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07/06/2010

Proliférations de Cyanobactéries dans la Loue

Une pollution de la Loue a entraîné une prolifération de Cyanobactéries toxiques. Ces organismes émettent des toxines mettant en danger la vie aquatique et notamment les populations de truites


ombre_malade.jpgPollution de la Loue : hécatombe parmi les poissons


 

par André Guyard

 

La Loue est une magnifique rivière qui entaille les plateaux du Jura. Il s'agit d'une résurgence du Doubs (voir dans ce même blog Source de la Loue).

 

Depuis le mois de mars 2010, on note une certaine mortalité parmi le peuplement de poissons de la Loue. Mais en mai, la presse locale s'est fait l'écho d'une véritable hécatombe. Le problème semble venir d'une efflorescence de Cyanobactéries. Les Cyanobactéries, appelées autrefois Cyanophycées ou Algues bleues, par leur absence de noyau cellulaire sont plus proches des Bactéries (Procaryotes) que des Algues (Eucaryotes). Leur forte capacité d'adaptation et l'absence de consommateurs spécifiques font qu'elles ont tendance à supplanter les autres espèces d'algues [1].

La prolifération des cellules cyanobactériennes s'accompagne alors de la formation d'une mousse verdâtre, due à l'accumulation des cellules à la surface de l'eau, puis de dépôts colorés (vert bleuté, rouge...) lorsque celles-ci meurent (voir cliché 1 ci-dessous). Or ces cellules émettent des toxines : la quasi-totalité des phycotoxines répertoriées dans les eaux douces et saumâtres seraient produites par ces micro-organismes. Lorsqu'elles prolifèrent, les Cyanobactéries toxiques peuvent entraîner une mortalité directe par empoisonnement ou une mortalité induite par d'autres maladies opportunistes comme des parasitoses (mycoses en particulier : cf photo CPE ci-dessus).

 

cyanobactéries-1.jpg

1. Plan d'eau envahi par un bloom de cyanobactéries. 2. filament (trichome) de cyanobactéries observé au microscope optique comportant des cellules normales (au centre) et deux types de cellules spécialisées : l'une (en bas, à gauche), appelée hétérocyste, permettant l'assimilation de l'azote ; l'autre (en haut, à droite), appelée akinète, permettant de résister à des conditions écologiques défavorables et de redonner un thalle après le retour à une situation normale. (Cliché L. Brient/ Université de Rennes-l). 3. Trichome vue au microscope électronique. - pv : pseudovacuoles gazeuses ; pb : corps polyédriques responsables de la fixation du CO2 ; c : cyanophycine ; n : nucléoplasme et fibrilles d'ADN (cliché P. Borelly).

 

Les toxines émises par les Cyanobactéries font l'objet d'une surveillance accrue en raison de risques sanitaires importants. On les classe habituellement en trois types : les dermatoxines, les neurotoxines et les hépatotoxines. Les premières provoquent chez certains sujets de fortes irritations cutanées, voire - en cas d'ingestion - des gastro-entérites accompagnées d'une forte fièvre. Les neurotoxines sont responsables, chez les animaux intoxiqués, de tremblements, de suffocations, de convulsions... Les hépatotoxines, quant à elles, regroupent de nombreuses toxines dont les microcystines qui peuvent endommager le foie et l'intestin grêle. Ingérées à faible dose dans les eaux de boisson, elles auraient des effets chroniques et pourraient favoriser le développement de tumeurs. Dans le cas de la Loue, il semblerait qu'il s'agisse de neurotoxines.

 

Ces proliférations (blooms ou fleurs d'eau ou efflorescences) sont dues à la présence dans les eaux d'un excès de phosphore. En effet, cet élément constitue un facteur limitant dans les eaux et le dépassement d'un certain seuil entraîne donc des proliférations de Cyanobactéries ou d'Algues. En outre, Algues et  Cyanobactéries peuvent l'assimiler au-delà de leurs besoins (consommation dite de luxe) pour le partager avec les générations suivantes. Le développement algal sur le fond entraîne l'asphyxie du sol de la rivière et de la faune qui s'y trouve (larves d'insectes, petits crustacés et vers). Cette faune est la source de nourriture du réseau alimentaire de la rivière.  Lors du pourrissement des  algues, il faudra tenir compte du relargage du phosphore qu'elles ont accumulé. Toutes ces proliférations (pollution directe et pollution différée) participent à l'eutrophisation du cours d'eau (Voir sur ce même blog, le problème des pollutions algales dans la région et surtout dans le cours supérieur du Doubs).

 

Ce problème de prolifération de microorganismes émettant des toxines dans le milieu aquatique est le même que celui des blooms constatés en mer et responsables d'intoxications. Voir à ce propos l'article sur la Ciguatera dans ce même blog.

 

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Bloom en mer de cyanobactéries (marées rouges)

 

D'où provient ce phosphore ?

 

Le phosphore peut provenir de rejets d'élevage agricoles (purin, fumier, cadavres), de piscicultures (excédent de nourriture, excréments de poissons) ou d'effluents résiduaires urbains (lessives phosphatées).

 

Il est urgent de détecter les sources de phosphore et d'y remédier le plus rapidement possible.

 

Mais le problème n'est pas récent. La toxicité des Cyanobactéries a été mise en évidence en Australie, dès 1880 (mortalité de moutons et de bovins). C'est dans ce même pays que, en 1991, 1400 moutons et 40 bovins sont morts, contaminés par des eaux renfermant des Cyanobactéries.

D'autres cas similaires ont été rapportés dans la quasi-totalité du globe au cours des années 1990. Chez les humains, plusieurs cas d'irritation de la peau, des problèmes respiratoires et des gastro-entérites ont été signalés à cette même époque. En 1996, au Brésil, cinquante personnes sont décédées et une centaine d'autres ont développé des maladies graves suite à l'utilisation, par un centre de dialyse, d'eau provenant d'un lac envahi par des Cyanobactéries.

 

En France, les pouvoirs publics ont pris tardivement conscience du danger malgré des études alarmantes, comme celle qui a été réalisée en 1994 par l'Université de Rennes I et qui montrait que 74 p. 100 des plans d'eau échantillonnés en Bretagne étaient envahis par des Cyanobactéries hépatotoxiques.

 

Les travaux publiés en 2004 montrent que la charge en composés azotés et phosphorés des eaux de surface, associée à une politique de barrages transformant les eaux courantes en eaux stagnantes et en piège à nutriments, favorise une hyper-eutrophisation caractérisée, le plus souvent, par ces Cyanobactéries toxiques.

 

Rappelons que les premières mesures destinées à protéger les populations ont été prises à partir de 2001 : le seuil de vigilance est atteint avec 200 cellules par millilitre et le niveau d'alerte 1 avec 20 000 cellules par millilitre, ce qui peut correspondre à 4 microgrammes par litre de microcystine-LR. Ce niveau 1 déclenche des restrictions sur l'utilisation de l'eau pour la baignade et une surveillance des eaux d'alimentation. Le contrôle ne s'effectue, pour l'instant, que sur la microcystine-LR, considérée comme la plus toxique des microcystines. Il y a obligation de recherche de la microcystine-LR en cas de prolifération algale, alerte des services sanitaires par les distributeurs d'eau dès que les teneurs en microcystine dépassent un microgramme par litre dans les eaux brutes et interdiction de la pratique de la baignade et des activités nautiques dans les plans d'eau à risques et dans certaines rivières.

 

La Commission de Protection des Eaux a réagi en portant plainte contre X. Elle fait état de ce dépôt de plainte sur son site. Un article qui analyse bien la situation et énumère les sources possibles de la contamination de la rivière par les phosphates.

 

Demain, la Loue vide ? Cyanobactéries et hécatombe de poissons record : la CPEPESC porte plainte pour pollution.

 

Vendredi 21 mai 2010, au lendemain d'une première réunion en préfecture, la Fédération de pêche du Doubs et le Syndicat Mixte de la Loue sont réunis au Conseil général pour faire le point sur la pollution de la Loue. Au-delà du constat sur la fragilité de ce fleuron du patrimoine franc-comtois, il s'agissait de mettre au point des solutions pour y remédier

 

Les autorités avaient été alertées à la suite de la découverte de poissons trouvés morts récemment à Ornans. De premières analyses ont révélé une prolifération de cyanobactéries dans l'eau de la rivière. D'autres prélèvements ont été transmis à un laboratoire spécialisé dans les cyanobactéries. Ils ont permis de découvrir la présence d'Oscillatoria, connu pour produire des neurotoxines qui mettent à mal les nerfs.

 

Le 30 mai, un colloque a été organisé à Rurey pour sauver la Loue. Après une présentation détaillée des spécificités du bassin versant de la Loue par le cabinet Reilé, élus et responsables associatifs ont proposé plusieurs pistes de travail pour tenter d'enrayer la dégradation de la qualité de l'eau de la Loue. L'Etat et la Région doivent établir un schéma de cohérence écologique et au niveau local, le département du Doubs va mettre en place plusieurs mesures pour aider les communes à améliorer leur réseau d'assainissement, les agriculteurs à gérer leurs effluents. Des conseils devraient être donnés également auprès du grand public et des industriels. Certains élus souhaitent que ces actions aillent au-delà de ce que les normes préconisent.

 

Le 8 juin, la Commission de protection des eaux, Franche-Comté Nature Environnement, Saône et Doubs vivants, Loue Vive et l'Association Nationale pour la Protection des Eaux et des Rivières-Truite, Ombre, Saumon ont annoncé avoir déposé une plainte contre X suite à cette pollution dont est victime la Loue.

 

Au cours d'une conférence de presse qu'elles ont tenue à la Maison de l'Environnement de Besançon, les plaignants ont annoncé avoir demandé au procureur de la République de mener les investigations nécessaires pour savoir comment la situation de la rivière a pu se dégrader à ce point. Elles ont affirmé que "60 à 80% des poissons de toutes espèces sont touchés de la source à Quingey, mais aussi la microfaune du substrat, crustacés, insectes qui nourrissent les poissons et participents à l'épuration.

 

Elles mettent en cause l'assainissement inexistant, incomplet ou inefficace, les rejets domestiques, les épandages de lisier excessifs ou incontrôlés,, les produits de traitement du bois et demandent un plan de sortie de crise s'appuyant sur le renouvellement du Contrat de rivière 2004-2010 avec des objectifs contraignants. Cela passe notamment, selon elles, par la généralisation de l'élevage porcin sur paille, l'interdiction des phosphates dans les lessives, la restauration des zones humides, l'arrêt de l'importation de céréales et de protéagineux pour nourrir le bétail, l'amélioration des réseaux d'assinissement, la récupération des eaux pluviales.

 

Et pour éviter que certaines cyanobactéries qui peuvent être neurotoxiques et hépatotociques ne soient "à l'origine de pathologies humaines", les associations affirment qu'il faut interdire la baignade sans limiter les autres activités récréatives "lorsque 100 000 cellules par millimètre de cyanobactéries sont dénombrées et lors de la présence d'écume".

 

La pollution de la Loue pourrait avoir de lourdes conséquences sur le tourisme. Les pêcheurs désertent les rives de la rivière. Selon la Fédération de pêche du Doubs, la rivière pourrait avoir perdu près de 80% de son cheptel. En outre, les professionnels du tourisme du Doubs s'inquiètent en cas d'interdiction de la baignade et de la pratique du canoé-kayak.

 

Tous les professionnels attendaient les décisions des services de l'Etat pour enfin savoir quoi répondre aux touristes et  aux pêcheurs. Le jeudi 3 juin, la préfecture du Doubs a pris un premier arrêté interdisant la consommation de toutes les espèces de poissons pêchés dans la Loue depuis sa source jusqu'au barrage de Quingey. Un second arrêté interdit l'utilisation de l'eau de la rivière Loue pour l'abreuvement du bétail.

 

La baignade et les autres activités nautiques ne sont pas, pour l'instant, interdites, sauf sur des sites où l'interdiction est antérieure par arrêté municipal, pour des motifs de sécurité.

 

Il est cependant recommandé d'éviter d'ingérer de l'eau, de prendre une « douche soignée » après la baignade ou l'activité nautique et de nettoyer le matériel et les équipements de loisirs nautiques. Une attention particulière doit être apportée aux jeunes enfants afin qu'ils n'ingèrent pas de substrats algaux ou d'eau ni ne jouent dans des zones d'eau stagnante.

 

Il est également recommandé de ne pas laisser approcher les animaux domestiques au bord de la rivière. Effectivement, les analyses faites sur un chevreuil retrouvé mort aux abords de la Loue ont établi la présence de cyanobactéries dans son organisme.

 

Des analyses régulières de l'eau sont effectuées par la DDT  (Direction Départementale des Territoires) pour suivre le phénomène et une recherche des causes de prolifération des cyanobactéries diligentée. Une source unique de cette pollution est peu probable. Il s'agit plutôt d'émissaires multiples dont la synergie engendre une détérioration de la qualité de l'eau débouchant sur une eutrophisation croissante des cours d'eau de notre région. Ci-dessous le résultat des prélèvements réalisés le 10 et le 19 juin 2010.

 

Prélèvements du 10 juin 2010

 

Pour chacun des sites, des prélèvements ont été réalisés dans la colonne d’eau seule et sur plusieurs substrats (galets, herbes, mousses...).


Les résultats confirment des concentrations importantes de cyanobactéries dans le substrat, quoique globalement légèrement en-deçà des semaines précédentes.


En ce qui concerne l’eau seule, les résultats sont inférieurs (voire très inférieurs) à 1000 cellules de cyanobactéries (cc) par ml d’eau pour les 5 prélèvements réalisés. Ceci est très inférieur aux seuils de vigilance pour la baignade, dont le premier niveau est fixé à 20 000 cc par ml d’eau.

 

Concentration en cyanobactéries

Com-

mune

Lieu

Prélève-

ments

Eau seule

Cc/ml

Prélèvements avec substrat (cc/ml)

Galets

Sable,

gravier

Macro-

phytes

Bryo-

phytes

Scey-

Maisières

N.-D.

Du

Chêne

38

484755

 

 

4053

Cléron

Grognard

335

 

212654

 

41725

Chenecey-

Buillon

Amont

Du

pont

42

391089

 

378632

 

Lavans Quingey

Moulin

de

Bellerive

0

 

 

47520

 

Rennes

sur

Loue

Pont

de

Rennes

561

 

 

10221

31082

Macrophytes : herbes, grandes algues
Bryophytes : mousses.

 

Prélèvements du 19 juin 2010

 

Concentration en cyanobactéries

 

Commune

 

Lieu

Prélèvements

Eau seule

Cc/ml

Prélèvements avec substrat (cc/ml)

Galets

Ouhans

Résurgence

0

364/1365

Mouthier

 

39

210

Rurey

Piquette

0

98

Quingey

 

8

282

 

Les résultats confirment une amélioration sensible des concentrations  de cyanobactéries dans le substrat. En ce qui concerne l’eau seule, les résultats sont bons pour les 4 prélèvements réalisés.

 

En ce qui concerne les analyses plus récentes, nous renvoyons le lecteur au site de la DDT du Doubs.

 

Le 4 novembre 2010, au cours d'une réunion interservices sur l'eau, le problème du peuplement piscicole de la Loue a été examiné. (voir Est Républicain du 5 novembre 2010).

Si les analyses révèlent une qualité d'eau "satisfaisante", on constate une forte baisse des densités de poissons. Il faut voir dans ce bilan le contre-coup de la prolifération de Cyanobactéries.

En effet, cet été, l'Onema (Office national de l'eau et des milieux aquatiques) a recensé dle peuplement pisciaire dans la Loue en différents points.  Jean-Michel Zammite, directeur interrégional de l'Onema, livre les premiers résultats : « En comparaison des chiffres obtenus en 1998-1999, on constate une forte baisse des densités de poissons, il y en a moitié moins à Mouthier, qu'on pensait pourtant peu touché, et sur les autres stations, on observe aussi une baisse. Les conditions de vie des poissons se détériorent sur l'ensemble de la haute Loue ». Les truites font en particulier les frais de cette dégradation.

Mme Humbert, directrice de la DDT (direction départementale des territoires) précise que des stations d'épuration et des installations classées ont été contrôlées et qu'aucune "anomalie majeure" n'a été constatée.

Le président du Conseil général, Claude Jeannerot, rappelle que « 40 millions ont été investis depuis 2004 pour que nos rivières soient propres ». Le Département porte plainte dès qu'il constate une suspicion de pollution ou une pollution.

Ces pics de Cyanobactéries observés dans la Loue au printemps et en été ne sont pas des cas isolés. Un programme d'expertise national va être mis en œuvre et la Loue en fera partie. « Les premières conclusions sont attendues fin mars et devraient nous permettre de travailler dès avril prochain ».

De son côté, la Commission de Protection des Eaux demande l'achat d'une station de mesure des polluants en continu, ce qui permettrait de voir au plus près ce qui passe dans la rivière. Si la prolifération de cyanobactéries a disparu aujourd'hui, rien ne dit qu'elle ne réapparaîtra pas au printemps prochain. Selon l'Onema, on observe un phénomène de dégradation continue de la Loue depuis 1999. Les effectifs des poissons sont en baisse et les classes de taille plus petites.

 

Voir également une mise au point du 6 novembre 2010 dans Macommune.info

 

Dans le même ordre d'idées, le collectif Sos Loue et rivières comtoises a adressé un recours gracieux au sujet de la pollution "très inquiétante" des rivières de Franche-Comté.

D'après le collectif qui s'est créé en 2010, l'état ne respecterait pas la directive européenne sur l'eau. Officiellement, les cours d'eau sont en bon état mais les poissons meurent comme au printemps 2010 avec des mortalités massives sur plus de 40 km sur la Loue. Cette action a fait l'objet d'un reportage de France 3 Franche-Comté diffusé le 18 janvier 2011.

 

La demande porte aussi sur les autres rivières qui constituent le sous-bassin du Doubs : le Doubs franco-suisse, l'Ain, le Dessoubre, le Lison, le Cusancin. "C'est à l'État", écrit le collectif d'associations, "de déterminer si des lois sont mal appliquées sur le bassin du Doubs ou si des politiques ont été mal conçues".

 

D'autres informations sur le blog de la vallée de la Loue : http://blog.france3.fr/vallee-de-la-loue/

 

Diversité et toxicité des cyanotoxines


Au moins 46 espèces de cyanobactéries, planctoniques et benthiques, ont le potentiel de produire des toxines (Ernst et al., 2005). Ces toxines se caractérisent par une grande variété de structures chimiques (petits peptides, alcaloïdes…) et de mécanismes de toxicité. En fonction de leur mode d’action, les cyanotoxines sont classées en hépatotoxines (microcystines par exemple), neurotoxines (anatoxines par exemple), cytotoxines, ou encore en dermatotoxines. En terme de mortalité, les poissons sont considérés comme plus résistants que les mammifères à la présence de toxines. En effet, les DL50 pour la microcystine (dose de toxine entraînant la mort de 50% des organismes) mesurées sur la carpe et la perche sont respectivement de 500 μg.kg-1 et 1500 μg.kg-1 de MC-LR* (Rabergh et al., 1991 ; Ibelings et al., 2005) alors qu’elles varient entre 50 μg.kg-1 à 300 μg.kg-1 de MC-LR* pour les mammifères (effets mesurés après injection intrapéritonéale et dépendant de l’espèce testée) (Sivonen et Jones, 1999). La toxicité des neurotoxines sur les mammifères, a été largement étudiée. Ainsi, les DL50 sur souris sont respectivement de 375 μg.kg-1 pour l’anatoxine-a, 250 μg.kg-1 pour l’homoanatoxine, 20 μg.kg-1 pour l’anatoxine-a(S) et 10 μg.kg-1 pour la saxitoxine (Kuiper-Goodman, 1999). À titre de comparaison, les DL50 sur souris de la toxine botulique est de 1,4 μg.kg-1 et de 350-1000 μg.kg-1 pour les venins de serpents de types cobras (selon l’espèce considérée). Les cyanotoxines sont donc des “poisons” relativement puissants et on comprend pourquoi, dans l’environnement, les neurotoxines ont été identifiées comme responsables de la mort de chiens (Gugger et al., 2005 ; Wood et al., 2007, 2010), de flamants roses (Krietniz et al., 2003) et de bétail (Mez et al., 1997). Concernant les effets de ces toxines sur les organismes aquatiques et en particulier sur les poissons, les données existantes concernent exclusivement des travaux en laboratoire. Ces études permettent d’apporter une information importante sur la toxicité potentielle des cyanotoxines, mais elles ne permettent pas d’évaluer les risques réels en milieux naturels en raison des protocoles utilisés concernant par exemple l’administration des toxines (injection), les doses injectées ou la durée d’exposition. Parmi ces études, il a été par exemple montré (Ernst et al., 2006 et 2007) que les microcystines (toxines hépatiques) produite par une cyanobactérie qui prolifère dans les lacs alpins, pouvaient induire un stress physiologique et des modifications de comportement chez le Corégone. Enfin, il faut signaler que pour les neurotoxines, aucune donnée n’est disponible sur leur transfert potentiel via les réseaux trophiques.

 

[1] Rappelons que les Cyanobactéries jouent un rôle fondamental dans l'évolution du monde vivant. Les eucaryotes actuels descendent d'une chimère ancestrale formée d'une cellule-hôte et de cellules bactériennes qui ont évolué en mitochondries. L'analyse du génome des chloroplastes qui assurent la photosynthèse dans les plantes et les algues confirme que ces organites dérivent de Cyanobactéries photosynthétiques.

Commentaires

je suis inquiéte pour cette pollution de la loue et navrée de voir notre beau patrimoine nature mourir du fait d'une pollution non interdite et insuffisamment surveillée.
Cordialement
S.Barboyon

Écrit par : Barboyon | 08/08/2010

quel dommage en cette période de restriction de tout bord,toutes cette clientelle touristique ''allemande,hollandaise,anglaise........''
venant enrichir région du haut doubs
et surtout pour moi avec un ami nous baignons du
1er janvier au 31 décembre et particulièrement
noêl et nouvel an quelques fois par moins 8°
recevez mes salutations

Écrit par : jean grandjean | 08/04/2011

Bonjour,
je n'arrive pas à trouver de résultats d'analyses de pollution de la Loue pour cette année. Ni à comprendre pourquoi seul le tronçon entre la source et Quingey est concerné, pensant que les poissons ne s'embarrassent pas de frontières ;-) Peut-on s'y baigner ? a-t-on trouver les origines de la pollution ? l'agriculture ?
merci de ta réponse
amicalement
patricia

Écrit par : Patricia Millot | 19/07/2011

Pour avoir connaissance des analyses récentes concernant la santé de la Loue, il faut se rendre, comme je le dis plus haut, sur le site de la DDT du Doubs : http://www.doubs.equipement.gouv.fr/rubrique.php3?id_rubrique=389

Écrit par : Guyard | 19/07/2011

Bonjour,

le problème des algues bleues suscite des commentaires plus ou moins précis. La présence du phosphore comme élément déterminant de la prolifération des ces algues est notoirement insuffisant. Il n'y a pas une seule cause pour cet effet ! Diable il faut réfléchir un peu en écologiste !!

En fait et je représente un "club" de scientifiques spécialisés dans le domaine de l'eau et de l'épuration, le problème des algues bleues a plusieurs causes; dont les sels nutritifs (azote et phosphore) sont certes un élément, mais ce n'est pas l'élément déclencheur.

Les proliférations d'algues bleues semblent directement liées à la présence des stations d'épuration biologiques à boues activées (libres ou fixées).
la densité de bactéries dans ces stations fait que le rejet des stations est contaminé par les produits toxiques (micropolluants non dégradés), mais aussi et surtout par les produits sécrétés et excrétés par les millions de bactéries que constituent une boue activée.
Ces produits ne sont pas détectés par les analyses de l'Administration (DBO5 et DCO) et donc pour l'Administration : tout est OK , cela fonctionne parafaitement. Pour nous autres spécialistes, on sait bien que ce n'est pas le cas.
le rejet d'une station d'épuration biologique est un concentré de toxiques plus dangereux que l'eau brute non épurée .
l'eau brute a un défaut : c'est le manque d'oxygène; l'eau épurée concentre tous les toxiques et en rajoute de par les excréments des bactéries (les animaux ne mangent en effet pas leurs excréments, les bactéries comme les autres ....)
L'eau brute d'égout rejetée dans une rivière : c'est la mort immédiate par manque d'oxygène, mais l'eau épurée par les stations actuelles c'est la mort lente par empoisonnement : quelle est la mort la plus écologique ???

En fait les produits rejetés par les bactéries de l'épuration entrent dans la chaine alimentaire des algues bleues, seuls être vivants à pouvoir recycler ces déchets de bactéries; c'est pourquoi, les sels nutritifs aidant, l'effet résultant des nutriments et des rejets de stations font proliférer les cyanobactéries à certains moments ou le débit est faible.

D'ailleurs sur la LOUE, les problèmes ont commencé après la mise en service de la nouvelle station de Pontarlier qui rejette dans le Doubs, qui se perd et rejoint la LOUE ( > 60% du débit à la source de la Loue à l'étiage)....
Il serait facile de démontrer la relation entre les stations d'épuration et les algues bleues, y compris les espèces toxiques ... mais cela remettrait en cause les process d'épuration glorifiés par l'Administration et ses thuriféraires : Veolia et Lyonnaise des Eaux avec saur et tuti quanti !

On dira ce qu'on veut des Autres, mais les américains semblent bien plus intelligents que nous autres puisqu'ils sont déjà passés à des systèmes d'épuration bien plus performants.

Écrit par : Bonvallot | 04/09/2012

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