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19/03/2016

Usage des pesticides aux Antilles et incidence sur la santé humaine

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 par André Guyard

 

Dernière mise à jour : 28/09/2018

 

En Guadeloupe, au cours des années soixante-dix, une thèse de médecine avait attiré l'attention sur l'incidence de l'emploi de pesticides dans les plantations de bananiers sur la santé humaine.

 

En effet, cette thèse montrait que le lait maternel des femmes de pêcheurs contenait une dose non négligeable de chlordécone, un insecticide de la famille des organo-chlorés interdit dès 1976 aux États-Unis et classé par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) comme potentiellement cancérigène pour l'homme en 1979. Cette constatation signifiait que les eaux de ruissellement et des rivières charriaient ce pesticide jusque dans les eaux marines. La population se contaminait en se nourrissant de fruits de mer et poissons par suite de la concentration du pesticide dans la chaîne alimentaire.

 

Cette observation entraîna une étude dirigée par Alain Kermarrec du laboratoire de Zoologie de la station de l'INRA de Petit-Bourg (Guadeloupe). L'équipe que je dirigeais alors à l'Université Antilles-Guyane était chargée de la récolte d'échantillons dans les cours d'eau et dans les eaux littorales. Cette étude a abouti à la publication d'un rapport en 1980 dénonçant l'utilisation des pesticides dans le traitement des bananiers.

 

Il aura fallu treize ans pour que le gouvernement français interdise définitivement l'utilisation de ce pesticide dans les Antilles françaises en 1993.

 

Dix ans après cete interdiction, une étude de Bouchon C. & Lemoine S. (2003), de l'Université des Antilles-Guyane, faisait un bilan de la rémanence des pesticides dans la chaîne alimentaire guadeloupéenne.

 

Très récemment, dans sa revue "Vivre" (n° 369 mars 2016) , sous la signature de Chloé Dussère, la Ligue contre le Cancer publiait un article soulignant un taux plus élevé de cancer de la prostate probablement lié à l'usage du chlordécone, article intégralement repris ci-dessous.

 

Antilles : Un taux plus élevé de cancer de la prostate

 

En Martinique et en Guadeloupe, les populations ont été exposées, plus longtemps qu'ailleurs, au pesticide chlordécone. Dans ces mêmes régions, la fréquence des cancers de la prostate est plus importante qu'ailleurs. Y a-t-il un lien de cause à effet ?

 

En Martinique : les sols contaminés à la chlordécone sont maintenant cartographiés.

  • La chlordécone a contaminé 37% de la surface agricole de la Martinique.
  • La préfecture de l'île a dressé la  cartographie des sols souillés, disponible sur son site web.
  •  Ce document est présenté comme un "outil d'aide à la décision" pour les agriculteurs afin de choisir les cultures sur les sols contaminés.

 

De 1973 à 1993, le chlordécone, un insecticide de la famille des organo-chlorés, est utilisé aux Antilles pour lutter contre un parasite du bananier : le charançon. En 1999, un contrôle de la qualité des eaux de consommation détecte la présence de ce produit, qui aurait contaminé non seulement les sols des bananeraies, mais aussi les légumes-racines fortement consommés dans ces régions (igname, madère...), certains animaux et le littoral, incluant poissons et crustacés, et certaines sources d'eau. Problème : le chlordécone est considéré comme perturbateur endocrinien et classé cancérogène possible pour l'homme par l'OMS. Plusieurs questions se posent alors : les populations sont-elles contaminées ? « En 2003, les premières mesures faites chez les femmes enceintes et leurs nourrissons, puis chez l'homme adulte, démontrent que le chlordécone est présent dans le sang de 90 % de la population », explique Luc Multigner, médecin épidémiologiste à l'Inserm.

 

Explosion du cancer de la prostate

 

Alors que les Antilles se caractérisent par des taux d'incidence de cancers, toutes localisations confondues, inférieurs à ceux de la France métropolitaine, le cancer de la prostate fait figure d'exception. Y aurait-il un lien entre l'exposition au chlordécone, plus importante aux Antilles qu'ailleurs, et la surincidence de ce cancer relevée en Guadeloupe et Martinique ? « En 2003, le programme de recherche Karuprostate qui a donné lieu à une publication dans le Journal of Clinical Oncology - nous a permis de comparer les caractéristiques de 709 personnes nouvellement atteintes du cancer de la prostate à 723 sujets indemnes de la maladie, précise Luc Multigner. Ce travail a permis de montrer que l'exposition au chlordécone augmente le risque de survenue du cancer de la prostate. »

 

D'autres facteurs de risque identifiés

 

Le programme de recherche a également relevé d'autres causes possibles de la forte prévalence du cancer de la prostate aux Antilles. D'abord, les populations d'ascendance africaine ont davantage tendance à développer un cancer de la prostate pour des raisons génétiques. Ensuite, la résidence de ces hommes dans un pays occidental joue également un rôle. « Un tiers des hommes interrogés sont partis travailler en métropole avant de revenir, poursuit Luc Multigner. Là-bas, ils ont vraisemblablement adopté les codes européens, notamment alimentaires, et se sont exposés à différentes pollutions qui pourraient contribuer à la survenue de la maladie. » Les antécédents familiaux apparaissent également comme un autre facteur de risque.

 

Les moyens d'action

 

Après l'interdiction du chlordécone, en 1993, les autorités sanitaires locales ont mené, à partir de 1999, plusieurs actions en vue de protéger les Antillais : pose de filtres à charbon pour limiter la contamination de l'eau, interdiction de certaines cultures sur les sols pollués, limitation de la pêche... De leur côté, des associations telles que la Ligue contre le cancer misent sur la prévention. « Nous rappelons régulièrement aux hommes la nécessité de se faire dépister à partir de 50 ans, et notamment d'accepter la réalisation d'un toucher rectal, raconte Dominique Chingan, président du Comité Guadeloupe de la Ligue contre le cancer. Mais il reste toujours difficile pour les hommes de parler de ce cancer, qui touche à la virilité. On a beau répéter qu'il existe désormais des moyens de pallier les désagréments de l'opération, les Antillais continuent de trouver cette maladie humiliante. »

 

Un pesticide au cœur des polémiques

 

Brevetée aux États-Unis en 1952, la molécule de chlordécone, commercialisée sous le nom de Képone, fait l'objet, en 1972, d'une autorisation provisoire de un an dans les bananeraies antillaises par le ministère français de l'Agriculture. Jusqu'en 1976, le chlordécone reste utilisé jusqu'à épuisement des stocks de Képone, avant d'être réintroduit en 1981 sous le nom commercial de Curlone. Depuis, ce pesticide suscite la polémique et la controverse, essentiellement aux Antilles, mais aussi en métropole. Et pour cause ! Le chlordécone a été autorisé à plusieurs reprises entre 1973 et 1993, et massivement utilisé dans les bananeraies de Guadeloupe et de Martinique, alors même qu'il avait été interdit dès 1976 aux États-Unis et que le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) l'avait classé comme potentiellement cancérigène pour l'homme en 1979. Malgré ces alertes, les grands planteurs antillais obtiennent l'homologation du chlordécone en 1981. La société Laurent de Laguarigue rachète le brevet et produit l'insecticide, sous le nom de Curlone. En 1990, ce produit est retiré de la vente en France, mais deux dérogations successives des ministres de l'Agriculture Henri Nallet et Jean-Pierre Soisson permettent son utilisation jusqu'en 1993. Quelques années plus tard, en 2006, l'Union régionale des consommateurs et l'Union des producteurs de la Guadeloupe, soutenues par l'avocat Harry Durimel, député des Verts, déposent une plainte contre X pour mise en danger de la vie d'autrui et administration de substance dangereuse, Cette plainte est aujourd'hui toujours en attente d'instruction au pôle de santé publique à Paris.

 

En savoir plus :

 

— Kermarrec A. (1980). — Niveau actuel de la contamination des chaînes biologiques en Guadeloupe : pesticides et métaux lourds (1979-1980).

 

— Bouchon C. & Lemoine S. (2003). — Niveau de contamination par les pesticides des chaînes trophiques des milieux marins côtiers de la Guadeloupe et recherche de biomarqueurs de génotoxicité.

 

— Observatoire des pesticides.

 

— Badot P.-M. (2017).— Des insecticides dans les assiettes antillaises En Direct n° 269 mars-avril 2017. p. 4.

 

— 02/05/2018 - Préfecture de la Martinique — Cartographie des sols de la Martinique pollués par la chlordécone.

 

 — 05-05-2018 :  Communiqué de la Préfecture de la Martinique

 

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01/04/2010

Les provocations de Claude Allègre

Outrés par les propos de Claude Allègre dans son dernier livre, L'imposture climatique, mettant en cause leurs travaux, 400 chercheurs se sont adressés au Ministre de tutelle, Valérie Pécresse pour dénoncer la position de l'ancien directeur de l'I.P.G. On doit rappeler que Claude Allègre n'en est pas à son coup d'essai de ses prévisions erronées : lors de l'éruption phréatique de la Soufrière de la Guadeloupe et contrairement aux avis de l'équipe Haroun Tazieff, c'est lui-même qui avait préconisé le déplacement en vain de 76 000 personnes pendant plus de six mois ?

L'analyse du livre par des journalistes de Sciences et Avenir, fustige l'ancien ministre.

 

allegre001.jpgLes provocations de Claude Allègre

 

par David Larousserie et Rachel Mulot

 

Accusations non étayées, attaques ad hominem : loin de toute démarche scientifique, l'ancien ministre, climato-sceptique déclaré, dérape dans sa démonstration.

 

Le succès médiatique du dernier livre de Claude Allègre, L'imposture climatique, porté par une vague de « climato-scepticisme »  (lire Sciences et Avenir, n° 757, mars 2010), oblige à revenir ici sur les erreurs et les manipulations qui l'entachent. Si la critique a des vertus, l'auteur osant revêtir les habits de Galilée -, hoqueter les mêmes arguments (vapeur d'eau, températures passées, etc.) en ignorant les réponses qui leur ont été apportées ne relève en rien d'une démarche scientifique. Le géochimiste feint toujours de confondre météorologie et climat, trouve dans les hivers froids un argument éclatant contre le réchauffement, alors qu'un réchauffement terrestre ne signifie pas une hausse linéaire des températures en toutes saisons et en tous lieux, comme l'expliquent les spécialistes.

 

Réfutant un lien dominant entre les dégagements d'origine humaine du CO2, et le climat, il écrit : "Tous les graphiques utilisés pour défendre cette idée se sont révélés faux et truqués." Or, leur fausseté n'est pas démontrée à ce jour, pas plus que le trucage, qui est une accusation grave. Et les preuves sont justement absentes de ce livre. Claude Allègre vitupère ainsi une courbe des températures passées dessinée en 1998 par l'Américain Michael Mann, mais passe sous silence le fait qu'une commission d'examen, certes critique, en a validé les principales conclusions et que d'autres équipes ont corroboré ces résultats depuis. Le Giec lui-même loin d'être l'institution "mafieuse", opaque et fermée aux débats qu'il décrit ne cache d'ailleurs pas dans son rapport de 2007 les discussions suscitées par ces reconstructions de températures. Enfin, en janvier dernier, une autre commission a blanchi ce chercheur de toute accusation de manipulation de données.

 

Claude Allègre n'échappe pas non plus aux contradictions. Tout en prétendant que les modélisations numériques sont incapables de prédire le climat, il développe ses propres prévisions en affirmant que le réchauffement sera bénéfique. "Les récoltes de blé en Ukraine [...] seront meilleures, qui s'en plaindra ? Les sols gelés de Sibérie vont se transformer en forêts : est-ce une menace pour la planète ?" À ce sujet, signalons que le dégel émettra du méthane, puissant gaz à effet de serre. Autre point navrant : les attaques ad hominem. Selon lui, le climatologue français Jean Jouzel, membre du Giec, n'aurait pas mérité sa médaille d'or du CNRS ; le climatologue américain Michael Mann serait ignorant des méthodes statistiques ; l'économiste britannique Nicholas Stem aurait été anobli par complaisance, etc. À marcher en mocassin sur la banquise, comme le montre le photomontage de couverture, on finit par déraper.

 

L'imposture climatique ou  la fausse écologie, Claude Allègre avec Dominique de Montvalon, Plon, 293 p., 19,90 €.

 

Allègre.jpg

Allègre fait la une de Charlie Hebdo

 

Commentaires :

 

Certains points de la "démonstration" de Claude Allègre méritent certaine attention.


Les mesures de température relevées au XIXe siècle n'avaient pas la précision des mesures actuelles. La lecture de thermomètres se faisait au degré près. Alors, comment justifier un réchauffement de 0,6°C quand la précision est de l'ordre de ± 1 °C ! De sorte que la courbe alarmante révélant un réchauffement brutal né lors de la révolution industrielle du XVIIIe siècle, repose sur des erreurs et des forçages…


D'autre part, l'examen des courbes de l'évolution des températures et de celles des variations du taux de carbone dans l'atmosphère révélées par l'analyse des carottes glaciaires montre un décalage dans le temps de ces courbes : celle des températures précédant celle du carbone !

 

Ces arguments sont repris par Benoît Rittaud dans son ouvrage : Le mythe climatique (Seuil 2010, 210 p., 17 €) dans le quel l'auteur conteste la thèse d'un réchauffement climatique dû aux émissions de dioxyde de carbone en n'omettant pas de citer ses sources.


L'analyse de ce livre a été faite par Didier Gordon (Pour la Science, mai 2010). qui souligne que "l'essentiel du livre est consacré à critiquer ce qu'il nomme le « carbocentrisme ». Selon l'auteur, les climatologues ne pensent pas tous que les émissions carbonées jouent un rôle majeur dans révolution du climat. Les cycles d'éruption solaire, les interactions de l'océan avec l'atmosphère, le fait que la vapeur d'eau contribue plus à l'effet de serre que le dioxyde de carbone, sont des éléments allant contre le carbocentrisme.


Si le carbocentrisme s'est imposé, c'est que la science est dans une période où on lui demande de résoudre des problèmes... À ce compte, elle a intérêt à annoncer des catastrophes et à se faire donner des crédits pour les déjouer. Dès lors, B. Rittaud dénonce l'existence d'une pseudoscience à l'œuvre dans notre société, la «climatomancie». Il en donne la définition que voici : art divinatoire visant à déduire du comportement humain l'avenir climatique de la Terre, dans l'idée de prescrire à chacun des actions de pénitence."

 

 Douche froide pour Claude Allègre


En octobre 2010, en affirmant que l’augmentation du CO2 dans l’atmosphère est liée aux activités humaines, l’Académie des Sciences a infligé à Claude Allègre et aux climato-sceptiques un cinglant désaveu. Depuis l’échec du sommet de Copenhague, les thèses des climato-sceptiques, faisaient la une de l’actualité. Claude Allègre dans son dernier ouvrage, L’imposture climatique mettait notamment en cause « l’objectivité et la qualité » des rapports du GIEC (Groupe intergouvernemental sur l’évolution du climat).