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29/05/2012

Recrudescence de séismes

séisme-sumatra-logo.jpgDes séismes en série

 

par Boris Bellanger (Sciences & Vie juin 2012)

 

Depuis 1900, la Terre a connu une première série de séismes de magnitude supérieure à 8,5 entre 1950 et 1965, puis une seconde série depuis 2004, et aucune entre ces deux périodes. D'après David Perkins, statisticien de l'USGS (Institut d'Études Géologiques des États-Unis), cette succession de séismes majeurs a peu de chance d'être le fruit du hasard. Une hypothèse contestée…

Au cours de cette seconde vague, quatre mégaséismes ont ravagé la planète en huit ans :

 

Sumatra, décembre 2004


Avec 280 000 morts, le premier mégaséisme de la série en cours entraîne une véritable hécatombe. Troisième séisme le plus puissant jamais enregistré, il touche l'océan Indien le 26 décembre 2004. De l'épicentre, situé à 200 km dans le nord-ouest de Sumatra, partent des vagues dévastatrices pouvant atteindre une quinzaine de mètres. Le tsunami fait également des dégâts en Inde, au Sri Lanka, et dans la corne de l'Afrique.

 

Chili, février 2010

 

Le séisme qui a frappé le Chili dans la nuit du 27 février 2010, a fait deux millions de sinistrés (voir article dans ce même blog). Il se classe sixième au rang des plus violents tremblements de terre des cent dernières années. Son épicentre ne se situe qu'à quelques kilomètres des côtes chiliennes, dans l'océan Pacifique. Les secousses, ressenties jusqu'à Santiago, à plus de 300 km au nord, provoquent un tsunami destructeur, avec des vagues allant jusqu'à 5 mètres qui ont ravagé les côtes. Les derniers bilans font état de 521 morts et 2 millions de sinistrés.

 

Japon, mars 2011


Le cinquième tremblement de terre le plus violent depuis un siècle restera dans les mémoires pour la catastrophe nucléaire qu'il a déclenchée. Mais le séisme qui a touché le Japon ce 11 mars 2011 était en lui-même mémorable. Il provoque un important tsunami, avec des vagues s'enfonçant jusqu'à 5 kilomètres à l'intérieur des terres, à une vitesse de 30 à 40 km/h. Elles détruisent tout sur leur passage. Au final, on dénombre près de 20 000 morts et disparus, 6000 blessés, et 125 000 bâtiments endommagés ou détruits.

 

Sumatra, avril 2012


Avec sa magnitude de 8,6, le tremblement de terre qui survient le 11 avril 2012 au large de l'Indonésie est le neuvième le plus puissant jamais enregistré depuis un siècle. Il frappe une région encore traumatisée par le séisme de décembre 2004. Dernier d'une série en cours, ses secousses, ressenties jusqu'à Singapour, en Thaïlande et en Inde, provoquent des scènes de panique dans la province d'Aceh, dans le nord de Sumatra, encore hantée par le souvenir du tsunami de décembre 2004. Cette fois, cependant, le séisme n'entraîne que des vagues de moins d'un mètre de haut. Les secousses causent la mort d'une dizaine de personnes.

 

Comment peut-on avoir un séisme aussi important à cet endroit ? Au lendemain du 11 avril 2012, Christophe Vigny (géophysicien à l'École normale supérieure de Paris) se perd en conjectures. C'est que, contrairement aux autres mégaséismes, qui se sont produits dans des zones de subduction (là où une plaque tectonique plonge sous une autre), celui de Sumatra résulte d'un mouvement horizontal de décrochement entre deux morceaux d'une même plaque. "La faille est verticale et environ 10 fois plus courte que les failles inclinées des zones de subduction détaille le géophysicien. Elle atteint donc plus rapidement la profondeur à partir de laquelle les roches ne sont plus cassantes." Or la magnitude d'un séisme est le produit de trois paramètres : la longueur de la faille, sa profondeur et l'intensité du glissement.

 

"Pour obtenir une telle magnitude avec une faille décrochante, il faudrait que la longueur de la faille ou le glissement soient beaucoup plus importants que ceux observés, remarque Christophe Vigny. À moins que la rupture n'ait été plus profonde qu'on ne le pense, ce qui soulève d'autres questions…"

 

Survenus en moins d'une décennie, ces quatre derniers séismes figurent dans le top 10 des plus violents séismes ayant secoué la planète au cours de ces 112 dernières années. Est-ce une simple coïncidence ? Ou bien une vulgaire épidémie ? Faut-il en particulier s'attendre à la survenue prochaine du fameux "big One", ce mégaséisme qui plane sur la côte ouest des États-Unis ? À la vue de ces spasmes à répétition, la question, en tout cas se pose : la Terre serait-elle entrée dans une période d'intense crise sismique ? Pour David Perkins, cela ne fait aucun doute. "Le nombre de séismes de magnitude supérieure à 8 survenus au cours de la décennie passée est quasiment le triple de celui mesuré sur les décennies du siècle précédent", constate ce statisticien de l'USGS, l'organisme américain qui surveille le pouls sismique de la planète. Et de rappeler que ce n'est d'ailleurs pas la première fois qu'une telle agitation est observée à la surface de notre planète.

 

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Entre 1950 et 1965, une autre série de mégaséismes

 

Outre la recrudescence des années 2000, une série de grands séismes apparaît nettement entre 1950 et 1965. Cette courte période concentre à elle seule sept des neuf plus puissants tremblements de terre du XXe siècle ! Parmi eux, trois dépassent la magnitude 9, dont le monstrueux séisme de magnitude 9,5 qui secoua le Chili en 1960. Étonnamment, à cette quinzaine infernale succédèrent près de quarante années au cours desquelles peu de secousses ont atteint la magnitude 8, et aucune la magnitude 8,5. La fin du XXe siècle a donc été exceptionnellement calme comparée à la première décennie du XXIe siècle, qui compte déjà deux monstres de magnitude 9 et 9,1...

 

Avant même le tout récent séisme de Sumatra, David Perkins en était persuadé : "Cette succession de séismes majeurs entrecoupée d'une période d'accalmie relative a peu de chances d'être le fruit du hasard."

 

Pour étayer cette assertion, le chercheur s'appuie sur des calculs de probabilité d'occurrence. En pratique, il produit aléatoirement des centaines de milliers de catalogues de sismicité et mesure la fréquence avec laquelle il obtient, par hasard, certaines caractéristiques du catalogue historique. Et d'après ses calculs, la probabilité que les cinq séismes de magnitude supérieure à 9 enregistrés depuis 1900 se répartissent par hasard dans le temps tel qu'ils l'ont été est inférieure à 2 %. Plutôt improbable, donc.

 

Et plus qu'un lancé de dés très malchanceux, David Perkins voit dans ces regroupements de mégaséismes l'expression d'un phénomène planétaire non identifié jusqu'alors. Avec son collègue Charles Bufe, il propose l'existence, à l'échelle du globe, d'un cycle sismique comparable au cycle décrit à l'échelle d'une faille géologique. C'est-à-dire que la Terre suivrait une séquence temporelle comprenant une longue phase d'accumulation de contraintes tectoniques, et une phase de libération de l'énergie accumulée, sous forme de séismes particulièrement puissants. Les deux chercheurs voient donc dans l'évolution de l'énergie libérée par l'activité sismique un motif régulier appelé à se répéter, selon un cycle global d'environ 70 ans, dont quinze au cours desquels les mégaséismes se manifesteraient à la chaîne (voir courbe ci-dessous). D'après leurs calculs, la terre oscillerait donc entre un état relativement calme et un état de crise sismique. Et la série noire actuelle ne serait pas l'effet du hasard.

 

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Des cycles sismiques contestés


Dans l'article qui détaillait pour la première fois leur théorie, ils constataient justement un regain d'activité sismique, et suggéraient qu'une nouvelle salve de tremblements de terre géants pourrait bien débuter. Or, cet article a été soumis pour publication sept mois avant que ne se produise le terrible séisme de Sumatra de 2004 et son tsunami dévastateur, et quelques années avant les mégaséismes suivants, au Chili et au lapon... "Il s'est passé ce que nous suggérions qu'il se passerait si ces essaims de gros séismes n'étaient pas dus simplement au hasard", remarque aujourd'hui David Perkins, qui ne croit pas avoir eu simplement de la chance en pariant sur un regain de colère de la Terre.

 

Cette proposition d'un supercycle sismique est toutefois loin de convaincre tout le monde. "L'approche statistique de Bufe et Perkins est biaisée, juge Peter Shearer, géophysicien de l'université de Californie à San Diego. Ils identifient dans le catalogue sismique des caractéristiques qui leur apparaissent anormales, et ensuite ils font des tests pour savoir quelle est la probabilité d'obtenir ces caractéristiques. En d'autres termes, ils formulent leur hypothèse après avoir sélectionné les données." Or, remarque le chercheur, n'importe quelle distribution obtenue de façon aléatoire peut donner une séquence d'événements qui semble, à vue d'œil, anormale. Par exemple, si l'on jette cent fois une pièce en l'air, elle peut retomber les dix premières fois du même côté. Ce qui peut paraître anormal. Une fois définie cette "anomalie", si on calcule après coup la probabilité pour qu'elle se produise, on la trouvera faible. Mais il ne faut pas pour autant y voir autre chose que le hasard... "Il faut faire des tests statistiques plus généraux sur la distribution passée des séismes, sans identifier au préalable des caractéristiques spécifiques, insiste Peter Shearer. Et on arrive à la conclusion que la séquence de séismes depuis 1900 ne peut être distinguée du résultat d'un processus aléatoire."

 

Un avis que partage Andrew Michael. Ce sismologue de l'USGS a lui aussi appliqué une batterie de tests statistiques aux archives sismiques de la Terre. "Les données du catalogue historique ne permettent pas de rejeter l'hypothèse selon laquelle les mégaséismes surviennent au hasard, conclut-il. La récente succession de grands tremblements de terre peut donc très bien être attribuée à une fluctuation dans un processus aléatoire." En clair : il n'y a pas de raison de soupçonner que les mégaséismes se manifestent à des moments en particulier ou qu'ils soient liés les uns aux autres. Reste que la prédiction de Perkins d'une entrée dans une nouvelle phase d'épidémie de mégaséismes a été faite avant le déclenchement de la série noire actuelle. Donc pas a posteriori, comme le reprochent ses détracteurs...

 

Mais comme le reconnaît Peter Shearer, le problème pour trancher la question est le manque de données - seulement cinq séismes de magnitude 9 depuis 1900. "On ne peut pas, sur la seule base des analyses statistiques, affirmer ni exclure qu'il y a une connexion entre les mégaséismes. Il se pourrait bien que ceux-ci surviennent par cycle, mais il n'y a pas assez d'événements pour l'affirmer avec certitude." Ce que confirme Christophe Vigny (ENS Paris) : "On ne saura s'il existe une cyclicité des séismes de magnitude 9 que lorsqu'on aura 500 ans de mesures de l'activité sismique du globe. Et encore ! Il faut plutôt se poser la question sur les mécanismes physiques sous-jacents qui expliqueraient pourquoi, certaines années, on aurait plus de grands séismes. Et là, je n'en vois aucun pour lier des séismes de cette taille à 20 000 kilomètres de distance."

 

Que des tremblements de terre en déclenchent d'autres n'est pourtant en soi pas une idée farfelue. Les sismologues savent depuis longtemps que lorsqu'un séisme majeur se produit à un endroit, il sera suivi localement par de très nombreuses répliques, de plus faible magnitude pour la majorité d'entre elles, et ce parfois pendant des années. On considère ainsi qu'un séisme de magnitude 9 déclenchera dans la région dix séismes de magnitude 8, cent de magnitude 7, mille de magnitude 6, etc. Le passage de l'onde sismique d'un séisme d'envergure peut aussi faire basculer des failles beaucoup plus éloignées et qui étaient sur le point de rompre. L'équivalent géologique de la goutte d'eau qui fait déborder le vase... Des études ont ainsi démontré que des séismes qui se sont produits aux États-Unis en 201l étaient associés aux mégaséismes du Chili en 2010 et du Japon en 2011, ou que des secousses en Chine en 2004 étaient le fruit du tremblement de terre de Sumatra. "Le déclenchement de séismes à distance n'est plus un sujet controversé, constate Nicholas Van der Eist, de l'université de Californie à Santa Cruz. Cependant, au-delà de quelques centaines de kilomètres de distance, aucun séisme de magnitude supérieure à 5 n'a pu être relié au passage de l'onde d'un séisme majeur".

 

Peut-on lier des mégaséismes éloignés ?


Autrement dit, il semble bien que les gros séismes n'en enfantent, à grande distance, que des petits. Reste que ces petits séismes vont à leur tour déclencher localement des répliques qui, en de très rares occasions, peuvent être plus puissantes que la secousse qui leur a donné naissance. De quoi faire le lien entre les mégaséismes éloignés ? Cette possibilité de cascade de séismes vient d'être analysée de près par Nicholas Van der Eist. "Si l'on considère une séquence de répliques liées à un petit séisme déclenché à distance par un tremblement de terre majeur, il est très peu probable qu'elle contienne un événement plus important que le petit séisme initial, détaille le géophysicien. Mais si un grand nombre de ces séquences de répliques sont initiées à l'échelle du globe, la probabilité cumulée que quelques-unes finissent par produire un gros séisme peut devenir plus importante."


Nicholas Van der Eist a donc regardé si, lorsqu'un puissant séisme se produit quelque part dans le monde, on observait un accroissement de la fréquence des petits séismes dans les régions où un tremblement de terre majeur allait ultérieurement se manifester. Par exemple, si le séisme de Sumatra en 2004 avait déclenché à distance une séquence de faibles secousses au Chili ou au Japon dans les zones où sont nés les monstres de 2010 et 2011. "Nous n'avons trouvé aucun signe d'une cascade d'événements qui pourrait expliquer l'augmentation actuelle du nombre de grands séismes", reconnaît le sismologue.

 

David Perkins ne désarme pas et prépare un nouvel article pour répondre aux critiques : "Il doit y avoir un mécanisme qui n'a pas encore été pris en considération, un moyen par lequel les gros séismes communiquent." Mais la distance n'est pas le seul obstacle à surmonter pour ce mécanisme encore inconnu. "Si un tri mécanisme de déclenchement existait, il faudrait encore expliquer pourquoi lors des périodes où le nombre de grands séismes est au-dessus de la moyenne historique, il n'y a pas plus de séismes de moindre magnitude, réplique Peter Shearer. Je ne vois pas comment ce mécanisme favoriserait la survenue des uns et pas celle des autres." Pour l'heure, en l'absence de signes statistiques décisifs et de mécanismes sismiques précis, la prudence convient plutôt de tenir la multiplication de puissants séismes pour de la pure coïncidence. "Mais la question est importante", remarque Peter Shearer.

 

 Dans l'attente du prochain…


Au-delà du débat scientifique, l'enjeu est vital : il s'agit de savoir si le risque pour les populations est aujourd'hui plus élevé qu'auparavant. "D'après nos calculs, si les grands séismes sont bien regroupés dans le temps, la probabilité d'avoir un séisme de magnitude supérieure à 8,6 dans les cinq années à venir est de 95 %, persiste David Perkins. Il faut s'y préparer." En particulier sur la côte ouest des États-Unis.

 

Là encore, peu de spécialistes sont d'accord avec ce pronostic alarmant. "La récente recrudescence de séismes majeurs n'a aucun pouvoir prédictif pour l'avenir", s'insurge ainsi Andrew Michael. Reste que les mégaséismes ne sont pas des événements parfaitement isolés les uns des autres. "Si dans les endroits où il n'y a pas eu d'activité sismique récente, comme la Californie et l'Alaska, le risque est à mon sens le même aujourd'hui qu'avant, la menace est certainement plus importante dans les régions comme Sumatra, le Chili, et le Japon qui ont récemment connu des mégaséismes", relève Peter Shearer.

 

Le séisme du 11 avril 2012 en est l'illustration parfaite, puisqu'il est lié à celui de Sumatra en 2004. Face à la complexité conjuguée des lois du hasard et de la sismologie, la science reste incapable de trancher. Et nous n'avons pas d'autre choix que d'attendre d'autres éventuels cataclysmes pour savoir si notre planète est en pleine épidémie. Condamnés à subir les caprices de la Terre, nous ne pouvons finalement être sûrs que d'une chose : hasard ou pas, la Terre nous fait vivre ces dernières années une terrible série noire.


 Peut-on prévoir les séismes ?


 Observer le ciel pour anticiper les tremblements de terre. Ce qui pourrait ressembler à une ancestrale pratique divinatoire est en réalité la très sérieuse proposition formulée par Kosuke Heki, géophysicien de l'université d'Hokkaido, au Japon. Celui-ci affirme avoir détecté un signe avant-coureur du mégaséisme qui a frappé l'archipel nippon en mars 2011. Une perturbation dans l'ionosphère, à 300 kilomètres d'altitude, repérée grâce au réseau de 1200 stations GPS qui quadrillent le pays (figure ci-dessous). "On savait déjà que les séismes génèrent des ondes acoustiques qui perturbent l'ionosphère après la secousse, explique Kosuke Heki. Ce que j'ai mis en évidence, c'est l'augmentation du contenu en électrons dans l'ionosphère qui débute 40 minutes avant le séisme !" Autrement dit : un potentiel signe précurseur des mégaséismes susceptible, s'il est confirmé, de sauver des centaines de milliers de vies... Point remarquable, le phénomène s'amplifie au fur et à mesure qu'on se rapproche de l'heure du tremblement de terre, et est plus marqué au-dessu de l'épicentre.

 

Fort de cette découverte, Kosuke Heki s'est penché sur deux autres séismes majeurs, celui du Chili en 2010 et celui de Sumatra en 2004. Dans les deux cas, il observe une anomalie similaire avant la secousse. "L'affirmation selon laquelle les séismes sont intrinsèquement imprévisibles n'est peut-être pas exacte, du moins pour les séismes de magnitude 9", lance le chercheur.

 

Mais cette annonce reçoit un accueil prudent. "L'ionosphère est un milieu excessivement variable, prévient ainsi Michel Parrot (CNRS), responsable du programme Demeter, satellite dédié à la recherche de signaux précurseurs. La météo ou les humeurs du Soleil perturbent régulièrement l'ionosphère. Il est donc difficile d'affirmer que l'anomalie observée est strictement liée à l'imminence d'un séisme." Une réserve partagée par Christophe Vigny (ENS, Paris) : "Je pense qu'il ne s'agit que d'une coïncidence fortuite. Mais il faudrait faire un vrai travail statistique : regarder combien de fois on détecte cette perturbation ionosphérique sans qu'il n'y ait de séisme par la suite. Sans cela, on ne pourra pas utiliser comme base d'un système d'alerte."


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Sources :

  • Boris Bellanger, Mégaséismes, l'épidémie ? Sciences & Vie n°1137 juin 2012, pp. 70-80.
  • Charles G. Bufe and David M. Perkins. The 2011 Tohoku earthquake: resumption of temporal clustering of Earth’s megaquakes. Seismological Society of America meeting, Memphis, April 14, 2011.
  • Charles G. Bufe and David M. Perkins. Evidence for a Global Seismic-Moment Release Sequence, Bull. Seismol. Soc. Am., June 2005. DOI: 10.1785/0120040110
  • Andrew J. Michael. The recent rate of great earthquakes: global clustering or random variability ? Seismological Society of America meeting, Memphis, April 14, 2011.
  • Earle, P. S., S. Rost, P. M. Shearer, and C. Thomas, Scattered P'P' waves observed at short distances, Bull. Seismol. Soc. Am., 101, 2843-2854, doi: 10.1785/0120110157, 2011.
  • Shearer, P. M., and P. B. Stark, Global risk of big earthquakes has not recently increased, Proc. Nat. Acad. Sci., 109, 717-721, www.pnas.org/cgi/doi/10.1073/pnas.1118525109, 2012.
  • Sumiejski, P. E., and P. M. Shearer, Temporal stability of coda Q^-1 in southern California, Bull. Seismol. Soc. Am., 102, 873-877, doi: 10.1785/0120110181, 2012.
  • Chen, X., P. M. Shearer, and R. E. Abercrombie, Spatial migration of earthquakes within seismic clusters in Southern California : Evidence for fluid diffusion, J. Geophys. Res., 117, B04301, doi:10.1029/2011JB008973, 2012.

 

Séismes en Italie (Complément)

En cette fin de mai 2012, l'Italie est durement touchée par une série de séismes, qui, s'ils n'atteignent pas la magnitude des séismes géants décrits plus haut, n'en sont pas moins destructeurs.

 

19-20 mai 2012 : un fort séisme frappe le nord-est de l'Italie

 

Le nord-est de l'Italie, industriel et très peuplé, a été réveillé dans la nuit de samedi à dimanche 20 mai 2012 par un fort séisme qui a fait au moins six morts, des dizaines de blessés, et détruit des hangars d'usines, des habitations et clochers autour de la ville de Ferrare, au patrimoine historique classé. Le séisme, de magnitude 5,9 et survenu à 10 km de profondeur, avait son épicentre à Finale Emilia, à 36 km au nord de Bologne, dans la zone de Modène.

Un nouveau séisme de magnitude 5,1 a frappé dimanche après-midi la zone entourant Ferrare, dans le nord-est de l'Italie, a annoncé l'institut de géophysique.

 

Parmi les victimes figurent quatre ouvriers qui travaillaient de nuit dans des usines. Deux femmes sont décédées après avoir été prises de malaise à la suite du déclenchement du séisme.


Sous l'impact, plusieurs maisons et clochers d'églises de la région se sont écroulés, et des hôpitaux ont été évacués par mesure de sécurité. À Bologne et dans d'autres villes, des milliers d'habitants réveillés au milieu de la nuit sont descendus paniqués dans les rues.

 

Les premières images diffusées par les télévisions montraient des maisons à demi écroulées, des amoncellements de gravats sur les routes, des corniches d'églises ou de tours détachées.. Dimanche après-midi, environ 3 000 personnes ont dû être évacuées de leurs habitations en Émilie-Romagne, entre Modène et Ferrare.

 

Sous l'impact de ce séisme, qui est équivalent dans son intensité à celui de L'Aquila en 2009, plusieurs joyaux architecturaux de villages proches de Ferrare ont été endommagés. Des dégâts importants sont ainsi survenus dans la petite ville de San Felice, où une église s'est écroulée. De nombreux monuments historiques, dont l'hôtel de ville, y ont été endommagés, leurs murs lézardés. Dans la région de Bologne, la partie supérieure d'une tour du château de Galeazza s'est détachée. "Selon les premières consultations, les dégâts au patrimoine culturel sont importants", indique le ministère des biens et activités culturels italiens. Plusieurs hôpitaux ont été évacués par mesure de sécurité, dans la crainte de nouvelles secousses.

 

Le 29 mai 2012 : nouveau séisme qui a frappé le nord de l'Italie, à San Felice sul Pannaro

 

Une nouvelle secousse a été ressentie après le puissant séisme de magnitude 5,8 qui a touché mardi 29 mai 2012, vers 9 heures, le nord de l'Italie, non loin de Modène. Au moins seize personnes ont perdu la vie dans cette première secousse, selon la chaîne de télévision italienne Sky Tg24. La deuxième secousse est également d'une magnitude supérieure à 5.

 

Parmi elles, trois personnes sont mortes à San Felice del Panaro dans l'effondrement d'une usine, deux dans la localité proche de Mirandola, une à Concordia et une autre à Finale, a indiqué le commandant des carabiniers de Modène, Salvatore Iannizzotto.


L'épicentre se trouvait en Émilie-Romagne, une région déjà frappée il y a neuf jours par le précédent tremblement de terre. Les médias italiens ont rapporté que la nouvelle secousse avait provoqué l'effondrement de bâtiments déjà endommagés lors de ce précédent séisme. Depuis, plusieurs milliers d'habitants dormaient sous la tente par crainte de répliques.

 

La secousse a été ressentie dans tout le centre-nord de l'Italie. Depuis une dizaine de jours, la péninsule a enregistré de nombreux tremblements de terre, dans le Nord comme dans le Sud, touché lundi 28 mai 2012 par un séisme de magnitude 4,3.

 

Le président de l'Institut national de géophysique et de vulcanologie (INGV), Stefano Gresta, s'est montré préoccupé pour la suite : "La séquence [des secousses] sera longue et on ne peut exclure que d'autres séismes forts puissent se produire".

20/05/2012

La Vipère Péliade : Vipera berus

Péliade-mélanique_03-logo.jpgLa Péliade : Vipera berus

 

par Michel Cottet

herpétologue

 

La Péliade est une vipère au corps épais. Contrairement à celle de l'Aspic, la tête est moins distincte du cou et avec un museau arrondi. L’iris des yeux est orangé-rougeâtre à noirâtre et la pupille se présente en fente verticale. Les écailles dorsales sont carénées et la queue est très courte. La coloration dorsale peut être gris blanchâtre, argenté ou clair, ou encore jaunâtre, rougeâtre, cuivrée ou noire. La tête s'orne souvent d'un motif en "X" ou en "V" et d'une bande qui s'étend de chaque côté du bord externe de l'œil au cou. Toute la face dorsale porte une large bande en zigzag d'un brun très sombre ou d'un noir profond chez le mâle où elle ressort très nettement (brun plus clair ou chocolat et moins contrastée chez la femelle). De grandes taches sombres s'alignent sur les flancs. La face ventrale plus ou moins nettement finement tachetée est gris-brunâtre et l’extrémité du dessous de la queue est blanc jaunâtre à orange.

 

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La queue est très courte

 

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La couleur de la livrée est variable

Cliché F. Wendler

 

Dans les tourbières jurassiennes, la Péliade présente assez fréquemment une livrée entièrement noire en harmonie avec la couleur de la tourbe. Cette livrée mélanique apparaît avec l'âge, les jeunes à la naissance présentent la coloration et les ornementations décrites ci-dessus.

 

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Péliade de tourbière à la livrée mélanique

cliché Michel Cottet

 

Longueur totale 55-60 cm, rarement jusqu'à 70, exceptionnellement jusqu'à 80 cm.
 
La Péliade a une aire de répartition importante, d’où son nom en anglais de « common adder = vipère commune », mais, en réalité les populations sont très dispersées et elle est en régression partout. Elle n’est présente que ponctuellement dans les biotopes qui lui restent favorables. On la trouve dans toute l'Europe du Nord et du Centre (sauf l'Irlande), ainsi qu'en Asie centrale jusqu'au fleuve Amour et à l'île de Sakhaline. En France, on la rencontre dans le Nord, en Bretagne et Normandie, dans une petite partie du Haut Doubs et du Haut Jura et dans le massif Central.

 

La Péliade aime les biotopes soumis à d'importants écarts de température pourvu que le taux d'humidité du sol et de l'air soit élevé. Elle fréquente les bords de chemin ensoleillés, broussailleux et herbeux, les lisières, bois clairs ou défrichés parsemés de souches et envahis de ronces et d'orties, les marécages tourbeux, les bosquets humides, les versants d'éboulis couverts de végétation. La Péliade vit de la plaine jusqu'à 3 000 m d'altitude en montagne.

 

La Péliade sort généralement de sa cachette très tôt le matin, alors qu'il fait encore froid et sombre. Elle rampe jusqu'à un endroit déterminé que le soleil atteint bientôt et se roule en galette ou en larges méandres. Dans les tourbières, elle affectionne le sommet aplati des touradons [1]. Dès que le soleil apparaît, la Péliade étale son corps le plus possible afin de capter le maximum de chaleur. Elle reste ainsi exposée jusqu'à ce que sa température interne atteigne environ 33°C, ce qui lui permet de disposer de toutes ses facultés. Elle se retire alors dans une cachette ombragée ou se met en quête de nourriture. En fin d'après-midi, elle cherche à nouveau un endroit exposé au soleil ou ayant emmagasiné de la chaleur, afin de se réchauffer à nouveau.

 

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Péliade non mélanique (Bonnevaux, Doubs 09/06/2012)

Cliché Michel Cottet

 

La Péliade chasse le jour et au crépuscule. Elle est particulièrement active quand il fait chaud, lourd et orageux, ou après de longues périodes de mauvais temps. Par grand vent, elle demeure dans son abri.

 

Les péliades s'accouplent en avril-mai. L'accouplement peut avoir lieu à toute heure du jour, mais surtout le soir et la nuit. Une femelle est souvent courtisée par plusieurs mâles qui se livrent des combats symboliques, les "danses de vipères" : quand ils se rencontrent, ils rampent par à-coups dans la même direction se dressent côte à côte, s'enroulant souvent les uns sur les autres, Puis ils essaient de se pousser par l'avant du corps qui est dressé, glissent et retombent. Ils peuvent également se donner des coups de tête. Cette "danse" dure jusqu'à ce qu'un des mâles se sente inférieur et prenne la fuite.

 

Le mâle doit souvent faire longuement la cour à sa dame avant qu'elle accepte ses avances. Il rampe alors sur son dos, cherchant à la stimuler en lui maintenant la queue plaquée au sol et en sortant vivement la langue dans sa direction. Tout comme la parade nuptiale, l'accouplement peut durer des heures. Il ne peut pas être interrompu brusquement et deux vipères accouplées sont très embarrassées pour prendre la fuite en cas de danger. La durée de la gestation varie fortement selon la région et les conditions climatiques, elle peut excéder 5 mois. Les 10 à 14 vipéreaux, rarement jusqu'à 20, mesurent à la naissance entre 14 et 23 cm. Ils naissent enveloppés dans une membrane transparente dont ils se délivrent immédiatement ou presque. Après la parturition, la femelle est amaigrie et toute fripée.

 

La Péliade se retire en octobre sous une souche, dans un terrier ou sous des rochers à l’abri du gel pour hiverner. Les endroits confortables abritent souvent plusieurs vipères qui hivernent ensemble, ou en compagnie de lézards vivipares, d'orvets ou d'amphibiens. L'hibernation se termine en mars-avril, souvent avant que toute la neige ait totalement fondu, ce qui est le cas dans les tourbières du Haut-Doubs (altitude de 800 à 1200 m). Elle quitte alors son lieu d'hibernation pour se chauffer au soleil à l'abri du vent et capter le maximum de chaleur. Son mélanisme lui permet d'atteindre une température interne très supérieure à la température extérieure. Elle reste ainsi exposée et devient active quand sa température interne atteint environ 33°C.


 
La Péliade se nourrit essentiellement de rongeurs, mais selon les biotopes, elle peut aussi se nourrir de grenouilles rousses, ou encore de lézards vivipares ou de musaraignes. En général, elle chasse à l'affût, épiant les proies qui passent, mais elle arpente aussi les broussailles ou les terriers. Quand elle a repéré une souris, elle essaie de s'en approcher lentement. Après avoir mordu sa proie, elle la relâche généralement et attend que le venin agisse. Souvent la souris parcourt encore quelques mètres avant de mourir. La vipère reste alors un certain temps sur place, ouvre grand sa bouche pour replacer ses mâchoires qui sont très mobiles l'une par rapport à l'autre, agite vivement la langue, et se met à rechercher sa proie. Elle s'oriente pour cela exclusivement grâce à son odorat qui est très fin et par un organe particulier qui lui transmet des information olfactives captées par la langue. Une fois qu'elle a trouvé la trace, elle la suit rapidement. Elle avale généralement la proie la tête la première et la déglutition peut durer 10 à 15 minutes ou plus. Une vipère adulte peut avaler à la suite deux à trois souris. Pour faciliter la digestion, elle s'installe alors dans un endroit chaud.

 

L'un des grands ennemis de la Péliade est le Hérisson. Il n'est nullement immunisé contre le venin, mais ses aiguilles le protègent des morsures. La Péliade a bien d'autres prédateurs : putois, sangliers, ainsi que de nombreuses espèces d'oiseaux, telles que les corvidés, les rapaces nocturnes (chouettes...) et diurnes (épervier, buse, circaète...), les hérons et cigognes. Mais son pire ennemi est toujours l'Homme qui lui livre encore une chasse sans merci dans de nombreuses régions et qui détruit des biotopes en asséchant des marais ou en étendant ses cultures.

 

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Les morsures de la Péliade sont rares et exceptionnellement mortelles, mais elles peuvent avoir des conséquences graves, provoquant des douleurs intenses et occasionnant parfois des séquelles qui mettent longtemps à se résorber totalement. Les morsures de vipère sont souvent liées à un comportement imprudent. Dans les régions où vivent les péliades, il faut éviter de marcher pieds nus et faire attention où l'on pose les pieds et les mains quand on ramasse des baies ou des champignons. En général, les péliades s'enfuient bien avant que l'Homme ne les remarque. Mais si on les surprend, elles s'enroulent sur elles-mêmes et mordent immédiatement.

 

Sources :

— Diesener G. & Reichholf J. (1986). — Les batraciens et les reptiles. 287 p. Éd. Solar.

 
— Pertti Viitanen (1967). — Hibernation and seasonal movements of the viper, Vipera berus berus (L.), in southern Finland, Annales Zoologici Fennici Vol. 4, N° 4 (1967), pp. 472-546.


[1] Mottes arrondies surélevées (40 à plus de 60 cm de haut) formées dans les tourbières ou zones humides paratourbeuses par la pousse annuelle de certaines graminées comme la Molinie.

La Vipère Aspic Vipera aspis

Vipère aspic—05logo.jpgLa Vipère Aspic Vipera aspis

 

par Michel Cottet,  herpétologue

 

(dernière mise à jour : 18 août 2016)

 

L'Aspic est un serpent de taille moyenne à tête triangulaire nettement distincte du cou.

 

L’iris des yeux est généralement de couleur jaune d’or à pupille verticale noire. Le museau est légèrement retroussé, les écailles carénées et la queue courte. La coloration est très variable, allant du gris clair, brun gris, jaunâtre, brun au rouge brique. La face dorsale est généralement ornée d'un motif composé de taches foncées alignées en deux rangs décalés. Mais on observe aussi des motifs en zigzag ou en ligne ondulée, entière ou interrompue ou/et fractionnée. Les flancs portent aussi des taches foncées, plus ou moins grandes et plus ou moins mates. La coloration ventrale, uniforme, va du jaunâtre gris au mauve jusqu’à noirâtre, parfois avec des minuscules ponctuations plus ou moins distinctes, Les mâles arborent des couleurs plus vives avec des motifs noirs plus larges et nettement plus contrastés ; ils sont légèrement plus grands que les femelles. Longueur totale adulte 65-85 cm.

 

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Cliché Michel Cottet

 

Chez cette espèce,  comme chez la Péliade, les individus mélaniques sont "relativement" fréquents en montagne ; nous avions déjà fait des observations dès 1976 en Autriche dans le massif des Totesgebirge, sur des sentiers en montagne, aux environs de 2000 m d'altitude lors d'expéditions spéléo. Des observations répétées de temps en temps, toujours en montagne. Je n'en ai vu qu'une seule fois dans le Haut Jura, au hameau de La Rageat à Lavans les St-Claude, en direction du Lac d'Antre.

Ci-dessous, un morphe mélanique, l'un des deux spécimens trouvés écrasés dans un parking  au col de Pierre Carrée, (les Carroz d'Araches, Hte-Savoie) le 15 août 2016.

 

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Vipera aspis mélanique écrasée

© Michel Cottet

 

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Cliché Michel Cottet

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L'Aspic est une espèce plutôt méridionale, répandue au nord-est de l'Espagne, presque sur toute la France à l'exception du nord-ouest, en Italie, Sicile, Elbe, Montecristo, Suisse et sud de la Forêt-Noire.

 

L'Aspic aime surtout les biotopes secs et ensoleillés. On le rencontre souvent dans les bosquets envahis par les broussailles, les lisières et sur les pentes rocailleuses.

 

L'Aspic quitte son abri très tôt le matin, alors qu'il fait encore frais. Il cherche une place au soleil et s'y installe, roulé en galette ou étalé en méandres souples. Avec une température externe de + 4 °C et une température corporelle d'environ 15 °C, l'Aspic arrive à atteindre en une heure sa température optimale, soit 29 °C.  

 

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 Clichés Michel Cottet

 

L'Aspic chasse surtout des petits rongeurs, particulièrement des campagnols, et plus rarement des lézards et des oisillons.

 

L'Aspic découvre ses proies en restant posté immobile, à l’affût, ou encore en arpentant son territoire, inspectant également terriers et fentes rocheuses, Il mord une première fois, puis attend un certain temps que le venin agisse en paralysant la proie avant de se remettre à sa recherche. Il se fie pour cela à son odorat très fin. La proie est généralement avalée la tête la première.

 

Au début du printemps, à la sortie de l'hibernation et alors que l'air ne se réchauffe que lentement, les vipères passent souvent des heures étendues au soleil. Quand l'emplacement choisi devient trop chaud (l'Aspic supporte jusqu'à 37°C environ), la vipère se retire dans un lieu semi-ombragé ou dans sa cachette préférée, ou se met à parcourir son territoire. Quand la température ambiante est basse et lorsque la vipère traverse une grande zone ombragée, sa température interne baisse fortement. Elle cherche alors à s'exposer au soleil pour retrouver sa température optimale. L'été, la vipère doit souvent sortir de son trou avant le lever du soleil pour étancher sa soif. La température de son corps étant trop basse, elle rampe lentement et maladroitement dans la rosée.

 

L’Aspic est territorial, sédentaire et se déplace peu, migrant seulement de façon saisonnière au printemps en sortant d’hibernation, pour les accouplements, puis gagnant son territoire d’estive et enfin retournant à son lieu d’hivernation aux premiers froids (petite cavité naturelle, fissure abritée du gel, petite grotte, terrier abandonné…). Il est plus sensible au dérangement que la plupart des couleuvres ; il est de plus en plus rare et dans certains secteurs, menacé de disparition.

 

Les services rendus par sa consommation importante de campagnols ne sont pas assez connus des acteurs du monde rural et en particulier des agriculteurs qui souffrent des dégâts des rongeurs sur les prairies fournissant le fourrage indispensable aux élevages de bétail herbivore.

 

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Cliché Michel Cottet

 

Les mâles sortent de l'hibernation dès le début du printemps, suivis quelque 10-15 jours plus tard par les femelles. En période de reproduction, les mâles déploient une grande activité avec des préliminaires et des combats rituels avant les accouplements ; ils circulent alors beaucoup, ne prenant pas ou peu de nourriture.

 

Quelque temps avant la mue - qui survient régulièrement et s'annonce par le ternissement des couleurs et l'opacification de l'œil -, la vipère s'abstient également de s'alimenter.

 

L'accouplement a lieu parfois dès fin février et surtout en mars-avril en Franche-Comté. Le cycle reproducteur de la femelle n'est pas encore connu avec précision, mais dans la majorité des régions les vipères s'accouplent chaque année. L’Aspic est ovovivipare. Les 4 à 15 vipéraux, longs de 18 cm environ, naissent en août-septembre. Les vipères Aspics connaissent souvent en septembre ou début octobre une nouvelle période d'accouplement, avec des rituels plus courts.

 

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Cliché Michel Cottet

 

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Femelles gravides © Michel Cottet 25/08/2013 Sancey le Grand (Doubs)

 

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Femelles gravides © Michel Cottet 25/08/2013 Sancey le Grand (Doubs)

 

Source :

Diesener G. & Reichholf J. (1986) - Les batraciens et les reptiles. Ed. Solar.

Médecine et génomique à l'Institut Pasteur

médecine,génomiqueMédecine et génomique à l'Institut Pasteur

 

Nous ne sommes pas tous égaux devant les maladies

 

"Tous les hommes sont égaux, mais certains sont plus égaux que d'autres" écrivait Georges Orwell. Ceci est un peu vrai face à la maladie. Si certaines pathologies sont provoquées par des mutations dans un gène unique, la plupart des maladies courantes ont à la fois une composante environnementale (nutrition, activité physique, etc.) et génétique – en témoignent les questions de nos médecins sur nos antécédents familiaux. Et qu'il s'agisse de diabète, d'asthme, de maladie d'Alzheimer, de cancers ou de maladies infectieuses, de multiples variations dans de multiples gènes interviennent.

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Des facteurs génétiques de prédisposition ou de protection

 

Certaines nous rendent plus vulnérables face à une maladie donnée – elles touchent des gènes "de prédisposition" – d'autres au contraire nous en protègent. Une mutation dans les gènes BRCA1 ou BRCA2 confère par exemple aux femmes qui la portent (2 sur 1 000) un risque de 40 à 80 % selon l'âge de développer un cancer du sein. Les rares individus porteurs d'une mutation du gène CCR5 sont eux résistants à l'infection par le virus du sida. D'autres gènes conditionnent la réponse aux traitements. Ainsi, 11 % des patients réagissent mal à une molécule, la mercaptopurine, utilisée pour traiter certaines leucémies. Chez eux, une activité réduite de l'enzyme TMPT freine l'élimination du médicament, induisant des effets très toxiques. Un test génétique est donc désormais recommandé aux États-Unis afin d'éviter ce traitement ou de rappliquer à très faibles doses chez ces patients.

 

Pour appréhender l'ampleur des recherches sur ces gènes de sensibilité aux maladies ou aux traitements et les perspectives médicales qui en découlent, il faut revenir sur la fantastique épopée scientifique qui a marqué le début du XXIe siècle.

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Naissance de la génomique

 

Tout a commencé par l'aboutissement d'un projet titanesque, qui dura 13 ans : le Projet Génome Humain. Achevé en 2003, il révélait l'intégralité du texte d'un ADN humain – sa  "séquence" – soit 3 milliards de lettres[1].

 

Il ouvrait l'ère de la génomique, rendant possible l'exploration des quelque 20 500 gènes contenus dans le génome humain, facilitée d'année en année par l'automatisation des techniques de séquençage et les progrès de la bio-informatique. Il a montré qu'il y a très peu de différences génétiques entre les individus ou les populations et pas de différences majeures entre groupes ethniques, abolissant définitivement le concept de race. Les génomes de deux individus pris au hasard dans la population mondiale ont en moyenne à peine 0,1 % de différences. Mais sur les trois milliards de lettres du texte de l'ADN, ce 0,1 % correspond tout de même à 3 millions de variations... dont bon nombre expliquent nos différences de vulnérabilité face aux maladies.

 

Nos différences génétiques cartographiées

 

Comment les étudier ? Dans la foulée du projet Génome Humain, un autre grand programme international – Hap-Map –, a dressé un catalogue des différences et des similarités génétiques entre individus. À partir des génomes de 270 individus d'origines africaine, asiatique et européenne, les variations génétiques les plus fréquentes (des changements ponctuels d'une lettre dans le texte de l'ADN, présents chez plus de 5 % des individus) ont été répertoriées. Trois millions de telles variations ont été cartographiées. Ces "balises" dans l'ADN ont permis de vastes études d'association sur des génomes entiers, portant chacune sur des centaines voire des milliers d'individus : les GWAS (genome-wide association studies). Schématiquement, un panel d'individus sains est comparé à un panel d'individus touchés par une maladie donnée, sur la base du catalogue Hap-Map : si certaines variations génomiques sont beaucoup plus fréquentes chez les malades, elles sont associées à la pathologie. En janvier 2012, plus de 1000 "GWAS" avaient été publiées, mettant en évidence plusieurs centaines de nouveaux facteurs génétiques de risque pour des maladies courantes : diabète, maladies cardio-vasculaires, maladies neuro-dégénératives (Alzheimer, Parkinson), cancers, maladies mentales comme la schizophrénie ou l'autisme (voir encadré), maladies infectieuses (hépatites B, C, sida, tuberculose…).

 

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Le projet "1000 génomes"

 

Ainsi, plus d'axes de recherche totalement inattendus et de pistes thérapeutiques nouvelles ont été identifiés depuis l'an 2000 qu'au cours du XXe siècle, et révolution de la génomique ne cesse d'apporter des outils toujours plus précis pour les recherches sur notre vulnérabilité aux maladies. Le projet "1000 génomes" lancé en 2008 vise désormais à fournir un grand nombre de séquences complètes de génomes humains à partir de toutes les populations du globe. Mais aussi à répertorier dans ces génomes des millions d'autres variations, dites "rares" (présentes chez moins de 0,5 % de la population), et divers "accidents" dans l'ADN qui n'ont pas à ce jour été cartographiés, comme de petites portions manquantes (délétions) ou surnuméraires (insertions). "Les chercheurs qui ont trouvé des régions du génome assoces à une maladie pourront regarder ces données et avoir un panorama presque complet des variations génétiques dans ces régions pouvant contribuer directement à la maladie", souligne un des auteurs du projet. À ce jour, 2 500 échantillons d'ADN provenant de 27 populations à travers le monde doivent être analysés.

 

Vers une médecine prédictive et personnalisée ?

 

Côté applications, la révolution médicale annoncée au début des années 2000, qui permettrait de prédire à chacun quelles maladies il risque de développer et de proposer des traitements à la carte en fonction du profil génétique, n'en est qu'à ses prémices. Mais pour beaucoup, il ne s'agit plus de savoir si elle surviendra, mais quand. Un des freins tient au fait que l'on s'attendait à découvrir quelques gènes majeurs associés aux maladies, et qu'on en a trouvé des dizaines, voire des centaines : en août dernier, une équipe internationale annonçait avoir découvert 29 nouveaux variants génétiques associés à la sclérose en plaques, s'ajoutant à 23 variants déjà connus... soit une cinquantaine identifiés pour cette seule maladie ! Il reste par ailleurs difficile d'évaluer parmi les gènes de "prédisposition" à une maladie lesquels sont les plus "prédictifs" d'un risque. Aussi, les sociétés qui proposent aujourd'hui sur Internet des tests génétiques révélant nos risques de maladies à partir d'un échantillon de salive sont-elles montrées du doigt pour leur manque de fiabilité... Au fil des avancées, une médecine prédictive plus fiable verra cependant le jour avec à la clé des mesures de prévention mieux ciblées. L'avancée des connaissances en pharmacogénomique, l'étude des facteurs génétiques individuels en jeu dans la réponse aux traitements, en plein développement, conduira parallèlement à l'essor de la médecine personnalisée : déjà, plusieurs traitements existent accompagnés de tests génétiques "compagnons", qui conditionnent leur utilisation chez un patient selon qu'il est "bon répondeur" ou bien à risque d'effets indésirables.

 

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1 000 dollars pour séquencer un génome

 

Un élément de taille est venu récemment conforter cette tendance à envisager une médecine du futur tenant compte du profil génétique du patient : la chute drastique des coûts du séquençage. Si en 2001 des centaines de millions de dollars étaient nécessaires pour obtenir la séquence génomique complète d'un individu, ce prix tombait à 50 000 dollars en 2009. En février 2011, une société américaine annonçait dans la revue scientifique Nature réduire ce coût à 1000 dollars. Le séquençage d'un génome serait bientôt à un prix si abordable qu'il pourrait être généralisé à tout un chacun. À quand notre séquence génomique dans notre carte Vitale ? Les questions éthiques et sociétales soulevées par cette perspective – la protection des données génétiques vis-à-vis des assurances ou des employeurs par exemple – deviennent urgentes à résoudre...

 

En attendant, chaque variation génétique associée à une maladie est une piste nouvelle pour les chercheurs. Il faut alors comprendre le mécanisme biologique dans lequel le gène impliqué intervient, trouver le moyen d'agir en conséquence pour traiter la maladie... La décennie précédente a fourni une avalanche de données génétiques associées aux maladies : seul le sommet de cet iceberg d'informations a été exploré. Son exploitation fournira sans doute bien des solutions inédites face aux maladies qui nous menacent.

 

Génomique et paludisme : vers de nouvelles pistes de recherche

 

Près d'un million de morts et 500 millions de cas par an, des traitements de moins en moins efficaces : le paludisme, un des premiers fléaux sanitaires de la planète, est une véritable urgence pour la recherche et l'étude des facteurs de sensibilité à cette infection apporte l'espoir de nouvelles voies d'investigation.

 

À l'Institut Pasteur, l'unité de Génétique fonctionnelle des maladies infectieuses, dirigée par Anavaj Sakuntabhai, avait déjà contribué à la découverte d'une mutation génétique conférant une résistance au paludisme chez 18 à 25 % des individus en Asie du Sud-Est, après une étude sur 3 500 personnes en Thaïlande. "Cette mutation est située dans un gène impliqué dans le stress oxydatif : ce phénomène intervient dans le vieillissement et la destruction des globules rouges, lieux de multiplication des parasites", explique Jean-François Bureau, un des chercheurs de l'unité.

 

Aujourd'hui, l'équipe pasteurienne lance une vaste étude de recherche de gènes associés à l'infection (GWAS[2]). Sa source : les échantillons d'ADN de plus d'un millier d'habitants des villages de Dieimo et de Ndiop au Sénégal – suivis depuis 1990 par l'Institut Pasteur de Dakar et l'Institut de Recherche pour le Développement (IRD) –, et de 600 personnes au Pérou. "Nous allons cibler nos recherches en définissant des sous-groupes dans ces populations exposées au paludisme : en fonction du nombre d'accès palustres, de leur sévérité, de l'âge – tes enfants étant les plus touchés , etc." précise Richard Paul, autre chercheur de l'équipe. "Grâce au suivi de ces habitants depuis 20 ans, nous disposons de quantité de données, parfois depuis la naissance. À chaque fois que nous découvrirons une mutation dans un gène, nous saurons ainsi à quel type de cas clinique elle est associée." Les premiers résultats devraient être disponibles dans un an.

 

Autisme : la part des gènes

 

Dès les années 70, des études chez les jumeaux mettaient en évidence une composante génétique dans l'autisme, trouble envahissant du développement qui touche un enfant sur 100. En 2003, les premiers gènes associés à des cas d'autisme et de syndrome d'Asperger (autisme avec langage et sans retard mental) étaient découverts à l'Institut Pasteur dans l'unité de Génétique humaine et Fonctions cognitives dirigée par Thomas Bourgeron. Aujourd'hui, plus de cent gènes sont associés à la maladie. Quelle part jouent-ils ?

 

"C'est très complexe", explique Thomas Bourgeron. "D'abord, il n'y a pas "un" autisme, mais un spectre de troubles autistiques, donc quantité de patients différents et autant de cas particuliers. Ensuite, l'impact de chaque gène diffère. Par exemple, la présence de mutations dans le gène SHANK3 que nous avons découvert signe quasiment toujours un autisme.

 

Ces cas-là sont "très génétiques". Chez d'autres patients, les mutations identifiées sur d'autres gènes n'expliquent pas à elles seules la maladie, qui relève probablement d'autres facteurs génétiques non identifiés et peut-être aussi de facteurs épigénétiques et environnementaux. Quoiqu'il en soit, ces gènes de vulnérabilité sont autant de pistes de recherche pour mieux comprendre les autismes." Dans le laboratoire de l'Institut Pasteur, généticiens côtoient neurobiologistes et psychiatres. Il ne s'agit pas seulement d'isoler des gènes associés à l'autisme mais de comprendre à quoi ils servent. "Pour définir la fonction de gènes récemment Impliqués, nous cultivons actuellement des neurones avec des cellules exprimant ces gènes mutés" explique Thomas Bourgeron. "Nos résultats préliminaires montrent des différences dans la taille des neurites, ces prolongements neuronaux pouvant donner de nouvelles connexions".

 

D'autres gènes impliqués interviennent dans le fonctionnement des points de communication entre les neurones, les synapses. Des images en 3D de cerveaux d'enfants autistes, reconstituées à partir d'IRM, sont aussi analysées en vue de relier d'éventuelles modifications aux mutations génétiques trouvées chez ces patients. C'est donc une cascade d'études qui découle des découvertes de gènes de vulnérabilité, avec à la clé l'espoir d'améliorer la prise en charge des enfants touchés.

 

Source : La lettre de l'Institut Pasteur, mai 2012.



[1] Le "texte génétique est un enchaînement de quatre "lettres – A, T, C, G – qui correspondent à l'enchaînement de quatre molécules dites bases ou nucléotides (Adénine, Thymine, Guanine, Cytosine) dans l'ADN

[2] Avec le Génopole d'Évry et le CEPH (Centre d'étude du polymorphisme humain).

Pacifique : un continent de déchets fait plus de six fois la France

7e continent_3Associated press.jpgPacifique : un continent de déchets fait plus de six fois la France

par Cécile Cassier

Journaliste Univers-nature

(dernier ajout le 2 septembre 2015)

 

Découvert en 1999 par le navigateur américain Charles Moore, ce qu’on appelle le « 7e continent » est un gigantesque amas de déchets, situé entre les côtes de Hawaï et l’Amérique du Nord. Ces millions de tonnes de plastiques s’amassent sur une superficie estimée à 3,4 millions de km² selon le Cniid (1), équivalant à plus de six fois la France. Ce "continent" s’est progressivement formé dans l’océan Pacifique Nord, récoltant et concentrant via les courants marins des déchets provenant d’Asie du sud-est et d’Amérique de l’Ouest. La catastrophe de Fukushima aurait contribué, à elle seule, à l’ajout de trois millions de tonnes de déchets.

 

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De par sa position dans les eaux internationales, lesquelles appartiennent à tous ou à personne au gré des nécessités, chacun se dédouane de ce problème qui ne cesse de grossir. Pourtant, l’impact sur l’environnement, et notamment la faune marine, est réel (contamination de la chaîne alimentaire etc.). Aussi, l’association OSL (Ocean Scientific Logistic) a mis sur pied une expédition, visant à évaluer l’impact de ce condensé de pollution. Afin de le sensibiliser, elle tiendra le public informé de ses recherches via un blog dédié (2). Seules deux expéditions scientifiques américaines se sont déjà rendues sur place, respectivement en 2006 et en 2009. Selon OSL, si rien n’est fait, dans 20 ans, ce continent sera aussi grand que l’Europe.

1- Centre National d’Information Indépendante sur les Déchets.
2- Le blog est accessible à l’adresse suivante : www.septiemecontinent.com

Ajout du 3 mai 2014

 

On pourra également se reporter à l'article Les gyres, vortex de pollution dans les océans

par Frédérique Harrus publié le 02/05/2014 qui actualise l'information (vidéo)

 

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Ajout du 25 août 2014

 

Bien sûr, la situation n'est pas meilleure sinon pire pour la pollution chimique des océans depuis la révolution industrielle. Témoin cet article récent qui fait le point sur la pollution de la mer par le mercure.

 

Ajout du 25 août 2014 : Même l'Arctique est gagné par le plastique (Science & Vie  n° 1164, septembre 2014, p. 24)

 

En fondant, la banquise arctique pourrait libérer de leur prison de glace des quantités insoupçonnées de particules de plastique. C'est ce que craignent des chercheurs américains et anglais qui ont découvert pour la première fois la présence de microplastiques (moins de 5 mm de diamètre) dans des carottes de glaces prélevées en quatre points reculés de la région en 2005 et 2010. Les scientifiques ont inventorié entre 38 et 264 débris de polyéthylène, polypropylène, Nylon, etc., par mètre cube... soit près de 1 000 fois plus que dans la tristement célèbre "soupe de plastique" du Pacifique Nord.

 

Ajout du 2 septembre 2015 : Ces déchets de plastique qui envahissent les océans

Article de Sylvie Rouat (Sciences et Avenir, n° 823 septembre 2015, pp. 66-69)

 

Par milliards, des débris se concentrent dans les mers au gré des courants, formant une "plastisphère" polluante très intégrée à l'écosystème. L'éliminer est un casse-tête pour les spécialistes.

 

"Ce qui m'a surpris, c'est qu'on ne voyait rien. La soupe de plastique, brassée en profondeur était invisible. Comment montrer une catastrophe qui ne se voit pas", s'interroge Patrick Deixonne, navigateur-explorateur, au retour de la troisième expédition 7e Continent qu'il a menée du 15 mai au 15 juin 2015 dans le "gyre" de l'Atlantique Nord. Là, dans ce gigantesque tourbillon de la mer des Sargasses, se concentrent des milliards de débris de plastique. Sous l'effet de la force de Coriolis, trois courants y font converger les objets flottants. Jadis, les voiliers s'y retrouvaient entravés dans des agglomérats d'algues. Aujourd'hui, ce sont les déchets de plastique. Ce matériau chimique, peu biodégradable, se fragmente en infimes particules pour créer une "soupe", capable de résister à l'eau de mer et aux UV jusqu'à 1000 ans, et improprement baptisée le "7e continent". Le phénomène, connu depuis moins de quinze ans, se retrouve dans les cinq grands bassins océaniques du monde (Atlantique Nord et Sud, océan Indien, Pacifique Nord et Sud), les courants y emprisonnant les débris de plastique flottants de toutes tailles, depuis la microbille cosmétique jusqu'au bidon. L'étendue de ces gyres est immense : celui du Pacifique Nord couvre une superficie estimée à six fois celle de la France.

"En 2050, si rien ne change, la masse de plastiques dans l'océan sera supérieure à celle des poissons." Une phrase tirée du Rapport de la Fondation Ellen MacArthur, une association britannique caritative, présenté durant le forum économique mondial de Davos.

 

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Pour zoomer, cliquez sur la carte

 

Venus du continent grâce aux vents et cours d'eau

D'où viennent ces déchets ? À 80 % des continents : en 2015, 9,1 millions de tonnes de plastique devraient se retrouver dans la mer, drainés par les pluies et les vents, acheminés par les cours d'eau. En fonction de leur densité, certains coulent, d'autres flottent et sont entraînés par les vents et courants marins. "Aujourd'hui, on estime à 300 millions de tonnes la quantité de plastique dans les océans. Si l'on ne fait rien, il y en aura 155 millions de tonnes supplémentaires en 2025", alerte Patrick Deixonne.

 

Ce printemps 2015, le catamaran de 18 mètres de l'expédition 7e Continent a parcouru quelque 2 500 kilomètres dans le gyre de l'Atlantique Nord pour y faire des prélèvements. "C'était une mission risquée, raconte Patrick Deixonne. Nous étions dix, cantonnés dans un habitacle de 20 mètres carrés, à plus de 2000 kilomètres de toute côte, dans une mer houleuse avec des creux de5 mètres."

 

 

Les déchets intègrent peu à peu la chaîne alimentaire

Sur place, il s'agissait de quantifier et caractériser les macro-, micro- et nanodébris. Chaque trait de filet d'une demi-heure remontait en moyenne 250 pièces de plastique. Ce qui permet d'estimer "à environ 200 000 le nombre de débris par kilomètre carré, pour l'essentiel des particules de 2 millimètres de diamètre", explique Patrick Deixonne. Or ces dernières. brassées par les vagues et la houle échappent pour une grande part aux filets échantillonneurs, qui ne prélèvent que la couche supérieure de la colonne d'eau. "Nos estimations ne sont qu'une fourchette basse", constate le navigateur.

 

À bord du bateau et en laboratoire, les échantillons ont été soumis à l'étude au microscope infrarouge et par spectroscopie "pour savoir s'il existe une signature spécifique des plastiques invisibles", indique Alexandra Ter-Halle, chimiste à l'université de Toulouse. Cette nouvelle méthodologie sera appliquée aux autres gyres, qui seront étudiés dans les prochaines années. La route du bateau a aussi régulièrement croisé de gros déchets flottants. Les membres de l'équipage remontaient chaque jour qui une boîte de Nesquik, qui un bidon, etc. Un observateur posté sur le pont était chargé de les compter, deux heures durant. Soit, selon les premières extrapolations... quelques millions de tonnes ! Problème : ces macrodéchets interagissent avec le milieu marin. Ils fonctionnent en effet comme des DCP (dispositifs de concentration de poissons) — un système utilisé par les pêcheurs —, sous lesquels les poissons ont tendance à s'agglutiner. Quant aux micro- et nanoplastiques, ils s'intègrent peu à peu à la chaîne alimentaire : d'abord colonisés par des micro-organismes, ils sont ensuite assimilés au plancton, premier maillon de la chaîne alimentaire marine. L'ensemble finit par former la "plastisphère", un écosystème marin organisé avec et autour du plastique.

 

300 millions de tonnes : la quantité de plastique dans les océans, 455 millions de tonnes estimés en 2025

A priori, ce "plastiplancton" n'est pas dangereux pour les organismes qui l'ingèrent : "Leur système digestif évacue les constituants du plastique, qui sont des matières inertes, inassimilables", explique François Calgani, spécialiste des plastiques à l'Ifremer de Bastia. Cependant, une étude publiée dans la revue Environmental Toxicology and Chemistry (2012) montrait que des moules mises en présence de nanobilles en polystyrène manquaient d'appétit. L'impact n'est pas nul, donc, sur les organismes filtreurs. Il l'est encore moins quand il est dû à des micro- ou macrodéchets. D'abord parce que ceux-ci servent de véhicules pour 1a dissémination des espèces dans les océans. Ainsi, le tsunami de 2011, qui a lessivé des milliards de tonnes de déchets vers la mer, a entraîné la migration de quelque 120 espèces du Japon au Canada. Et avec elles, un grand nombre d'agents pathogènes pour les populations locales.

 

La plastisphère change les règles du jeu entre les différents organismes. Ainsi en va-t-il des Halobates sericeus, insectes marins qui marchent sur l'eau et pondent sur des objets flottants... a fortiori sur les débris de plastique. Dans un milieu où les ressources sont rares, la multiplication des lieux de ponte favorise leur développement, au détriment d'autres espèces. Et notamment des poissons, qui eux aussi déposent sur les plastiques leurs œufs, un mets de choix pour les halobates. Il y a trois ans, une étude menée par des chercheurs de l'université de Californie (États-Unis) avait établi que ces insectes proliféraient dans le gyre du Pacifique Nord. En 2015, la mission 7e Continent en a prélevé également de grandes quantités dans l'Atlantique Nord. Autres habitants privilégiés du septième continent, les méduses dont les jeunes polypes (premier stade de développement) colonisent volontiers les morceaux de plastique. Peut-être est-ce là la clé de leur prolifération ? "Ce qui est certain, c'est que les méduses mangent des poissons. Donc plusil y a de méduses, moins il y a de poissons", remarque Patrick Deixonne.

 

Enfin, les déchets qui contiennent du polyéthylène, soit la plupart des plasstiques deviennent poreux en se dégradant et absorbent les polluants persistants. Ils se muent ainsi en véritables "éponges" à métaux lourds. Que deviennent ces polluants ? Sont-ils rejetés dans l'environnement ? Sont-ils transférés aux algues, au plancton ? L'étude de la plastisphère ne fait que commencer. Et face à l'étendue du désastre, "il est urgent de comprendre avant d'envisager de nettoyer les mers", avertit Alexandra Ter-Halle. Car sous les plastiques, il y a la vie, une vie foisonnante à préserver.

 

 Les solutions pour s'en débarrasser

Parmi les actions envisageables, certaines relèvent de la fausse bonne idée, mais d'autres auraient une réelle efficacité.

Selon une étude publiée dans Science en 2015, les 192 pays côtiers de la planète ont produit 275 millions de tonnes de déchois plastique en 2010, dont 8 millions de tonnes ont été déversés dans les océans. Face à ce constat, que faire ?

 

Réduire la pollution à la source ?

Bannir tous les plastiques ? La solution est irréaliste. Sans film alimentaire, par exempmle, une grande quantité de nourriture serait jetée. Cependant, des mesures de restriction sont prises. En France, les sacs de caisse seront interdits en 2016 : un sac qui sert 20 minutes pollue en effet 450 ans...

 

Rendre le plastique biodégradable ?

Les plastiques biodégradables sont conçus pour se déliter dans des conditions spécifiques d'humidité, de chaleur et de microbiologie rarement atteintes dans la nature. Il existe un plastique dit oxofragmentable :un additif permet sa fragmentation. Fausse bonne idée, car il rend la pollution invisible. Les emballages compostables sont. eux, issus de produits naturels : pommes de terre, algues, maïs, déchets agroalimentaires. C'est l'option choisie par le Laboratoire d'ingénierie des matériaux de Bretagne (Limat B), qui utilise des déchets locaux associés à des bactéries marines pour produire des emballages à usage local. Une économie circulaire vertueuse.

 

Empêcher l'arrivée à la mer ?

Cela nécessite l'immobilisation générale à l'échelle d'un bassin versant, impliquant le nettoyage régulier des cours d'eau. L'équipe de l'ONG 7e Continent mène ainsi chaque année des opérations de nettoyage, la dernière ayant eu lieu dans la Seine, où ont été enlevés en moyenne 100 kilos de déchets tous les 100 mètres. "En France, les agences de l'eau financent des grilles de captation, mais c'est encore anecdotique", souligne Patrick Deixonne, de 7e Continent. Une application participative sera inaugurée en septembre ("Stop le plastique") pour permettre de photographier et localiser par GPS les lieux contaminés. Ces informations seront transmises aux services de collecte des déchets.

 

Ramasser les déchets ?

 Simple et efficace à court terme. Cette solution a été expérimentée à l'échelle d'un pays, le Liban, où, au lendemain de la guerre civile, les fonds marins étaient recouverts de plus d'un mètre de déchets. En août 1997, l'association Opération Big Blue lançait la première campagne de ramassage qui a réuni 40 000 personnes sur tout le littoral. Depuis, ce nettoyage est devenu annuel. Problème : tant que des plastiques seront relâchés dans la nature, il faudra les ramasser. Le cycle est sans fin, donc.

 

Piéger les déchets en mer ?

C'est le pari du Néerlandais Boyan Slat qui a imaginé une barrière souple de deux kilomètres de long, attachée aux fonds marins, qui arrête les déchets poussés par les courants. Ceux-ci se concentrent au milieu du dispositif, d'où ils sont extraits à partir d'une plate-forme. L'association The Ocean Cleanup a annoncé la mise en place d'un prototype en 2016 au large du Japon. Problème : ce système ne tient pas compte de la plastisphère et de la vie qui lui est associée. Et ne résout pas le problème des nanoparticules.

 

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 `voir aussi :

 

En 2050, il y aura plus de plastique que de poissons dans les océans (Sciences et Avenir)
http://www.sciencesetavenir.fr/nature-environnement/pollution/20160122.OBS3208/en-2050-il-y-aura-plus-de-plastique-que-de-poissons-dans-les-oceans.html

Voilà comment des plaques de déchets se forment dans les océans (Maxisciences)
http://www.maxisciences.com/ocean/voila-comment-des-plaques-de-dechets-se-forment-dans-les-oceans_art35772.html

Le 7e continent de plastique: ces tourbillons de déchets dans les océans (Le Monde)
http://www.lemonde.fr/planete/article/2012/05/09/le-7e-continent-de-plastique-ces-tourbillons-de-dechets-dans-les-oceans_1696072_3244.html

Bluebirds Marine Systems (le fabricant de SeaWax)
http://www.bluebird-electric.net/

L'Europe et la France vont-elles enfin interdire les sacs plastique? (Notre Planète)
http://www.notre-planete.info/actualites/3868-sacs-plasti...

09/05/2012

Le Conseil d’État maintient l’interdiction de semer du MON 810

FNE-logo.pngLe Conseil d’État maintient l’interdiction de semer du MON 810 : victoire des organisations apicoles, paysannes et environnementales


Le Président de la Section du Contentieux du Conseil d'État a rejeté aujourd'hui en référé la demande de suspension de l'arrêté du Ministre de l'agriculture du 16 mars 2012, interdisant la culture du maïs OGM MON810.


Cette demande était formulée par deux entreprises agricoles bien connues pour s’être déjà illustrées aux côtés de la Sté MONSANTO, lorsque le Conseil d’État a annulé en novembre 2011 le moratoire sur le maïs OGM MON 810.

 

Face au risque d’une nouvelle décision de justice dans le même sens, l’Union Nationale de l’Apiculture Française, les Amis de la Terre, la Confédération Paysanne, la Fédération Française d’apiculteurs Professionnels, la Fédération Nationale d’Agriculture Biologique, France Nature Environnement, la Fédération Nature et Progrès et le Réseau Semences Paysannes se sont unis dans leur diversité pour obtenir en justice le maintien de l’interdiction en France.

 

Le Conseil d’État vient de donner raison à nos organisations en refusant de suspendre l’interdiction de mise en culture du 16 mars 2012, qui « ne porte pas atteinte […] à un intérêt public, à la situation des entreprises requérantes ou aux intérêts qu’elles entendent défendre ».

 

C’est une victoire pour nos organisations mobilisées contre l’autorisation de mise en culture de ces maïs OGM. L’Agence Européenne de Sécurité Alimentaire avait dénoncé en décembre 2011 l’évaluation insuffisante et « le risque important pour l’environnement », ainsi que le rappelle le Conseil d’État dans son ordonnance. Cette décision nous donne raison en admettant l’urgence à protéger l’environnement, l’apiculture, et les semences biologiques, paysannes et conventionnelles, face à la menace que représente la culture de ces OGM.

 

Une telle décision était vitale pour la filière apicole française car depuis un arrêt de la Cour de justice européenne de septembre 2011, le miel contenant du pollen d’OGM ne peut pas être commercialisé pour la consommation humaine dans aucun état de l’Union. Cela ruine aujourd’hui les apiculteurs espagnols confrontés aux cultures de MON 810 autorisées dans leur pays.

 

La bataille juridique se poursuit car les puissantes organisations de producteurs de maïs ont de leur côté saisi le Conseil d’État d’une autre procédure sur le fond.

 

Les organisations de défense de l'environnement seront d’une extrême vigilance et elles travailleront inlassablement pour que le nouveau Ministre de l’agriculture renforce l’interdiction du MON 810 et adopte les règles protégeant la santé humaine et animale, ainsi que les filières respectueuses de l’environnement.

 

08/05/2012

Pollutions de l'eau douce. L'incroyable indulgence

Pollutions de l'eau douce.

L'incroyable indulgence

 

par Hervé Chambonnière (Le Télégramme.com)

 (Compléments et dernière mise à jour : 25/08/2014)

 

Contrairement aux « voyous des mers », les pollueurs d'eau douce bénéficient d'une incroyable indulgence des autorités. Du contrôle à la sanction, enquête sur une quasi-impunité. Même si la Bretagne apparaît comme la plus sévère... des régions laxistes!

 

Il y a le fléau des algues vertes. Il y a aussi les menaces de sévères sanctions européennes pour nos eaux « de qualité médiocre ». Il y a, enfin, un coût toujours plus élevé pour rendre l'eau potable. Mais rien n'y fait. Les pollueurs, à la source de ces problèmes, ne sont pas véritablement inquiétés. La répression est tout simplement jugée « insignifiante », par le Conseil d'État. Elle affiche toujours, malgré « quelques progrès », « une défaillance à peu près totale », selon la Cour des comptes. Contrôles insuffisants, beaucoup d'infractions mais peu de poursuites, sanctions peu dissuasives, peu nombreuses et bénignes... À toutes les étapes de la chaîne répressive, les deux hautes juridictions ont relevé, en 2010, une accablante série d'incohérences. En voici l'inventaire.

 

Des contrôles insuffisants

 

Même s'ils sont en augmentation, ceux-ci sont « notoirement insuffisants », tranchait, en juin 2010, le Conseil d'État. Il y en a, pourtant, clairement beaucoup plus en Bretagne. Pour les seuls contrôles nitrates, les services de l'État ont vérifié un peu plus d'une exploitation agricole sur sept, en 2010. À titre de comparaison, en 2003, dans la Beauce, « tout agriculteur ou irriguant savait d'emblée qu'il n'avait aucune chance d'être contrôlé durant sa vie professionnelle entière », relève le Conseil d'État.

 

Des services asphyxiés et bridés

 

Pourquoi si peu de contrôles ? « Nos moyens sont dérisoires comparés à l'ampleur des pollutions constatées, confesse un responsable de la police de l'environnement. Nous ne sommes pas assez nombreux ». Autre raison évoquée par la Cour des comptes : « Avec des effectifs si limités par département, pour la première fois en recul depuis dix ans, les agents éprouvent des difficultés à répondre aux objectifs et priorités fixés par l'administration centrale ». D'autant que « la direction de l'eau a multiplié les priorités au même moment ». Autre explication avancée par un responsable de la police de l'eau : « Les services ne sont pas toujours très libres de contrôler les exploitations agricoles... C'est très variable d'un département à l'autre, suivant l'autonomie dont dispose le préfet face aux lobbies locaux ».

 

Une jungle réglementaire

 

Il existe treize polices (réglementations) différentes concernant l'eau, vingt-cinq différentes pour l'environnement ! Pour les appliquer, le code de l'environnement désigne pas moins de 70 catégories d'agents différents. Un rapprochement des activités de police de plusieurs organismes (Onema, Oncfs et DDTM) a été amorcé. « L'efficacité d'un tel édifice, faut-il s'en étonner, est pour le moins limité », constate le Conseil d'État. Quant au droit pénal de l'environnement, avec ses 540 délits et ses425 contraventions, « il n'est pas d'application aisée ».

 

Des sanctions peu dissuasives

 

Pour une pollution de quelques kilomètres, même à plus de 200 km de nos côtes, un « voyou des mers » risque, depuis août 2008, une amende de 15M€. Quid pour les pollutions qui se déroulent à nos portes, dans des cours d'eau qui alimentent nos réseaux d'eau potable? L'amende maximale prévue est de... 75.000€. « C'est vraiment pas cher pour une pollution qui peut durer 2.500 ans », raille un gendarme spécialisé, évoquant la pollution industrielle du Rhône au plomb et au PCB.

 

Trop de classements sans suite

 

C'est ce que dénoncent deux associations bretonnes de protection de l'environnement, l'Aappma de l'Elorn et Eau et Rivières. Difficile de vérifier, tant les données sont nombreuses, partielles et différentes. À titre indicatif, néanmoins, un instructif rapport interministériel de 2005, consacré aux polices de l'environnement, livre ce curieux constat : alors qu'elles devraient être quatre fois plus poursuivies (car les infractions sont plus facilement établies: auteur identifié...), les affaires liées à l'environnement le sont... presque deux fois moins ! Plus d'une affaire sur deux (contre trois habituellement) est ainsi classée sans suite. Pour quels motifs ? Mystère. Dans son rapport, le Conseil d'État évoque « des raisons qui n'ont pas été élucidées »... Le rapport interministériel de 2005 avance une explication : « Les magistrats sont méfiants quant au choix de contentieux faits par l'administration pour des motifs qu'ils pensent être liés à des considérations d'ordre politique ou en relation avec l'action de groupes de pression. Ils paraissent craindre de se trouver instrumentalisés ». En Bretagne, en 2010, pour les seuls contrôles des plans nitrates, seul un PV sur quatre (26%) faisait l'objet d'un classement sans suite. Mais un sur trois (34%) était toujours en attente d'une réponse pénale des parquets bretons.

 

Ajout du 23 février 2013

 

Dans l'ensemble, en 2013 en France, les nitrates gagnent toujours du terrain  La teneur en nitrates dans l'eau excède 50 mg/1 dans 18 860 communes de France. Soit 860 de plus qu'en 2012. En cause : les nitrates contenus dans les déjections animales épandues pour fertiliser les sols. Quand l'apport dépasse les besoins des cultures, l'excès se retrouve dans les rivières, puis sur les côtes, où il favorise la prolifération d'algues vertes. "Dans l'Ouest, des efforts ont été faits, commente Jean-Louis Peyraud, de l'Institut national de la recherche agronomique. Moins dans les zones de grandes cultures - Bassin parisien, Poitou - Charentes, Haute-Normandie... - où la hausse ne ralentit pas. "

 

Quelle est la part de l'eau douce sur notre planète ?


Une infographie de Pierre Barthélémy sur Mblog nous renseigne à ce propos.

 

Les techniques de détections de pollutions chimiques des eaux

Voir l'article [LIEN]

 

Ajout du 25 août 2014

 

Bien sûr, la situation n'est pas meilleure sinon pire pour la pollution des océans depuis la révolution industrielle. Témoin cet article récent qui fait le point sur la pollution de la mer par le mercure.