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04/09/2012

Gaz de schiste : avis de Corinne Lepage

Gaz de schiste :

"ce que vous affirmez est un

tissu de contre vérités"

 
  
Gaz de schiste : "ce que vous affirmez est un tissu de contre vérités"Ayant reçu une copie de la lettre ouverte de l'Amicale des foreurs et des métiers du pétrole (AFMP) en date du 30 juillet et adressée à la ministre de l'Ecologie, Corinne Lepage - députée européenne - leur a répondu le 10 août dernier : "Ce que vous affirmez est un tissu de contre vérités."



Voici la teneur intégrale de la lettre :

"Vous contestez tout d'abord le fait que cette exploitation ne puisse pas se faire sans dégâts considérables sur l'environnement et la santé, et que les produits chimiques puissent se retrouver dans les nappes. Il s'agit pourtant d'une double réalité qui n'est pas uniquement fondée, comme vous le suggérez, sur le film Gasland. Le rapport publié en juin 2011[1] à la demande de la commission de l'Environnement du Parlement européen est sans concession. Il met en lumière les risques liés à la fracturation hydraulique en se référant notamment à des impacts majeurs de polluants atmosphériques, la contamination des eaux, les substances toxiques utilisées, le nombre non négligeable d'accidents aux États-Unis, la contamination des nappes par le méthane, le risque d'explosion de bâtiments, l'impact sur le paysage et les risques pour la santé humaine liés aux produits chimiques et radioactifs. Robert B. Jackson, de l'Université Duke aux États-Unis, a mis en évidence des niveaux élevés de méthane dans l'eau récoltée près des forages gaziers[2], ainsi que des substances chimiques toxiques pour l'environnement. De son côté, Paulina Jaramillo, chercheur du Département d'ingénierie et de politique publique à l'université Carnegie Mellon University et le WWF établissent que le fracking augmente les gaz à effet de serre, comme le CO2."

"Plus récemment, nous avons auditionné au Parlement européen des universitaires américains et des représentants d'associations qui, documents et prélèvements à l'appui, nous ont démontré la réalité des ravages des gaz de schiste sur la vie de nombreux américains. Votre contestation est d'autant plus mal venue que le contre film Truthland produit par vos collègues de l'Independant Petroleum Association of America est bien peu crédible. Surtout, le rapport d'experts censé rétablir la vérité, préparé par l'Energy Institute de l'université du Texas, et présenté en février dernier lors du congrès annuel de l'American Association for the Advancement of Science (AAAS) a été décrédibilisé en raison d'un conflit d'intérêt non rendu public[3]. Une ONG a révélé que le premier auteur du rapport et directeur adjoint de l'Energy Institute était aussi membre du conseil de direction et actionnaire d'une société de forage spécialisée dans le gaz de roche, lien qui n'était pas signalé dans le rapport. Bien au contraire, le document était présenté comme "indépendant de l'industrie de l'énergie" et en outre, il était affirmé qu'il avait été "revu par les pairs", ce qui était faux. De plus, les ONG ont démontré le caractère erroné ou obsolète des chiffres cités, et une présentation tronquée s'agissant des contaminations constatées. Selon l'ONG à l'origine de ces révélations, le rapport « ignore plusieurs cas de contaminations provoqués par des aspects de l'extraction distincts de la fracturation de la roche. Le rapport lui-même soulève plus d'une vingtaine de problèmes environnementaux liés à l'extraction du gaz de schiste, largement absents du communiqué de presse » annonçant le rapport. Votre lettre ouverte est dans la même veine."

Vos arguments sont plus mal fondés les uns que les autres et se heurtent aux faits.

- "Vous prétendez que les experts français sauraient réaliser des forages dans des conditions de parfaite sécurité, ce que ne sauraient pas faire les Américains « avec des pratiques non respectueuses des règles de l'art ». C'est une double plaisanterie. On voit mal en quoi les entreprises américaines, qui ont obtenu seules ou en binôme les autorisations d'explorer en France, procèderaient différemment en France qu'aux Etats-Unis. D'autant plus que l'étude du Parlement européen précitée apporte la preuve de la vacuité de l'argument. Il souligne que les mêmes conséquences ont été observées en Europe, en particulier en Allemagne avec une contamination au benzène et au mercure. Quant aux tremblements de terre, ils se sont produits au Royaume Uni en 2011, et l'expérience a été stoppée. De plus, comment comprendre l'argument qui prétend que les 6000 puits réalisés en France n'auraient donné lieu qu'à 2 pollutions mineures. Benoitement, n'étions-nous pas persuadés que la fracturation hydraulique était interdite pour rechercher le gaz de schiste en France ? Quels sont donc ces 6000 puits qui établiraient l'absence de risques de cette technologie appliquée aux gaz de schistes ?"

- "Vous prétendez que l'eau nécessaire pour les opérations de fracturation n'est utilisée qu'une fois, soit 10 000 M3 nécessaires, soit encore le dixième de ce qu'utilise un terrain de golf, sauf que le rapport du Parlement européen précise que la demande peut aller jusqu'à 45 000 M3, et que les nouveaux projets de la seule année 2010 représente 17 Mds de M3, contre 50 Mds pour tous les autres usages de l'eau. En outre, l'eau du golf retourne à la nappe ; celle utilisée pour la fracturation est très polluée et donc inutilisable sauf pour de nouvelles fracturations…"

- "Vous vous offusquez que l'on puisse parler de mitage de l'espace, au motif que la situation juridique liée à la propriété du sous-sol diffère en France et aux Etats-Unis. C'est exact, mais vous oubliez de rappeler qu'en contrepartie la France ne dispose pas de grandes étendues désertiques inhabitées. Les conséquences de la multiplication des puits seraient donc tragiques pour nos paysages et nos sites parfois exceptionnels, et souvent protégés."

- "L'argument le plus malhonnête de votre lettre ouverte est celui de l'absence de toute toxicité des produits utilisés, lesquels seraient « des produits courants d'usage ménager, cosmétique ou alimentaire (comme le guar qui est avec le sable le principal additif à l'eau de fracturation) ». La vérité sur la planète terre est toute autre. Sur les 260 substances connues utilisées pour la fracturation, qui ne sont d'ailleurs pas totalement rendues publiques, 58 sont toxiques, mutagènes, carcinogènes et/ou allergènes. Pour être plus précise, 6 figurent sur la liste des substances prioritaires dans le cadre du règlement REACH, qui doivent requérir une attention immédiate, une est bioaccumulative et toxique, 2 (naphtalène et benzène) figurent sur la liste des 33 substances prioritaires, sont toxiques pour les organismes aquatiques, 38 sont toxiques pour la santé humaine, 6 sont carcinogènes connues, 6 carcinogènes suspectées, mutagènes et 5 reprotoxiques. Avoir l'outrecuidance de parler de « position idéologique sans fondement technique » à propos de ces produits dépasse l'entendement !"

"La position idéologique est précisément du côté des foreurs. L'ultra libéralisme et la foi absolue dans la technologie, qui trouvera toutes les solutions- mais qui dans la vraie vie, évidemment ne peut pas les trouver- sont une idéologie. De la même manière, le refus d'admettre la réalité du changement climatique et son origine anthropique et le financement par le lobby pétrolier des « marchands de doute » participent d'une idéologie. L'importance du sujet mérite un autre comportement. Certes, notre sous-sol recèle peut être du gaz de schiste assurant quelques mois, voire quelques années de consommation. Certes, l'économie américaine profite d'une énergie bon marché grâce à cette exploitation dont le coût réel est assumé par les victimes d'aujourd'hui, et celles encore plus nombreuses de demain. Le moratoire décrété par plusieurs Etats témoigne des réactions des citoyens américains face à un lobby d'une puissance fantastique, qui a su obtenir le refus américain d'entrer dans le processus de Kyoto."

"En Europe, nous devons exiger une analyse complète coût-avantage avant toute décision. Cette analyse passe par une analyse de cycle de vie et une connaissance très approfondie des risques réels. En Allemagne, le Parlement de la Rhénanie du Nord-Westphalie a appelé à un moratoire jusqu'à ce que l'impact de tels procédés soit connu, et la France a voté l'interdiction du recours à la fracturation hydraulique. La question se pose aussi en termes d'impact sur le changement climatique à court terme (émissions de méthane et de CO2 due à la méthode), mais aussi à moyen et long terme en raison du retard pris pour sortir de la société du pétrole, retard qui pourrait être suicidaire."

"Certes, une partie du monde économique européen et français fantasme sur une croissance tirée par l'exploitation des gaz de schiste. Un tel choix serait dramatiquement court-termiste. Même en admettant qu'il accorde quelques mois, voire quelques années d'énergie bon marché, les coûts externes immenses pour la santé et l'environnement supportés par tous, le retard dans l'émergence d'une industrie puissante et leader dans les énergies renouvelables de toutes natures, la destruction irréversible de nos territoires densifiés pour les uns, protégés pour les autres, feraient perdre à l'économie européenne un temps précieux et constitueraient une régression massive de toutes les politiques engagées depuis 30 ans."

 

Corinne Lepage

03/09/2012

Truites de la Loue : tableau de Courbet

Truites de la Loue :

tableau de Courbet

 

Courrier des lecteurs publié récemment dans l'Est républicain et diffusé sur twitter par le blogueur Bisonteint. Le voici : http://twitpic.com/aoud8l

Nicolas-Jachet.jpg

Courbet2012_truites-mortes.jpg

01/09/2012

La Voie lactée ouvre son cœur aux astrophysiciens bisontins

La Voie lactée ouvre son cœur aux astrophysiciens bisontins

 

Un bulbe en forme de sphère aplatie et une barre allongée à l'allure de cigare : voilà à quoi ressemble le cœur de la Voie lactée. Une conclusion établie avec certitude par les chercheurs de l'Observatoire des sciences de l'Univers THETA de Franche-Comté (ex-Observatoire de Besançon), perfectionnant ainsi le scénario de formation de notre galaxie.

 

La décomposition de la lumière émise sur toute la région centrale de la Voie lactée révèle en effet deux populations d'étoiles bien différentes en termes de métallicité, composition chimique, cinématique…, preuves d'une nature et d'une histoire propres à chacune d'elles. Ce résultat est obtenu d'après un relevé des étoiles établi par les États-Unis dans le proche infrarouge, qui, se jouant des nuages de poussières interstellaires les masquant dans le domaine du visible, est apte à mettre en évidence leur brillance et leur couleur, et ainsi d'en déduire leurs caractéristiques. Ces mesures photométriques corroborent les hypothèses avancées par les astrophysiciens bisontins, testées selon une modélisation de la Voie lactée créée voilà trente ans à l'Observatoire, sans cesse enrichie et affinée depuis. Le « Besançon galaxy model » utilisé par la communauté scientifique, qui l'a adopté et reconnu sous ce nom, est le seul au monde à synthétiser toutes les connaissances sur les objets célestes pour construire un scénario de formation et un modèle numérique. « Le modèle va encore évoluer pour être capable d'expliquer les mouvements des étoiles et de reproduire leurs orbites », explique Annie Robin, astrophysicienne à l'Observatoire, qui l'a conçu avec son équipe.

 

Du côté du ciel, à présent que les mesures photométriques ont apporté la preuve de leur pertinence, un relevé spectrométrique réalisé par le très grand télescope européen installé au Chili complétera les données par des informations plus fines encore, et sur une population d'étoiles beaucoup plus importante. Les avancées de l'observation et de la modélisation menées en parallèle apporteront encore des éléments de connaissance sur la formation de notre galaxie et permettront à Annie Robin et à son équipe, d'ici quelques années, d'établir une représentation de face de la Voie lactée. Une image totalement inédite et à jamais hors de vue car l'envoi d'une sonde pour se positionner face à notre galaxie dans l'idée d'en saisir un cliché nécessiterait un voyage de 10.000 ans…

 

 

Galaxie Eso 1118

 

 

Le cœur de la galaxie ESO 1118 (vue de face) présente, comme la Voie lactée, une sphère et une barre. Une telle image de la Voie lactée n'est pas réalisable, car la position de notre système solaire sur la « tranche » de la galaxie, que l'on peut imaginer comme une assiette, nous interdit de la voir de face. D'ici quelques années, les astrophysiciens bisontins seront à même d'en donner une représentation réaliste tenant compte du gaz, de la poussière, des étoiles et des dernières découvertes, grâce aux données couplées de la modélisation et de l'observation. (Copyright : 1999 - 2008 ESO).


Lancement de la sonde astrométrique Gaia


 Le lancement de la sonde astrométrique Gaia est prévu pour juin 2013. Véritable scanner de la Voie lactée, Gaia devrait apporter les réponses que se posent depuis des siècles les astronomes sur sa formation et son évolution. Les chercheurs de l’Institut UTINAM et l’Observatoire des sciences de l’Univers THETA de l’université de Franche-Comté participent activement à la préparation d’une mission d’exploration révolutionnaire, dépassant les limites de la connaissance.

 

Avant Gaia, Hipparcos avait, à la fin des années 1980, observé 120 000 étoiles jusqu’à une centaine d’années-lumière de la Terre, avec une précision cent fois supérieure à celle des mesures effectuées depuis le sol. Hipparcos constituait une étape clé dans l’histoire de la connaissance de notre galaxie. Les progrès de la technologie autorisent aujourd’hui l’ESA, l’Agence spatiale européenne, à envoyer une deuxième sonde, Gaia, qui, plus perfectionnée encore, affiche des ordres de grandeur à donner le tournis. Gaia sera capable de mesurer les position, distance, vitesse et composition chimique de 1,5 milliard d’étoiles situées jusqu’à 40 000 années-lumière de notre planète ! La précision sera à nouveau multipliée par cent, ce qui reviendrait à mesurer depuis la Terre le diamètre d’une pièce de 1 euro posée sur la Lune !

 

Placée à plus d’un million de kilomètres de la Terre dont elle suivra la révolution autour du Soleil, Gaia bénéficiera d’une vue imprenable sur l’ensemble du ciel. Les relevés qu’elle effectuera pendant cinq ans, en dehors de toute turbulence atmosphérique, seront à l’origine de l’établissement d’une carte tridimensionnelle et dynamique de la Voie lactée, et grâce aux informations glanées jusqu’aux galaxies les plus lointaines, produiront rien de moins que le nouveau système de référence de l’Univers. Car Gaia recensera des milliers d’objets célestes aujourd’hui pressentis.

 

Mission de la sonde astrométrique Gaia

 

Connaissances exponentielles

 

En attendant, les astrophysiciens de l’Institut UTINAM préparent une simulation de la mission, à partir d’un modèle de l’Univers le plus réaliste possible incluant toutes les connaissances actuelles. Ces données modélisées servent à éprouver la performance des algorithmes, des instruments de mesure et des logiciels d’analyse qui depuis vingt ans se peaufinent en prévision de cet extraordinaire voyage. Astéroïdes, comètes, tous les objets célestes, même les plus petits, potentiellement placés sur le chemin de Gaia sauront ainsi être identifiés, mesurés puis analysés de façon formelle et rapide. Si l’immense masse de données collectées est estimée en pétaoctets, leur traitement est prévu en seulement trois ans, au terme desquels les informations seront mises à disposition de l’ensemble de la communauté scientifique. 

 

Einstein supportera-t-il le voyage ?

 

Aussi incroyable que cela puisse paraître, Gaia représente l’occasion d’aller juger sur pièces la théorie de la relativité générale d’Einstein, postulant que la lumière est déviée lorsqu’elle rencontre un objet massif et que l’espace autour de cette masse est déformé. Les mesures effectuées, notamment les coefficients de courbure de la lumière, soumettront les équations du savant à l’extrême précision de Gaia, et, le cas échéant, permettront aux physiciens d’aujourd’hui d’affiner cette théorie fondamentale.

 

L’aventure Gaia, impliquant quatre cents chercheurs et ingénieurs dans le monde, est jalonnée de nombreux colloques. Le prochain, coorganisé par l’Institut UTINAM, aura lieu du 29 février au 2 mars prochains à Barcelone. En octobre, Besançon recevra des doctorants en astrophysique lors d’une semaine d’école consacrée aux méthodes de modélisation de la galaxie et à leurs applications à la mission spatiale Gaia.

 

Contact : Annie Robin

Institut UTINAM

Observatoire des sciences de l'Univers THETA de Franche-Comté

Université de Franche-Comté / CNRS (INSU)

Tél. (0033/0) 3 81 66 69 4

 

Sources : La Voie lactée ouvre son cœur aux astrophysiciens bisontins : En Direct, n° 243, juillet 2012. Gaia : l’Univers revisité : En Direct, Vignette du numéro 240 de Janvier 2012n° 240, janvier 2012.

07/08/2012

L'Écureuil roux

 

Ecureuil_1_logo.jpgL’écureuil roux (Sciurus vulgaris)

 

par André Guyard

dernier ajout 08/04/2016

 

Des écureuils roux hantent mon jardin de Thise. Visites hivernale et estivale de ces superbes rongeurs.

 

écureuil3.jpg
 

On ne se lasse pas d’admirer ces magnifiques bestioles qui se poursuivent de branche en branche au moment du rut ou qui visitent, l’automne venu, chênes et noisetiers du petit bois qui jouxte mon jardin. Je les aperçois de la fenêtre de mon bureau et je peux les filmer à une distance de 40 m. Voir le petit film joint à ce texte. (Il faut pardonner les soubresauts du caméscope car le zoom est assez élevé).

 

La coloration du pelage varie en fonction de la saison : roux en hiver, noir en été. Le ventre est toujours blanc. En hiver, les oreilles arborent un long pinceau de poils.

 

Ecureuil-Hiver.jpg
L'écureuil n'hiberne pas
 
Il reste actif,malgré les intempéries comme le prouve cette vidéo d'un écureuil bondissant dans la neige due à BBC news.
 
 

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Écureuil en fin d'été en robe noire (Thise 11/09/2014)
 

Extrêmement rapide, l'écureuil est arboricole mais il n’hésite pas à descendre au sol pour rechercher les noisettes qu’il préfère d’ailleurs aux glands. Il saute et grimpe remarquablement bien. Il construit un nid à deux ouvertures avec des rameaux rongés qu'il fixe dans le houppier d'un arbre au contact du tronc et qu'il garnit d'herbes et de mousses. Il utilise parfois un trou d'arbre ou un nid de pie ou de corneille abandonné. Il fait des provisions qu'il enterre ou enfonce dans des cavités.

 

Son domaine vital couvre 10 à 50 ha de bois de feuillus ou de conifères avec de vieux arbres et des fourrés. Il n'hésite pas à annexer parcs et jardins.

 


L'écureuil visite les noisetiers et

épluche les noisettes encore vertes

(Thise, 30 juillet 2012)

 

Il se nourrit de graines de conifères, de faines, de noisettes, de glands, de champignons, de bourgeons, de jeunes pousses et ne dédaigne pas escargots, insectes, œufs et oisillons.

 

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Cônes de pin au sol rongés par un Écureuil

 

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Quelques cônes de conifères rongés par des écureuils

 

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Quelques cônes de conifères rongés par des écureuils

(a) cône de pin mûr, (b) cône de pin vert

 

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Rameaux de sapin coupés par des écureuils

qui ont mangé les boutons floraux

 

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Cônes d'épicéas sur la neige épluchés par des écureuils

 

écureuils.jpg
Maman écureuil et son petit

 

La reproduction a lieu au printemps et au début de l'été. Les plus jeunes femelles ont des portées de deux petits et les plus âgées peuvent en avoir jusqu'à cinq. Il peut y avoir deux portées par an.








Nid d'écureuil

(Vidéo trouvée sur internet. Auteur inconnu.

Manipuler le curseur pour obtenir l'animation)

 

Pour les scientifiques, l’Écureuil roux s’appelle Sciurus vulgaris Linné 1758. Il appartient à l’ordre des Rongeurs, à la famille des Sciuridés tout comme les marmottes.

 

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Voie d'Écureuil sur neige durcie

En haut les pattes postérieures à 5 doigts,

en bas les mains à 4 doigts

 

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Piste d'écureuil bondissant

 

Je porte au fond de moi une espèce de remords qui me vient de ma prime enfance.

 

J'avais alors une dizaine d'année et j’habitais les Fontenelles, un village du Haut-Doubs. Mon voisin Maxime m’avait confié la garde de son chien de chasse, une espèce de bâtard, sourd comme un pot que j’allais promener au bout d’une laisse de peur de le voir partir tout seul. Il était costaud et me faisait traverser des haies et des buissons et j’affrontais les épines noires et autres églantiers en y laissant souvent quelques égratignures.

 

Pour me récompenser, Maxime m’emmena un jour à la chasse avec lui. Nous voilà partis dans le Grand Bois. Le chien lâché, la truffe à terre, cherchait une piste.

 

Quand soudain, Maxime me pousse du coude : "tu veux le tirer" me dit-il en me montrant du doigt un écureuil qui, dans les branchage, nous observait avec curiosité. Maxime me passa son fusil. Je n’avais jamais manipulé une arme. "Vise-le et quand tu le vois dans l’œilleton, tu appuies sur la détente".

 

Je visai la pauvre bête. Le coup partit et la décharge de plombs pulvérisa l’animal dont la dépouille sanguinolente s’écrasa au sol. On la donna au chien qui l’engloutit aussitôt. Ma mémoire a conservé intacte l’image de la queue de l’écureuil disparaissant dans la gueule du corniaud.

 

J’imaginais l’incompréhension du "Guerriot" de Louis Pergaud observant avec intérêt l’œil noir du canon de l’arme qui le fixait pour s’allumer en déluge de feu.

 

De ce jour, je fus complètement guéri de la chasse.

 

Un hommage à l’écureuil, ce superbe lutin de nos bois, qui est aujourd’hui une espèce protégée. Heureusement !

 

Vidéos : André Guyard

 

Source : Bang P. & Dalhström P. (1977). - Guide des traces d'animaux. Delachaux & Niestlé Ed.

 

Voir aussi une vidéo proposée par le Muséum National d'Histoire Naturelle pendant le tour de France 2014.

 

Vidéo du net sur la prédation de l'écureuil.

31/07/2012

Charles Beauquier, l'homme qui protégeait la nature

Charles-Beauquier.jpgCharles Beauquier,

l'homme qui protégeait la nature

 

Loi Beauquier : la protection des paysages


· L’homme politique


"Oublié de la République" selon Jean-Louis Debré, Charles Beauquier compte parmi les hommes politiques français ayant exercé une certaine influence sous la IIIe République. Il est successivement sous-préfet de Pontarlier (1870 à 1871), entre au Conseil général du Doubs en 1871 et devient conseiller municipal de Besançon en 1873. Le 25 avril 1880, il est élu député du Doubs et occupa cette fonction jusqu’en 1914.

 

· L’homme de culture

 

Diplômé de l’École de Droit à Paris et de l’École des Chartes en 1857, son attention se porte d’abord sur la critique musicale et les traditions populaires. Parallèlement à sa carrière politique, il s’adonne au journalisme en fondant des journaux comme Le Doubs (1868) ou La Fraternité (1875). Il est également rédacteur en chef, à Besançon, du Républicain de l’Est (1871). Homme de culture et d’héritage, ethnologue avant l’heure, on lui doit de nombreux ouvrages sur la musique et sur le patrimoine et le folklore comtois, qui font encore autorité. Engagé pour la préservation de la nature, il est l’un des fondateurs de la Société pour la protection des paysages et de l’esthétique de la France. Porteur d’un nouveau rapport au paysage, cet engagement donne lieu à la loi du 21 avril 1906, première loi de protection de l’environnement, dite loi Beauquier.

 

· L’élaboration de la loi Beauquier

 

De 1901 à 1906 Marqué par la notion de pittoresque, le XIXe siècle considère le paysage comme patrimoine culturel relevant d’intérêts artistiques, géologiques ou historiques. Dans un contexte de progrès scientifiques et industriels, Charles Beauquier propose le 23 mars 1901 à la Chambre des députés une première proposition de loi "ayant pour objet la protection des sites pittoresques". Opposant farouche à l’industrialisation, Beauquier accuse l’État de "laisser commettre des actes de vandalismes dans nos musées naturels, dans cette splendide collection de sites pittoresques que renferme la France ! Étrange contradiction ! L’État veillera avec un soin religieux sur un tableau de maître qui représentera un paysage et il en laissera détruire, sans s’émouvoir, le magnifique et irréparable original !".

 

Parallèlement à cette proposition de loi, son confrère Louis Dubuisson, député du Finistère, présente le 17 mai 1901 un autre projet de loi sur le même thème.

 

Le 5 février 1903, Beauquier et de nombreux députés, tels que Ferdinand Buisson, Jaurès, Georges Leygues, Poincaré, Marcel Sembat, proposent une deuxième loi beaucoup plus courte. Malgré la création de la Société pour la protection des paysages de France en 1901, la deuxième révolution industrielle s’oppose plus que jamais à la préservation de la beauté des paysages. À ce titre, Beauquier attire l’attention de la Chambre des députés sur l’urgence d’une législation "car dans toutes les parties de la France on arrache des arbres, on brise des rochers, on capte des torrents, on couvre les campagnes d’affiches et de réclames et l’on saccage des sites merveilleux, consacrés par l’admiration des poètes, des artistes et des foules".

 

Il faut attendre 1906 pour que le texte soit adopté par la Chambre des députés. Le débat du 27 mars 1906 au Sénat permet au rapporteur, Maurice Faure, d’attribuer la paternité de la loi à Charles Beauquier et à Louis Dubuisson. D’après lui, il donne une résonance patriotique marquée à cette loi, qui a pour but de "protéger ces richesses vraiment nationales contre l’effet destructeur du temps et contre le vandalisme des hommes, peut-être plus destructeur encore". L’alignement est marqué sur la législation en matière de monuments historiques, sauf sur l’aspect financier : "Il n’est prévu, au point de vue financier, aucune participation de l’État. Notre loi est très franchement décentralisatrice".

 

La loi de protection des paysages est définitivement adoptée le 21 avril 1906, décidant de la création "d’une commission des sites et monuments naturels de caractère artistique" dans chaque département. La commission se chargera de dresser "une liste des propriétés foncières dans la conservation peut avoir, au point de vue artistique ou pittoresque, un intérêt général" ; le classement n’est décidé que si le propriétaire donne son accord. Le Doubs est, semble-t-il, l’un des premiers départements à l’avoir mise en œuvre, en 1912.

 

Les premiers classements dans le Doubs

(Source : Archives départementales du Doubs, 4T 51 et 52.)

 

La commission des sites se réunit pour la première fois dès le 12 décembre 1906. Charles Beauquier assiste à ses séances de travail jusqu’à son décès en 1916.

 

Sur la base d’une liste établie dès 1906 par l’ingénieur ordinaire des Ponts-et-Chaussées, les sites suivants, essentiellement des grottes, glacières, cascades ou sources, sont classés en 1912.

 

Le 2 mai 1912 :

 

- Source du Lison, creux Billard et grotte Sarrazine (Nans-sous-Sainte-Anne) ;

- Pont du Diable (Sainte-Anne et Crouzet-Migette) ;

- grottes d’Osselle (Rozet-Fluans) ;

- grottes de Plaisirfontaine (Bonnevaux) ;

- cascades du Bout-du-Monde (Beure) ;

- sources d’Arcier, propriété de la Ville de Besançon.

 

Le 23 mai 1912 :

 

- pont Sarrazin de Vandoncourt ;

- ruisseau et vallée de Fontaine-Ronde à Touillon-et-Loutelet, Montperreux et Les Hôpitaux-Vieux ;

- grottes et château de la Roche à Saint-Hippolyte ;

- rocher dit « Dames des Entreportes » à Pierrefontaine ;

- théâtre romain de Mandeure ;

- saut du Doubs et col des Roches à Lac-ou-Villers [Villers-le-Lac] ;

- cascades du Doubs à Fourcatier-et-Maison-Neuve ;

- gorges du Remonot à Les Combes ;

- grottes de Chenecey-Buillon ;

- glacière de Chaux-lès-Passavant ;

- grottes de la Baume à Bournois.

 

Au cours de l'année 2012, une série de manifestations a salué sa mémoire.

 

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Le Lézard ocellé (Timon lepidus)

reptiles,sauriens,lacertidés,lézard ocelléLe Lézard ocellé (Timon lepidus)

 

par André Guyard

 

 

Morphologie externe

 

Le Lézard ocellé (Timon lepidus ou Lacerta lepida) est le plus grand lézard rencontré en France. Le corps trapu et massif atteint 600 à 650 mm queue comprise.

 

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La robe  du Lézard ocellé se caractérise par la présence de taches bleues cerclées de noir (ocelles)

sur les flancs de l'animal

(Cliché de Stéphanie Leblond)

 

D'une façon générale, le corps des lézards, très grossièrement serpentiforme présente une tête, un tronc pourvu de deux paires de membres et une queue.

Chez le Lézard ocellé et la majorité des Lacertiliens, la peau présente des écailles épidermiques, se recouvrant partiellement. Ce n'est que chez les Amphisbénidés que les écailles peuvent être absentes.

Entièrement cornées, ces écailles forment de grandes plaques[1]sur la tête et la mâchoire inférieure, de petites plaques sur le reste du corps. Cette couche épidermique se renouvelle périodiquement par lambeaux, sauf chez les Orvets où elle tombe tout d'une pièce. Chez certains Lacertiliens, il existe sous les écailles des plaques osseuses, ou ostéodermes qui, sur la tête, s'unissent aux os sous-jacents.

 

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Les écailles sont granuleuses ; sur la face ventrale du tronc, elles sont carrées et disposées en plusieurs rangées obliques. Imbriquées les unes dans les autres de l'avant à l'arrière, les écailles tombent tous les ans, au cours d'une mue, par petits lambeaux. Le tégument, ainsi protège, est très pauvre en glandes : il n'en existe que sur la face interne des cuisses ; ce sont les glandes inguinales ou fémorales dont les orifices sont bien visibles (pores fémoraux). Il en résulte que la peau est sèche. La sécrétion des glandes fémorales favorise l'adhérence des sexes pendant l'accouplement.

 

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[1] Dites écussons ou scutelles.

 

La tête de forme triangulaire est grosse, avec de fortes joues et un museau arrondi. Elle montre une bouche antérieure, largement fendue, deux narines petites, deux yeux placés latéralement avec paupières supérieure et inférieure mobile, et, en arrière des yeux, deux tympans situés au fond d'une petite dépression qui correspond au conduit auditif externe de l'Homme.

 

Dans la cavité buccale, les dents sont petites et coniques. Elles sont soudées aux maxillaires et non pas implantées dans des alvéoles : elles servent à la rétention des proies.

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La langue est bifide, très mobile, pouvant sortir[1]de la cavité buccale par une échancrure de la lèvre inférieure, donc sans que la bouche soit ouverte.

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La langue du Lézard ocellé lui sert également

à se pourlécher après un bon repas

(Cliché de Stéphanie Leblond)

 

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[1] Elle est dite protractile.

 

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La tête du Lézard ocellé est protégée

par de grandes plaques dorsales

 (Cliché de Stéphanie Leblond)

 

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Le museau est arrondi et les joues sont proéminentes

(Cliché de Stéphanie Leblond)

 

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Nomenclature des plaques céphaliques en vue latérale

(Cliché de Stéphanie Leblond)


Le tronc, allongé et aplati dorso-ventralement, est séparé de la queue, ventralement, par un orifice transversal, la fente cloacale que précède une large écaille ou plaque préanale. Les pattes antérieures, comme les postérieures, s'insèrent latéralement au tronc et se terminent, par cinq doigts munis chacun d'une griffe.

 

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Les pattes à cinq doigts du Lézard ocellé montre un doigt opposable aux quatre autres

(Cliché de Stéphanie Leblond)

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La queue très épaisse à la base se rétrécit pour former une longue pointe fine. Elle est plus épaisse à la base chez le mâle que chez la femelle. Chez les lézards, elle se brise si l'on saisit le Lézard par cet appendice et elle continue ensuite à s'agiter pendant un temps assez long. Il s'agit d'un phénomène d'autotomie (autos : soi-même; tome, coupure). L'une des vertèbres basales présente une fissure transversale[1] et est entourée de muscles spéciaux. Si le Lézard est saisi, il contracte ces muscles et la vertèbre se brise : la queue se détache alors et il n'y a pas d'hémorragie, car les vaisseaux sanguins sont étranglés par la contraction musculaire. Par la suite, la queue régénère et il en pousse parfois deux. Brisée une seconde fois (au niveau du régénérat), elle ne repousse pas. La queue régénérée ne présente qu'un tube de cartilage fibreux et les écailles sur la partie régénérée sont différentes de ce qu'elles étaient auparavant.



[1] Il s'agit d'un diaphragme non osssifié.

 

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La queue est longue et effilée

(Cliché de Stéphanie Leblond)

 

La peau renferme des pigments. Chez les Lacertiliens, ces pigments permettent souvent à l'animal de changer de coloration et de se confondre avec le milieu (homochromie). Ils se localisent dans le derme, sous l'épiderme, dans des chromatophores. Ces chromatophores contiennent généralement des pigments mélaniques qui peuvent se disperser dans le cytoplasme cellulaire ou bien se rassembler autour du noyau, ce qui rend la coloration plus foncée ou plus claire. Chez certains Lacertiliens, dont les Caméléons, il existe également des chromatophores chargés de pigments caroténoïdes et associés à la couche pigmentaire jaune sous-épidermique et à des cristaux de guanine : d'où une grande variation de coloration de la peau (grâce à la guanine, elle peut même passer au bleu ou au vert).

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La coloration du Lézard ocellé est variable mais toujours caractérisée par des taches bleues (ocelles) sur les flancs. La face dorsale, couverte de petites écailles perlées, est généralement verte, rarement brun olivâtre, avec un dessin très fin plus ou moins réticulé s'estompant vers les flancs généralement verts et ornés de trois à quatre rangées d'ocelles bleus bordées de noir. Les membres et la base de la queue sont verts avec des taches noires, et le ventre presque toujours blanchâtre à jaunâtre, rarement blanc verdâtre.

 

Les jeunes présentent une coloration dorsale typique : sur un fond vert olive ou sombre s'alignent des ocelles noirs à centre jaunâtre qui forment des barres transversales.

 

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Coloration dorsale du jeune lézard ocellé


 Le squelette

 

Le crâne est complètement ossifié et très solide. Les orbites sont séparées par un septum cartilagineux, la cloison interorbitaire, traversée par les nerfs olfactifs. Il n'y a ni alisphénoïdes, ni orbitosphénoïdes, ni parasphénoïdes. L'arcade zygomatique inférieure n'existe pas, du fait de la réduction du jugal et de l'absence du quadrato-jugal. La voûte du crâne est formée d'os de membrane[1],la base d'os de cartilage. Les condyles occipitaux se sont fusionnés en un seul condyle impair.

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Les deux branches de la mandibule sont soudées ; l'os carré est mobile sur le crâne, mais assez court et il ne permet qu'une ouverture relativement faible de la cavité buccale. Alors que chez les serpents, les deux branches de la mandibule ne sont pas soudées et peuvent s'écarter durant la déglutition, permettant le passage de grosses proies.

 

La colonne vertébrale est munie, chez les Lézards, de vertèbres procœles, sauf chez la plupart des Geckos, où elles sont amphicœles avec persistance d'un reste de la corde dorsale. À la base de la queue existent des os en chevrons, fixés aux centres vertébraux. On compte six ou huit vertèbres cervicales (suivant l'espèce), des vertèbres dorsales en nombre variable, deux vertèbres lombaires et deux vertèbres sacrées.

 

Les côtes n'ont qu'une tête, le tuberculum n'étant représenté que par un ligament.

 

On distingue des côtes cervicales, quatre paires de vraies côtes dorsales unies à un sternum ventral et des côtes dorsales libres ou fausses cotes. Le sternum est losangique.

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La ceinture scapulaire présente une interclavicule ou épisternum en forme de T, deux clavicules s'appuyant sur les deux omoplates[2] souvent fenestrées. De part et d'autre, existe un précoracoïde suivi d'un coracoïde, fenestrés également.

Le membre antérieur possède un carpe qui compte une première rangée de deux os, un os central et une seconde rangée de cinq os. La formule des phalanges des doigts est deux, trois, quatre, cinq et trois.

 

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À la ceinture pelvienne, les ilions s'articulent sur deux vertèbres sacrées, les pubis et les ischions se réunissent en une symphyse ventrale ou symphyse ischiatique, qui se continue en arrière par un cartilage supportant portant le cloaque. Chaque pubis se continue en avant par un épipubis cartilagineux.

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Le tarse possède une première rangée de deux os et une seconde de cinq os. La formule des phalanges des orteils est deux, trois, quatre, cinq, quatre.



[1] Et, entre les deux pariétaux, existe un orifice, le trou pariétal.

[2]  Ou scapula.


Le système nerveux et les organes des sens

 

L'encéphale montre deux lobes olfactifs très allongés, deux hémisphères cérébraux lisses et assez volumineux, une épiphyse, deux tubercules bijumeaux, un cervelet petit, à allure de lame mince, qui recouvre en partie le bulbe rachidien.

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Des corpuscules tactiles sont répandus sur toute la surface du corps. Ils sont situés au bord des écailles. Le tympan est nettement distinct de la peau. L'oreille moyenne communique largement avec le pharynx.

Les organes olfactifs sont deux simples conduits, sans communication avec deux organes bien développés, les organes de Jacobson qui s'ouvrent dans la cavité buccale.

 

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L'œil possède un peigne et la sclérotique a un anneau osseux. Les paupières sont normales avec glande lacrymale et glande de Harder.

Remarque : chez les Caméléons, les paupières se soudent en ne laissant subsister qu'un orifice vertical, et les deux yeux peuvent se mouvoir indépendamment l'un de l'autre, si bien que l'animal peut guetter une proie dans toutes les directions.

 

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Chez le Lézard ocellé, l'épiphyse est un simple cul-de-sac. Mais le ganglion droit de l'habenula se continue par un nerf qui se termine par un œil pariétal placé sous la peau, dans le trou pariétal du crâne : c'est une vésicule que limitent un cristallin et une rétine à bâtonnets internes. Il s'agit du vestige d'un œil qui a dû être fonctionnel chez certains Vertébrés fossiles.

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On trouve des corpuscules gustatifs sur les parois de la cavité buccale et surtout sur la langue.

 

L'appareil digestif

 

La cavité buccale n'est pas séparée des fosses nasales par une cloison complète. Assez en arrière, les fosses nasales y débouchent par leurs orifices internes ou choanes, visibles de chaque côté d'une crête médiane du palais[1] . Le bord des maxillaires présente une saillie sur laquelle sont fixées les nombreuses dents coniques (dites pleurodontes).

 

À la base de la langue, longue et bifide, s'ouvre le pharynx que continue l'œsophage. Ce dernier, placé sous le cœur et les poumons, passe insensiblement à l'estomac.

 

Disposé longitudinalement, l'estomac présente une légère courbure dans sa région postérieure. Il est entièrement caché par un foie volumineux et massif qui montre une grosse vésicule biliaire. La bile atteint l'intestin par un canal cholédoque et plusieurs canaux hépatiques qui traversent le pancréas. L'intestin est assez court et s'achève par le rectum qui débute par un cæcum et qui débouche dans un cloaque, après avoir longé le bassin.



[1] Il n'y a pas de glandes salivaires, mais des glandes labiales s'ouvrant à la base des lèvres.

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L'appareil respiratoire

 

Le larynx est pourvu d'un cartilage cricoïde et de deux cartilages aryténoïdes. Chez certains Lacertiliens, le larynx est muni d'une épiglotte. Les Geckos et les Caméléons possèdent des cordes vocales et peuvent émettre des sons.

 

La trachée est courte et a des anneaux cartilagineux complets.

 

De courtes bronches conduisent à deux poumons peu alvéolés. Chez divers Geckos et chez les Caméléons, les poumons sont prolongés à l'arrière par des diverticules, les sacs aériens, qui s'insinuent entre les viscères et produisent un gonflement du corps de l'animal.

 

Chez les Lacertiliens serpentiformes, les deux poumons, comme chez les Ophidiens, sont souvent de grandeur différente.

 

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L'appareil circulatoire

 

Le cœur possède deux oreillettes et un ventricule[1] Du ventricule partent l'artère pulmonaire (qui se divise pour se rendre aux poumons) et deux aortes ventrales,qui s'entrecroisent sans communication et se continuent l'une et l'autre par deux arcs aortiques[2]. Les deux paires d'arcs aortiques se réunissent en arrière et dorsalement pour former l'aorte commune. L'oreillette droite reçoit, dans un sinus, une veine cave inférieure et deux veines caves supérieures. L'oreillette gauche reçoit les deux veines pulmonaires droite et gauche.



[1] À demi cloisonné.

[2] Il y a donc deux crosses aortique de chaque côté.

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L'appareil veineux présente un système porte hépatique et un système porte rénal.

Le sang a des hématies ovales, biconvexes et nucléées.

 

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L'appareil génito-urinaire

 

Appareil excréteur


Les reins sont situés dans la partie postérieure de l'abdomen et plus ou moins lobés : ce sont des reins tertiaires ou métanéphros, symétriques par rapport à la colonne vertébrale. Leurs conduits excréteurs, les uretères, se rendent directement au cloaque chez la femelle. Chez le mâle, chaque uretère se réunit au canal déférent (spermiducte) du même côté et les deux conduits s'ouvrent par un orifice commun dans la partie latérale du cloaque, au niveau d'une vessie urinaire ventrale.

 

Appareil génital


Le mâle possède deux testicules ovoïdes, situés symétriquement de part et d'autre de la colonne vertébrale, en avant des reins. Un vestige de canal de Müller est visible en avant de chaque testicule. Les canaux déférents, qui partent de ces testicules, forment un tube en apparence rectiligne, mais dont le canal est très sinueux. L'orifice de chaque canal déférent (en fait orifice génito-urinaire) se continue par un sillon sur un des deux pénis (ou hémipénis). L'animal a, en effet, deux organes copulateurs, dévaginables, à parois formées de tissu érectile et pouvant faire saillie hors de l'orifice cloacal lors de la copulation. Chacun de ces pénis fonctionne séparément. Au repos, ils peuvent être perceptibles sous forme de saillie près de l'orifice cloacal.

 

La femelle a deux ovaires. Deux oviductes, dérivés des canaux de Müller embryonnaires s'ouvrent très en avant d'eux dans la cavité générale. Ces oviductes qui débutent par une sorte de pavillon, la trompe de Fallope, sont des tubes à parois très plissées, dont le diamètre, d'abord assez faible, augmente lorsqu'ils se rapprochent du cloaque. Ils y débouchent par deux orifices situés en avant des orifices urinaires.

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Reproduction

 

Le mâle semble atteindre la maturité sexuelle à 2 ans, la femelle à 3 ans.

 

Pour la reconnaissance des sexes, l'odorat semble jouer un rôle important : on a même constaté que le mâle s'assure que la femelle est en rut en passant la langue sur son cloaque.

 

Les femelles désirant s'accoupler recherchent la compagnie des mâles qui se livrent à des combats symboliques n'entraînant généralement aucune blessure.

 

L'accouplement a lieu au début du printemps et la ponte s'effectue, entre avril et juin, dans un trou creusé par la femelle dans un talus de terre friable. Une ponte peut compter une vingtaine d'œufs et même plus. La femelle enterre ses œufs, qui éclosent au bout de 3 mois environ. Les petits mesurent 105 à 120 mm à la naissance.

 

Les parents se désintéressent des œufs après la ponte.

 

L'œuf pondu est formé par le jaune, cellule géante chargée de vitellus et par des enveloppes successives déposées autour de lui au cours de sa descente dans l'oviducte : albumen[1] ou blanc, membrane coquillière et coquille, cette dernière formée par une protéine analogue au collagène.

 

À l'un des pôles du jaune ou cellule-œuf (pôle animal) se trouve le germe ou cicatricule, qui est dépourvu de vitellus et où se localise, avant la segmentation, le noyau de fécondation. La membrane coquillière est formée de deux feuillets qui son constitués par des fibres microscopiques entremêlées.

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Cet œuf est donc semblable à celui des Oiseaux et son développement est identique (œuf méroblastique à segmentation partielle et discoïdale, apparition d'une cavité amniotique, et d'une allantoïde à rôle respiratoire et excréteur) les excréta de l'embryon consistent essentiellement en acide urique précipité.

 

Chez le Lézard ocellé et chez tous les Lacertiliens et les Ophidiens dont les œufs ont une coque membraneuse, le jeune à l'éclosion possède au bout du museau une petite dent cornée, dite dent de rupture, différenciée avec une pointe ou un bord coupant ; généralement impaire, rarement paire (Geckos), elle prend naissance peu avant l'éclosion à l'extrémité de la mâchoire inférieure sur l'intermaxillaire. Elle a pour rôle de percer ou d'inciser la coque de l'œuf au moment de la naissance, puis elle disparaît quelques heures ou quelques jours après l'éclosion.

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 Cette "dent de l'œuf"  est très réduite ou même indistincte chez les espèces ovovivipares. Chez les Reptiles  dont l'œuf a une coque dure (Sphenodon, Tortues, Crocodiles), à la dent de l'œuf correspond un épaississement corné de l'épiderme, le diamant ou caroncule, apparaissant à l'extrémité du museau.

 

Dans la nature, le développement des œufs déposés par les femelles est plus ou moins influencé par les conditions de température et d'hygrométrie, et, de ce fait, sa durée est variable : neuf à onze semaines.

 

Pendant l'incubation, les œufs grossissent, par le fait de l'humidité et de la croissance de l'embryon.



[1] On dit encore albumine. C'est une matière protidique riche en eau, peu abondante, le jaune remplissant presque complètement l'œuf.

 

 

Le développement des Reptiles

 

Le développement est direct, sans métamorphose et, des leur naissance, les jeunes ont le même comportement que les adultes. Tout de suite très vigoureux et agiles, ces jeunes lézards, qui naissent entre la fin de juillet et le début de septembre et qui mesurent de 5 à 7 centimètres, se nourrissent de Pucerons et d'autres Insectes minuscules.

À l'âge d'un an, ils atteignent la taille de 14 à 15 centimètres. Les mâles étant généralement un peu plus grands que les femelles. Celles-ci sont capables de se reproduire dès leur deuxième année.

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 Répartition du Lézard ocellé

 

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Répartition du lézard ocellé en Europe

 

On le rencontre dans la péninsule ibérique, au sud de la France, dans le nord-ouest de l'Italie et le nord-ouest de l'Afrique, jusqu'à 2100 m d'altitude. Les clichés qui illustrent cet article ont été réalisés en mai et juin 2012 dans le Bas-Vivarais (Ardèche).

 

Biologie du Lézard ocellé

 

Le Lézard ocellé fréquente des terrains secs, très ensoleillés, recelant de nombreuses cachettes et portant une végétation éparse. Il affectionne les terres cultivées : plantations, vignes ainsi que les sols rocheux ou sablonneux.

 

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 Le Lézard ocellé fréquente des

biotopes ensoleillés et pierreux

 (Cliché de Stéphanie Leblond)

 

 Le Lézard ocellé recherche le soleil au printemps, lorsqu'il sort de l'hivernage, et en automne. Il passe alors de nombreuses heures chaque jour à prendre un bain de soleil. En plein été quand la température extérieure est élevée, la durée d'exposition au soleil est raccourcie au profit du temps d'activité.

 

Le Lézard ocellé parcourt généralement son territoire lentement en furetant. En cas de danger ou de conflit, il peut courir rapidement, en décollant son ventre et sa queue du sol. En cas d'agression, il se plante devant son ennemi, crachant la gueule grande ouverte et il peut même sauter sur son adversaire.

 

Pour se protéger de ses ennemis, le Lézard ocellé creuse un terrier ou s'installe dans une cachette naturelle (terrier de rongeur, tas de pierres, tronc d'arbre creux…). Il reste de préférence à proximité de cette retraite, qu'il regagne pour se reposer.

 

Le Lézard ocellé se nourrit principalement de grands insectes qu'il débusque lors de ses rondes sur son territoire. Il capture surtout coléoptères, grillons et sauterelles, limaces, mille-pattes ou scorpions, exceptionnellement de petits vertébrés.

 

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Lézard ocellé ayant capturé une larve d'insecte

(Cliché de Stéphanie Leblond)

 

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Le Lézard ocellé mue à la fin du printemps

(Cliché de Stéphanie Leblond)

 

Si le biotope est adéquat, la densité de peuplement peut être importante, mais certains individus vivent seuls. Malgré sa taille et en dépit de sa combativité, l'espèce a de nombreux prédateurs. Le Lézard ocellé est chassé par des rapaces diurnes (Milan, Aigle botté et Autour des palombes) et la Couleuvre de Montpellier. Son habitat est réduit dans certaines régions par la généralisation de l'agriculture intensive.

 

Sources :

 

- H. Boué & R. Chanton (1959). - Zoologie II. Procordés et Vertébrés, pp. 292-398.  Doin & Cie, Ed.

- G. Diesener & J. Reichholf (1986). – Batraciens et Reptiles, Ed. Solar.

 

Pour plus de détails, consulter l'article de Wikipedia consacré au Lézard ocellé.

 

Remerciements à Stéphanie Leblond qui m'a fourni quelque 500 clichés des lézards ocellés qui fréquentent sa propriété des Chanels à Paysac (Ardèche).

28/07/2012

Des cellules souches dans la rétine

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(Dernière mise à jour : 2/11/2014)

 

Dans ce même blog, nous avons évoqué l'emploi de cellules souches embryonnaires pour régénérer la rétine. Ces cellules embryonnaires sont pluripotentes car elles sont à l'origine de toutes les cellules de l'organisme (voir dans ce même blog les articles : Cellules souches et rajeunissement et Élaboration d'une rétine à partir de cellules souches embryonnaires).

 

Une autre technique est utilisée dans le même but de régénération de la rétine par une autre équipe américaine : des cellules souches découvertes dans la rétine d'individus adultes décédés ouvrent une nouvelle piste de traitement de l’une des premières causes de cécité, la dégénérescence maculaire liée à l’âge, ou DMLA.

 

 

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La dégénérescence maculaire liée à l'âge (DMLA) détruit les cellules de l'épithélium pigmentaire de la rétine. Cette couche de cellules qui tapisse le fond de la rétine assure le bon fonctionnement des cellules photoréceptrices de l'œil. Une maladie qui n'est pas négligeable et qui s'aggrave avec l'âge des patients. D'après le journal d'ophtalmologie, 2007, le taux de DMLA dans le monde, s'établit selon l'âge : de 55 à 64 ans à 12,2%, 65 à 74 ans à 18,3%, plus de 74 ans  à 29,7% (600 000 patients en France).

Les travaux de l’équipe de Sally Temple, de l’Institut des cellules souches neuronales de Rensselaer, aux États-Unis ouvrent un espoir de remédier à la DMLA. En cultivant sous diverses conditions de telles cellules prélevées sur des donneurs décédés, les biologistes ont mis en évidence, parmi elles, l’existence d’une sous-population de cellules souches multipotentes, c’est-à-dire capables de se différencier en plusieurs types cellulaires – dont les cellules de l’épithélium pigmentaire de la rétine.

 

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La DMLA (dégénérescence maculaire liée à l'âge) entraîne l'apparition d'une ou plusieurs taches noires qui occultent la vision centrale

 

Cet épithélium est une couche de cellules qui tapisse le fond de la rétine et assure le bon fonctionnement des cellules photoréceptrices de l’œil, les bâtonnets et les cônes. La DMLA, principale cause de malvoyance et de cécité dans les pays industrialisés – elle y touche sept pour cent des personnes de plus de 75 ans –, est due à la disparition progressive de ces cellules. Il n’existe encore aucun traitement pour la forme la plus fréquente, dite DMLA « sèche » ou atrophique.

 

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Infographie : Betty Lafon pour Sciences et Avenir

 

Une piste explorée par plusieurs équipes consiste à greffer dans la rétine des cellules de l’épithélium pigmentaire de la rétine produites en laboratoire à partir de cellules souches embryonnaires (cellules ES) ou de cellules induites à la pluripotence (cellules iPS), c’est-à-dire capables de se différencier en cellules de n'importe lequel des trois feuillets embryonnaires (lors de l’embryogenèse, ces feuillets produisent les organes du futur individu).

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La DMLA (dégénérescence maculaire liée à l'âge) se caractérise par une atteinte de la zone centrale de la rétine, la macula (le cercle  jaune vu en rétino-angiographie)

© KOKEL/BSIP

 

En découvrant des cellules souches dans l’épithélium pigmentaire de la rétine humaine adulte, les biologistes américains ouvrent la voie à une nouvelle piste : en culture, sous certaines conditions, ces cellules souches multipotentes se différencient en cellules de l’épithélium pigmentaire. Existerait-il des conditions similaires qui activeraient leur différenciation dans la rétine des personnes atteintes de la maladie, et ainsi la régénération in situ de l’épithélium défectueux ? Certains animaux à sang froid, comme les amphibiens, ont déjà cette capacité de régénérer leur épithélium pigmentaire et d’autres tissus oculaires lorsque ceux-ci sont abîmés. Prochaine étape : décortiquer le mécanisme qui active la différenciation de ces nouvelles cellules souches – une donnée indispensable pour mettre au point les conditions favorables à la régénération de l’épithélium in situ.

 

« C’est la première fois que l’on met en évidence des cellules souches dans ce tissu chez l’adulte, commente Olivier Goureau, de l’Institut de la vision, à Paris. Cette piste de réparation endogène semble prometteuse. » Celle de la greffe de cellules de l’épithélium pigmentaire dérivées de cellules pluripotentes n’est pas abandonnée pour autant. Son équipe, qui travaille sur la production de différentes cellules rétiniennes à partir de cellules souches pluripotentes humaines, s’apprête, en collaboration avec le laboratoire ISTEM du génopole d’Evry, à effectuer chez la souris des tests de greffe d’un tel épithélium.

 
Source :
 
M.-N. Cordonnier (2012). - Des cellules souches dans la rétine. Pour la Science n° 413 mars 2012, p. 8.
 
 

Pour en savoir plus

 

E. Salero et al., Adult human RPE can be activated into a multipotent stem cell that produces mesenchymal derivatives, Cell Stem Cell, vol. 10, pp. 88-95, 2012.

C. Delcourt, Les troubles de la vision liés à l'âge, Pour la Science, n° 292, pp. 38-45, 2002.

 

Les cellules souches embryonnaires humaines tiennent leurs promesses (ajout de janvier 2013)

 

Des patients ont reçu une greffe de cellules souches embryonnaires humaines. Une première mondiale qui offre un espoir de traitement pour cette maladie incurable.

 

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 De gauche à droite, tomographie par cohérence optique de la rétine d'une macula normale, d'une rétine atteinte de DMLA et enfin d'un œdème maculaire, une complication rencontrée souvent chez les diabétiques

(CMCR MAISON ROUGE STRASBOURG)

 

 

Pour la première fois, une équipe du prestigieux Jules Stein Eye Institute de Los Angeles (États-Unis) a réalisé avec succès, en mars 2012, une greffe de cellules souches embryonnaires humaines (CSEh) chez deux patientes atteintes de dégénérescence maculaire liée à l'âge (DMLA). L'une des patientes souffrait de la forme dite sèche. L'autre d'une affection proche appelée maladie de Stargardt. Ces CSEh, prélevées sur l'embryon aux premiers stades de développement, ont la particularité de se répliquer indéfiniment avant de se différencier pour former plus de 200 types de tissus humains. 50 000 d'entre elles ont été injectées sous la rétine de patientes très malvoyantes pour reconstituer de la rétine. Six mois après, l'une pouvait à nouveau se déplacer seule, l'autre était capable d'utiliser partiellement un ordinateur. Un succès. Mais ces résultats doivent, bien sûr, être confirmés sur la durée. C'est pourquoi l'étude va se poursuivre pendant encore deux ans et inclure vingt-quatre autres patients.


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Les greffes de cellules souches embryonnaires humaines (ci-dessus, vues au microscope) sont peut-être la thérapie de l'avenir. Au dernier stade de leur développement, elles donneront un véritable tissu rétinien, aidant à restaurer la vision du patient

© UC IRVINE

 

S'ils sont avérés, ces résultats constitueront un immense espoir de traitement pour les deux formes de cette maladie dont les symptômes sont une déformation des lignes droites avec l'apparition progressive d'une ou plusieurs taches noires centrales, les scotomes, traduction de la perte de la vision centrale. Moins fréquente (20 % des cas), la forme dite humide est la plus grave. Elle se caractérise par la formation de néovaisseaux sous la rétine, une prolifération due à une production anormale de facteurs de croissance (VEGF : Vascular Endothelial growth factor). En revanche, il n'existe à ce jour aucun traitement pour la forme sèche sans néovascularisation (dite aussi atrophique, plus lente et plus répandue (80 %), les antiVEGF étant inopérants. L'objectif thérapeutique est dans ce cas de stabiliser la destruction progressive des cellules photoréceptrices de la rétine et de bloquer l'inflammation locale. « Plusieurs molécules sont à l'étude et des essais cliniques vont démarrer dans les mois qui viennent », prévoit le Pr Eric Souied, président de l'Association DMLA*.

 

Face à une affection dont le nombre de cas pourrait doubler d'ici à 2030 en raison du vieillissement de la population, les chercheurs s'intéressent aussi au dépistage. On sait ainsi de longue date que le risque de développer une DMLA est plus important en cas de tabagisme et de surpoids. Plus récemment, des travaux ont été consacrés à la prédisposition génétique et plusieurs marqueurs ont été identifiés (ARMS2, CFH...). Un test de dépistage à partir d'un simple prélèvement salivaire, Macula Risk, est même déjà fabriqué et commercialisé au Canada et sur Internet par la firme Artic DX. Toutefois, son usage reste controversé et surtout prématuré comme l'a précisé un communiqué spécial émis par l'American Academy of Ophtalmology (AAO) en novembre 2012. « À l'avenir, ces tests pourront probablement aider à mieux traiter les patients à haut risque en permettant des traitements adaptés, a ainsi précisé le Dr Edwin Stone, responsable du groupe de travail de l'AAO sur la prédisposition génétique. « Mais les preuves d'un réel bénéfice pour le patient manquent encore. » Pour l'heure, en France, ce test est depuis peu en cours d'évaluation au centre hospitalier intercommunal de Créteil (Val-de-Marne) selon un protocole rigoureux, et uniquement, auprès de patients présentant des antécédents familiaux. L'équipe de Créteil poursuit par ailleurs un projet de génétique appliquée. « Nous avons identifié des marqueurs génétiques prédictifs de sévérité, détaille le Pr Souied. D'ici à cinq ans, nous espérons pouvoir adapter notre prise en charge au profil de chacun. » Un premier pas de soin personnalisé de la DMLA.

 

*N° vert 0.800.880.66.

 

Source :

Sylvie Riou-Millot (2013) . - Bien voir - Sciences et Avenir n° 792, février 2013, pp. 46-57.

 

Les cellules souches induites adultes (iPS) entrent dans la danse (ajout de mars 2013)

 

Dans le traitement de la DMLA, les premiers essais cliniques impliquant des cellules iPS devraient démarrer au Japon en 2013 au centre hospitalier de Kobe. Cette opération, qui se pratique déjà avec les CSEh (voir plus haut et également le dossier « Vision », Sciences et Avenir792, février 2013) consistera à injecter des iPS différenciées directement dans l'œil du patient afin de reconstituer les cellules abîmées.

 

Peut-on envisager de déployer cette technique pour des interventions nécessitant de plus importantes réparations dans des tissus nécrosés ? Dans le cas de la rétine, le nombre de cellules iPS à injecter est relativement faible. Mais s'il est possible d'envisager de greffer en surface de l'œil quelques milliers de cellules rétiniennes au millimètre carré, sera-t-il possible de réparer en profondeur un trouble cardiaque comme l'ischémie qui détruit plusieurs dizaines de milliards de cellules ? Sera t-il possible de produire autant de cellules, et à quel coût ? Autant de questions qui restent sans réponse. Pour toutes ces raisons, il semble illusoire - du moins pour l'heure - d'envisager que les iPS puissent ouvrir la voie à une médecine totalement personnalisée où l'on pourra soigner chaque patient à partir de ses propres cellules expurgées de leurs défauts.

 

Une greffe relance l'espoir dans la DMLA (ajout du 2 novembre 2014)

 

Une première mondiale : l'équipe menée par Yasuo Kurimoto, du Kobe City Médical Center Général Hospital au Japon a réalisé un implant de tissu rétinien à partir de cellules souches pluripotentes induites (iPS).

 

Le 12 septembre 2014, une Japonaise de 70 ans atteinte de DMLA a reçu une greffe d'un tissu rétinien conçu  à partir de cellules souches pluripotentes induites (IPS). Une première mondiale.

 

Même s'il est trop tôt pour évaluer le résultat, la patiente a déclaré, le lendemain, que sa vue était plus "brillante". Les iPS en question étaient des cellules souches obtenues à partir de cellules adultes différenciées — ici de peau de la patiente — puis reprogrammées en cellules de rétine. L'équipe japonaise a implanté un feuillet de 1,3 sur 3 mm d'épithélium rétinien dans l'œil de la patiente.

 

« Cette excellente équipe a réalisé ce que nous appelons "une preuve de concept" », commente Marc Peschanski, directeur scientifique d'I-Stem au génopôle d'Évry (Essonne). Nous attendons les résultats dans les deux ans. » Un éventuel succès pourrait cependant être difficile à étendre au plus grand nombre. « Le procédé n'étant pas du tout industrialisé, nous allons nous retrouver devant un problème éthique : nous aurons le traitement mais pas les moyens de l'appliquer. »

 

Source : Article de Sciences et Avenir, n° 813, novembre 2014 p. 28.

 

Une piste autre que les cellules souches : Un collyre anti-cholestérol pour ralentir la DMLA  

 

Une possibilité de ralentir la maladie vient d'être explorée par une équipe de chercheurs américains dirigée par Rajendra Apte, du département d'ophtalmologie de l'École de médecine de l'université Washington à Saint-Louis (Missouri).

 

Principale cause de malvoyance chez les personnes âgées, la DMLA pourrait être prévenue par des gouttes oculaires évacuant le cholestérol de l'œil. Un essai prometteur chez le rat.

 

Les injections dans l'œil utilisées pour traiter localement la DMLA pourraient céder la place à un simple collyre. C'est en effet la piste ouverte par des chercheurs américains qui publient une étude dans Cell Metabolism. Selon ce travail, il serait possible de ralentir la prolifération anormale des vaisseaux qui caractérise cette affection en régulant le métabolisme du cholestérol à l'intérieur de l'œil. L'approche qui n'a encore été testée que chez la souris — consisterait à cibler avec un collyre les cellules chargées d'évacuer le cholestérol. Celui-ci retournerait ainsi dans la circulation sanguine et ne s'accumulerait plus dans l'œil, empêchant la maladie de progresser. Cette idée inédite vient compléter l'arsenal des techniques en développement pour préserver ou restaurer la vision (lire Sciences et Avenir, 793, février 2013).

 

Rappelons que le cholestérol est un lipide impliqué dans de nombreux processus biochimiques. Mais quel rapport peut-il exister entre le cholestérol et le développement de vaisseaux sanguins de la rétine ? Il n'y a pas de lien entre DMLA et taux sanguin de cholestérol. La clef s'appelle en fait macrophages. Cette catégorie de cellules immunitaires joue en effet un rôle primordial dans l'élimination du cholestérol de l'œil. Or, les macrophages deviennent moins performants avec l'âge. Il en résulte des dépôts lipidiques qui entretiennent un foyer inflammatoire. Celui-ci favorise le développement de vaisseaux anormaux sous la rétine, responsables d'altérations sévères de la vision centrale. Pour l'heure, on ignore les mécanismes précis qui conduisent ces « vieux » macrophages à induire cette prolifération vasculaire. En revanche, de récents travaux ont montré qu'ils comptaient moins d'ABCAl, une protéine « transporteuse » permettant d'évacuer le cholestérol. Pour preuve, de « jeunes » macrophages dépourvus de ce même transporteur se comportent effectivement comme de « vieux » macrophages, favorisant une vascularisation anormale. D'où l'idée des chercheurs de « booster » l'expression d'ABCAl dans ces cellules afin qu'elles puissent se débarrasser de leur cholestérol et trouver la capacité à réguler la croissance vasculaire.

 

Pour ce faire, l'équipe de Rajendra Apte, du département d'ophtalmologie de l'École de médecine de l'université Washington à Saint-Louis (Missouri), a utilisé des gouttes ophtalmiques contenant un agoniste du LXR (Liver X Receptor). Cet agent stimule l'action d'un récepteur initialement découvert dans le foie et impliqué dans le métabolisme des lipides. Des études préalables ont en effet montré qu'il augmente la production du transporteur ABCA1 par les macrophages. Et les résultats des essais ont été encourageants : ainsi « dopées », les « vieilles » cellules se sont remises à fabriquer cet indispensable transporteur dans les mêmes proportions que les « jeunes ».

 

Restait à évaluer cette stratégie sur des souris chez lesquelles on a induit, sous l'effet d'un laser, une croissance anormale des vaisseaux sous-rétiniens, reproduisant ainsi ce que l'on observe chez les patients souffrant de DMLA. Là encore, les résultats ont été positifs. Administré en collyre, l'agoniste du LXR a permis de réduire significativement la prolifération vasculaire chez les souris traitées, les macrophages défaillants parvenant à nouveau à évacuer efficacement le cholestérol.

 

Il pourrait s'agir d'un progrès thérapeutique majeur

 

II faut désormais poursuivre ces recherches pour confirmer ces bons résultats, et surtout les appliquer à l'homme, ce qui prendra encore de longues années. S'ils se révélaient concluants, il s'agirait d'un progrès thérapeutique majeur dans la mesure où la fréquence de la DMLA augmente avec l'âge, représentant la principale cause de malvoyance chez les personnes de plus de 50 ans. Selon les chercheurs, « intervenir avant que la maladie ne soit à un stade avance avec des agents efficaces capables de stimuler la sortie du cholestérol de l'œil pourrait empêcher la progression de la maladie. Cette stratégie pourrait être déployée préventivement ».


Source : Marc Gozian Sciences et Avenir, n° 795, mai 2013, pp. 78-79.

Élaboration d'une rétine en culture à partir de cellules souches embryonnaires

Rétine-logo.jpgÉlaboration d'une rétine en culture

à partir de cellules souches embryonnaires


par Yoshiki Sasai[1]

 

 Lors du développement embryonnaire, dans l'utérus, un petit amas de cellules identiques donne naissance aux divers types de cellules du corps humain. Elles s'arrangent en structures variées et finissent par former les organes. Un "programme" interne dirige cette progression depuis des éléments simples jusqu'à des tissus de forme et de taille appropriées.

 

Les biologistes aimeraient reproduire le développement embryonnaire en laboratoire, à la fois pour mieux comprendre ses mécanismes et pour élaborer des moyens le réparer et remplacer des tissus endommagés. Le succès est peut-être proche : de récents progrès laissent envisager la "culture d'organes" de remplacement à l'extérieur du corps ; ils pourraient être disponibles pour les opérations chirurgicales d'ici dix ans.

 

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Cellules épithéliales pigmentées de la rétine

 

Mon optimisme se fonde sur des études sur les cellules souches – des divers types de cellules. Nous avons montré que des cultures de cellules souches peuvent donner naissance à une rétine ; cette structure clef de l'œil traduit la lumière en signaux électriques et chimiques, qui sont ensuite transmis au cerveau. Dans d'autres travaux, nous avons fait pousser du tissu cérébral (cortex) et une partie de l'hypophyse (une petite glande située à la base du cerveau). Pour ce faire, nous avons placé une mince couche de cellules dans une boîte de Pétri, où nous avons ajouté un cocktail de molécules présentes dans l'organisme. Ces cellules se sont développées en une structure tridimensionnelle. Nous espérons que du tissu rétinien produit de la sorte permettra de traiter plusieurs maladies de l'œil, telle la dégénérescence maculaire (la macula est la partie centrale de la rétine.

 

La formation de la rétine est un phénomène auto-organisé, fondé sur un programme interne des cellules.


À l'origine, nous cherchions à mieux comprendre la formation de la rétine. Nous savions qu'elle provient d'une partie du cerveau embryonnaire nommée diencéphale. Durant les premiers stades du développement embryonnaire, un segment du diencéphale s'étend pour former la vésicule optique, une structure en forme de ballon. Celle-ci s'invagine, formant la "cupule optique", qui deviendra la rétine (voir figure ci-dessous).


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Naissance de la rétine chez l'embryon

L'œil se forme à partir d'un petit amas de cellules embryonnaires. Au début, une couche de tissu, le neuroépithélium, se replie vers l'extérieur, donnant naissance à la vésicule optique (jour 9). La paroi de ce bourgeon s'incurve ensuite vers l'intérieur (jour 9,5), et la vésicule du cristallin se développe (jour 10). Une partie de la vésicule optique engendre la cupule optique, à l'origine de la rétine et du nerf optique (jour 10,5). La rétine contient trois couches distinctes de cellules (à l'extrême droite), l'une d'elles étant constituée des photorécepteurs (les bâtonnets et les cônes). La rétine représentée ici, d'une taille de 250 micromètres est celle d'une souris. La rétine humaine est similaire, mais plus grosse, et sa formation est plus longue.

 

Depuis plus d'un siècle, les biologistes débattent sur le mécanisme de formation de la cupule optique. Une question importante concerne le rôle des structures voisines, telles que le cristallin et la cornée. Certains chercheurs pensent que le cristallin façonne la cupule optique en exerçant une pression sur la vésicule, tandis que d'autres affirment que la cupule peut se former sans lui et sans les autres tissus voisins.

 

Il est difficile d'observer les mécanismes physiologiques sous-tendant le développement sur des animaux vivants. Il y a environ dix ans, nous avons donc décidé de reproduire le développement de l'œil dans une boîte de Pétri. Pour ce faire, nous avons utilisé des cellules souches embryonnaires, que nous avons exposées à diverses substances chimiques connues pour être impliquées dans la formation de l'œil. Les cellules souches embryonnaires constituent le type le plus immature de cellules souches. Elles sont capables de se différencier en tous les types cellulaires du corps, des neurones jusqu'aux cellules musculaires.

 

Aucune technique existante ne permettait d'engendrer des organes à partir de cultures de cellules souches. Des essais avaient été réalisés en plaçant les cellules sur une sorte d'échafaudage artificiel, qui imitait la forme de l'organe ciblé (en l'occurrence une vessie ou un œsophage), mais ils n'avaient remporté qu'un succès mitigé. Nous avons donc tenté une approche différente.

 

En 2000, nous avons élaboré une méthode pour transformer des cellules souches embryonnaires de souris en différents types de neurones. Nous avons ensuite placé une monocouche de ces cellules souches dans une boîte de Pétri, avec des cellules dites nourricières : ces dernières transmettaient des signaux chimiques déclenchant la différenciation des cellules souches embryonnaires. Cette couche mince ne reproduisait pas les organes tridimensionnels réels, mais nous désirions déjà savoir si les molécules sélectionnées suffisaient à obtenir les types particuliers de neurones apparaissant précocement lors du développement de l'œil.

 

Après des débuts difficiles, nous avons développé une nouvelle méthode en 2005, qui nous a permis de dépasser le stade bidimensionnel : nous avons créé une suspension de cellules souches dans un milieu liquide, qualifiée de culture flottante. L'intérêt d'une telle culture tridimensionnelle est double. Tout d'abord, un agrégat de cellules est mieux à même de prendre la forme des tissus s'il est tridimensionnel que s'il est plat. Ensuite, la formation de structures complexes requiert de multiples communications entre cellules, et ces dernières interagissent plus facilement dans une culture tridimensionnelle.

 

Nous avons placé des cellules en suspension dans de petits réservoirs - comptant chacun en moyenne 3 000 cellules - au sein d'une boîte de Pétri. Initialement séparées les unes des autres, les cellules se sont liées avec leurs voisines. Nous avons ensuite déclenché la différenciation de ces petits agrégats de cellules en des progéniteurs neuronaux (des cellules neuronales immatures) présents à l'avant du cerveau. Les cellules ont alors commencé à échanger des signaux.

 

Trois à quatre jours plus tard, elles se sont organisées spontanément en une sphère creuse formée d'une couche cellulaire ; on parle de neuroépithélium. Nous avons nommé SFEBq cette méthode de culture (pour Serum free floating culture of embryoid body-like aggregate with quick reaggregation, littéralement culture sans sérum flottante d'agrégats embryonnaires se réagrégeant rapidement).

 

Dans l'embryon, les cellules neuroépithéliales forment des structures cérébrales spécifiques, après avoir reçu des signaux chimiques externes. L'un de ces signaux déclenche le développement du diencéphale, qui engendrera la rétine et l'hypothalamus (une aire cérébrale contrôlant l'appétit et de nombreuses fonctions physiologiques fondamentales). Après avoir fait s'agréger les cellules en sphères, nous avons provoqué leur différenciation en progéniteurs rétiniens - les précurseurs des cellules rétiniennes matures. Pour ce faire, nous avons ajouté à notre culture un mélange de protéines, incluant celles qui assurent ce rôle chez l'embryon.

 

Quelques jours plus tard, des structures semblables à la vésicule optique ont spontanément bourgeonné sur les sphères, avant de changer de forme : la structure finale ressemblait à la cupule optique de l'œil embryonnaire (voir figure ci-dessous). Comme la cupule optique des animaux vivants, cette structure issue de cellules souches embryonnaires se composait de deux parois (deux épithéliums), l'une extérieure et l'autre intérieure ; c'est cette dernière qui est à l'origine de la rétine.

 

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Formation de la rétine à partir d'une cellule souche

La formation d'une rétine à partir d'une culture de cellules souches embryonnaires ressemble à ce qui se produit dans l'utérus. Les cellules s'agrègent et commencent à former la vésicule optique "primitive" environ cinq jours après avoir été mélangées avec des substances nommées facteurs de croissance. Cette vésicule gonfle, puis forme la cupule optique. Le 24e jour, toutes les couches de la rétine sont visibles.

 

Ainsi, une structure ordonnée est née de la seule agrégation de cellules souches dans un récipient. Contrairement à ce qui se passe chez l'embryon, il ne se formait pas de cristallin ou de lentille au voisinage de la cupule optique. Nos travaux montrent donc qu'aucune force exercée par des tissus voisins (tel le cristallin) n'est nécessaire à la formation de la protorétine. Au moins in vitro, c'est un phénomène auto-organisé, fondé sur un programme interne des cellules. Ce programme est encodé dans leur ADN, et nous travaillons à préciser ses mécanismes d'action.

 

L'apparition spontanée d'une structure stratifiée


Le développement normal de la rétine, tel qu'on l'observe chez les embryons, s'est poursuivi dans nos cultures. En deux semaines supplémentaires, la cupule optique a grandi jusqu'à environ deux millimètres de diamètre, et l'épithélium monocouche interne est devenu une structure stratifiée, contenant les six catégories de cellules d'une rétine naturelle après la naissance. L'une des couches extérieures de cette structure était constituée de photorécepteurs et l'autre de cellules dites ganglionnaires, qui, dans le corps, relient la rétine au cerveau. Entre les deux se trouvaient plusieurs couches de cellules de liaison, nommées interneurones.

 

De nombreuses questions demeurent, notamment sur la façon dont une boule de cellules entre dans un programme de différenciation, qui aboutit à des tissus distincts. Tout au long du développement embryonnaire, des formes complexes apparaissent spontanément à partir d'amas de matière homogène - on parle de brisure de symétrie. En l'absence de ce phénomène, les divisions cellulaires de l'œuf fécondé n'engendreraient qu'une masse indifférenciée de cellules. Nos cultures de cellules souches embryonnaires qui s'auto-organisent devraient aider à mieux comprendre les mécanismes en jeu dans les brisures de symétrie.

 

On cherche également à mieux comprendre comment s'effectue le modelage de la cupule optique à partir d'une simple couche de cellules (l'épithélium rétinien). La force qui s'applique sur les cellules et la rigidité varient dans l'épithélium. En mesurant in vitro la direction de la force et la rigidité du tissu en différents endroits, nous avons découvert que la cupule optique se forme en plusieurs étapes. Tout d'abord, la rigidité de la protorétine diminue, ce qui accroît sa flexibilité. Dans le même temps, les cellules qui se trouvent à la jonction de l'épithélium (la boule dont a bourgeonné la rétine) et de la protorétine adoptent une forme en coin. Finalement, la protorétine commence à se replier vers l'intérieur en raison de sa rapide extension. Nous avons appliqué les conditions mécaniques correspondantes à une simulation sur ordinateur, et la forme de la cupule optique est apparue !

 

Pour y voir plus clair...

 

Nos travaux aideront-ils à lutter contre les troubles oculaires humains ? Nous avons progressé dans cette voie. En particulier, mon équipe a récemment recréé une cupule optique et un tissu neuronal à couches multiples à partir de cellules souches embryonnaires humaines. La même méthode de culture devrait être applicable à des cellules souches humaines dites pluripotentes induites - des cellules matures et différenciées dont on a « inversé » le développement pour qu'elles se comportent comme des cellules souches embryonnaires. Nous avons également inventé une méthode fiable de cryoconservation, qui permet de stocker du tissu rétinien issu de cellules embryonnaires humaines dans de l'azote liquide.

 

Ces travaux promettent des applications médicales. Par exemple, nous pourrions créer des rétines artificielles, qui aideront à étudier les maladies de l'œil et, peut-être, à développer des médicaments et des thérapies géniques pour inverser la dégénérescence rétinienne.

 

Trois catégories de dégénérescence rétinienne pourraient bénéficier de nos recherches : la dégénérescence maculaire, la rétinopathie pigmentaire et le glaucome. Ces maladies touchent des millions d'individus à travers le monde et altèrent des couches différentes de la rétine.

 

Dans la dégénérescence maculaire, un tissu nommé épithélium pigmentaire rétinien est endommagé : ce tissu tapisse le fond de la rétine et supporte les photorécepteurs, qui se détériorent également, en particulier dans la région centrale de la rétine.

Dans la rétinopathie pigmentaire, les bâtonnets (un type de photorécepteurs) disparaissent progressivement pendant plusieurs années. La maladie se manifeste d'abord par une cécité nocturne, ou héméralopie, puis le champ visuel se réduit jusqu'à se limiter à une petite zone au centre, avant que le patient ne devienne totalement aveugle.

 

Enfin, le glaucome endommage les cellules ganglionnaires, qui relient la rétine au cerveau via le nerf optique.

 

De ces trois maladies, la dégénérescence maculaire semble la plus susceptible d'être traitée par une thérapie cellulaire. Pour obtenir les cellules nécessaires au remplacement de l'épithélium pigmentaire rétinien endommagé, on transforme des cellules souches embryonnaires humaines ou des cellules souches pluripotentes induites, au sein de cultures conventionnelles ou flottantes. Des essais cliniques à petite échelle ont débuté aux États-Unis et sont prévus dans d'autres pays : les cellules d'épithélium pigmentaire issues de cellules souches sont injectées sous la rétine avec une fine aiguille, afin de remplacer au moins une partie du tissu endommagé.

 

Pour la rétinopathie pigmentaire, la thérapie cellulaire est une perspective plus lointaine. À l'inverse d'une culture classique, notre méthode peut engendrer une couche dense de bâtonnets facilement transplantable. En revanche, ces photorécepteurs doivent s'intégrer dans le circuit neuronal de l'œil - ce qui n'était pas nécessaire pour l'épithélium, simple tissu de soutien. Ainsi, ils doivent se connecter à un autre type de cellules sensorielles, les cellules bipolaires, et nous ne savons pas encore comment réaliser cette connexion.

Le glaucome pourrait être la plus difficile des trois maladies à traiter par thérapie cellulaire. Des cultures de cellules souches embryonnaires peuvent produire les cellules ganglionnaires nécessaires, mais dans l'œil postnatal, le nerf optique ne se reforme pas spontanément. Autrement dit, une fois les cellules ganglionnaires transplantées, on ne sait pas connecter leurs axones (les prolongements des neurones qui forment le nerf optique) aux cellules cérébrales.

Notre méthode a décuplé les possibilités des tissus formés à partir de cellules souches embryonnaires. Reste à découvrir ce qu'elle peut nous apprendre sur les mécanismes qui conduisent d'une cellule unique à un organe aussi complexe que l'œil...

 

BIBLIOGRAPHIE


Y. Sasai (2013). – Une rétine en culture. Pour la Science, n° 426 avril 1993, pp. 58-63.

 

T. Nakano et al. (2012). - Self-formation of optic cups and storable stratified neural retina from human ESCs, Cells Stem Cell, vol. 10, pp. 771-785.


D Schwartz et al. (2012). - Embryonic stem cell trials for macular degeneration : a preliminary report, Lancet, vol. 379, pp. 713-720, 2012.

 

M. Eiraku et al. (2011). - Self-organizing optic-cup morphogenesis in three-dimensional culture, Nature, vol. 472, pp. 51-56.

 

Les alternatives thérapeutiques aux cellules souches

par Serge Picaud et José Sahel, Institut de la vision, Paris

 

Si les cellules souches ouvrent de nouvelles perspectives thérapeutiques pour les patients aveugles, une autre technique en est déjà au stade commercial : celle des prothèses rétiniennes. Ces dispositifs visent à stimuler artificiellement une rétine ayant perdu ses photorécepteurs. Les images, filmées par une caméra fixée sur une paire de lunettes, sont d'abord transformées en matrices d'impulsions électriques. Celles-ci sont ensuite transmises à des électrodes implantées sur la rétine résiduelle (voir la figure ci-dessous).


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Commercialisée depuis deux ans en Europe, la première prothèse rétinienne opérationnelle a reçu l'autorisation de mise sur le marché aux États-Unis en février 2013. En France, quatre patients aveugles ont participé aux essais cliniques. Cependant, les images perçues ne sont constituées que de 60 points ou pixels, puisque l'implant n'a que 60 électrodes : c'est insuffisant pour bien voir une image complexe, tel un visage, mais suffisant pour une image simple, de sorte que certains patients sont capables de lire des lettres d'environ 10 centimètres de hauteur.

 

De nombreux chercheurs tentent d'augmenter le nombre de pixels, chaque électrode devant activer une zone disjointe de sa voisine. Ainsi, à l'Institut de la vision, on poursuit plusieurs objectifs : le développement de nouvelles formes tridimensionnelles pour les implants, avec l'ESIEE (École supérieure d'ingénieurs en électrotechnique et électronique) et le CEA; l'utilisation de matériaux semi-conducteurs différents, tels le graphène et le diamant (projet européen NEUROCARE) ; l'amélioration du codage des informations visuelles.

 

Une piste alternative, la thérapie optogénétique, est inspirée d'algues unicellulaires et de bactéries dotées de protéines photosensibles. Ces protéines sont des canaux ioniques dont l'ouverture est contrôlée par la lumière. L'idée est d'insérer le gène qui les code dans les neurones non photosensibles de la rétine, qui pourraient alors être activés par la lumière.Ainsi, chaque cellule produisant les protéines jouerait le rôle d'un pixel. Ces protéines étant moins performantes que nos pigments visuels, les aveugles devront porter des lunettes rehaussant la luminance.

 

Ainsi, dans le cadre du projet européen RETICIRC, nous avons rendu la vue à des souris aveugles grâce à une protéine bactérienne. Nous avons ensuite montré que cette protéine permet l'activation de cellules rétiniennes humaines par la lumière, grâce à des cultures de cellules prélevées post mortem. Avant de passer à une application clinique, nous devrons vérifier que la thérapie génique visant à faire exprimer la protéine bactérienne n'entraîne pas d'inflammation ou de rejet chez le primate.



[1] Yoshiki SASAI est directeur du groupe d'organogenèse et de neurogenèse au Centre de biologie du développement du RIKEN, à Kobe, au Japon. Plus d'information sur Y. Sasai et ses recherches.

 

27/07/2012

Controverse acide sur les cellules souches

Cellules-souches-200.jpgControverse acide sur les cellules souches

 

 

Un article paru dans la revue "Sciences & Vie" de mai 2014 fait état de l'obtention de cellules souches par choc acide à la suite de travaux d'une équipe japonaise, résultats publiés dans "Nature" de janvier 2014. (Nature 01/2014; 505(7485):641-7.)

 

Dans "Pour la Science" en ligne (avril 2014), un article de Yvan Pandelé[1] fait le point sur cette publication. Ci-dessous la publication in extenso de cet article.

 

La récente découverte d’une méthode pour fabriquer des cellules souches par choc acide a suscité l’enthousiasme de la communauté scientifique. Avant d’être gravement mise en doute...

La nouvelle avait fait grand bruit. En janvier dernier, des chercheurs japonais et américains annonçaient avoir réussi à transformer des cellules de souris adultes en cellules souches par une nouvelle méthode : la soumission à un choc acide. Nommées STAP (Stimulus-triggered acquisition of pluripotency), les cellules souches obtenues seraient pluripotentes, c'est-à-dire capables de se différencier en de nombreux types cellulaires une fois réinjectées chez l’embryon.

Assez vite cependant, les publications concernées  – un article et une lettre parues dans la revue Nature le 30 janvier dernier – ont suscité des doutes. Des chercheurs ont pointé des détails problématiques : incohérence méthodologique, images modifiées ou reprises de la thèse de doctorat du premier auteur… Des observations qui, mises bout à bout, commençaient à faire désordre.

Plus grave, aucune équipe de recherche n’est jusqu’à présent parvenue à répliquer les résultats. On s’est également aperçu que les cellules STAP produites ne provenaient pas de la souche de souris mentionnée dans l’article, mais de deux autres souches. Sur son blog de recherche, Paul Knoepfler, spécialiste des cellules pluripotentes à l’Université de Californie à Davis, a publié une série de sondages informels qui semblent indiquer un scepticisme croissant au sujet de l’existence des cellules STAP. 

Une découverte prometteuse

La méthode découverte par Haruko Obokata et ses collègues semblait pourtant très prometteuse, combinant une technique simple – modifier l’acidité du milieu de culture – et des résultats encourageants. En effet, les cellules STAP présenteraient un potentiel de différenciation encore supérieur aux cellules pluripotentes induites (IPS) obtenues par reprogrammation génétique, récompensées par un prix Nobel de médecine en 2012. Les enjeux sont forts : la thérapie cellulaire à base de cellules souches permettra peut-être de traiter de nombreuses maladies, en remplaçant les tissus ou les organes lésés.

Certains des auteurs impliqués dans la découverte des cellules STAP se sont exprimés publiquement. Teruhiko Wakayama, chercheur à l’Université de Yamanashi, s’est prononcé en faveur d’un retrait des articles : le 10 mars dernier, il déclarait avoir perdu confiance dans le travail effectué et préférer approfondir les recherches en vue d’une éventuelle republication. Charles Vacanti, auteur sénior et chercheur à la Faculté de médecine de Harvard, continue pour sa part de défendre la validité de l’étude. Le 20 mars dernier, il mettait à la disposition de la communauté une version détaillée du protocole employé, afin de faciliter d’éventuelles réplications.

Des accusations de fraude

Mais les critiques se focalisent surtout sur le premier auteur, Haruko Obokata, une jeune biologiste (30 ans) responsable d’équipe au Riken, un prestigieux institut de recherche japonais. À la suite des suspicions émises, le Riken a rapidement lancé une enquête interne. Les conclusions, parues à la fin du mois de mars, sont sévères vis-à-vis de Haruko Obokata, qui se voit accusée d’avoir manipulé volontairement certaines données annexes, se rendant coupable de fraude scientifique (scientific misconduct). Dans une conclusion au vitriol, les rapporteurs estiment le protocole expérimental difficile à suivre – donc à reproduire – et vont jusqu’à déplorer « le manque total d’intégrité et d’humilité » de la chercheuse.

Violemment mise en cause par son propre institut et au centre d’un ouragan médiatique, Haruko Obokata a répliqué mercredi 9 avril dans une conférence de presse. Visiblement très éprouvée, elle s’est excusée pour les erreurs commises, mais plaide la bonne foi et maintient la validité des résultats de son équipe. « Le phénomène des cellules STAP est une réalité que j'ai vérifiée à plus de 200 reprises », affirme-t-elle, ajoutant que le protocole a été répliqué par une tierce personne. Le Riken a confirmé cette dernière information tout en minimisant les résultats obtenus, affirmant qu’ils ne constituaient pas une réplication complète. Le chercheur en question, également membre de l'institut japonais, semble vouloir conserver l’anonymat. Jusqu’à ce que ses résultats soient confirmés ?

Un retrait des articles ?

La question de l’existence des cellules STAP reste donc ouverte. Pour l’heure, la revue Nature n’a pas annoncé de retrait des publications mises en cause, et continue de couvrir l’affaire sur son blog d’actualité. Quant aux réactions des institutions de recherche, elles sont contrastées. Si le Riken a joué la transparence et a mis beaucoup d’ardeur à se désolidariser de H. Obokata, l’Université Harvard est pour sa part restée silencieuse. Toujours est-il qu’en l’absence de demande de retrait de la part des institutions scientifiques ou des principaux auteurs, les publications restent, jusqu’à nouvel ordre, valides.

Ces dernières années, on observe une augmentation du nombre de rétractations d’articles scientifiques. Une revue conduite en 2012 sur la base PubMed, qui référence un très grand nombre d’articles dans le champ biomédical, a montré que les deux tiers des rétractations étaient dues à des cas de fraude scientifique, c'est-à-dire du plagiat (ou auto-plagiat) ou de la manipulation volontaire de données. Cette hausse pourrait toutefois révéler, plutôt qu’une intensification des mauvaises pratiques, une plus grande sensibilité du système de détection.

En cas de fraude avérée, le scandale est généralement à la mesure des espoirs suscités. En 2005, dans un article publié dans Science, une équipe de recherche coréenne avait affirmé avoir créé des cellules souches embryonnaires à partir de clones humains… Las, la découverte s’était révélée factice et l’article avait été retiré dans un scandale retentissant. Espérons que l’affaire des cellules STAP ne connaîtra pas la même issue.

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© Haruko Obokata

 

Cette figure, qui présente le résultat d'une électrophorèse sur gel, a été falsifiée (le couloir 3 correspond à un gel différent des autres couloirs). Il s'agit d'un des deux cas de fraude scientifique identifiés par l'institut de recherche où travaille Haruko Obokata.

 

Pour en savoir plus

M.-N. Cordonnier, Des cellules souches produites par choc acidePour la Science, en ligne le 8 février 2014.

H. Obokata et al.Stimulus-triggered fate conversion of somatic cells into pluripotencyNature, vol. 505, pp. 641-647, 30 janvier 2014.

H. Obokata et al.Bidirectional developmental potential in reprogrammed cells with acquired pluripotencyNature, vol. 505, pp. 676-680, 30 janvier 2014.

F. C. Fang et al., Misconduct accounts for the majority of retracted scientific publicationsPNAS, 109(42), 2012.

D. Fanelli, Why growing retractions are (mostly) a good signPLOS Medicine10(12), 2013.

 


[1] Yvan Pandelé est journaliste à Pour la Science.

24/07/2012

L'agroterrorisme dans nos assiettes


Alerte à tous les futurs cancéreux

que nous sommes !

Pomme-mortelle.jpg

 « J'ai autrefois craché le sang à la suite de traitements chimiques avec lesquels j'empoisonnais moi-même les autres… Tout le monde sait que les produits chimiques sont cancérigènes. » 30 juillet 1972, 20 h, première chaîne de télévision, le présentateur Philippe Gildas relate le congrès international de la défense de la Nature, tenu à Fleurance (Gers), dont le maire était alors l'illustre Maurice Mességué.
 
Chaque jour, chaque fois que vous ingérez un aliment, une boisson, vous risquez de contracter un cancer. L'agriculture et son complice capitaliste l'agro-alimentaire nous tuent à petit feu. C'est probablement le plus grand scandale du troisième millénaire.
 
Ne serait-il pas judicieux d'étendre le délit de risque causé à autrui (articles 223-1 & 2 du code pénal) aux atteintes sanitaires des consommateurs, victimes involontaires, et non seulement des exploitants volontaires ?
http://www.wat.tv/video/son-cancer-aux-pesticides-50ch5_2...
 
Morts de kamikazes, et nous ? Car ce n'est pas QUE la dose qui fait le poison, mais aussi la durée de l'empoisonnement :
http://videos.tf1.fr/infos/2010/agriculteurs-victimes-du-...
http://www.dailymotion.com/video/xqdpak_la-mort-est-dans-...
 
Alors qu'il est déjà trop tard parce que tous les sols et bien des corps sont irréversiblement contaminés, ici et là, le combat ne fait que commencer
Comme en Inde :
http://www.youtube.com/watch?v=Tq4EjQDiPIw
Ou en Argentine :
http://www.lapresse.ca/international/amerique-latine/2012...
Et en Europe : ?

Agroterrorisme.jpg

 


 Contre toutes censures, un livre aborde pour la première fois l'agriculture et sa logique de mort, il s'annonce comme un best-seller :
L’AGROTERRORISME DANS NOS ASSIETTES
Michel Tarrier, 256 pages, Éditions LME
http://www.amazon.fr/Agroterrorisme-dans-assiettes-Michel...
 

Consultez aussi :
http://www.notre-planete.info/actualites/com.php?id=2122
Et pour en parler, vous pouvez rejoindre ce réseau :
http://www.facebook.com/groups/paysansvoyous/
 


23/07/2012

Kokopelli : Biodiversité sacrifiée sur l'autel de la productivité

La Biodiversité sacrifiée
sur l'autel de la productivité

La Cour de Justice de l'Union Européenne désavoue Kokopelli et son propre avocat général


Suite au jugement scandaleux de la Cour Européenne de Justice — qui prouve une fois de plus que ces institutions Européennes sont complètement corrompues et à la botte des banskters, du Cartel de la Chimie, des multinationales biocidaires et autres marionnettes politiques — certains amis de Kokopelli ont pensé qu'il était adéquat de relancer des énièmes pétitions pour la défense des semences libres.

(Pour plus de détails, voir l'article correspondant sur le site de Kokopelli.)

21/07/2012

Cellules souches : obtenir des neurones à partir de fibroblastes

01-Cellules souches.jpgObtenir des neurones

à partir de fibroblastes

 

Les cellules de l'organisme, y compris les neurones possèdent la même information génétique, mais elle n'est pas lue de la même façon selon le type cellulaire. On sait aujourd'hui agir sur cette lecture, notamment à l'aide de facteurs de transcription, des protéines qui se fixent sur l'ADN et régulent sa transcription en ARN. Grâce à un seul de ces facteurs, l'équipe de Karen Ring et Yadong Huan, de l'Université de Californie (San Francisco) a réussi à obtenir des réseaux de neurones à partir de fibroblastes humains et de souris.

 

Pour transformer les fibroblastes en d'autres cellules, on les place dans un milieu de culture adapté, qui recrée l'environnement physico-chimique des cellules qu'on cherche à obtenir, et l'on provoque la sur-expression des facteurs de transcription responsables de la différenciation visée.

Protocole-experimental.jpg

Protocole de l'expérimentation

 

Cette dernière opération consiste à faire produire en masse ces facteurs de transcription par la cellule. L'équipe de Y. Huang  et de Karen Ring n'en a utilisé qu'un seul, nommé Sox2. D'autres équipes avaient également obtenu des neurones, mais elles avaient fait appel à un nombre bien plus important de facteurs de transcription.

 

En quelques jours, les fibroblastes se sont transformés en cellules souches neurales induites (iNSCs). Celles-ci se sont divisées et se sont différenciées en astrocytes, oligodendrocytes et en neurones fonctionnels. En moins d'un mois, ces neurones se sont associés en réseaux.

 

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Neurones issus de la transformation de fibroblastes

 

Pour vérifier que les cellules reprogrammées ne risquaient pas de dégénérer en cellules cancéreuses, l'équipe américiane les a greffées dans le cerveau d'une souris. Elles s'y sont intégrées sans causer de tumeur. Ainsi, par ce type de reprogrammation, les iNSCs auto-renouvelables et multipotentes sans potentiel tumorigène peuvent être générées directement à partir de fibroblastes. Ces cellules seront peut-être utiles dans la lutte contre les maladies neurodégénératives, telles celles d'Alzheimer et de Parkinson ; elles permettront de tester les médicaments élaborés.

 

Source :


K. King et al. (2012). - Direct Reprogramming of Mouse and Human Fibroblasts into Multipotent Neural Stem Cells with a Single Factor. Cell Stem Cell, 7 juin 2012.

20/07/2012

L’Université de Franche-Comté et la fédération de pêche du Doubs au chevet de la Loue

L’Université de Franche-Comté

et la fédération de pêche du Doubs

au chevet de la Loue

(18/07/2012)

 

 

Classée comme l'une des plus belles rivières d'Europe pour la pêche à la mouche, la Loue se fraie dans le massif du Jura une reculée creusant d'abruptes falaises calcaires, au pied desquelles moucheurs locaux et touristes aiment venir titiller la truite et l'ombre.


"La vallée a connu un tourisme de masse lié à la pêche à la mouche, avec des personnes qui avaient les moyens et venaient de toute l'Europe. Mais depuis le début des années 2000, les pêcheurs fuient cette rivière dans un état lamentable, où ils voient les poissons mourir", constate Alexandre Cheval, garde-pêche dans la Vallée de la Loue. "Aujourd'hui, ils préfèrent aller en Slovénie ou en Roumanie sur des cours d'eau comparables à la Loue il y a 30 ans", ajoute-t-il. Le nombre des cartes de pêche enregistrées par la fédération sur le secteur de la Loue est passé de 2000 il y a dix ans à près 400 l'année dernière.

 

Mais depuis 1973 "la population piscicole a diminué de 70 à 80% sur certains secteurs de la Loue" qui s'écoule d'Ouhans dans le Doubs à Parcey dans le Jura, affirme Thomas Groubatch, chargé de mission à la Fédération de pêche du Doubs. Néanmoins, il pense qu'il "reste quelques secteurs refuges, mais ils sont rares. Il faut agir vite pendant que ces zones existent encore".


Des polluants d'origines diverses (population humaine, agriculture ou industrie), ainsi que l'aménagement des rivières (seuils et barrages) sont notamment mis en cause.

 

"Ce n'est pas une pollution ponctuelle, mais chronique. La rivière se dégrade de plus en plus et les milieux naturels ont de plus en plus de mal à supporter la pollution. La situation est plus qu'alarmante", s'inquiète Alexandre Cheval, qui redoute qu'un "point de non-retour" ait été atteint.

 

Pour lutter contre cette pollution, les services de l'État ont engagé une série d'actions comme le renforcement des règles d'épandage du lisier, l'installation de passes à poissons ou un effort de sensibilisation des industriels.


La Loue va être auscultée sous toutes les coutures. Les chercheurs du Laboratoire de Chrono-environnement viennent de commencer leurs travaux. Annoncée depuis au moins un an, cette vaste étude prévue sur cinq ans a enfin commencé dernièrement. D'après François Degiorgi, l’un des coordinateurs de cette étude, “Il s’agit d’un travail pluridisciplinaire qui porte aussi bien sur le bassin versant que sur la rivière. L’objectif est de localiser les causes du mauvais état de la Loue puis de chercher à les relier à une spacialisation des effets dans la rivière”.

 

Pendant une première phase de trois ans, une quinzaine de chercheurs va travailler sur le terrain pour cette étude. Une équipe pluridisciplinaire formée de chimistes, biologistes, géologues, pédologues. La plupart d’entre eux sont rattachés au laboratoire de chrono-environnement mais le laboratoire de géographie Théma, le Muséum d’Histoire naturelle de Besançon, l’Université de Neuchâtel, le laboratoire d’analyses de Poligny prêteront également main-forte à l’équipe.

 

Déjà des universitaires ont  prélevé des larves et des insectes adultes au bord de la Loue pour pouvoir évaluer la qualité du milieu de façon beaucoup plus précise que les indicateurs utilisés habituellement pour classer les rivières.

 

Autre partenaire de taille, la Fédération de Pêche du Doubs. Dès lundi, une soixantaine de pêcheurs est mobilisée chaque jour de la  semaine pour réaliser des pêches électriques afin d’effectuer de nouveaux inventaires piscicoles sur au moins huit stations de la Loue. Toutes les associations de pêche de la vallée, les fédérations de pêche des départements de Bourgogne et de Franche-Comté, le département de l’Ain ainsi que des bénévoles sont mobilisés la semaine prochaine.

 

Tout les amoureux de la Loue ont encore en tête les images des relevés piscicoles effectués, eux aussi à grand renfort de moyens et de médias par l’Onema en 2010. Alors, pourquoi recommencer et ne vaudrait-il pas commencer à agir concrètement pour diminuer les sources de pollution ?


« Pour que les politiques se bougent encore plus, il faut des preuves sur les origines de la pollution, explique Alexandre Cheval, garde pêche de la fédération du Doubs, cette étude va permettre d’affiner le tir, il nous faut des connaissances les plus fines possibles pour réajuster le tir. En 2010, l’Onema n’avait travaillé que sur quatre stations ».


Les politiques se sont déjà bougés en finançant cette étude qui coûte 360 000 euros pour la première phase. Environ 80% de  cette somme est prise en charge par l’Agence de l’Eau, le conseil général du Doubs et le conseil régional de Franche-Comté ; le reste étant financé par l’Université de Franche-Comté.

 

De nombreuses études ont été réalisées ces vingt dernières années, pas forcément coordonnées. Tout l’enjeu de ce travail va être de savoir capitaliser les résultats déjà publiés et surtout d’identifier beaucoup plus précisément l’impact des activités humaines sur le bassin versant de la Loue. En 2015, la directive européenne sur l’eau devra être renouvelée. Les premiers résultats  de cette étude sur la Loue pourraient bien être examinés de près.  De ses malheurs, la Loue pourrait ainsi en tirer un petit bénéfice. La rivière, connue dans toute l’Europe par les pêcheurs à la mouche, pourrait se faire aussi une réputation auprès des milieux scientifiques en étant devenue un véritable laboratoire à ciel ouvert.

 

En Franche-Comté, le Doubs franco-suisse, dont la Loue est à la fois un affluent et une résurgence, le Dessoubre et le Cusancin sont confrontés à un même problème de pollution et de mortalité piscicole.

 

Isabelle Brunarius

(France 3 Franche-Comté)

Source :

Blog.france3.fr/vallee-de-la-loue

 

Voir également dans ce même blog :

 

- Ces Saprolegnia qui parasitent les poissons

- La santé du Doubs mise à prix

- La Loue en avril 2011

- Mortalité des poissons dans le Doubs

- l'alerte lancée par Pascal P.

- Menaces sur le Doubs franco-suisse

- Proliférations algales dans la Haute vallée du Doubs

- Prolifération de Cyanobactéries dans la Loue

- Pathologie des poissons d'eau douce

 

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06/07/2012

Créer des dents biologiques grâce à des cellules souches

01-Cellules souches.jpgCréer des dents biologiques

grâce à des cellules souches

 

par Sylvie Riou-Milliot

 

Encore un autre espoir de la médecine régénérative : cette technique est capable aujourd'hui de créer des dents biologiques grâce à des cellules souches (voir l'article sur ce blog concernant les potentialités des cellules souches). Plusieurs équipes de chercheurs dans le monde y sont déjà parvenues sur la souris. Des essais vont bientôt démarrer chez l'Homme. Et à terme cette technique remplacera la pose d'implants.

 

Or, un implant n'est finalement qu'une vis, le plus souvent en titane, fixée dans de l'os avec lequel elle fait bon ménage en raison de facteurs de biocompatibilité. Une technique qui se révèle en fait incomplète. « Si cette nouvelle architecture artificielle rétablit la fonction masticatoire, elle ne restaure en rien la fonction biologique, poursuit le spécialiste. Car un implant ne compense pas l'absence de pulpe dentaire, cette zone qui confère à la dent sa vitalité, ni celle du ligament alvéolodentaire, un élément essentiel qui assure un rôle d'amortisseur des forces masticatoires. Régénérer des dents serait donc nettement plus physiologique ! Grâce au développement de l'ingénierietissulaire et des biotechnologies, nous savons aujourd'hui que d'ici à quelques années à peine, cela sera possible. »

 

Recréer une biodent

 

D'après le Pr Henry Magloire, président de l'Institut français pour la recherche en odontologie (Ifro), enseignant à la faculté d'odontologie de Lyon et chercheur à l'Institut de génomique de Lyon : « Recréer une "biodent" est un véritable challenge pour les chercheurs. Quelques rares équipes dans le monde y sont déjà parvenues chezl'animal. Pour l'Homme, ce sera évidemment plus difficile car la dent est un organe complexe dont on n'arrive pas encore à contrôler ni la forme ni la taille, encore moins la couleur ou la direction dans laquelle la "néodent" va se former. »

 

C'est à Strasbourg, dans l'unité Inserm UMR 977, que l'équipe d'Hervé Lesot a réussi à générer in vitro une dent à partir de cellules embryonnaires de souris. Au Japon, d'autres chercheurs sont allés plus loin. « L'équipe du Pr EtsukoIkeda, de l'université des sciences de Tokyo, a elle aussi créé un germe dentaire, mais elle l'a ensuite réimplanté dans une mâchoire de rongeur », détaille le Dr Simon. Trente-cinq jours après, une dent entière avait poussé ! Son analyse histologique a prouvé que tous les tissus dentaires – dentine mais aussi émail, cément et pulpe – étaient bien présents dans cette nouvelle architecture. Cette dent s'est même révélée parfaitement intégrée à son milieu, sensible au chaud, au froid, à la douleur et de plus entièrement fonctionnelle. Depuis, toujours à Tokyo, en 2011, une autre équipe a trouvé une astuce pour gagner dix jours sur le temps de formation de la nouvelle dent. Les chercheurs ont fait se multiplier les cellules embryonnaires, les ont déposées sur un support en plastique, servant en quelque sorte de moule, qu'ils ont implanté au niveau du rein d'une souris. Cette zone, très bien vascularisée, a permis une croissance accélérée. Une fois développée, la dent a été incluse dans une mâchoire de souris. Et là encore, la fonctionnalité était au rendez-vous. Une stratégie qui augure, pour l'avenir, de la création de néodents pour réparer celles manquantes...

 

En France, à Paris, où un travail de régénération pionnier, a été réalisé en 2011 à la faculté d'odontologie de l'université Paris-Descartes. Les équipes des Prs Anne Poliard (EA2496) et Michel Goldberg (UMR 747) ont, grâce à l'implantation de cellules souches pulpaires, réussi à produire de la dentine, un tissu minéralisé de la dent sécrété par des cellules, les odontoblastes. « II s'agit là d'une approche très novatrice qui trouvera ses applications futures notamment dans le traitement des caries », salue le Pr Magloire. Un véritable espoir pour venir à bout d'un fléau qui représente la principale cause d'extraction dentaire (60 %) avant les maladies dites du parodonte (40 %).

 

"Nous avons d'abord établi des lignées cellulaires à partir de la pulpe des molaires d'embryons de souris en privilégiant celles de type A4 qui présentaient un potentiel de différenciation important pour former de la dentine », détaille Yassine Harichane, l'un des chercheurs ayant consacre une partie de sa thèse à ce sujet. Puis, munis d'une microfraise, les chercheurs ont ensuite creusé un minuscule trou dans la molaire de rongeurs de façon a provoquer une lésion pulpaire et l'ont comblée avec ou sans les fameuses cellules A4. « Trois semaines après environ, il y avait une néoformation dedentine dans le groupe traité ", précise le chercheur. « Le choix de la stratégie réparatrice dépendra en fait du degré d'atteinte de la lésion initiale, détaille le Pr Poliard. Si l'atteinte est modérée, et s'il subsiste de la pulpe saine, on pourra se contenter de stimuler les cellulessouches vivantes résiduelles par des facteurs de croissance. En revanche, si la lésion est très importante, quand la pulpe est totalement détruite, par exemple sur une dent cassée, il faudra utiliser un substitut de pulpe, c'est-à-dire un biomatériau dans lequel on aura inoculé des cellules souches qui reformeront du tissu. » Plusieurs équipes dans le monde y travaillent, comme celle du Pr Catherine Chaussain (EA 2496), toujours à l'université Paris-Descartes.

 

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Supports dotés de nanoréservoirs actifs

 

Une autre approche de nanomédecine régénérative, baptisée NanoRegMed, est, elle, actuellement suivie par une équipe Inserm à l'université de Strasbourg. « Nous avons développé une stratégie innovante avec des supports dotés de nanoréservoirs actifs, explique la coordonnatrice du projet, le Dr Nadia Benkirane-Jessel, directrice de recherches Inserm l'UMR 977. Nous travaillons plus particulièrement sur un peptide de contrôle de l'inflammationpulpaire que nous avons incorporé à unematrice qui a la consistance d'un gel ». Un gel qui permettrait non pas la prévention des caries – le brossage régulier demeure incontournable – mais leur traitement Comment ? En évitant de recourir à la dévitalisation de la dent et en régénérant la pulpe à partir du gel. Une start-up a même été créée, ARTiOSnanomed. Une phase de tests chez l'animal ayant obtenu des résultats encourageants, des essais sont maintenant prévus chez l'Homme et la start-up a entamé des négociations avec un poids lourd du secteur, la firme américaine Colgate-Palmolive.

 

Mais l'équipe voit déjà plus loin. Car de la dent à l'os, il n'y a qu'un pas. Aussi, à Strasbourg, orthopédistes et rhumatologues travaillent-ils en collaboration avec les dentistes et les biologistes. Objectif : développer des implants hybrides « intelligents » à base de nanoréservoirs de principes actifs et de cellules osseuses et cartilagineuses issues de cellules souches pour un jour, être en mesure de proposer des greffes d'os et de cartilage aux patients victimes de pathologies ostéoarticulaires, comme l'arthrose. D'ailleurs, créer aussi de l'os, des muscles, des nerfs..., c'est le rêve de tous ceux qui ont foi dans les promesses des cellules souches (lire Sciences et Avenir n° 722, avril 2007).

 

Biobanques dentaires

 

Une autre idée fait son chemin : congeler et stocker des cellules souches pulpaires obtenues à partir des dents de lait et des dents de sagesse, comme on le fait déjà avec les cellules issues du sang de cordon ombilical, des muscles, des nerfs..., c'est le rêve de tous ceux qui ont foi dans les promesses des cellules souches (lire Sciences et Avenir n° 739, septembre 2008).

 

La première biobanque dentaire est née au Texas (États-Unis) avec la société BioEden. Depuis, d'autres ont suivi, comme la société Stemsave qui, dans le Colorado, rétribue même les dentistes (90 dollars) qui acceptent de récupérer les dents de leurs patients... Le concept a également fait récemment son apparition au Royaume-Uni et en Suisse avec Future Health Biobank, autorisant le stockage privé et payant. La voie semblait donc toute tracée pour que la France se dote à son tour d'une telle structure. En juin 2011, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) avait même donné son feu vert à l'institut Clinident Bio-Pharma qui proposait le stockage d'une dent pendant vingt ans pour environ 120 € par an. Avant de revenir sur sa décision à l'automne, estimant que les travaux étaient trop préliminaires et contraires au principe de non-patrimonialité du corps humain reposant sur l'anonymat et la gratuité. Une exception française qui a enclenché une bataille judiciaire, toujours en cours.

 

Source :

Sylvie Riou-Milliot (2012). - Quand les dents repousseront,Sciences et Avenir n° 783, mai 2012, pp.72-75.

 

Les dents cachent une source inattendue de cellules souches (ajout d'octobre 2014)

 

Nous avons vu plus haut que la pulpe dentaire renferme une petite quantité de cellules souches. Durant l'été 2014, l'origine de ces cellules souches a été décelée par des chercheurs suédois : elles proviennent des nerfs de la dent.

Des cellules nerveuses migrent en effet régulièrement vers la pulpe, pour retourner à l'état de cellules indifférenciées. Une vraie surprise pour les scientifiques. Comprendre le mécanisme de ce processus pourrait ouvrir la voie à un nouveau mode de fabrication de ces cellules souches très utiles, non seulement pour recréer des dents, mais également pour soigner de nombreuses maladies (voir l'article sur ce blog concernant les potentialités des cellules souches).

 

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Dans la pulpe de la dent (en orange), des cellules nerveuses redeviennent des cellules souches (Science & Vie n° 1165, octobre 2014, p. 36).

19/06/2012

Tirs de loups : Sarkozy a flingué jusqu'à la dernière minute !

Tirs de loups : Sarkozy a flingué jusqu'à la dernière minute !

par Pierre Athanaze

(via Luce Lapin : Charlie Hebdo)

 

Le 10 mai, le Journal officiel a publié deux arrêtés destructeurs concernant une espèce pourtant strictement protégée par la convention de Berne: le loup. C’est la suite logique des cadeaux répugnants faits aux chasseurs par Sarkozy. Le point avec Pierre Athanaze, président de l’ASPAS, Association pour la protection des animaux sauvages.

Qu’autorisent ces arrêtés ?

 

Le premier permet aux fusillos français d’abattre onze loups cette année. Soit cinq de plus à ceux que Kosciusko-Morizet avait déjà scandaleusement autorisés l’an dernier.

 

Le second fixe la liste des départements — dans les Alpes et les Pyrénées — où des mesures expresses permettront de tuer le gros méchant loup.

 

Et aussi dans les Vosges… alors que seuls deux loups y sont arrivés l’an dernier !

 

L’équipe de Sarkozy était loin de faire dans la dentelle. Après avoir donné toute une série de cadeaux électoraux aux chasseurs avant la présidentielle, elle leur en offre, en prévision des législatives, un de plus, eux qui attendaient cela depuis longtemps, et également aux syndicats agricoles, qui ont trouvé le parfait bouc émissaire pour cacher leur totale incompétence à enrayer la crise de la filière ovine. Et, du coup, empoisonne un  peu plus ce dossier, qui n’en avait vraiment pas besoin.


La chasse au loup est donc ouverte en plein XXIe siècle, exactement comme elle l’était au XIXe. Pis, le précédent ministère de l’Écologie avait écrit à l’Office national de la chasse et de la faune sauvage pour lui demander de mettre en place un réseau composé d’agents de l’établissement public, mais aussi de chasseurs et de lieutenants de louveterie qui recevront une  formation ad hoc pour être plus efficaces dans leur mission d’élimination du loup!



Y a-t-il des recours, et quels sont-ils ?

 

L’ASPAS a décidé de porter plainte contre la France auprès de la Commission européenne. Notre pays, une fois de plus, se distingue par sa mauvaise foi et son attitude totalement anti-nature, au mépris de tous ses engagements [de façades] devant les instances européennes.

 

J’ai rencontré la Commission européenne pour évoquer ce dossier. Notre plainte viendra en rejoindre trois autres que nous avons déjà déposées à Bruxelles. Une contre les chasses dites traditionnelles, qui chaque année tuent dans des conditions atroces plus d’un million d’oiseaux. Une deuxième contre la chasse au tétras-lyre, espèce en voie de disparition, qui est pourtant autorisée dans les réserves naturelles du Vercors et de la Chartreuse. Et une troisième contre la France, qui est le seul pays d’Europe occidentale où le grand tétras, autre espèce en voie de disparition, est toujours chassé. Elle l’est dans les Pyrénées, où l’espèce a perdu plus de 60 % de ses effectifs en vingt ans. Je suis confiant quant à la suite de ces recours, dont certains devraient rapidement conduire la France à de nouvelles condamnations.

 

À moins que le nouveau gouvernement n’ait un peu plus le sens des responsabilités que ceux qui l’ont précédé, et qui depuis dix ans n’ont eu de cesse de faire des cadeaux aux chasseurs. Des cadeaux qui coûtent très très cher à la nature.


• À lire, de Pierre Athanaze : Le Livre noir de la chasse – Massacres et abus de pouvoir, éditions Sang de la Terre.


•  www.aspas-nature.org

 

 

Ajout du 26 août 2014 :


Clientélisme et populisme sont les 2 mamelles...

 par Marc Laffont, le 6 juin 2014



Le 29 mai 2014, en réponse à une question du sénateur Roland Povinelli (qui doit se sentir seul dans cet univers anti-nature qu’est le Sénat...) restée sans suite pendant un an, madame la ministre de l’écologie a laborieusement admis que 93 % des indemnisations l’ont été sur la base suivante : "cause de mortalité liée à une prédation, responsabilité du loup non exclue".


Ce qui signifie que seuls 7 % des constats ayant conduit à une indemnisation sont incontestablement le fait du loup. Pour les (très nombreux) autres constats, il y a doute.


  Et c’est donc sur cette base de 93 % de doute que l’actuel gouvernement décide de programmer l’abattage de 24 + 12 = 36 loups sur une population estimée entre 220 et 380 individus. Soit entre 9,5 et 16,5 % de la population.


Évidemment, aucune précision n’est fournie pour indiquer ce que seront les critères retenus pour porter de 24 à 36 les loups pudiquement "prélevés"...

 

On peut imaginer que cela dépendra par exemple du degré d’énervement des anti-loups les plus virulents. Lesquels ne risquent pas de se contenter de 24 loups. Ni de 36. Ni de 48 ou même 64 d’ailleurs, vu que leur objectif est de ramener la population de loups en dessous du seuil de viabilité.


L’ours dans les Pyrénées est là pour montrer qu’une petite population est bien suffisante pour générer quantités de subsides publics supplémentaires pour les éleveurs allergiques à la Nature. L’État étant tenu de respecter ses engagements, l’argent coule à flot, sans pérenniser pour autant la population d’ours.


À l’instar des anti-ours, avec lesquels ils sont d’ailleurs en étroite relation, les anti-loups rêvent eux aussi de pouvoir tenir l’État par les parties intimes... Mais Canis lupus est peu enclin à servir de faire valoir, l’infâme...

 

Revenons à ces arrêtés.

 

Puisqu’il est d’ores et déjà prévu d’occire un certain nombre de loups, il convient, a minima, que la France reste dans les clous de la directive Habitats. Les finances du pays n’ont pas besoin d’une énième condamnation pour non respect du droit environnemental européen...


Cela sous-entend un certain nombre d’exclusions de situations d’abattage.



Tout d’abord, il n’est pas pensable d’envisager un tir létal dans une zone où le loup ne fait que timidement son retour.  Exit donc l’Ardèche, l’Ariège, l’Aude, les Bouches du Rhône, la Haute-Marne, la Meuse, les Pyrénées Orientales, la Haute-Saône...

 

Tirer des loups en dehors de la présences des troupeaux est une aberration qui n’a que fort peu de chances de porter sur LE loup qui aurait (peut être) attaqué un troupeau, il y a plusieurs semaines, à X km du lieu du tir...


De même, si un tir doit quand même être décidé pour calmer quelques esprits (mais sans résoudre quoi que ce soit au problème...), il faut impérativement qu’il soit effectué sur un loup EN SITUATION EFFECTIVE D’ATTAQUE, et sur un troupeau où les moyens de protection ont été EFFECTIVEMENT ET CORRECTEMENT mis en place.



Le gibier bénéfice d’une période de quiétude durant laquelle il n’est pas chassé, pour permettre la reproduction et l’élevage des jeunes. Il serait particulièrement incongru qu’une espèce comme le loup, strictement protégée et à ce titre inscrite à l’annexe II de la directive "Habitats", ne bénéficie pas, a minima, de la même faveur, le loup n’étant pas soumis à un plan de chasse mais seulement passible de tirs dérogatoires exceptionnels. Il est donc proprement scandaleux que des tirs létaux puissent être programmés en mai et juin, période d’élevage de la plupart des louveteaux.
Dans le cas contraire, ce serait l’aveu d’une volonté délibérée de régulation d’une espèce strictement protégée. Les associations les plus en pointe en matière de sollicitation des tribunaux pourraient donc d’ores et déjà se frotter les mains...



Le gouvernement gagnerait en crédibilité en limitant la liste des tireurs potentiels à des professionnels patentés, comme l’ONCFS. Et donc en excluant les pratiquants d’un loisir mortifère, dont le principal fait d’armes depuis 40 ans est d’avoir organisé la multiplication du cochonglier au delà des capacités de gestion par ses adeptes...

 

L’écran de fumée des tirs de loups ne pourra pas indéfiniment reculer la question de la mise en place d’une assurance-prédation, englobant TOUTES les causes, et dont le montant de la cotisation serait d’autant plus bas que les moyens de protection, financés par l’État et le contribuable, seraient le plus efficacement mis en place.

La seule solution durable pour le pastoralisme, c’est cette incontournable mise en œuvre efficace des mesures de protection qui restreindront l’accès au troupeau, que ce soit pour le loup ou tout autre prédateur à 2 ou 4 pattes.

 

Plus globalement, tous les tirs et toutes les éradications du monde ne changeront rien à ces quelques statistiques implacables :



- La production de viande ovine française a été divisée par 2 entre 1983 et 2013.
- La consommation de viande ovine par habitant a presque été divisée par 2 entre 1994 et 2013.
- L’approvisionnement en viande ovine en France est assuré à plus de la moitié par les importations (GB, NZ, Irlande, Espagne...).
- Le taux de pénétration de la viande ovine en France est tombé à 56 % en 2010. On attend la prochaine évaluation, prévue normalement pour fin 2014...
- Les plus de 65 ans représentent 40 % des volumes achetés, les - de 35 ans, 5 % seulement.
- Le coût de revient moyen de l’agneau français est de l’ordre de 12 € le kg, alors que le prix payé au producteur est d’environ 6 €/kg, ce qui est pourtant le plus élevé des pays producteurs d’Europe.
- Pourquoi un tel écart ? Parce que la productivité numérique par brebis est de 0,7 agneau, ce qui est une trop faible technicité pour espérer rentabiliser un élevage ovin viande.

Pour finir, la conséquence des point précédents : la dépendance aux subventions est devenue apocalyptique.

Vu que ces arrêtés concernent essentiellement les zones pastorales, tenons nous en au montant des subventions versées dans cette zone : un élevage de 460 brebis nécessite (chiffres 2012) 52 400 € de subventions/an, pour induire la production de 33 200 € de viande ovine et générer 18 100 € de revenu pour l’unique unité de main d’œuvre que parvient à "rémunérer" une exploitation de 460 brebis.

Nul doute que l’abattage de 36 loups va fondamentalement modifier cet "équilibre".



 Source : la buvette des alpages

Quel est l'animal le plus dangereux pour l'Homme ?

18:18 Publié dans Mammifères | Tags : loup, tirs de loups | Lien permanent | Commentaires (1) |  Facebook | | |

18/06/2012

OGM : la France maintient le bon cap

FNE-logo.pngOGM : la France maintient le bon cap


France Nature Environnement (FNE) salue la décision de la France qui, lors du Conseil européen de l’environnement du 11 juin 2012, a refusé que soient modifiées les modalités d’autorisation de mise en culture d’OGM. Bien au-delà de ce constat, il importe pour FNE que soient rappelés enjeux de société et stratégies.


Une nouvelle fois, il s’est agit de déjouer un marché de dupes consistant à accorder aux États membres la possibilité d’interdire sur leurs territoires des cultures d’OGM, pour faciliter les autorisations de mise en culture au niveau communautaire par un allègement des procédures de leur évaluation !



FNE a dénoncé a plusieurs reprises les carences de ces procédures menées par l’Agence européenne de sécurité alimentaire (AESA / EFSA), ainsi que son fonctionnement, alors que ses avis conditionnent les autorisations accordées par la Commission européenne (CE). Rappelons que, en France, le Comité scientifique du Haut Conseil des Biotechnologies et l’ANSES ont contesté la validité de ces expertises européennes, notamment en raison de l’insuffisance de la puissance statistique des tests présentés par la firme MONSANTO au sujet de son maïs MON 810 en question (tests examinés par l'AESA).



Celle-ci reproche à la France de ne pas apporter de preuves scientifiques nouvelles dans son dossier d’interdiction du MON 810 renouvelé en février 2012, alors que l’une de ces preuves est apportée par son évaluation défaillante !

 

mais-ogm.jpg

 

Selon Lylian Le Goff, pilote de la mission Biotechnologies de FNE : « Des procédures d’évaluation moins contraignantes, reposant sur le dogme aberrant de l’équivalence en substance entre variété OGM et non OGM, faciliteraient autorisations et cultures dans les quelques états favorables aux OGM et, par conséquent, la contamination des Etats soucieux de préserver l’intégrité de leur biodiversité et la spécificité de leurs territoires, notamment par la libre circulation des semences défendue par l’OMC. Voilà pourquoi il est vain de permettre à un état d’interdire les OGM sur son territoire sans un renforcement de l’évaluation de leurs risques toxicologiques mais aussi de leurs impacts socio-économiques».



Il importe effectivement de maintenir le cap et que l’avis unanime émis en décembre 2008 par le Conseil européen des ministres de l’environnement soit enfin appliqué : «renforcer et harmoniser les méthodes d’évaluation des risques des OGM en Europe ».

08/06/2012

Squelettes d'ours préhistoriques dans une grotte du Doubs

Squelettes d'ours préhistoriques

dans une grotte du Doubs

 

Trois squelettes d'ours bruns préhistoriques ont été découverts dans une grotte du Haut-Doubs dans le gouffre de la Nisotte, sur le premier plateau du Jura à L'Hôpital-du-Grosbois (Doubs).

 

Gouffre-de-la-Risotte.jpg

Une découverte importante qui a été faite en mai 2010 par les spéléologues de l'Association Spéléologique du Canton de Rougemont. Ces ossements d'ours dateraient d'au minimum 5 000 ans. (Voir la vidéo du reportage de France3 Franche-Comté de l'époque. Durée : 42 s)

Dans l'une des salles de cette cavité, les spéléologues ont trouvé un squelette complet d'une femelle très âgée, de nombreux éléments crâniens d'un sujet de sexe indéterminé pour l'instant, ainsi qu'un squelette d'un ourson d'un an, datant du Quaternaire. Cette découverte exceptionnelle confirme que la Franche-Comté est une région importante pour la paléontologie du Quaternaire et pour les Ursidés de cette époque.

Ours-prehistorique.jpg

La grotte de la Nisotte, dont l'entrée était effondrée, est composée une galerie étroite et sèche de six mètres de long qui débouche sur une succession de deux puits. La première salle aisément accessible aboutit par  le second puits de 15 m dans une salle large de 6 mètres, longue de 30 et haute de 15 qui contenait les ossements des trois ours, d'un chien ou loup et d'un chat sauvage. Dans une autre salle ont été retrouvés quelques restes récents d'oiseaux et de reptiles. La grotte de la Nisotte se révèle donc avoir fonctionné comme piège naturel pour tous ces vertébrés.

 

Deux ans après la découverte et l'entrée de la grotte refermée, l'aventure est révélée au public. Ce délai a été observé pour éviter les pillages et pour permettre aux spécialistes de travailler en toute sérénité.

 

Aujourd'hui, l'heure est à la remontée des ossements à la surface pour être étudiés. C'est pourquoi ce vendredi 6 juin 2012, une expédition organisée par les membres du club spéléo de Rougemont accompagnés de chercheurs du CNRS et du personnel du Service Régional d'Archéologie (SRA) de Franche-Comté est descendue dans le gouffre de la Nisotte suivie par une équipe de France3-Franche-Comté. Parmi les scientifiques : MM. Argant, paléontologue au CNRS (Aix en Provence), Lampéa, responsable du programme "Oursalpes" chargé de l'étude des ossements d'ours retrouvés dans les Alpes et le Jura, Griggo archéozoologue spécialisé dans l'étude des os et Mme Jacqueline Argant palynologue pour l'étude des pollens de la flore fossile.

 

Des ossements appartenant à une bonne dizaine d'espèces dont 4 ours bruns (Ursus arctos), un loup (Canis lupus), un chat forestier (Felis sylvestris), un squelette de serpent (espèce non déterminée) ainsi que d'autres ossements non déterminés, ont été extrait du gouffre de la Nisotte et confiés à Alain Argant pour être étudiés dans un laboratoire du centre paléontologique de l'ARPA de Saône-et-Loire.

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L'identification du sexe du crâne ci-dessus a été confirmée par la découverte le 6 juin de l'os pénien, en fouillant soigneusement le substrat couvert de stalagmites.

Voir la vidéo du reportage de France3-Franche-Comté (Durée : 2 min, après la pub).

04/06/2012

Ces Saprolegnia qui parasitent les poissons du Jura

poissons,maladies,pathologie des poissons,doubs,doubs-franco-suisse,montbéliardCes Saprolegnia qui parasitent les poissons du Jura

 

Les Saprolegnia qui parasitent les poissons des rivières du Jura français et du Jura suisse sont des organismes appartenant à l'ordre des Oomycètes (Voir l'article "Une unique souche de Saprolegnia parasitica parasite les poissons du Jura" dans ce même blog). Les oomycètes (Oomycota ou Oomycetes) représentent un phylum de protistes[1] filamenteux comprenant environ 500 espèces. Ce sont des organismes aquatiques non photosynthétiques qui ressemblent aux champignons mais les analyses phylogénétiques ont montré que les oomycètes sont éloignés des champignons[2].


Les Oomycètes


Les oomycètes sont communs dans l'eau, sur les déchets organiques et les cadavres des petits animaux. Certaines espèces vivent dans le sol en saprophytes sur les débris organiques. Plusieurs espèces sont des pathogènes majeurs de plantes, certaines espèces parasitent des animaux. La plupart des espèces de Saprolegnia sont des organismes saprophytes mais certaines espèces parasitent les poissons. Le genre Pythium comprend de nombreuses espèces parasites de plantes et quelques autres parasites d'animaux. Le genre Phytophtora est également responsable de maladies chez les végétaux sauvages et cultivés. Plasmopora viticola est l'agent du mildiou de la vigne.

 

Les oomycètes étaient autrefois classés dans les Mastigomycotina (maintenant Chytridiomycota, depuis la séparation des Mastigomycota), parmi les Mycota, avec lesquels ils partagent un certain nombre de caractères (cellules filamenteuses : hyphes, absence de chlorophylle, nutrition sur de la matière organique, ...). Mais ils présentent également de profondes divergences avec les mycètes (paroi cellulosique, noyaux diploïdes). Ils sont maintenant classés parmi les Straménopiles du fait de la présence de zoospores à deux flagelles poilus et de l'utilisation de laminarine comme substance de réserve.

 

Les Straménopiles

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Les Straménopiles [3] appartiennent à un vaste clade parmi les algues actuellement inclus dans la gamme Chromalveolata. Ils sont composés d'organismes dont la taille varie entre celles des diatomées unicellulaires et les algues géantes multicellulaires.

 

La définition et l'organisation des Straménopiles sont encore litigieuses. Au cours de leur cycle biologique, ils possèdent des éléments unicellulaires munis de deux flagelles. Ces zoospores biflagellées ou conidies sont caractéristiques de la multiplication végétative (asexuée). Les deux flagelles sont de longueur différente, l'un à l'avant de la cellule, et un autre attaché plus en arrière. Le flagelle antérieur se divise en trois branches minuscules (appelées mastigonèmes) qui courent latéralement le long de la cellule. Ce flagelle crée un courant d'eau qui se déplace vers l'avant de la cellule et apporte de la nourriture à la cellule. Le second flagelle inséré plus en arrière est lisse et décrit un mouvement de fouet. (En raison de ces flagelles, le groupe a été appelé les Hétérocontes = flagelles différents).

 

La plupart des Straménopiles possèdent des chloroplastes qui sont entourés de quatre membranes. Cette situation serait le résultat d'une endosymbiose secondaire, et plus précisément d'une ingestion d'une Rhodophyte unicellulaire par un autre Eucaryote. Les chloroplastes contiennent de la chlorophylle a et de la chlorophylle c et le plus souvent un pigment accessoire : la  fucoxanthine qui leur donne une couleur brun doré ou brun-vert (d'où leur ancien nom Chrysophyta ou algues brun doré.) Cette sorte d'inclusion leur vaut un autre nom : les Chromistes. Certains Straménopiles sont incolores (groupes Opalinata à Commation). Cette particularité s'explique de la façon suivante : soit, ils sont dérivés du groupe avant l'absorption des chloroplastes, soit,  ils ont perdu leurs chloroplastes plus tardivement.

 

Tous sont munis de mitochondries et se reproduisent par mitose.

 

Les Saprolegnia

 

Le genre Saprolegnia comprend des micro-organismes communs dans l'eau, sur les déchets organiques et les cadavres de petits animaux. La plupart des espèces sont des organismes saprophytes, mais certaines espèces sont pathogènes ou parasites :

 

  • provoquant des mycoses chez l'homme
  • ou des maladies chez l'animal :
    • taches blanches sur la peau et les branchies des poissons d'eau douces,
    • pourrissement des pontes d'écrevisses.
 
Chez les Saprolegnia, l'appareil végétatif abondant et ramifié forme comme une espèce de feutrage blanc. Il est de structure cénocytique. La membrane est cellulosique.
 

Mortalité-Loue-nov-2011-1.jpg

Truites parasitées par Saprolegnia parasitica

(Clichés collectif LRC)

 
 

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(clichés DR)

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(clichés DR)

 

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La multiplication végétative s'effectue au moyen de zoosporanges situés à l'extrémité d'un filament du siphon dont ils s'isolent par formation d'une cloison transversale cellulosique. Par une déchirure du sommet s'échappent des zoospores de première génération, piriformes munies de deux flagelles antérieurs , qui nagent rapidement puis se fixent et s'entourent d'une membrane cellulosique. Après un certain temps, cette membrane se déchire et une nouvelle zoospore sort, rénifome, cette fois, et possédant deux flagelles latéraux (zoospore de seconde génération, qui se fixera et donnera naissance au mycélium.

 

La reproduction sexuée est une hétérogamétangie. L'oogone se forme généralement à l'extrémité d'un filament qui se renfle et s'isole par une membrane. L'oogone est plurinucléée et le protoplasme se sépare en plusieurs masses qui s'arrondissent pour donner les oosphères d'abord plurinucléées puis uninucléées par résorption des noyaux surnuméraires.

 

À l'extrémité d'un autre rameau, plus mince et situé souvent juste au-dessous de l'oogone se forme une anthéridie en massue qui s'isole par une cloison. Cette anthéridie est plurinucléée mais il ne se différencie pas d'anthérozoïdes mobiles. L'anthéridie vient s'appliquer contre l'oogone, perfore la membrane de celle-ci, pénètre à l'intérieur et se ramifie entre les oosphères, envoyant un rameau vers chacune d'elles, de sorte que les noyaux mâles peuvent aller féconder les oosphères entre lesquels ils se répartissent. Quant aux noyaux non utilisés, ils se résorbent et disparaissent. L'œuf formé s'entoure d'une épaisse membrane cellulosique et peut rester longtemps sans germer, attendant les conditions favorables. La germination s'effectue avec réduction chromatique. Le cycle est donc haplobiontique.

 

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(cliché DR)




[1] organismes unicellulaires

[2] La classification des Protistes a été récemment bouleversée par les études moléculaires qui ont confirmé de manière catégorique que les algues (précédemment dénommées Hétérocontes ou Chrysophytes) étaient liées à une variété de protistes et non d'algues, tels que les flagellés hétérotrophes bicosoecides et les oomycètes fongiques (Leipe et al, 1994). Le groupe a été officieusement baptisé ainsi par Patterson (1989) et a été fondé à l'époque sur des preuves cytologiques. Les flagelles pileux qui définissent ce groupe sont un sous-ensemble distinctif de flagelles rencontrés dans les protistes, et se distinguent en ayant une longue tige creuse qui donne lieu à un petit nombre de poils fins, et la structure entière s'insère dans la cellule par une région basale. Ces poils se rencontrent généralement sur les flagelles. Un certain nombre de Straménopiles sont supposés (opalines) ou reconnus (diatomées) d'avoir perdu leurs poils.

[3] Straménopiles signifie "cheveux en paille" qui s'explique par la forme trifurquée du flagelle. Ce nom moderne se substitue aux précédentes appellations : Chrysophytes, Hétérocontes et Chromistes).

02/06/2012

Saprolegnia parasitica : une unique souche parasite les poissons

poissons,maladies,pathologie des poissons,doubs,doubs-franco-suisse,montbéliardUne unique souche de Saprolegnia parasitica parasite les poissons du Jura


par André Guyard

(Dernière mise à jour : novembre 2012)


Une unique souche de Saprolegnia parasitica serait à l'origine de l'attaque des poissons des rivières jurassiennes : c'est la conclusion à laquelle est arrivé un laboratoire suisse.


Mandaté par l’Office fédéral de l’environnement (OFEV), le laboratoire neuchâtelois dirigé par le docteur Lassaâd Belbahri a mis en évidence une seule et même souche d’un agent pathogène, infestant les truites, ombres et loches du Doubs, de la Loue et de la Sorne. Un résultat qu’il faut probablement s’attendre à retrouver du côté de l’Ain et de la Bienne mais aussi de l’Areuse et de la Birse, en Suisse, où, les symptômes qui frappent le Doubs et la Loue depuis 2009 ont été relevés cette année.

 

Cet agent pathogène est un oomycète Saprolegnia parasitica, fréquent dans les piscicultures. Le voici maintenant envahissant nos rivières. Il s'agit d'un agent pathogène opportuniste qui s'attaque aux poissons soumis à des stress et/ou déjà affaiblis par des sources de pollution atteignant nos rivières. Autrefois classé parmi les champignons, les études phylogénétiques placent désormais cet organisme parmi les Straménopiles, un clade particulièrement compliqué rattaché aux Algues (voir l'article sur Saprolegnia dans ce même blog).

 

Une opinion partagée par le collectif SOS Loue et rivières comtoises : « La saprolégniose n’est qu’une cochonnerie de plus, une maladie qui achève des poissons déjà très faibles », avance Jean-Michel Blondeau, un membre fondateur. « Les éclusées (lâchers d’eau des barrages), l’ouverture hors crues des vannes de fond, les stations d’épuration inexistantes ou pas aux normes, les nitrates et phosphates présents dans des algues jamais analysées, voire certains alevinages. Un cocktail explosif. […] Reconnaissons notre responsabilité collective et agissons avant que ne survienne un problème de santé publique. »

 

Le laboratoire neuchâtelois établit que la souche de Saprolegnia a été introduite récemment et se caractérise par sa virulence des souches pathogènes déjà présentes dans les milieux observés. Mais son origine reste inconnue, probablement anthropique : lâchers de poissons d'élevage contaminés, contamination par les bottes d’un pêcheur, la coque d’une embarcation, l'utilisation de vifs contaminés comme appâts, introduction d’espèces exotiques, exploitations aquacoles… D'autres vecteurs de la contamination peuvent être soupçonnés comme les écrevisses américaines.

 

En effet, aux États-Unis, une écrevisse loge un tueur de grenouilles. Il s'agit également d'un champignon qui provoque la  chytridiomycose décimant les amphibienset qui est aussi hébergé par les écrevisses ! C'est ce que révèle Tegan McMahon, de l'université de Floride du Sud. Dans le Colorado et en Louisiane, près de 30 % de ces crustacés sont contaminés par Batrachochytrium dendrobatidis. Des expériences en laboratoire montrent que des spores du pathogène, déposées dans l'eau, se logent dans la paroi intestinale des écrevisses, d'où elles peuvent ensuite contaminer les grenouilles. Ces réservoirs biologiques expliqueraient la virulence et la persistance de l'infection, en partie responsable du déclin des amphibiens.

 

En définitive, on ne peut que recommander pour éviter la propagation de Saprolegnia à d’autres cours d’eau de procéder à la désinfection du matériel ayant été en contact avec les eaux contaminées avec une solution javellisée ou alcoolique.

 

Rappelons que, dès mai 2011, la préfecture du Doubs avait demandé au laboratoire vétérinaire de Poligny (Jura français) d'étudier le problème de la saprolégniose, une maladie qui se manifeste par l’apparition d’un champignon sur le corps du poisson et qui n’occasionne en général qu’une faible mortalité. Les conclusions du labo : « Les poissons présentent des lésions dues à des surinfections externes cutanées par des saprolegnia banales. Aucun autre agent pathogène n’a été trouvé en quantité suffisante ».


Selon le blog animé par Isabelle Brunnarius sur le site de France 3 Franche-Comté, la Bienne est également sévèrement touchée.


23 mars 2012


L’AAPPMA La Biennoise souhaite interdire la pêche sur 24 kilomètres, pour une durée indéterminée, à la suite de la forte mortalité de poissons découverte à la mi-mars dans cette rivière jurassienne. Sur son blog, le pêcheur jurassien précise que « les limites du secteur fermé à la pêche sont pour l’amont, la  confluence du Tacon avec la Bienne à St Claude et pour l’aval, la  confluence du Merdançon et la Bienne à Dortan« . Cette décision intervient alors que les analyses réalisées par l’ONEMA sur les poissons morts ne sont toujours pas connues. Aujourd’hui encore, Charles Varenne, le président de l’AAPPMA, récupère des poissons morts au bord de cette rivière. Et pourtant, selon l’association de pêche, des pêcheurs continuaient de pêcher et de manger leurs prises. La Biennoise veut également sauvegarder les truites encore bien portantes.

 

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La Bienne est également touchée

par cette mortalité pisciaire

 

15 novembre 2012


Daniel Berthet, le président de  la société de pêche de Morez, prépare méticuleusement les truites mortes prélevées la semaine dernière dans la Bienne. Ces prélèvements vont partir ce jeudi dans un laboratoire d’analyse de Valence dans la Drôme. Ces analyses révéleront peut-être le nom du produit toxique à l’origine de la mort d’au moins 300 truites la semaine dernière à Morez. Mais il se peut que plus de poissons soient morts car les fortes pluies de ces jours-là ont augmenté le débit de la Bienne ; des poissons ont pu être entraînés loin rapidement. Avantage de cette météo, la pollution a été diluée.

 

Le président de cette AAPPMA souhaite déposer plainte à la gendarmerie, mais, pour l’instant, les gendarmes n’ont pas voulu prendre sa plainte en expliquant qu’ils attendaient le procès-verbal de la police de l’eau, l’Onema. Mais Daniel Berthet ne s’avoue pas vaincu, il retournera à la gendarmerie pour tenter de déposer plainte. Les enquêtes sur les pollutions aquatiques aboutissent difficilement car il est compliqué de prouver l’origine du déversement.

 

Voir également dans ce même blog sur le même sujet :


 - État sanitaire de la faune halieutique du Dessoubre, de la Loue et du Lison

- La santé du Doubs mise à prix

- La Loue en avril 2011

- Mortalité des poissons dans le Doubs

- l'alerte lancée par Pascal P.

- Menaces sur le Doubs franco-suisse

- Proliférations algales dans la Haute vallée du Doubs

- Prolifération de Cyanobactéries dans la Loue

- Pathologie des poissons d'eau douce

- Ces Saprolegnia qui parasitent les poissons du Jura

01/06/2012

Enfouissement des déchets radioactifs

Enfouissement des déchets radioactifs

BURE : conférence exceptionnelle
(Mise à jour du 15/06/2012)


Après la conférence du 13 juin 2012
à LIGNY-EN-BARROIS, Salle Jean BARBIER

Corinne LEPAGE, députée européenne

et Michèle RIVASI, députée européenne,

ont questionné Bertrand THUILLIER, docteur ès sciences sur les considérables risques à court terme du projet CIGéo.


Vidéotransmission sur internet : le lien est publié sur le site d’Europe Ecologie – les Verts :  http://eelv.fr/


BURE : Corinne LEPAGE a dit NON  (ajout du 15/06/2012)

En introduction de la conférence de Bertrand THUILLIER, expert indépendant, sur “les considérables risques à court terme du projet CIGéo”, conférence suivie d’un riche débat, qui s’est prolongé jusqu’à 23 h 30, Sébastien GEORGES de l’Est-Républicain relate l’essentiel des propos de la Députée Européenne, qui peuvent être résumés par cette seule déclaration :
Je suis partisane de l’arrêt de cette solution (l’enfouisssement) au bénéfice d’une gestion en surface.”

Voir l’article :

http://www.villesurterre.com/images/stories/bure-120615-l...

Voir la dernière interview de Bertrand THUILLIER, par Pascal BAUDOIN de l’Est-Républicain,
une pleine page qui a fait l’effet d’une bombe, comme disent les journalistes, et qui a rempli la salle :

http://www.villesurterre.com/images/stories/bure-120613-b...

Les détails et les infos sur la prochaine mise en ligne de l’intégralité de la conférence et du débat :

http://www.villesurterre.com/index.php?option=com_content...

Au moment où l’ANDRA organise une suite de réunions dont l’ambition est de faire accepter la nécessité d’enfouir les déchets HA et MA-VL à 500 m dans le sous-sol de BURE, il est primordial d’organiser une conférence de très haut niveau pour expliquer les considérables risques à court terme du projet CIGéo, Centre Industriel de stockage géologique.
 
Les travaux de l’ingénieur indépendant Bertrand THUILLIER viennent de mettre au jour les nombreux problèmes, nuisances et risques liés aux transports, aux structures d’entreposage, aux rejets de gaz et de contaminants radioactifs, mais également les graves questions de sûreté avec les risques d’explosion et d’incendie, voire même un risque de réactions en chaîne nucléaire.

Le conférencier s’attardera sur la présence de l’hydrogène dégagé par les colis MAVL, et du bitume inflammable. S’ajoutent aussi les questions associées à la nécessité de l’enfouissement et aux notions de réversibilité et de récupérabilité des colis.
 
Pour être informé et débattre ensemble sur ce projet, nous ne pouvons pas attendre le Débat public de 2013.

Pour nous le vrai Débat public, c’est maintenant !


 

Contacts :

Michel GUERITTE – michel.gueritte@gmail.com

06 71 06 81 17
Irène GUNEPIN – gunepin.irene@wanadoo.fr

06 81 71 54 52
 
Détails sur
http://www.villesurterre.com/index.php?option=com_content...

Vous pouvez aussi poser vos questions à :
bertrand@villesurterre.com

29/05/2012

Recrudescence de séismes

séisme-sumatra-logo.jpgDes séismes en série

 

par Boris Bellanger (Sciences & Vie juin 2012)

 

Depuis 1900, la Terre a connu une première série de séismes de magnitude supérieure à 8,5 entre 1950 et 1965, puis une seconde série depuis 2004, et aucune entre ces deux périodes. D'après David Perkins, statisticien de l'USGS (Institut d'Études Géologiques des États-Unis), cette succession de séismes majeurs a peu de chance d'être le fruit du hasard. Une hypothèse contestée…

Au cours de cette seconde vague, quatre mégaséismes ont ravagé la planète en huit ans :

 

Sumatra, décembre 2004


Avec 280 000 morts, le premier mégaséisme de la série en cours entraîne une véritable hécatombe. Troisième séisme le plus puissant jamais enregistré, il touche l'océan Indien le 26 décembre 2004. De l'épicentre, situé à 200 km dans le nord-ouest de Sumatra, partent des vagues dévastatrices pouvant atteindre une quinzaine de mètres. Le tsunami fait également des dégâts en Inde, au Sri Lanka, et dans la corne de l'Afrique.

 

Chili, février 2010

 

Le séisme qui a frappé le Chili dans la nuit du 27 février 2010, a fait deux millions de sinistrés (voir article dans ce même blog). Il se classe sixième au rang des plus violents tremblements de terre des cent dernières années. Son épicentre ne se situe qu'à quelques kilomètres des côtes chiliennes, dans l'océan Pacifique. Les secousses, ressenties jusqu'à Santiago, à plus de 300 km au nord, provoquent un tsunami destructeur, avec des vagues allant jusqu'à 5 mètres qui ont ravagé les côtes. Les derniers bilans font état de 521 morts et 2 millions de sinistrés.

 

Japon, mars 2011


Le cinquième tremblement de terre le plus violent depuis un siècle restera dans les mémoires pour la catastrophe nucléaire qu'il a déclenchée. Mais le séisme qui a touché le Japon ce 11 mars 2011 était en lui-même mémorable. Il provoque un important tsunami, avec des vagues s'enfonçant jusqu'à 5 kilomètres à l'intérieur des terres, à une vitesse de 30 à 40 km/h. Elles détruisent tout sur leur passage. Au final, on dénombre près de 20 000 morts et disparus, 6000 blessés, et 125 000 bâtiments endommagés ou détruits.

 

Sumatra, avril 2012


Avec sa magnitude de 8,6, le tremblement de terre qui survient le 11 avril 2012 au large de l'Indonésie est le neuvième le plus puissant jamais enregistré depuis un siècle. Il frappe une région encore traumatisée par le séisme de décembre 2004. Dernier d'une série en cours, ses secousses, ressenties jusqu'à Singapour, en Thaïlande et en Inde, provoquent des scènes de panique dans la province d'Aceh, dans le nord de Sumatra, encore hantée par le souvenir du tsunami de décembre 2004. Cette fois, cependant, le séisme n'entraîne que des vagues de moins d'un mètre de haut. Les secousses causent la mort d'une dizaine de personnes.

 

Comment peut-on avoir un séisme aussi important à cet endroit ? Au lendemain du 11 avril 2012, Christophe Vigny (géophysicien à l'École normale supérieure de Paris) se perd en conjectures. C'est que, contrairement aux autres mégaséismes, qui se sont produits dans des zones de subduction (là où une plaque tectonique plonge sous une autre), celui de Sumatra résulte d'un mouvement horizontal de décrochement entre deux morceaux d'une même plaque. "La faille est verticale et environ 10 fois plus courte que les failles inclinées des zones de subduction détaille le géophysicien. Elle atteint donc plus rapidement la profondeur à partir de laquelle les roches ne sont plus cassantes." Or la magnitude d'un séisme est le produit de trois paramètres : la longueur de la faille, sa profondeur et l'intensité du glissement.

 

"Pour obtenir une telle magnitude avec une faille décrochante, il faudrait que la longueur de la faille ou le glissement soient beaucoup plus importants que ceux observés, remarque Christophe Vigny. À moins que la rupture n'ait été plus profonde qu'on ne le pense, ce qui soulève d'autres questions…"

 

Survenus en moins d'une décennie, ces quatre derniers séismes figurent dans le top 10 des plus violents séismes ayant secoué la planète au cours de ces 112 dernières années. Est-ce une simple coïncidence ? Ou bien une vulgaire épidémie ? Faut-il en particulier s'attendre à la survenue prochaine du fameux "big One", ce mégaséisme qui plane sur la côte ouest des États-Unis ? À la vue de ces spasmes à répétition, la question, en tout cas se pose : la Terre serait-elle entrée dans une période d'intense crise sismique ? Pour David Perkins, cela ne fait aucun doute. "Le nombre de séismes de magnitude supérieure à 8 survenus au cours de la décennie passée est quasiment le triple de celui mesuré sur les décennies du siècle précédent", constate ce statisticien de l'USGS, l'organisme américain qui surveille le pouls sismique de la planète. Et de rappeler que ce n'est d'ailleurs pas la première fois qu'une telle agitation est observée à la surface de notre planète.

 

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Entre 1950 et 1965, une autre série de mégaséismes

 

Outre la recrudescence des années 2000, une série de grands séismes apparaît nettement entre 1950 et 1965. Cette courte période concentre à elle seule sept des neuf plus puissants tremblements de terre du XXe siècle ! Parmi eux, trois dépassent la magnitude 9, dont le monstrueux séisme de magnitude 9,5 qui secoua le Chili en 1960. Étonnamment, à cette quinzaine infernale succédèrent près de quarante années au cours desquelles peu de secousses ont atteint la magnitude 8, et aucune la magnitude 8,5. La fin du XXe siècle a donc été exceptionnellement calme comparée à la première décennie du XXIe siècle, qui compte déjà deux monstres de magnitude 9 et 9,1...

 

Avant même le tout récent séisme de Sumatra, David Perkins en était persuadé : "Cette succession de séismes majeurs entrecoupée d'une période d'accalmie relative a peu de chances d'être le fruit du hasard."

 

Pour étayer cette assertion, le chercheur s'appuie sur des calculs de probabilité d'occurrence. En pratique, il produit aléatoirement des centaines de milliers de catalogues de sismicité et mesure la fréquence avec laquelle il obtient, par hasard, certaines caractéristiques du catalogue historique. Et d'après ses calculs, la probabilité que les cinq séismes de magnitude supérieure à 9 enregistrés depuis 1900 se répartissent par hasard dans le temps tel qu'ils l'ont été est inférieure à 2 %. Plutôt improbable, donc.

 

Et plus qu'un lancé de dés très malchanceux, David Perkins voit dans ces regroupements de mégaséismes l'expression d'un phénomène planétaire non identifié jusqu'alors. Avec son collègue Charles Bufe, il propose l'existence, à l'échelle du globe, d'un cycle sismique comparable au cycle décrit à l'échelle d'une faille géologique. C'est-à-dire que la Terre suivrait une séquence temporelle comprenant une longue phase d'accumulation de contraintes tectoniques, et une phase de libération de l'énergie accumulée, sous forme de séismes particulièrement puissants. Les deux chercheurs voient donc dans l'évolution de l'énergie libérée par l'activité sismique un motif régulier appelé à se répéter, selon un cycle global d'environ 70 ans, dont quinze au cours desquels les mégaséismes se manifesteraient à la chaîne (voir courbe ci-dessous). D'après leurs calculs, la terre oscillerait donc entre un état relativement calme et un état de crise sismique. Et la série noire actuelle ne serait pas l'effet du hasard.

 

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Des cycles sismiques contestés


Dans l'article qui détaillait pour la première fois leur théorie, ils constataient justement un regain d'activité sismique, et suggéraient qu'une nouvelle salve de tremblements de terre géants pourrait bien débuter. Or, cet article a été soumis pour publication sept mois avant que ne se produise le terrible séisme de Sumatra de 2004 et son tsunami dévastateur, et quelques années avant les mégaséismes suivants, au Chili et au lapon... "Il s'est passé ce que nous suggérions qu'il se passerait si ces essaims de gros séismes n'étaient pas dus simplement au hasard", remarque aujourd'hui David Perkins, qui ne croit pas avoir eu simplement de la chance en pariant sur un regain de colère de la Terre.

 

Cette proposition d'un supercycle sismique est toutefois loin de convaincre tout le monde. "L'approche statistique de Bufe et Perkins est biaisée, juge Peter Shearer, géophysicien de l'université de Californie à San Diego. Ils identifient dans le catalogue sismique des caractéristiques qui leur apparaissent anormales, et ensuite ils font des tests pour savoir quelle est la probabilité d'obtenir ces caractéristiques. En d'autres termes, ils formulent leur hypothèse après avoir sélectionné les données." Or, remarque le chercheur, n'importe quelle distribution obtenue de façon aléatoire peut donner une séquence d'événements qui semble, à vue d'œil, anormale. Par exemple, si l'on jette cent fois une pièce en l'air, elle peut retomber les dix premières fois du même côté. Ce qui peut paraître anormal. Une fois définie cette "anomalie", si on calcule après coup la probabilité pour qu'elle se produise, on la trouvera faible. Mais il ne faut pas pour autant y voir autre chose que le hasard... "Il faut faire des tests statistiques plus généraux sur la distribution passée des séismes, sans identifier au préalable des caractéristiques spécifiques, insiste Peter Shearer. Et on arrive à la conclusion que la séquence de séismes depuis 1900 ne peut être distinguée du résultat d'un processus aléatoire."

 

Un avis que partage Andrew Michael. Ce sismologue de l'USGS a lui aussi appliqué une batterie de tests statistiques aux archives sismiques de la Terre. "Les données du catalogue historique ne permettent pas de rejeter l'hypothèse selon laquelle les mégaséismes surviennent au hasard, conclut-il. La récente succession de grands tremblements de terre peut donc très bien être attribuée à une fluctuation dans un processus aléatoire." En clair : il n'y a pas de raison de soupçonner que les mégaséismes se manifestent à des moments en particulier ou qu'ils soient liés les uns aux autres. Reste que la prédiction de Perkins d'une entrée dans une nouvelle phase d'épidémie de mégaséismes a été faite avant le déclenchement de la série noire actuelle. Donc pas a posteriori, comme le reprochent ses détracteurs...

 

Mais comme le reconnaît Peter Shearer, le problème pour trancher la question est le manque de données - seulement cinq séismes de magnitude 9 depuis 1900. "On ne peut pas, sur la seule base des analyses statistiques, affirmer ni exclure qu'il y a une connexion entre les mégaséismes. Il se pourrait bien que ceux-ci surviennent par cycle, mais il n'y a pas assez d'événements pour l'affirmer avec certitude." Ce que confirme Christophe Vigny (ENS Paris) : "On ne saura s'il existe une cyclicité des séismes de magnitude 9 que lorsqu'on aura 500 ans de mesures de l'activité sismique du globe. Et encore ! Il faut plutôt se poser la question sur les mécanismes physiques sous-jacents qui expliqueraient pourquoi, certaines années, on aurait plus de grands séismes. Et là, je n'en vois aucun pour lier des séismes de cette taille à 20 000 kilomètres de distance."

 

Que des tremblements de terre en déclenchent d'autres n'est pourtant en soi pas une idée farfelue. Les sismologues savent depuis longtemps que lorsqu'un séisme majeur se produit à un endroit, il sera suivi localement par de très nombreuses répliques, de plus faible magnitude pour la majorité d'entre elles, et ce parfois pendant des années. On considère ainsi qu'un séisme de magnitude 9 déclenchera dans la région dix séismes de magnitude 8, cent de magnitude 7, mille de magnitude 6, etc. Le passage de l'onde sismique d'un séisme d'envergure peut aussi faire basculer des failles beaucoup plus éloignées et qui étaient sur le point de rompre. L'équivalent géologique de la goutte d'eau qui fait déborder le vase... Des études ont ainsi démontré que des séismes qui se sont produits aux États-Unis en 201l étaient associés aux mégaséismes du Chili en 2010 et du Japon en 2011, ou que des secousses en Chine en 2004 étaient le fruit du tremblement de terre de Sumatra. "Le déclenchement de séismes à distance n'est plus un sujet controversé, constate Nicholas Van der Eist, de l'université de Californie à Santa Cruz. Cependant, au-delà de quelques centaines de kilomètres de distance, aucun séisme de magnitude supérieure à 5 n'a pu être relié au passage de l'onde d'un séisme majeur".

 

Peut-on lier des mégaséismes éloignés ?


Autrement dit, il semble bien que les gros séismes n'en enfantent, à grande distance, que des petits. Reste que ces petits séismes vont à leur tour déclencher localement des répliques qui, en de très rares occasions, peuvent être plus puissantes que la secousse qui leur a donné naissance. De quoi faire le lien entre les mégaséismes éloignés ? Cette possibilité de cascade de séismes vient d'être analysée de près par Nicholas Van der Eist. "Si l'on considère une séquence de répliques liées à un petit séisme déclenché à distance par un tremblement de terre majeur, il est très peu probable qu'elle contienne un événement plus important que le petit séisme initial, détaille le géophysicien. Mais si un grand nombre de ces séquences de répliques sont initiées à l'échelle du globe, la probabilité cumulée que quelques-unes finissent par produire un gros séisme peut devenir plus importante."


Nicholas Van der Eist a donc regardé si, lorsqu'un puissant séisme se produit quelque part dans le monde, on observait un accroissement de la fréquence des petits séismes dans les régions où un tremblement de terre majeur allait ultérieurement se manifester. Par exemple, si le séisme de Sumatra en 2004 avait déclenché à distance une séquence de faibles secousses au Chili ou au Japon dans les zones où sont nés les monstres de 2010 et 2011. "Nous n'avons trouvé aucun signe d'une cascade d'événements qui pourrait expliquer l'augmentation actuelle du nombre de grands séismes", reconnaît le sismologue.

 

David Perkins ne désarme pas et prépare un nouvel article pour répondre aux critiques : "Il doit y avoir un mécanisme qui n'a pas encore été pris en considération, un moyen par lequel les gros séismes communiquent." Mais la distance n'est pas le seul obstacle à surmonter pour ce mécanisme encore inconnu. "Si un tri mécanisme de déclenchement existait, il faudrait encore expliquer pourquoi lors des périodes où le nombre de grands séismes est au-dessus de la moyenne historique, il n'y a pas plus de séismes de moindre magnitude, réplique Peter Shearer. Je ne vois pas comment ce mécanisme favoriserait la survenue des uns et pas celle des autres." Pour l'heure, en l'absence de signes statistiques décisifs et de mécanismes sismiques précis, la prudence convient plutôt de tenir la multiplication de puissants séismes pour de la pure coïncidence. "Mais la question est importante", remarque Peter Shearer.

 

 Dans l'attente du prochain…


Au-delà du débat scientifique, l'enjeu est vital : il s'agit de savoir si le risque pour les populations est aujourd'hui plus élevé qu'auparavant. "D'après nos calculs, si les grands séismes sont bien regroupés dans le temps, la probabilité d'avoir un séisme de magnitude supérieure à 8,6 dans les cinq années à venir est de 95 %, persiste David Perkins. Il faut s'y préparer." En particulier sur la côte ouest des États-Unis.

 

Là encore, peu de spécialistes sont d'accord avec ce pronostic alarmant. "La récente recrudescence de séismes majeurs n'a aucun pouvoir prédictif pour l'avenir", s'insurge ainsi Andrew Michael. Reste que les mégaséismes ne sont pas des événements parfaitement isolés les uns des autres. "Si dans les endroits où il n'y a pas eu d'activité sismique récente, comme la Californie et l'Alaska, le risque est à mon sens le même aujourd'hui qu'avant, la menace est certainement plus importante dans les régions comme Sumatra, le Chili, et le Japon qui ont récemment connu des mégaséismes", relève Peter Shearer.

 

Le séisme du 11 avril 2012 en est l'illustration parfaite, puisqu'il est lié à celui de Sumatra en 2004. Face à la complexité conjuguée des lois du hasard et de la sismologie, la science reste incapable de trancher. Et nous n'avons pas d'autre choix que d'attendre d'autres éventuels cataclysmes pour savoir si notre planète est en pleine épidémie. Condamnés à subir les caprices de la Terre, nous ne pouvons finalement être sûrs que d'une chose : hasard ou pas, la Terre nous fait vivre ces dernières années une terrible série noire.


 Peut-on prévoir les séismes ?


 Observer le ciel pour anticiper les tremblements de terre. Ce qui pourrait ressembler à une ancestrale pratique divinatoire est en réalité la très sérieuse proposition formulée par Kosuke Heki, géophysicien de l'université d'Hokkaido, au Japon. Celui-ci affirme avoir détecté un signe avant-coureur du mégaséisme qui a frappé l'archipel nippon en mars 2011. Une perturbation dans l'ionosphère, à 300 kilomètres d'altitude, repérée grâce au réseau de 1200 stations GPS qui quadrillent le pays (figure ci-dessous). "On savait déjà que les séismes génèrent des ondes acoustiques qui perturbent l'ionosphère après la secousse, explique Kosuke Heki. Ce que j'ai mis en évidence, c'est l'augmentation du contenu en électrons dans l'ionosphère qui débute 40 minutes avant le séisme !" Autrement dit : un potentiel signe précurseur des mégaséismes susceptible, s'il est confirmé, de sauver des centaines de milliers de vies... Point remarquable, le phénomène s'amplifie au fur et à mesure qu'on se rapproche de l'heure du tremblement de terre, et est plus marqué au-dessu de l'épicentre.

 

Fort de cette découverte, Kosuke Heki s'est penché sur deux autres séismes majeurs, celui du Chili en 2010 et celui de Sumatra en 2004. Dans les deux cas, il observe une anomalie similaire avant la secousse. "L'affirmation selon laquelle les séismes sont intrinsèquement imprévisibles n'est peut-être pas exacte, du moins pour les séismes de magnitude 9", lance le chercheur.

 

Mais cette annonce reçoit un accueil prudent. "L'ionosphère est un milieu excessivement variable, prévient ainsi Michel Parrot (CNRS), responsable du programme Demeter, satellite dédié à la recherche de signaux précurseurs. La météo ou les humeurs du Soleil perturbent régulièrement l'ionosphère. Il est donc difficile d'affirmer que l'anomalie observée est strictement liée à l'imminence d'un séisme." Une réserve partagée par Christophe Vigny (ENS, Paris) : "Je pense qu'il ne s'agit que d'une coïncidence fortuite. Mais il faudrait faire un vrai travail statistique : regarder combien de fois on détecte cette perturbation ionosphérique sans qu'il n'y ait de séisme par la suite. Sans cela, on ne pourra pas utiliser comme base d'un système d'alerte."


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Sources :

  • Boris Bellanger, Mégaséismes, l'épidémie ? Sciences & Vie n°1137 juin 2012, pp. 70-80.
  • Charles G. Bufe and David M. Perkins. The 2011 Tohoku earthquake: resumption of temporal clustering of Earth’s megaquakes. Seismological Society of America meeting, Memphis, April 14, 2011.
  • Charles G. Bufe and David M. Perkins. Evidence for a Global Seismic-Moment Release Sequence, Bull. Seismol. Soc. Am., June 2005. DOI: 10.1785/0120040110
  • Andrew J. Michael. The recent rate of great earthquakes: global clustering or random variability ? Seismological Society of America meeting, Memphis, April 14, 2011.
  • Earle, P. S., S. Rost, P. M. Shearer, and C. Thomas, Scattered P'P' waves observed at short distances, Bull. Seismol. Soc. Am., 101, 2843-2854, doi: 10.1785/0120110157, 2011.
  • Shearer, P. M., and P. B. Stark, Global risk of big earthquakes has not recently increased, Proc. Nat. Acad. Sci., 109, 717-721, www.pnas.org/cgi/doi/10.1073/pnas.1118525109, 2012.
  • Sumiejski, P. E., and P. M. Shearer, Temporal stability of coda Q^-1 in southern California, Bull. Seismol. Soc. Am., 102, 873-877, doi: 10.1785/0120110181, 2012.
  • Chen, X., P. M. Shearer, and R. E. Abercrombie, Spatial migration of earthquakes within seismic clusters in Southern California : Evidence for fluid diffusion, J. Geophys. Res., 117, B04301, doi:10.1029/2011JB008973, 2012.

 

Séismes en Italie (Complément)

En cette fin de mai 2012, l'Italie est durement touchée par une série de séismes, qui, s'ils n'atteignent pas la magnitude des séismes géants décrits plus haut, n'en sont pas moins destructeurs.

 

19-20 mai 2012 : un fort séisme frappe le nord-est de l'Italie

 

Le nord-est de l'Italie, industriel et très peuplé, a été réveillé dans la nuit de samedi à dimanche 20 mai 2012 par un fort séisme qui a fait au moins six morts, des dizaines de blessés, et détruit des hangars d'usines, des habitations et clochers autour de la ville de Ferrare, au patrimoine historique classé. Le séisme, de magnitude 5,9 et survenu à 10 km de profondeur, avait son épicentre à Finale Emilia, à 36 km au nord de Bologne, dans la zone de Modène.

Un nouveau séisme de magnitude 5,1 a frappé dimanche après-midi la zone entourant Ferrare, dans le nord-est de l'Italie, a annoncé l'institut de géophysique.

 

Parmi les victimes figurent quatre ouvriers qui travaillaient de nuit dans des usines. Deux femmes sont décédées après avoir été prises de malaise à la suite du déclenchement du séisme.


Sous l'impact, plusieurs maisons et clochers d'églises de la région se sont écroulés, et des hôpitaux ont été évacués par mesure de sécurité. À Bologne et dans d'autres villes, des milliers d'habitants réveillés au milieu de la nuit sont descendus paniqués dans les rues.

 

Les premières images diffusées par les télévisions montraient des maisons à demi écroulées, des amoncellements de gravats sur les routes, des corniches d'églises ou de tours détachées.. Dimanche après-midi, environ 3 000 personnes ont dû être évacuées de leurs habitations en Émilie-Romagne, entre Modène et Ferrare.

 

Sous l'impact de ce séisme, qui est équivalent dans son intensité à celui de L'Aquila en 2009, plusieurs joyaux architecturaux de villages proches de Ferrare ont été endommagés. Des dégâts importants sont ainsi survenus dans la petite ville de San Felice, où une église s'est écroulée. De nombreux monuments historiques, dont l'hôtel de ville, y ont été endommagés, leurs murs lézardés. Dans la région de Bologne, la partie supérieure d'une tour du château de Galeazza s'est détachée. "Selon les premières consultations, les dégâts au patrimoine culturel sont importants", indique le ministère des biens et activités culturels italiens. Plusieurs hôpitaux ont été évacués par mesure de sécurité, dans la crainte de nouvelles secousses.

 

Le 29 mai 2012 : nouveau séisme qui a frappé le nord de l'Italie, à San Felice sul Pannaro

 

Une nouvelle secousse a été ressentie après le puissant séisme de magnitude 5,8 qui a touché mardi 29 mai 2012, vers 9 heures, le nord de l'Italie, non loin de Modène. Au moins seize personnes ont perdu la vie dans cette première secousse, selon la chaîne de télévision italienne Sky Tg24. La deuxième secousse est également d'une magnitude supérieure à 5.

 

Parmi elles, trois personnes sont mortes à San Felice del Panaro dans l'effondrement d'une usine, deux dans la localité proche de Mirandola, une à Concordia et une autre à Finale, a indiqué le commandant des carabiniers de Modène, Salvatore Iannizzotto.


L'épicentre se trouvait en Émilie-Romagne, une région déjà frappée il y a neuf jours par le précédent tremblement de terre. Les médias italiens ont rapporté que la nouvelle secousse avait provoqué l'effondrement de bâtiments déjà endommagés lors de ce précédent séisme. Depuis, plusieurs milliers d'habitants dormaient sous la tente par crainte de répliques.

 

La secousse a été ressentie dans tout le centre-nord de l'Italie. Depuis une dizaine de jours, la péninsule a enregistré de nombreux tremblements de terre, dans le Nord comme dans le Sud, touché lundi 28 mai 2012 par un séisme de magnitude 4,3.

 

Le président de l'Institut national de géophysique et de vulcanologie (INGV), Stefano Gresta, s'est montré préoccupé pour la suite : "La séquence [des secousses] sera longue et on ne peut exclure que d'autres séismes forts puissent se produire".

20/05/2012

La Vipère Péliade : Vipera berus

Péliade-mélanique_03-logo.jpgLa Péliade : Vipera berus

 

par Michel Cottet

herpétologue

 

La Péliade est une vipère au corps épais. Contrairement à celle de l'Aspic, la tête est moins distincte du cou et avec un museau arrondi. L’iris des yeux est orangé-rougeâtre à noirâtre et la pupille se présente en fente verticale. Les écailles dorsales sont carénées et la queue est très courte. La coloration dorsale peut être gris blanchâtre, argenté ou clair, ou encore jaunâtre, rougeâtre, cuivrée ou noire. La tête s'orne souvent d'un motif en "X" ou en "V" et d'une bande qui s'étend de chaque côté du bord externe de l'œil au cou. Toute la face dorsale porte une large bande en zigzag d'un brun très sombre ou d'un noir profond chez le mâle où elle ressort très nettement (brun plus clair ou chocolat et moins contrastée chez la femelle). De grandes taches sombres s'alignent sur les flancs. La face ventrale plus ou moins nettement finement tachetée est gris-brunâtre et l’extrémité du dessous de la queue est blanc jaunâtre à orange.

 

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La queue est très courte

 

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La couleur de la livrée est variable

Cliché F. Wendler

 

Dans les tourbières jurassiennes, la Péliade présente assez fréquemment une livrée entièrement noire en harmonie avec la couleur de la tourbe. Cette livrée mélanique apparaît avec l'âge, les jeunes à la naissance présentent la coloration et les ornementations décrites ci-dessus.

 

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Péliade de tourbière à la livrée mélanique

cliché Michel Cottet

 

Longueur totale 55-60 cm, rarement jusqu'à 70, exceptionnellement jusqu'à 80 cm.
 
La Péliade a une aire de répartition importante, d’où son nom en anglais de « common adder = vipère commune », mais, en réalité les populations sont très dispersées et elle est en régression partout. Elle n’est présente que ponctuellement dans les biotopes qui lui restent favorables. On la trouve dans toute l'Europe du Nord et du Centre (sauf l'Irlande), ainsi qu'en Asie centrale jusqu'au fleuve Amour et à l'île de Sakhaline. En France, on la rencontre dans le Nord, en Bretagne et Normandie, dans une petite partie du Haut Doubs et du Haut Jura et dans le massif Central.

 

La Péliade aime les biotopes soumis à d'importants écarts de température pourvu que le taux d'humidité du sol et de l'air soit élevé. Elle fréquente les bords de chemin ensoleillés, broussailleux et herbeux, les lisières, bois clairs ou défrichés parsemés de souches et envahis de ronces et d'orties, les marécages tourbeux, les bosquets humides, les versants d'éboulis couverts de végétation. La Péliade vit de la plaine jusqu'à 3 000 m d'altitude en montagne.

 

La Péliade sort généralement de sa cachette très tôt le matin, alors qu'il fait encore froid et sombre. Elle rampe jusqu'à un endroit déterminé que le soleil atteint bientôt et se roule en galette ou en larges méandres. Dans les tourbières, elle affectionne le sommet aplati des touradons [1]. Dès que le soleil apparaît, la Péliade étale son corps le plus possible afin de capter le maximum de chaleur. Elle reste ainsi exposée jusqu'à ce que sa température interne atteigne environ 33°C, ce qui lui permet de disposer de toutes ses facultés. Elle se retire alors dans une cachette ombragée ou se met en quête de nourriture. En fin d'après-midi, elle cherche à nouveau un endroit exposé au soleil ou ayant emmagasiné de la chaleur, afin de se réchauffer à nouveau.

 

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Péliade non mélanique (Bonnevaux, Doubs 09/06/2012)

Cliché Michel Cottet

 

La Péliade chasse le jour et au crépuscule. Elle est particulièrement active quand il fait chaud, lourd et orageux, ou après de longues périodes de mauvais temps. Par grand vent, elle demeure dans son abri.

 

Les péliades s'accouplent en avril-mai. L'accouplement peut avoir lieu à toute heure du jour, mais surtout le soir et la nuit. Une femelle est souvent courtisée par plusieurs mâles qui se livrent des combats symboliques, les "danses de vipères" : quand ils se rencontrent, ils rampent par à-coups dans la même direction se dressent côte à côte, s'enroulant souvent les uns sur les autres, Puis ils essaient de se pousser par l'avant du corps qui est dressé, glissent et retombent. Ils peuvent également se donner des coups de tête. Cette "danse" dure jusqu'à ce qu'un des mâles se sente inférieur et prenne la fuite.

 

Le mâle doit souvent faire longuement la cour à sa dame avant qu'elle accepte ses avances. Il rampe alors sur son dos, cherchant à la stimuler en lui maintenant la queue plaquée au sol et en sortant vivement la langue dans sa direction. Tout comme la parade nuptiale, l'accouplement peut durer des heures. Il ne peut pas être interrompu brusquement et deux vipères accouplées sont très embarrassées pour prendre la fuite en cas de danger. La durée de la gestation varie fortement selon la région et les conditions climatiques, elle peut excéder 5 mois. Les 10 à 14 vipéreaux, rarement jusqu'à 20, mesurent à la naissance entre 14 et 23 cm. Ils naissent enveloppés dans une membrane transparente dont ils se délivrent immédiatement ou presque. Après la parturition, la femelle est amaigrie et toute fripée.

 

La Péliade se retire en octobre sous une souche, dans un terrier ou sous des rochers à l’abri du gel pour hiverner. Les endroits confortables abritent souvent plusieurs vipères qui hivernent ensemble, ou en compagnie de lézards vivipares, d'orvets ou d'amphibiens. L'hibernation se termine en mars-avril, souvent avant que toute la neige ait totalement fondu, ce qui est le cas dans les tourbières du Haut-Doubs (altitude de 800 à 1200 m). Elle quitte alors son lieu d'hibernation pour se chauffer au soleil à l'abri du vent et capter le maximum de chaleur. Son mélanisme lui permet d'atteindre une température interne très supérieure à la température extérieure. Elle reste ainsi exposée et devient active quand sa température interne atteint environ 33°C.


 
La Péliade se nourrit essentiellement de rongeurs, mais selon les biotopes, elle peut aussi se nourrir de grenouilles rousses, ou encore de lézards vivipares ou de musaraignes. En général, elle chasse à l'affût, épiant les proies qui passent, mais elle arpente aussi les broussailles ou les terriers. Quand elle a repéré une souris, elle essaie de s'en approcher lentement. Après avoir mordu sa proie, elle la relâche généralement et attend que le venin agisse. Souvent la souris parcourt encore quelques mètres avant de mourir. La vipère reste alors un certain temps sur place, ouvre grand sa bouche pour replacer ses mâchoires qui sont très mobiles l'une par rapport à l'autre, agite vivement la langue, et se met à rechercher sa proie. Elle s'oriente pour cela exclusivement grâce à son odorat qui est très fin et par un organe particulier qui lui transmet des information olfactives captées par la langue. Une fois qu'elle a trouvé la trace, elle la suit rapidement. Elle avale généralement la proie la tête la première et la déglutition peut durer 10 à 15 minutes ou plus. Une vipère adulte peut avaler à la suite deux à trois souris. Pour faciliter la digestion, elle s'installe alors dans un endroit chaud.

 

L'un des grands ennemis de la Péliade est le Hérisson. Il n'est nullement immunisé contre le venin, mais ses aiguilles le protègent des morsures. La Péliade a bien d'autres prédateurs : putois, sangliers, ainsi que de nombreuses espèces d'oiseaux, telles que les corvidés, les rapaces nocturnes (chouettes...) et diurnes (épervier, buse, circaète...), les hérons et cigognes. Mais son pire ennemi est toujours l'Homme qui lui livre encore une chasse sans merci dans de nombreuses régions et qui détruit des biotopes en asséchant des marais ou en étendant ses cultures.

 

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Les morsures de la Péliade sont rares et exceptionnellement mortelles, mais elles peuvent avoir des conséquences graves, provoquant des douleurs intenses et occasionnant parfois des séquelles qui mettent longtemps à se résorber totalement. Les morsures de vipère sont souvent liées à un comportement imprudent. Dans les régions où vivent les péliades, il faut éviter de marcher pieds nus et faire attention où l'on pose les pieds et les mains quand on ramasse des baies ou des champignons. En général, les péliades s'enfuient bien avant que l'Homme ne les remarque. Mais si on les surprend, elles s'enroulent sur elles-mêmes et mordent immédiatement.

 

Sources :

— Diesener G. & Reichholf J. (1986). — Les batraciens et les reptiles. 287 p. Éd. Solar.

 
— Pertti Viitanen (1967). — Hibernation and seasonal movements of the viper, Vipera berus berus (L.), in southern Finland, Annales Zoologici Fennici Vol. 4, N° 4 (1967), pp. 472-546.


[1] Mottes arrondies surélevées (40 à plus de 60 cm de haut) formées dans les tourbières ou zones humides paratourbeuses par la pousse annuelle de certaines graminées comme la Molinie.

La Vipère Aspic Vipera aspis

Vipère aspic—05logo.jpgLa Vipère Aspic Vipera aspis

 

par Michel Cottet,  herpétologue

 

(dernière mise à jour : 18 août 2016)

 

L'Aspic est un serpent de taille moyenne à tête triangulaire nettement distincte du cou.

 

L’iris des yeux est généralement de couleur jaune d’or à pupille verticale noire. Le museau est légèrement retroussé, les écailles carénées et la queue courte. La coloration est très variable, allant du gris clair, brun gris, jaunâtre, brun au rouge brique. La face dorsale est généralement ornée d'un motif composé de taches foncées alignées en deux rangs décalés. Mais on observe aussi des motifs en zigzag ou en ligne ondulée, entière ou interrompue ou/et fractionnée. Les flancs portent aussi des taches foncées, plus ou moins grandes et plus ou moins mates. La coloration ventrale, uniforme, va du jaunâtre gris au mauve jusqu’à noirâtre, parfois avec des minuscules ponctuations plus ou moins distinctes, Les mâles arborent des couleurs plus vives avec des motifs noirs plus larges et nettement plus contrastés ; ils sont légèrement plus grands que les femelles. Longueur totale adulte 65-85 cm.

 

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Cliché Michel Cottet

 

Chez cette espèce,  comme chez la Péliade, les individus mélaniques sont "relativement" fréquents en montagne ; nous avions déjà fait des observations dès 1976 en Autriche dans le massif des Totesgebirge, sur des sentiers en montagne, aux environs de 2000 m d'altitude lors d'expéditions spéléo. Des observations répétées de temps en temps, toujours en montagne. Je n'en ai vu qu'une seule fois dans le Haut Jura, au hameau de La Rageat à Lavans les St-Claude, en direction du Lac d'Antre.

Ci-dessous, un morphe mélanique, l'un des deux spécimens trouvés écrasés dans un parking  au col de Pierre Carrée, (les Carroz d'Araches, Hte-Savoie) le 15 août 2016.

 

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Vipera aspis mélanique écrasée

© Michel Cottet

 

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Cliché Michel Cottet

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L'Aspic est une espèce plutôt méridionale, répandue au nord-est de l'Espagne, presque sur toute la France à l'exception du nord-ouest, en Italie, Sicile, Elbe, Montecristo, Suisse et sud de la Forêt-Noire.

 

L'Aspic aime surtout les biotopes secs et ensoleillés. On le rencontre souvent dans les bosquets envahis par les broussailles, les lisières et sur les pentes rocailleuses.

 

L'Aspic quitte son abri très tôt le matin, alors qu'il fait encore frais. Il cherche une place au soleil et s'y installe, roulé en galette ou étalé en méandres souples. Avec une température externe de + 4 °C et une température corporelle d'environ 15 °C, l'Aspic arrive à atteindre en une heure sa température optimale, soit 29 °C.  

 

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 Clichés Michel Cottet

 

L'Aspic chasse surtout des petits rongeurs, particulièrement des campagnols, et plus rarement des lézards et des oisillons.

 

L'Aspic découvre ses proies en restant posté immobile, à l’affût, ou encore en arpentant son territoire, inspectant également terriers et fentes rocheuses, Il mord une première fois, puis attend un certain temps que le venin agisse en paralysant la proie avant de se remettre à sa recherche. Il se fie pour cela à son odorat très fin. La proie est généralement avalée la tête la première.

 

Au début du printemps, à la sortie de l'hibernation et alors que l'air ne se réchauffe que lentement, les vipères passent souvent des heures étendues au soleil. Quand l'emplacement choisi devient trop chaud (l'Aspic supporte jusqu'à 37°C environ), la vipère se retire dans un lieu semi-ombragé ou dans sa cachette préférée, ou se met à parcourir son territoire. Quand la température ambiante est basse et lorsque la vipère traverse une grande zone ombragée, sa température interne baisse fortement. Elle cherche alors à s'exposer au soleil pour retrouver sa température optimale. L'été, la vipère doit souvent sortir de son trou avant le lever du soleil pour étancher sa soif. La température de son corps étant trop basse, elle rampe lentement et maladroitement dans la rosée.

 

L’Aspic est territorial, sédentaire et se déplace peu, migrant seulement de façon saisonnière au printemps en sortant d’hibernation, pour les accouplements, puis gagnant son territoire d’estive et enfin retournant à son lieu d’hivernation aux premiers froids (petite cavité naturelle, fissure abritée du gel, petite grotte, terrier abandonné…). Il est plus sensible au dérangement que la plupart des couleuvres ; il est de plus en plus rare et dans certains secteurs, menacé de disparition.

 

Les services rendus par sa consommation importante de campagnols ne sont pas assez connus des acteurs du monde rural et en particulier des agriculteurs qui souffrent des dégâts des rongeurs sur les prairies fournissant le fourrage indispensable aux élevages de bétail herbivore.

 

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Cliché Michel Cottet

 

Les mâles sortent de l'hibernation dès le début du printemps, suivis quelque 10-15 jours plus tard par les femelles. En période de reproduction, les mâles déploient une grande activité avec des préliminaires et des combats rituels avant les accouplements ; ils circulent alors beaucoup, ne prenant pas ou peu de nourriture.

 

Quelque temps avant la mue - qui survient régulièrement et s'annonce par le ternissement des couleurs et l'opacification de l'œil -, la vipère s'abstient également de s'alimenter.

 

L'accouplement a lieu parfois dès fin février et surtout en mars-avril en Franche-Comté. Le cycle reproducteur de la femelle n'est pas encore connu avec précision, mais dans la majorité des régions les vipères s'accouplent chaque année. L’Aspic est ovovivipare. Les 4 à 15 vipéraux, longs de 18 cm environ, naissent en août-septembre. Les vipères Aspics connaissent souvent en septembre ou début octobre une nouvelle période d'accouplement, avec des rituels plus courts.

 

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Cliché Michel Cottet

 

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Femelles gravides © Michel Cottet 25/08/2013 Sancey le Grand (Doubs)

 

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Femelles gravides © Michel Cottet 25/08/2013 Sancey le Grand (Doubs)

 

Source :

Diesener G. & Reichholf J. (1986) - Les batraciens et les reptiles. Ed. Solar.

Médecine et génomique à l'Institut Pasteur

médecine,génomiqueMédecine et génomique à l'Institut Pasteur

 

Nous ne sommes pas tous égaux devant les maladies

 

"Tous les hommes sont égaux, mais certains sont plus égaux que d'autres" écrivait Georges Orwell. Ceci est un peu vrai face à la maladie. Si certaines pathologies sont provoquées par des mutations dans un gène unique, la plupart des maladies courantes ont à la fois une composante environnementale (nutrition, activité physique, etc.) et génétique – en témoignent les questions de nos médecins sur nos antécédents familiaux. Et qu'il s'agisse de diabète, d'asthme, de maladie d'Alzheimer, de cancers ou de maladies infectieuses, de multiples variations dans de multiples gènes interviennent.

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Des facteurs génétiques de prédisposition ou de protection

 

Certaines nous rendent plus vulnérables face à une maladie donnée – elles touchent des gènes "de prédisposition" – d'autres au contraire nous en protègent. Une mutation dans les gènes BRCA1 ou BRCA2 confère par exemple aux femmes qui la portent (2 sur 1 000) un risque de 40 à 80 % selon l'âge de développer un cancer du sein. Les rares individus porteurs d'une mutation du gène CCR5 sont eux résistants à l'infection par le virus du sida. D'autres gènes conditionnent la réponse aux traitements. Ainsi, 11 % des patients réagissent mal à une molécule, la mercaptopurine, utilisée pour traiter certaines leucémies. Chez eux, une activité réduite de l'enzyme TMPT freine l'élimination du médicament, induisant des effets très toxiques. Un test génétique est donc désormais recommandé aux États-Unis afin d'éviter ce traitement ou de rappliquer à très faibles doses chez ces patients.

 

Pour appréhender l'ampleur des recherches sur ces gènes de sensibilité aux maladies ou aux traitements et les perspectives médicales qui en découlent, il faut revenir sur la fantastique épopée scientifique qui a marqué le début du XXIe siècle.

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Naissance de la génomique

 

Tout a commencé par l'aboutissement d'un projet titanesque, qui dura 13 ans : le Projet Génome Humain. Achevé en 2003, il révélait l'intégralité du texte d'un ADN humain – sa  "séquence" – soit 3 milliards de lettres[1].

 

Il ouvrait l'ère de la génomique, rendant possible l'exploration des quelque 20 500 gènes contenus dans le génome humain, facilitée d'année en année par l'automatisation des techniques de séquençage et les progrès de la bio-informatique. Il a montré qu'il y a très peu de différences génétiques entre les individus ou les populations et pas de différences majeures entre groupes ethniques, abolissant définitivement le concept de race. Les génomes de deux individus pris au hasard dans la population mondiale ont en moyenne à peine 0,1 % de différences. Mais sur les trois milliards de lettres du texte de l'ADN, ce 0,1 % correspond tout de même à 3 millions de variations... dont bon nombre expliquent nos différences de vulnérabilité face aux maladies.

 

Nos différences génétiques cartographiées

 

Comment les étudier ? Dans la foulée du projet Génome Humain, un autre grand programme international – Hap-Map –, a dressé un catalogue des différences et des similarités génétiques entre individus. À partir des génomes de 270 individus d'origines africaine, asiatique et européenne, les variations génétiques les plus fréquentes (des changements ponctuels d'une lettre dans le texte de l'ADN, présents chez plus de 5 % des individus) ont été répertoriées. Trois millions de telles variations ont été cartographiées. Ces "balises" dans l'ADN ont permis de vastes études d'association sur des génomes entiers, portant chacune sur des centaines voire des milliers d'individus : les GWAS (genome-wide association studies). Schématiquement, un panel d'individus sains est comparé à un panel d'individus touchés par une maladie donnée, sur la base du catalogue Hap-Map : si certaines variations génomiques sont beaucoup plus fréquentes chez les malades, elles sont associées à la pathologie. En janvier 2012, plus de 1000 "GWAS" avaient été publiées, mettant en évidence plusieurs centaines de nouveaux facteurs génétiques de risque pour des maladies courantes : diabète, maladies cardio-vasculaires, maladies neuro-dégénératives (Alzheimer, Parkinson), cancers, maladies mentales comme la schizophrénie ou l'autisme (voir encadré), maladies infectieuses (hépatites B, C, sida, tuberculose…).

 

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Le projet "1000 génomes"

 

Ainsi, plus d'axes de recherche totalement inattendus et de pistes thérapeutiques nouvelles ont été identifiés depuis l'an 2000 qu'au cours du XXe siècle, et révolution de la génomique ne cesse d'apporter des outils toujours plus précis pour les recherches sur notre vulnérabilité aux maladies. Le projet "1000 génomes" lancé en 2008 vise désormais à fournir un grand nombre de séquences complètes de génomes humains à partir de toutes les populations du globe. Mais aussi à répertorier dans ces génomes des millions d'autres variations, dites "rares" (présentes chez moins de 0,5 % de la population), et divers "accidents" dans l'ADN qui n'ont pas à ce jour été cartographiés, comme de petites portions manquantes (délétions) ou surnuméraires (insertions). "Les chercheurs qui ont trouvé des régions du génome assoces à une maladie pourront regarder ces données et avoir un panorama presque complet des variations génétiques dans ces régions pouvant contribuer directement à la maladie", souligne un des auteurs du projet. À ce jour, 2 500 échantillons d'ADN provenant de 27 populations à travers le monde doivent être analysés.

 

Vers une médecine prédictive et personnalisée ?

 

Côté applications, la révolution médicale annoncée au début des années 2000, qui permettrait de prédire à chacun quelles maladies il risque de développer et de proposer des traitements à la carte en fonction du profil génétique, n'en est qu'à ses prémices. Mais pour beaucoup, il ne s'agit plus de savoir si elle surviendra, mais quand. Un des freins tient au fait que l'on s'attendait à découvrir quelques gènes majeurs associés aux maladies, et qu'on en a trouvé des dizaines, voire des centaines : en août dernier, une équipe internationale annonçait avoir découvert 29 nouveaux variants génétiques associés à la sclérose en plaques, s'ajoutant à 23 variants déjà connus... soit une cinquantaine identifiés pour cette seule maladie ! Il reste par ailleurs difficile d'évaluer parmi les gènes de "prédisposition" à une maladie lesquels sont les plus "prédictifs" d'un risque. Aussi, les sociétés qui proposent aujourd'hui sur Internet des tests génétiques révélant nos risques de maladies à partir d'un échantillon de salive sont-elles montrées du doigt pour leur manque de fiabilité... Au fil des avancées, une médecine prédictive plus fiable verra cependant le jour avec à la clé des mesures de prévention mieux ciblées. L'avancée des connaissances en pharmacogénomique, l'étude des facteurs génétiques individuels en jeu dans la réponse aux traitements, en plein développement, conduira parallèlement à l'essor de la médecine personnalisée : déjà, plusieurs traitements existent accompagnés de tests génétiques "compagnons", qui conditionnent leur utilisation chez un patient selon qu'il est "bon répondeur" ou bien à risque d'effets indésirables.

 

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1 000 dollars pour séquencer un génome

 

Un élément de taille est venu récemment conforter cette tendance à envisager une médecine du futur tenant compte du profil génétique du patient : la chute drastique des coûts du séquençage. Si en 2001 des centaines de millions de dollars étaient nécessaires pour obtenir la séquence génomique complète d'un individu, ce prix tombait à 50 000 dollars en 2009. En février 2011, une société américaine annonçait dans la revue scientifique Nature réduire ce coût à 1000 dollars. Le séquençage d'un génome serait bientôt à un prix si abordable qu'il pourrait être généralisé à tout un chacun. À quand notre séquence génomique dans notre carte Vitale ? Les questions éthiques et sociétales soulevées par cette perspective – la protection des données génétiques vis-à-vis des assurances ou des employeurs par exemple – deviennent urgentes à résoudre...

 

En attendant, chaque variation génétique associée à une maladie est une piste nouvelle pour les chercheurs. Il faut alors comprendre le mécanisme biologique dans lequel le gène impliqué intervient, trouver le moyen d'agir en conséquence pour traiter la maladie... La décennie précédente a fourni une avalanche de données génétiques associées aux maladies : seul le sommet de cet iceberg d'informations a été exploré. Son exploitation fournira sans doute bien des solutions inédites face aux maladies qui nous menacent.

 

Génomique et paludisme : vers de nouvelles pistes de recherche

 

Près d'un million de morts et 500 millions de cas par an, des traitements de moins en moins efficaces : le paludisme, un des premiers fléaux sanitaires de la planète, est une véritable urgence pour la recherche et l'étude des facteurs de sensibilité à cette infection apporte l'espoir de nouvelles voies d'investigation.

 

À l'Institut Pasteur, l'unité de Génétique fonctionnelle des maladies infectieuses, dirigée par Anavaj Sakuntabhai, avait déjà contribué à la découverte d'une mutation génétique conférant une résistance au paludisme chez 18 à 25 % des individus en Asie du Sud-Est, après une étude sur 3 500 personnes en Thaïlande. "Cette mutation est située dans un gène impliqué dans le stress oxydatif : ce phénomène intervient dans le vieillissement et la destruction des globules rouges, lieux de multiplication des parasites", explique Jean-François Bureau, un des chercheurs de l'unité.

 

Aujourd'hui, l'équipe pasteurienne lance une vaste étude de recherche de gènes associés à l'infection (GWAS[2]). Sa source : les échantillons d'ADN de plus d'un millier d'habitants des villages de Dieimo et de Ndiop au Sénégal – suivis depuis 1990 par l'Institut Pasteur de Dakar et l'Institut de Recherche pour le Développement (IRD) –, et de 600 personnes au Pérou. "Nous allons cibler nos recherches en définissant des sous-groupes dans ces populations exposées au paludisme : en fonction du nombre d'accès palustres, de leur sévérité, de l'âge – tes enfants étant les plus touchés , etc." précise Richard Paul, autre chercheur de l'équipe. "Grâce au suivi de ces habitants depuis 20 ans, nous disposons de quantité de données, parfois depuis la naissance. À chaque fois que nous découvrirons une mutation dans un gène, nous saurons ainsi à quel type de cas clinique elle est associée." Les premiers résultats devraient être disponibles dans un an.

 

Autisme : la part des gènes

 

Dès les années 70, des études chez les jumeaux mettaient en évidence une composante génétique dans l'autisme, trouble envahissant du développement qui touche un enfant sur 100. En 2003, les premiers gènes associés à des cas d'autisme et de syndrome d'Asperger (autisme avec langage et sans retard mental) étaient découverts à l'Institut Pasteur dans l'unité de Génétique humaine et Fonctions cognitives dirigée par Thomas Bourgeron. Aujourd'hui, plus de cent gènes sont associés à la maladie. Quelle part jouent-ils ?

 

"C'est très complexe", explique Thomas Bourgeron. "D'abord, il n'y a pas "un" autisme, mais un spectre de troubles autistiques, donc quantité de patients différents et autant de cas particuliers. Ensuite, l'impact de chaque gène diffère. Par exemple, la présence de mutations dans le gène SHANK3 que nous avons découvert signe quasiment toujours un autisme.

 

Ces cas-là sont "très génétiques". Chez d'autres patients, les mutations identifiées sur d'autres gènes n'expliquent pas à elles seules la maladie, qui relève probablement d'autres facteurs génétiques non identifiés et peut-être aussi de facteurs épigénétiques et environnementaux. Quoiqu'il en soit, ces gènes de vulnérabilité sont autant de pistes de recherche pour mieux comprendre les autismes." Dans le laboratoire de l'Institut Pasteur, généticiens côtoient neurobiologistes et psychiatres. Il ne s'agit pas seulement d'isoler des gènes associés à l'autisme mais de comprendre à quoi ils servent. "Pour définir la fonction de gènes récemment Impliqués, nous cultivons actuellement des neurones avec des cellules exprimant ces gènes mutés" explique Thomas Bourgeron. "Nos résultats préliminaires montrent des différences dans la taille des neurites, ces prolongements neuronaux pouvant donner de nouvelles connexions".

 

D'autres gènes impliqués interviennent dans le fonctionnement des points de communication entre les neurones, les synapses. Des images en 3D de cerveaux d'enfants autistes, reconstituées à partir d'IRM, sont aussi analysées en vue de relier d'éventuelles modifications aux mutations génétiques trouvées chez ces patients. C'est donc une cascade d'études qui découle des découvertes de gènes de vulnérabilité, avec à la clé l'espoir d'améliorer la prise en charge des enfants touchés.

 

Source : La lettre de l'Institut Pasteur, mai 2012.



[1] Le "texte génétique est un enchaînement de quatre "lettres – A, T, C, G – qui correspondent à l'enchaînement de quatre molécules dites bases ou nucléotides (Adénine, Thymine, Guanine, Cytosine) dans l'ADN

[2] Avec le Génopole d'Évry et le CEPH (Centre d'étude du polymorphisme humain).

Pacifique : un continent de déchets fait plus de six fois la France

7e continent_3Associated press.jpgPacifique : un continent de déchets fait plus de six fois la France

par Cécile Cassier

Journaliste Univers-nature

(dernier ajout le 2 septembre 2015)

 

Découvert en 1999 par le navigateur américain Charles Moore, ce qu’on appelle le « 7e continent » est un gigantesque amas de déchets, situé entre les côtes de Hawaï et l’Amérique du Nord. Ces millions de tonnes de plastiques s’amassent sur une superficie estimée à 3,4 millions de km² selon le Cniid (1), équivalant à plus de six fois la France. Ce "continent" s’est progressivement formé dans l’océan Pacifique Nord, récoltant et concentrant via les courants marins des déchets provenant d’Asie du sud-est et d’Amérique de l’Ouest. La catastrophe de Fukushima aurait contribué, à elle seule, à l’ajout de trois millions de tonnes de déchets.

 

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De par sa position dans les eaux internationales, lesquelles appartiennent à tous ou à personne au gré des nécessités, chacun se dédouane de ce problème qui ne cesse de grossir. Pourtant, l’impact sur l’environnement, et notamment la faune marine, est réel (contamination de la chaîne alimentaire etc.). Aussi, l’association OSL (Ocean Scientific Logistic) a mis sur pied une expédition, visant à évaluer l’impact de ce condensé de pollution. Afin de le sensibiliser, elle tiendra le public informé de ses recherches via un blog dédié (2). Seules deux expéditions scientifiques américaines se sont déjà rendues sur place, respectivement en 2006 et en 2009. Selon OSL, si rien n’est fait, dans 20 ans, ce continent sera aussi grand que l’Europe.

1- Centre National d’Information Indépendante sur les Déchets.
2- Le blog est accessible à l’adresse suivante : www.septiemecontinent.com

Ajout du 3 mai 2014

 

On pourra également se reporter à l'article Les gyres, vortex de pollution dans les océans

par Frédérique Harrus publié le 02/05/2014 qui actualise l'information (vidéo)

 

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Ajout du 25 août 2014

 

Bien sûr, la situation n'est pas meilleure sinon pire pour la pollution chimique des océans depuis la révolution industrielle. Témoin cet article récent qui fait le point sur la pollution de la mer par le mercure.

 

Ajout du 25 août 2014 : Même l'Arctique est gagné par le plastique (Science & Vie  n° 1164, septembre 2014, p. 24)

 

En fondant, la banquise arctique pourrait libérer de leur prison de glace des quantités insoupçonnées de particules de plastique. C'est ce que craignent des chercheurs américains et anglais qui ont découvert pour la première fois la présence de microplastiques (moins de 5 mm de diamètre) dans des carottes de glaces prélevées en quatre points reculés de la région en 2005 et 2010. Les scientifiques ont inventorié entre 38 et 264 débris de polyéthylène, polypropylène, Nylon, etc., par mètre cube... soit près de 1 000 fois plus que dans la tristement célèbre "soupe de plastique" du Pacifique Nord.

 

Ajout du 2 septembre 2015 : Ces déchets de plastique qui envahissent les océans

Article de Sylvie Rouat (Sciences et Avenir, n° 823 septembre 2015, pp. 66-69)

 

Par milliards, des débris se concentrent dans les mers au gré des courants, formant une "plastisphère" polluante très intégrée à l'écosystème. L'éliminer est un casse-tête pour les spécialistes.

 

"Ce qui m'a surpris, c'est qu'on ne voyait rien. La soupe de plastique, brassée en profondeur était invisible. Comment montrer une catastrophe qui ne se voit pas", s'interroge Patrick Deixonne, navigateur-explorateur, au retour de la troisième expédition 7e Continent qu'il a menée du 15 mai au 15 juin 2015 dans le "gyre" de l'Atlantique Nord. Là, dans ce gigantesque tourbillon de la mer des Sargasses, se concentrent des milliards de débris de plastique. Sous l'effet de la force de Coriolis, trois courants y font converger les objets flottants. Jadis, les voiliers s'y retrouvaient entravés dans des agglomérats d'algues. Aujourd'hui, ce sont les déchets de plastique. Ce matériau chimique, peu biodégradable, se fragmente en infimes particules pour créer une "soupe", capable de résister à l'eau de mer et aux UV jusqu'à 1000 ans, et improprement baptisée le "7e continent". Le phénomène, connu depuis moins de quinze ans, se retrouve dans les cinq grands bassins océaniques du monde (Atlantique Nord et Sud, océan Indien, Pacifique Nord et Sud), les courants y emprisonnant les débris de plastique flottants de toutes tailles, depuis la microbille cosmétique jusqu'au bidon. L'étendue de ces gyres est immense : celui du Pacifique Nord couvre une superficie estimée à six fois celle de la France.

"En 2050, si rien ne change, la masse de plastiques dans l'océan sera supérieure à celle des poissons." Une phrase tirée du Rapport de la Fondation Ellen MacArthur, une association britannique caritative, présenté durant le forum économique mondial de Davos.

 

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Pour zoomer, cliquez sur la carte

 

Venus du continent grâce aux vents et cours d'eau

D'où viennent ces déchets ? À 80 % des continents : en 2015, 9,1 millions de tonnes de plastique devraient se retrouver dans la mer, drainés par les pluies et les vents, acheminés par les cours d'eau. En fonction de leur densité, certains coulent, d'autres flottent et sont entraînés par les vents et courants marins. "Aujourd'hui, on estime à 300 millions de tonnes la quantité de plastique dans les océans. Si l'on ne fait rien, il y en aura 155 millions de tonnes supplémentaires en 2025", alerte Patrick Deixonne.

 

Ce printemps 2015, le catamaran de 18 mètres de l'expédition 7e Continent a parcouru quelque 2 500 kilomètres dans le gyre de l'Atlantique Nord pour y faire des prélèvements. "C'était une mission risquée, raconte Patrick Deixonne. Nous étions dix, cantonnés dans un habitacle de 20 mètres carrés, à plus de 2000 kilomètres de toute côte, dans une mer houleuse avec des creux de5 mètres."

 

 

Les déchets intègrent peu à peu la chaîne alimentaire

Sur place, il s'agissait de quantifier et caractériser les macro-, micro- et nanodébris. Chaque trait de filet d'une demi-heure remontait en moyenne 250 pièces de plastique. Ce qui permet d'estimer "à environ 200 000 le nombre de débris par kilomètre carré, pour l'essentiel des particules de 2 millimètres de diamètre", explique Patrick Deixonne. Or ces dernières. brassées par les vagues et la houle échappent pour une grande part aux filets échantillonneurs, qui ne prélèvent que la couche supérieure de la colonne d'eau. "Nos estimations ne sont qu'une fourchette basse", constate le navigateur.

 

À bord du bateau et en laboratoire, les échantillons ont été soumis à l'étude au microscope infrarouge et par spectroscopie "pour savoir s'il existe une signature spécifique des plastiques invisibles", indique Alexandra Ter-Halle, chimiste à l'université de Toulouse. Cette nouvelle méthodologie sera appliquée aux autres gyres, qui seront étudiés dans les prochaines années. La route du bateau a aussi régulièrement croisé de gros déchets flottants. Les membres de l'équipage remontaient chaque jour qui une boîte de Nesquik, qui un bidon, etc. Un observateur posté sur le pont était chargé de les compter, deux heures durant. Soit, selon les premières extrapolations... quelques millions de tonnes ! Problème : ces macrodéchets interagissent avec le milieu marin. Ils fonctionnent en effet comme des DCP (dispositifs de concentration de poissons) — un système utilisé par les pêcheurs —, sous lesquels les poissons ont tendance à s'agglutiner. Quant aux micro- et nanoplastiques, ils s'intègrent peu à peu à la chaîne alimentaire : d'abord colonisés par des micro-organismes, ils sont ensuite assimilés au plancton, premier maillon de la chaîne alimentaire marine. L'ensemble finit par former la "plastisphère", un écosystème marin organisé avec et autour du plastique.

 

300 millions de tonnes : la quantité de plastique dans les océans, 455 millions de tonnes estimés en 2025

A priori, ce "plastiplancton" n'est pas dangereux pour les organismes qui l'ingèrent : "Leur système digestif évacue les constituants du plastique, qui sont des matières inertes, inassimilables", explique François Calgani, spécialiste des plastiques à l'Ifremer de Bastia. Cependant, une étude publiée dans la revue Environmental Toxicology and Chemistry (2012) montrait que des moules mises en présence de nanobilles en polystyrène manquaient d'appétit. L'impact n'est pas nul, donc, sur les organismes filtreurs. Il l'est encore moins quand il est dû à des micro- ou macrodéchets. D'abord parce que ceux-ci servent de véhicules pour 1a dissémination des espèces dans les océans. Ainsi, le tsunami de 2011, qui a lessivé des milliards de tonnes de déchets vers la mer, a entraîné la migration de quelque 120 espèces du Japon au Canada. Et avec elles, un grand nombre d'agents pathogènes pour les populations locales.

 

La plastisphère change les règles du jeu entre les différents organismes. Ainsi en va-t-il des Halobates sericeus, insectes marins qui marchent sur l'eau et pondent sur des objets flottants... a fortiori sur les débris de plastique. Dans un milieu où les ressources sont rares, la multiplication des lieux de ponte favorise leur développement, au détriment d'autres espèces. Et notamment des poissons, qui eux aussi déposent sur les plastiques leurs œufs, un mets de choix pour les halobates. Il y a trois ans, une étude menée par des chercheurs de l'université de Californie (États-Unis) avait établi que ces insectes proliféraient dans le gyre du Pacifique Nord. En 2015, la mission 7e Continent en a prélevé également de grandes quantités dans l'Atlantique Nord. Autres habitants privilégiés du septième continent, les méduses dont les jeunes polypes (premier stade de développement) colonisent volontiers les morceaux de plastique. Peut-être est-ce là la clé de leur prolifération ? "Ce qui est certain, c'est que les méduses mangent des poissons. Donc plusil y a de méduses, moins il y a de poissons", remarque Patrick Deixonne.

 

Enfin, les déchets qui contiennent du polyéthylène, soit la plupart des plasstiques deviennent poreux en se dégradant et absorbent les polluants persistants. Ils se muent ainsi en véritables "éponges" à métaux lourds. Que deviennent ces polluants ? Sont-ils rejetés dans l'environnement ? Sont-ils transférés aux algues, au plancton ? L'étude de la plastisphère ne fait que commencer. Et face à l'étendue du désastre, "il est urgent de comprendre avant d'envisager de nettoyer les mers", avertit Alexandra Ter-Halle. Car sous les plastiques, il y a la vie, une vie foisonnante à préserver.

 

 Les solutions pour s'en débarrasser

Parmi les actions envisageables, certaines relèvent de la fausse bonne idée, mais d'autres auraient une réelle efficacité.

Selon une étude publiée dans Science en 2015, les 192 pays côtiers de la planète ont produit 275 millions de tonnes de déchois plastique en 2010, dont 8 millions de tonnes ont été déversés dans les océans. Face à ce constat, que faire ?

 

Réduire la pollution à la source ?

Bannir tous les plastiques ? La solution est irréaliste. Sans film alimentaire, par exempmle, une grande quantité de nourriture serait jetée. Cependant, des mesures de restriction sont prises. En France, les sacs de caisse seront interdits en 2016 : un sac qui sert 20 minutes pollue en effet 450 ans...

 

Rendre le plastique biodégradable ?

Les plastiques biodégradables sont conçus pour se déliter dans des conditions spécifiques d'humidité, de chaleur et de microbiologie rarement atteintes dans la nature. Il existe un plastique dit oxofragmentable :un additif permet sa fragmentation. Fausse bonne idée, car il rend la pollution invisible. Les emballages compostables sont. eux, issus de produits naturels : pommes de terre, algues, maïs, déchets agroalimentaires. C'est l'option choisie par le Laboratoire d'ingénierie des matériaux de Bretagne (Limat B), qui utilise des déchets locaux associés à des bactéries marines pour produire des emballages à usage local. Une économie circulaire vertueuse.

 

Empêcher l'arrivée à la mer ?

Cela nécessite l'immobilisation générale à l'échelle d'un bassin versant, impliquant le nettoyage régulier des cours d'eau. L'équipe de l'ONG 7e Continent mène ainsi chaque année des opérations de nettoyage, la dernière ayant eu lieu dans la Seine, où ont été enlevés en moyenne 100 kilos de déchets tous les 100 mètres. "En France, les agences de l'eau financent des grilles de captation, mais c'est encore anecdotique", souligne Patrick Deixonne, de 7e Continent. Une application participative sera inaugurée en septembre ("Stop le plastique") pour permettre de photographier et localiser par GPS les lieux contaminés. Ces informations seront transmises aux services de collecte des déchets.

 

Ramasser les déchets ?

 Simple et efficace à court terme. Cette solution a été expérimentée à l'échelle d'un pays, le Liban, où, au lendemain de la guerre civile, les fonds marins étaient recouverts de plus d'un mètre de déchets. En août 1997, l'association Opération Big Blue lançait la première campagne de ramassage qui a réuni 40 000 personnes sur tout le littoral. Depuis, ce nettoyage est devenu annuel. Problème : tant que des plastiques seront relâchés dans la nature, il faudra les ramasser. Le cycle est sans fin, donc.

 

Piéger les déchets en mer ?

C'est le pari du Néerlandais Boyan Slat qui a imaginé une barrière souple de deux kilomètres de long, attachée aux fonds marins, qui arrête les déchets poussés par les courants. Ceux-ci se concentrent au milieu du dispositif, d'où ils sont extraits à partir d'une plate-forme. L'association The Ocean Cleanup a annoncé la mise en place d'un prototype en 2016 au large du Japon. Problème : ce système ne tient pas compte de la plastisphère et de la vie qui lui est associée. Et ne résout pas le problème des nanoparticules.

 

Capture-des-déchets-en-pleine-mer-450.jpg

 `voir aussi :

 

En 2050, il y aura plus de plastique que de poissons dans les océans (Sciences et Avenir)
http://www.sciencesetavenir.fr/nature-environnement/pollution/20160122.OBS3208/en-2050-il-y-aura-plus-de-plastique-que-de-poissons-dans-les-oceans.html

Voilà comment des plaques de déchets se forment dans les océans (Maxisciences)
http://www.maxisciences.com/ocean/voila-comment-des-plaques-de-dechets-se-forment-dans-les-oceans_art35772.html

Le 7e continent de plastique: ces tourbillons de déchets dans les océans (Le Monde)
http://www.lemonde.fr/planete/article/2012/05/09/le-7e-continent-de-plastique-ces-tourbillons-de-dechets-dans-les-oceans_1696072_3244.html

Bluebirds Marine Systems (le fabricant de SeaWax)
http://www.bluebird-electric.net/

L'Europe et la France vont-elles enfin interdire les sacs plastique? (Notre Planète)
http://www.notre-planete.info/actualites/3868-sacs-plasti...

09/05/2012

Le Conseil d’État maintient l’interdiction de semer du MON 810

FNE-logo.pngLe Conseil d’État maintient l’interdiction de semer du MON 810 : victoire des organisations apicoles, paysannes et environnementales


Le Président de la Section du Contentieux du Conseil d'État a rejeté aujourd'hui en référé la demande de suspension de l'arrêté du Ministre de l'agriculture du 16 mars 2012, interdisant la culture du maïs OGM MON810.


Cette demande était formulée par deux entreprises agricoles bien connues pour s’être déjà illustrées aux côtés de la Sté MONSANTO, lorsque le Conseil d’État a annulé en novembre 2011 le moratoire sur le maïs OGM MON 810.

 

Face au risque d’une nouvelle décision de justice dans le même sens, l’Union Nationale de l’Apiculture Française, les Amis de la Terre, la Confédération Paysanne, la Fédération Française d’apiculteurs Professionnels, la Fédération Nationale d’Agriculture Biologique, France Nature Environnement, la Fédération Nature et Progrès et le Réseau Semences Paysannes se sont unis dans leur diversité pour obtenir en justice le maintien de l’interdiction en France.

 

Le Conseil d’État vient de donner raison à nos organisations en refusant de suspendre l’interdiction de mise en culture du 16 mars 2012, qui « ne porte pas atteinte […] à un intérêt public, à la situation des entreprises requérantes ou aux intérêts qu’elles entendent défendre ».

 

C’est une victoire pour nos organisations mobilisées contre l’autorisation de mise en culture de ces maïs OGM. L’Agence Européenne de Sécurité Alimentaire avait dénoncé en décembre 2011 l’évaluation insuffisante et « le risque important pour l’environnement », ainsi que le rappelle le Conseil d’État dans son ordonnance. Cette décision nous donne raison en admettant l’urgence à protéger l’environnement, l’apiculture, et les semences biologiques, paysannes et conventionnelles, face à la menace que représente la culture de ces OGM.

 

Une telle décision était vitale pour la filière apicole française car depuis un arrêt de la Cour de justice européenne de septembre 2011, le miel contenant du pollen d’OGM ne peut pas être commercialisé pour la consommation humaine dans aucun état de l’Union. Cela ruine aujourd’hui les apiculteurs espagnols confrontés aux cultures de MON 810 autorisées dans leur pays.

 

La bataille juridique se poursuit car les puissantes organisations de producteurs de maïs ont de leur côté saisi le Conseil d’État d’une autre procédure sur le fond.

 

Les organisations de défense de l'environnement seront d’une extrême vigilance et elles travailleront inlassablement pour que le nouveau Ministre de l’agriculture renforce l’interdiction du MON 810 et adopte les règles protégeant la santé humaine et animale, ainsi que les filières respectueuses de l’environnement.

 

08/05/2012

Pollutions de l'eau douce. L'incroyable indulgence

Pollutions de l'eau douce.

L'incroyable indulgence

 

par Hervé Chambonnière (Le Télégramme.com)

 (Compléments et dernière mise à jour : 25/08/2014)

 

Contrairement aux « voyous des mers », les pollueurs d'eau douce bénéficient d'une incroyable indulgence des autorités. Du contrôle à la sanction, enquête sur une quasi-impunité. Même si la Bretagne apparaît comme la plus sévère... des régions laxistes!

 

Il y a le fléau des algues vertes. Il y a aussi les menaces de sévères sanctions européennes pour nos eaux « de qualité médiocre ». Il y a, enfin, un coût toujours plus élevé pour rendre l'eau potable. Mais rien n'y fait. Les pollueurs, à la source de ces problèmes, ne sont pas véritablement inquiétés. La répression est tout simplement jugée « insignifiante », par le Conseil d'État. Elle affiche toujours, malgré « quelques progrès », « une défaillance à peu près totale », selon la Cour des comptes. Contrôles insuffisants, beaucoup d'infractions mais peu de poursuites, sanctions peu dissuasives, peu nombreuses et bénignes... À toutes les étapes de la chaîne répressive, les deux hautes juridictions ont relevé, en 2010, une accablante série d'incohérences. En voici l'inventaire.

 

Des contrôles insuffisants

 

Même s'ils sont en augmentation, ceux-ci sont « notoirement insuffisants », tranchait, en juin 2010, le Conseil d'État. Il y en a, pourtant, clairement beaucoup plus en Bretagne. Pour les seuls contrôles nitrates, les services de l'État ont vérifié un peu plus d'une exploitation agricole sur sept, en 2010. À titre de comparaison, en 2003, dans la Beauce, « tout agriculteur ou irriguant savait d'emblée qu'il n'avait aucune chance d'être contrôlé durant sa vie professionnelle entière », relève le Conseil d'État.

 

Des services asphyxiés et bridés

 

Pourquoi si peu de contrôles ? « Nos moyens sont dérisoires comparés à l'ampleur des pollutions constatées, confesse un responsable de la police de l'environnement. Nous ne sommes pas assez nombreux ». Autre raison évoquée par la Cour des comptes : « Avec des effectifs si limités par département, pour la première fois en recul depuis dix ans, les agents éprouvent des difficultés à répondre aux objectifs et priorités fixés par l'administration centrale ». D'autant que « la direction de l'eau a multiplié les priorités au même moment ». Autre explication avancée par un responsable de la police de l'eau : « Les services ne sont pas toujours très libres de contrôler les exploitations agricoles... C'est très variable d'un département à l'autre, suivant l'autonomie dont dispose le préfet face aux lobbies locaux ».

 

Une jungle réglementaire

 

Il existe treize polices (réglementations) différentes concernant l'eau, vingt-cinq différentes pour l'environnement ! Pour les appliquer, le code de l'environnement désigne pas moins de 70 catégories d'agents différents. Un rapprochement des activités de police de plusieurs organismes (Onema, Oncfs et DDTM) a été amorcé. « L'efficacité d'un tel édifice, faut-il s'en étonner, est pour le moins limité », constate le Conseil d'État. Quant au droit pénal de l'environnement, avec ses 540 délits et ses425 contraventions, « il n'est pas d'application aisée ».

 

Des sanctions peu dissuasives

 

Pour une pollution de quelques kilomètres, même à plus de 200 km de nos côtes, un « voyou des mers » risque, depuis août 2008, une amende de 15M€. Quid pour les pollutions qui se déroulent à nos portes, dans des cours d'eau qui alimentent nos réseaux d'eau potable? L'amende maximale prévue est de... 75.000€. « C'est vraiment pas cher pour une pollution qui peut durer 2.500 ans », raille un gendarme spécialisé, évoquant la pollution industrielle du Rhône au plomb et au PCB.

 

Trop de classements sans suite

 

C'est ce que dénoncent deux associations bretonnes de protection de l'environnement, l'Aappma de l'Elorn et Eau et Rivières. Difficile de vérifier, tant les données sont nombreuses, partielles et différentes. À titre indicatif, néanmoins, un instructif rapport interministériel de 2005, consacré aux polices de l'environnement, livre ce curieux constat : alors qu'elles devraient être quatre fois plus poursuivies (car les infractions sont plus facilement établies: auteur identifié...), les affaires liées à l'environnement le sont... presque deux fois moins ! Plus d'une affaire sur deux (contre trois habituellement) est ainsi classée sans suite. Pour quels motifs ? Mystère. Dans son rapport, le Conseil d'État évoque « des raisons qui n'ont pas été élucidées »... Le rapport interministériel de 2005 avance une explication : « Les magistrats sont méfiants quant au choix de contentieux faits par l'administration pour des motifs qu'ils pensent être liés à des considérations d'ordre politique ou en relation avec l'action de groupes de pression. Ils paraissent craindre de se trouver instrumentalisés ». En Bretagne, en 2010, pour les seuls contrôles des plans nitrates, seul un PV sur quatre (26%) faisait l'objet d'un classement sans suite. Mais un sur trois (34%) était toujours en attente d'une réponse pénale des parquets bretons.

 

Ajout du 23 février 2013

 

Dans l'ensemble, en 2013 en France, les nitrates gagnent toujours du terrain  La teneur en nitrates dans l'eau excède 50 mg/1 dans 18 860 communes de France. Soit 860 de plus qu'en 2012. En cause : les nitrates contenus dans les déjections animales épandues pour fertiliser les sols. Quand l'apport dépasse les besoins des cultures, l'excès se retrouve dans les rivières, puis sur les côtes, où il favorise la prolifération d'algues vertes. "Dans l'Ouest, des efforts ont été faits, commente Jean-Louis Peyraud, de l'Institut national de la recherche agronomique. Moins dans les zones de grandes cultures - Bassin parisien, Poitou - Charentes, Haute-Normandie... - où la hausse ne ralentit pas. "

 

Quelle est la part de l'eau douce sur notre planète ?


Une infographie de Pierre Barthélémy sur Mblog nous renseigne à ce propos.

 

Les techniques de détections de pollutions chimiques des eaux

Voir l'article [LIEN]

 

Ajout du 25 août 2014

 

Bien sûr, la situation n'est pas meilleure sinon pire pour la pollution des océans depuis la révolution industrielle. Témoin cet article récent qui fait le point sur la pollution de la mer par le mercure.

14/04/2012

Le nucléaire vu par notre minuscule souverain

 Le nucléaire vu par notre minuscule souverain... Édifiant !

 

(Mise à jour du 13/03/2014)

 

Rappelons à M. Sarkozy que l'Alsace est un fossé d'effondrement entre les Vosges et la Forêt Noire. Manifestement, notre président en sursis n'a jamais entendu parler des deux séismes de magnitude 7,5 et 9 qui ont détruit la région de Bâle le 18 octobre 1356 !

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Canard Enchaîné (12/04/2012)

 

Remarques : le 18 octobre 1356, deux séismes de magnitudes estimées par le site du BRGM à 9 et 7,5 ont affecté la région bâloise à proximité de la centrale nucléaire de Fessenheim (Haut-Rhin).

En ce qui concerne cette centrale de Fessenheim, la plus vieille du parc français, il s'agit du séisme de référence. Sa magnitude (1) a été estimée à partir des registres notariaux et des annales religieuses. En fait, les avis divergent : EDF évalue sa magnitude à 6,1 ; l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) à 6,8 ; et une étude suisse de 2009 à 7,1, ce qui est 30 fois plus violent que l'estimation de l'exploitant !

EDF a beau ajouter une marge de sûreté d'un demi-degré de magnitude au séisme historique de référence, la centrale de Fessenheim n'a pas été construite pour lui résister...

 

(1) Rappelons que la magnitude est l'énergie libérée par un séisme, indépendamment des dégâts provoqués. Elle est définie par une échelle logarithmique, où chaque unité ajoutée correspond à une multiplication par 32 de l'énergie libérée. Ainsi, un séisme de magnitude 9 libère, non pas 3 fois plus, mais 1 milliard 74 millions de fois plus d'énergie qu'un séisme de magnitude 3.

 

Mars 2014 : Un accident nucléaire grave est France est maintenant officiellement reconnu comme une possibilité à laquelle il faut se préparer : c’est le sens du "Plan national de réponse ’Accident radiologique ou nucléaire majeur’ " publié le 3 février par le Secrétariat général de la défense et de la sécurité intérieure.

On est surpris que la nouvelle ait suscité peu d’échos. Mais c’est ainsi.

Ce plan, qui décline sur cent-dix-huit pages et huit scénarios la conduite à tenir en cas d’accident grave, est une nouvelle étape dans la lente reconnaissance de la vraisemblance du pire.

Tchernobyl, en 1986, n’avait pas fait broncher la nomenklatura nucléariste.

Les choses ont commencé à changer à la suite de la submersion partielle de la centrale du Blayais (Gironde), fin 1999 : la France était alors passée à deux doigts d’une catastrophe nucléaire...

 

Pour en savoir plus, voir l'article de Mediapart.

 

03/04/2012

Abeilles: Le Cruiser OSR perturberait le système d'orientation des insectes

abeilles,cruiser osr,pesticides,mortalité des abeillesAbeilles : Cruiser OSR et Gaucho suspectés de perturber le système d'orientation des insectes

 

 (dernière mise à jour du 21 juin 2018)

 

Pour la première fois, deux études, l'une française, l'autre britannique publiées toutes deux le 30 mars 2012 dans la revue scientifique américaine Science, démontrent les effets délétères des néonicotinoïdes, à faibles doses, sur les pollinisateurs dans des conditions naturelles. Ce qui expliquerait leur déclin, ces insecticides systémiques étant utilisés massivement dans l'agriculture. Elles montrent en effet que les néonicotinoïdes ont, à faible dose, des effets puissamment délétères sur les insectes pollinisateurs domestiques et sauvages. Introduits dans les années 1990, ces insecticides systémiques qui enrobent directement les semences sont les plus couramment utilisés en agriculture. Ils joueraient un rôle majeur dans la disparition de ces insectes, dont le déclin menace à terme les cultures de plantes à fleurs, et, bien sûr, la production de miel.

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 Dans l'étude française, les chercheurs Mickaël Henry, Maxime Beguin, Fabrice Requier, Orianne Rollin, Jean-François Odoux, Pierrick Aupine, Jean Apte, Sylvie Tchamitchian et Axel Decourtye ont marqué 653 abeilles en collant sur leur thorax une puce à radio-identification permettant de suivre leurs déplacements. Ils ont ensuite donné à certaines d'entre elles une dose infinitésimale, soit non létale, de Cruiser. Le Cruiser OSR est le nom commercial du thiaméthoxam (famille des néonicotinoïdes) qui est un produit fongicide et insecticide enrobant les semis de colza. Cet enrobage doit notamment protéger la plante contre les fontes de semis, le mildiou et les pucerons. Les chercheurs ont constaté que les butineuses avaient du mal à retrouver leur ruche, réduisant d'autant leurs chances de vivre. Un modèle mathématique établit d'ailleurs que les populations d'abeilles exposées au pesticide chutaient à un niveau ne permettant plus leur renouvellement.

 

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(Agrandir le document en cliquant dessus)

 

De leur côté, pour réaliser leur expérience, Penelope Whitehorn et Dave Goulson de l'université de Stirling (Royaume-Uni) ont exposé des colonies de bourdons (Bombusterrestris) en développement à des faibles niveaux d'un néonicotinoïde appelé imidaclopride et commercialisé sous le nom de Gaucho. Les chercheurs ont ensuite placé les colonies dans un terrain où les bourdons ont pu s'alimenter dans des conditions naturelles. Ils ont soigneusement pesé les nids - comprenant les insectes, la cire, le miel, les larves, le pollen - au début et à la fin de l'expérience. Et les résultats ont été sans appel : les colonies exposées à l'imidaclopride ont un poids 12 % plus faible que les colonies non exposées, suggérant ainsi qu'elles se sont moins nourries. "Plus terrible et surprenant : elles ont produit 85 % de reines en moins", souligne Penelope Whitehorn. Or, après le dépérissement hivernal, la production de reines est indispensable à l'établissement de nouvelles colonies puisqu'elles sont les seules à pouvoir les fonder... 85% de reines en moins peut donc signifier 85 % de nids en moins l'année suivante. De quoi expliquer - peut-être - le déclin de ces insectes qui disparaissent massivement en Amérique du Nord et dont trois espèces sont désormais éteintes en Grande-Bretagne.

 

Pesticide dans le collimateur

 

Le ministère de l'Agriculture a par ailleurs demandé à l'Institut national de la recherche agronomique (Inra) et à l'Association de coordination technique agricole (Acta) "d'accélérer les recherches en plein champ" pour évaluer si les résultats de leur expérimentation "se retrouvent en condition réelle".

Le ministre de l'Agriculture Bruno Le Maire a indiqué avoir demandé l'avis de l'Agence de sécurité sanitaire concernée, l'Anses, pour qu'elle confirme, ou non, d'ici deux mois, c'est-à-dire avant la nouvelle campagne de semences, que les dangers présentés par le pesticide dans le cadre de l'étude se confirmaient en plein champ. "Si ces nouvelles données étaient confirmées, l'autorisation de mise sur le marché" du Cruiser OSR, qui protège les semis de colza, "serait retirée", a-t-il indiqué.

 

Les apiculteurs pour un retrait immédiat

 

L'Union nationale de l'apiculture française (Unaf), qui milite de longue date contre ce pesticide, s'est réjouie du "nouvel éclairage apporté par l'étude". Mais craignant que les déclarations de Bruno Le Maire ne s'expliquent que par "la période électorale", elle a demandé une interdiction immédiate. Selon l'Unaf, un avis au 31 mai 2012 serait trop tardif par rapport au calendrier de commande des graines de colza. "Le temps n'est plus aux études mais à l'action politique courageuse", estime le syndicat des apiculteurs. Le réseau France Nature Environnement (FNE) a pour sa part vu "un message extrêmement positif" dans la réaction du ministère.

 

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 Le fabricant conteste

 

Comme on pouvait s'y attendre, le fabricant du pesticide, Syngenta, numéro un mondial de l'agrochimie, a pour sa part contesté les conclusions de l'étude, en affirmant qu'elle était "fortement éloignée de la réalité". Selon le groupe suisse, la dose d'insecticide administrée est "au moins trente fois plus élevée que celle du nectar de colza protégé avec du Cruiser", et pour atteindre la quantité de thiaméthoxam retenue dans l'étude, l'abeille devrait consommer quotidiennement jusqu'à sept fois son propre poids en nectar.

 

Mais Axel Decourtye, un des co-auteurs de l'étude, a contesté ce point, indiquant que l'étude avait été conduite avec une dose qui peut être rencontrée en conditions réelles. Il a par ailleurs fait valoir qu'en tout état de cause, le travail des chercheurs consistait à "regarder le danger de ce pesticide sur l'abeille, pas l'exposition des abeilles en condition réelle".

 

Argument également rejeté par Jean-Marc Bonmatin, du CNRS, spécialiste de la concentration des pesticides dans les pollens et nectars. « Selon mes calculs, laconcentration utilisée par l'équipe française est sans doute effectivement supérieure de cinq à dix fois à ce que rencontre en moyenne l'abeille, mais elle peut correspondre à des "pires cas" qui peuvent parfois survenir dans la nature. D'autant que d'autres chercheurstrouvent des concentrations plus élevées que les miennes, assez compatibles avec les chiffres de l'étude française. Ce qu'il faut retenir - et que montrent maintenantune dizaine d'études -,c'est que les insecticidessystémiquesagissent comme des poisons à très faibles doses. Notez que l'imidaclopride est au moins 7000 fois plus toxique que le DDT" (voir le schéma ci-contre). De son côté, le ministère de l'Agriculture a indiqué attendre d'ici à la fin du mois de mai un avis de l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) sur cette étude. "Si ces nouvelles dones étaient confires, l'autorisation de mise sur le marché" du Cruiser OSR, utilisé sur le colza, "serait retirée". Il pourrait ainsi rejoindre le Gaucho et le Régent sur la liste des insecticides systémiques partiellement interdits en France

 

Mortalité en hausse de  85 %

 

Ces débats autour du Cruiser OSR interviennent alors qu'en juin 2011 des experts avaient indiqué que la mortalité des colonies d'abeilles restait largement inexpliquée malgré toutes les recherches sur la toxicité des pesticides. Selon l'ONU, la mortalité des abeilles est en progression, jusqu'à 85 % dans certaines régions, et pourrait avoir de graves conséquences sur la production alimentaire puisque la plupart des plantes, cultivées ou non, sont pollinisées par les abeilles.

 
Interdiction définitive du Cruiser OSR en France
 
 
Selon Libération du 29 juin 2012, le gouvernement a annoncé vendredi 29 juin 2012 l'interdiction définitive du Cruiser OSR, un pesticide utilisé pour le colza, dont plusieurs études ont confirmé les effets néfastes sur les abeilles.
 

Début juin, le ministère avait indiqué qu'il était favorable à cette interdiction à la suite d'un avis de l'Agence sanitaire pour l'alimentation et l'environnement (Anses), qui dénonçait l'impact néfaste sur les abeilles d'une des molécules actives du Cruiser, le thiaméthoxam.

 

Les arguments avancés par le groupe suisse Syngenta, fabricant du pesticide, lors d'une procédure contradictoire, n'ont pas été de nature à remettre en cause l'avis de l'Anses, aussi le gouvernement a décidé de confirmer sa décision d'interdire le Cruiser OSR, a expliqué le ministre de l'Agriculture, Stéphane Le Foll.

 

Cette interdiction qui "prend effet immédiatement", a précisé le ministre, concerne exclusivement le Cruiser OSR qui est utilisé pour le colza en enrobage de la semence.

 

La décision était très attendue car les semis sont réalisés vers la fin août et les agriculteurs passent leurs commandes avant.

 

Le produit est utilisé en France sur 650.000 hectares, soit la moitié des surfaces plantées en colza. En Europe, il atteint près de 3 millions d'hectares.

 

La décision de retirer l'autorisation de marché "a été prise au vu de résultats scientifiques selon lesquels la molécule présente dans le Cruiser OSR a un impact sur le comportement des abeilles, en particulier sur leur capacité à retourner à la ruche", a expliqué le ministre.

 

M. Le Foll a confirmé son souhait de porter la discussion à Bruxelles afin d'interdire ce type de molécule à l'échelle européenne. Il souhaite aussi un débat plus large sur la famille des néonicotinoïdes, molécules présentes dans les insecticides.

 

"Pas d'alternative au Cruiser OSR ?"

 

Interrogé sur l'éventualité pour la France de voir sa décision retoquée par Bruxelles, le ministère a indiqué ne pas craindre un tel veto puisque, a-t-il indiqué, sa décision est du ressort national.

 

Le groupe Syngenta, qui va attaquer cette interdiction en référé suspension devant le tribunal administratif, "dénonce avec la plus grande fermeté une décision pénalisante pour l'agriculture française, qui utilise comme argument une seule expérience non validée et très éloignée de la pratique agricole".

 

"Il n'y a pas d'alternative au Cruiser OSR", a ajouté un porte-parole du numéro un mondial de l'agrochimie qui a mis en garde contre "un développement des pulvérisations [...] moins efficaces" dans les champs.

 

L'abandon du Cruiser OSR handicapera la compétitivité de l'agriculture française, toujours selon Syngenta qui affirme qu'il représentera également un manque à gagner pour les semenciers français de 72 millions d'euros.

 

Les apiculteurs se sont réjouis de l'interdiction du pesticide et espèrent qu'elle entraînera celle du Cruiser 350 servant pour le maïs.

 

"On boit du petit lait avec cette décision, c'est une très bonne nouvelle que l'on attendait avec impatience", a indiqué à l'AFP Olivier Belval, président de l'Union nationale de l'apiculture française.

 

"Cette bonne décision en appelle une autre, l'interdiction du Cruiser 350, utilisé pour le maïs, et que l'on attend depuis 2008", a dit encore M. Belval.

 

Le député socialiste Gérard Bapt, président du groupe environnement-santé à l'Assemblée nationale, a, lui aussi, exprimé sa "satisfaction", estimant que c'est "toute la famille des néonicotinoïdes qu'il faudrait considérer", et non le seul Cruiser OSR.

 

À France Nature environnement, Claudine Joly a parlé de "première victoire", qui "marque un tournant dans la lutte contre les fléaux menaçant les pollinisateurs".

 

L'effet cocktail des pesticides démontré

 

(Rachel Mulot, Sciences et Avenir, n° 790, décembre 2012, p. 32.)

 

Perte d'orientation, récoltes plus maigres, morts prématurées et massives... Les bourdons exposés à plusieurs pesticides quand ils butinent d'un champ à l'autre sont fortement fragilisés, au point de menacer la survie de leur colonie. L'effet cumulatif des pesticides vient en effet d'être démontré par Nigel Raine, de l'université de Londres, dans l'une des rares études portant sur ces cocktails (lire S. et A. n° 783, mai 2012, et n° 771, mai 2011).

 

Le chercheur a équipé de puces RFID les bourdons Bombisterrestra d'une quarantaine de ruches. Il les a ensuite exposés à deux pesticides différents, séparément ou simultanément : un néonicotinoïde  (l'imidachlopride, molécule active du Gaucho de Bayer, enrobant les semences) et un pyréthroïde (la lambdacyhalothrine, molécule active du Warrior de Syngenta pulvérisée sur les cultures). Le tout aux faibles doses qu'ils rencontrent dans les champs.

 

Conclusions ? Chez les insectes doublement exposés, le nombre de bourdons qui se sont égarés a augmenté de 50 % par rapport au groupe témoin. Les ouvrières affamées ont délaissé les larves pour butiner à leur tour et les naissances ont chuté. In fine, les taux de mortalité cumulés observés pour chaque type d'exposition étaient de 41 % dans le groupe exposé à l'imidaclopride, 51 % avec le pyréthroïde et 69 % parmi ceux qui étaient exposés aux deux - contre 30 % pour le groupe témoin. « Les premiers effets de la double exposition se sont fait sentir au bout de deux semainesseulement, pour s'aggraver à la quatrième semaine, souligne Nigel Raine. Les tests actuels qui évaluent la toxicité (aiguë) des pesticidesen 96 heures sonttotalement insuffisants. » 

 

Les pesticides reconnus nocifs pour les abeilles par l'Efsa

 

(Rachel Mulot dans Sciences et Avenir793, mars 2013)

 

Les autorités européennes viennent d'admettre le risque élevé de toxicité des néonicotinoïdes pour les insectes pollinisateurs.Seront-ils interdits ?

 

Tardivement, mais scrupuleusement, la très conservatrice Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) reconnaît - enfin ! - des risques de toxicité pour les abeilles exposées aux néonicotinoïdes[1]. Ces insecticides, les plus employés dans les pays développés, se répandent dans le système vasculaire de la plante et s'attaquent an système nerveux central des insectes. L'Efsa avait été saisie par la Commission européenne à la suite de la publication dans la revue Science en avril 2012 d'une étude de l'équipe de Mickael Henry à l'Inra d'Avignon (voir Sciences et Avenir783 de mai 2012).

 

Les scientifiques avaient alors clairement montré des effets mortels à long terme de ces produits sur les butineuses, et cette expérience, la première effectuée dans des conditions naturelles, avait connu un écho mondial. Elle venait compléter de nombreuses éludes in vitro (voir Sciences et Avenir771 de mai 2011), puis in vivo, qui montraient depuis dix ans de nombreux effets toxiques : désorientation des insectes, perte des fonctions cognitives, surmortalité et fragilité des larves, etc. Certains de ces effets se manifestant après exposition à des doses infimes. L'Efsa a donc conclu que des risques aigus existent bien pour les abeilles collectant un pollen ou un nectar imprègnés de clothianidine (Poncho-Maïs) ou d'imidaclopride (Gaucho, Confidor). Les risques du thiamethoxame (Cruiser) n'ont pu être prouvés, faute de données suffisantes. Antre source d'intoxication possible : l'exposition à des poussières émanant de l'ensemencement de graines traitées ou de l'application de granules d'insecticides pour les trois molécules étudiées. Les experts de l'agence se sont enfin intéressés à une dernière voie : via les gouttelettes d'eau produites par les plantes traitées. Dans ce cas, « la seule évaluation des risques ayant pu être finalisée concède le maïs traité avec du thiaméthoxame », explique l'agence.

 

La Commission européenne a proposé aux états membres d'interdire purement et simplement l'usage des néonicotinoïdes sur le colza, le maïs, le tournesol et le coton. Dénonçant un rapport « politique », Syngenta (Cruiser) a promis de défendre vigoureusement le thiamétoxame. Bayer CropSdence (Gaucho, Confidor) a décidé d'investir dans un programme destiné à réduire leurs effets sur les abeilles. Le temps est compté : si les Etats membres valident les interdictions, elles entreront en i^in urie 1er juillet prochain.

 

Rappel : une décennie de découvertes sur ce problème

2004 : contamination des pollens et persistance des insecticides dans les sols pendant deux ans.

2010 : synergie mortelle entre un parasite de l'abeille, le Nosemacerenae, et l'imidaclopride, mais aussi le thiaclopride et le fipronil.

2012 : effets délétères à faibles doses in vivo du thiamétoxame et de l'imidaclopride. Effet cocktail et cumulatif de plusieurs pesticides.

 



[1] Les différents avis de l'Efsa : sur la clothianidine : http://urls.fr/ful ; surl'imidaclopride : http://urls.fr/fuo ; sur le thiamétoxame : http://urls.fr/fup

 

Pour en savoir plus :

 

  • Mickaël Henry, Maxime Beguin, Fabrice Requier, Orianne Rollin,Jean-François Odoux, Pierrick Aupine, Jean Apte, Sylvie Tchamitchian, Axel Decourtye. (2012). - A Common Pesticide Decreases Foraging Success and Survival in Honey Bees, Science 29 March 2012, Vol. 335,  n° 6076.

 

  • Penelope Whitehorn et Dave Goulson (2012). - Neonicotinoid pesticide reduces bumble bee colony growth and queen production, Science, 29  march 201, Vol. 335, n° 6076.

 

  • Rachel Mulot (2012) - Abeilles : la mort à très petites doses, Sciences et Avenir783, mai 2012 pp. 8-13.

 

 

Mise à jour du 29 avril 2013

 

Abeilles : trois pesticides suspendus pour deux ans

La Commission européenne a décidé le 29 avril de suspendre à titre provisoire l'utilisation de trois pesticides soupçonnés de contribuer au déclin des abeilles.

 

Le 29 avril 2013, la Commission Européenne a suspendu trois insecticides pour une durée de deux ans.C'est une victoire d'une courte tête, mais une victoire quand même pour les apiculteurs de toute l'Union européenne. En ce lundi 29 avril, était soumise au vote des États membres une proposition de loi visant à suspendre pour une durée de deux ans certains pesticides couramment utilisés en agriculture. Figuraient dans le collimateur de cette loi trois insecticides dits "neonicotinoïdes" (car voisins chimiquement de la nicotine) : le clothianidine, l'imidaclopride et le thiaméthoxame. Ces derniers agissent sur le système nerveux des insectes et sont soupçonnés de participer à l'effondrement des colonies d'abeilles : leur usage est désormais suspendu pour une durée de deux ans.

 

"Confrontées à des résidus d'insecticides systémiques neurotoxiques, même infinitésimaux, les abeilles sont désorientées, se refroidissent et ne retrouvent plus leurs ruches. Leur système immunitaire étant affaibli, elles peuvent aussi développer des maladies neurodégénératives qui entraînent la mort en quelques jours", explique sur son site l'Union nationale de l'apiculture française (UNAF).

 

Cette classe de pesticides, principalement produite par le chimiste Allemand Bayer et le Suisse Syngenta fait d'ailleurs déjà l'objet d'un certain nombre de restrictions. Par principe de précaution, l'utilisation du Gaucho (fabriqué par Bayer et dont l'élément actif est l'imidaclopride) a été suspendu depuis 1999, en France, sur certaines cultures (tournesol puis maïs).

 

L'usage du Régent, un insecticide neurotoxique produit par une autre entreprise de chimie allemande (BASF Agro), a été suspendu pour les mêmes raisons en 2004. Enfin, en juillet 2012, c'était le tour du Cruiser (contenant du thiametoxam), de faire l'objet d'une interdiction sur les cultures de soja en France, suite à un avis négatif émis par l'Anses (Agence sanitaire pour l'alimentation et l'environnement).

 

Ce lundi 29 avril, un pas de plus a été franchi en matière de restriction de ce type d'insecticides. Mais il s'en est fallu de peu. "Bien que la majorité des États membres approuvent cette proposition de loi, la majorité nécessaire pour son adoption ou son rejet n'a pas été atteinte" déplore Tonio Borg, commissaire européen à la santé et à la politique des consommateurs. Le projet a en effet recueilli 15 voix en sa faveur, 8 contre et 4 abstentions. "La décision finale revenait donc à la commission", explique-t-il. 

 

"Les abeilles sont vitales à notre écosystème et contribuent à plus de 22 milliards d'euros chaque année dans l'agriculture européenne" - Tonio Borg, commissaire européen à la santé et à la politique des consommateurs

 

"Puisque notre proposition est basée sur un certain nombre de risques pour les abeilles identifiés par l'EFSA, la commission a décidé son adoption, explique Tonio Borg sur le site de la Commission européenne. J'ai l'intention de faire tout mon possible pour m'assurer de la protection des abeilles. Elles sont vitales à notre écosystème et contribuent à plus de 22 milliards d'euros chaque année dans l'agriculture européenne"chiffre-t-il.

 

En effet, selon la FAO (l'Organisation des nations unies pour l'alimentation et l'agriculture), sur la centaine d'espèces cultivées qui constituent 90 % de l'alimentation mondiale, 71 dépendent des abeilles pour leur pollinisation. 

 

Ces nouvelles restrictions s'appliqueront dans toute l'Europe à partir du 1er décembre 2013

 

De ce fait, l'usage de ces trois néonicotinoïdes est interdit pour le traitement des graines, des sols et des feuilles sur toutes les plantes et céréales qui attirent les abeilles. Leur usage reste toutefois autorisé sur les cultures en serre. L'usage en plein air est également toléré s'il survient après la période de floraison.

 

Ces nouvelles restrictions s'appliqueront dans toute l'Europe à partir du 1er décembre 2013. La Commission se réservant le droit de statuer sur le renouvellement ou non de cette suspension d'ici deux ans, en fonction des nouvelles données scientifiques disponibles d'ici là.

 

Ajout du 23 juillet 2014

 

Abeilles : L'effet des pesticides de mieux en mieux cernés

 

Ajout du 21 juin 2018 :

 

Des apiculteurs brûlent leurs ruches

29/03/2012

Épandage aérien de pesticides

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No comment sur la sincérité "écologique" de l'actuel gouvernement !