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08/08/2013

Le Macaque de Barbarie

Macaque de Barbarie_13_logo.jpgLe Macaque de Barbarie

Macaca sylvanus

Famille des Cercopithecidae

 

par André Guyard

(Dernière mise à jour 10/09/2013)

 

Le Macaque de Barbarie ou Macaque berbère ou Magot Macaca sylvanus est le seul macaque vivant sur le continent africain, à l'état sauvage dans les forêts relictuelles du Maroc et de l'Algérie ainsi que de manière artificielle sur le rocher de Gibraltar où il représente le seul primate d'Europe avec l'Homo sapiens.

 

Macaque de Barbarie_14-1.jpg

 

Depuis 1969, le parc de 24 ha de forêts de "la Montagne des Singes" (Kintzheim, Bas-Rhin) accueille 240 individus répartis en quatre groupes.

 

Créé en 1974, un parc similaire, "la Forêt des Singes" à Rocamadour regroupe 130 Macaques de Barbarie qui vivent également en liberté dans une forêt de 24 ha.

 

Les singes évoluent librement dans leur territoire

 

Dans le parc, les singes évoluent dans des conditions très proches de la vie sauvage. Ils disposent de grands espaces leur permettant de s'isoler du public quand ils le souhaitent. Ils sont nourris, n'ont pas à craindre les prédateurs et peuvent évoluer en toute liberté.

 

 

Comme la plupart des singes, le Magot est une espèce arboricole

 

L'activité ludique occupe une large fraction de l'emploi du temps quotidien.

 

Jeux dans les branches des arbres

 

Dans le parc, les magots sont nourris quotidiennement par les soigneurs, et le nourrissage de chaque groupe constitue un spectacle pour les visiteurs. On leur distribue, pommes, ananas, bananes, graines, etc. Mais ils ne négligent par les ressources naturelles : glands, écorces, cônes, et aiguilles de pin, champignons, bulbes, proies animales constituées principalement d'insectes.



À la recherche de graines sur le sol

 

La femelle s'occupe de son unique petit. Mais d'autres femelles, voire des mâles  peuvent cocooner les petits et les rapports sociaux s'établissent souvent par leur intermédiaire.



Femelle et son petit

 

L'épuçage est un contact social entre individus qui fédère la solidarité dans le groupe.


Une mère épuçant son jeune d'un an

 

Du point de vue éthologique, la Montagne des Singes est aussi un centre d'études. Depuis la création du parc, des scientifiques travaillent sur des programmes de recherche dont le thème principal est le comportement social du Macaque de Barbarie, espèce évoluée et organisée.

 

Une contribution importante à la sauvegarde de l'espèce car les magots font aujourd'hui partie des espèces menacées, classées en Annexe II de la Convention de Washington.

 

Un recensement récent estime aujourd'hui la population sauvage à environ 10.000 individus en Algérie et au Maroc (23.000 individus en 1978).

 

La Montagne des Singes met en œuvre un certain nombre d'actions pour contribuer à la sauvegarde de l'espèce :

 

Ø    elle sensibilise le public à la protection de ce singe en le présentant libre dans un milieu proche de son habitat naturel ;

 

Ø    elle développe une action pédagogique par l'intermédiaire de panneaux interactifs et attractifs et surtout, grâce aux explications données par des guides spécialistes de cette espèce ;

 

Ø    les populations présentes dans le parc constituent une précieuse réserve génétique ;

 

Ø    elle renforce les populations sauvages par des réintroductions de groupes entiers d'animaux. Depuis la création du parc, près de 600 singes issus de nos différents parcs ont été réintroduits dans le Moyen Atlas marocain.

 

Les autres mesures urgentes de protection de l'espèce consistent principalement à préserver les milieux naturels et limiter l'impact des hommes (surexploitation des forêts, concurrence avec les troupeaux, capture de bébés singes pour en faire des animaux de compagnie ...).

 

Les autres espèces du genre Macaca vivant principalement en Asie du Sud et du Sud-Est, le Magot peut être considéré comme l'une des formes ancestrales du rameau des macaques qui sont apparus en Afrique il y a 5,5 millions d'années. Néanmoins, sa morphologie et son écologie témoignent d'une réelle adaptation aux conditions de vie dans le Moyen Atlas et l'espèce diffère beaucoup des premiers macaques apparus.

 

Le Macaque de Barbarie présente un certain nombre d'adaptations morphologiques au froid lié à l'environnement montagnard où il vit, tempéré l'été et rigoureux l'hiver. De telles adaptations sont rares chez les primates et témoignent de la grande faculté d'adaptation des macaques. Témoin, le macaque japonais Macaca fuscata qui est capable de survivre dans une épaisse neige. Les adaptations morphologiques du magot à l'environnement montagnard hivernal consistent en

 

Ø    une réduction de la longueur de la queue et des doigts pour éviter le gel des extrémités,

 

Ø    un allongement relatif de la longueur de la colonne vertébrale par rapport aux membres qui permet de lutter contre le refroidissement en permettant une posture en boule,

 

Ø    un fort épaississement du pelage en saison froide.

 

Comme chez tous les macaques, les mâles sont plus lourds et plus puissants que les femelles, et présentent un dimorphisme sexuel quant à la longueur des canines. La femelle présente des callosités fessières qui s'allument lors de l'œstrus.

 

Les callosités fessières de la femelle

et l'arrière-train du mâle

 

Clichés et vidéos : André Guyard

 

Source :

 

Documentation du site de la "Montagne des Singes" (plaquette, projection vidéo, soigneurs).

 

Wikipedia présente un article fort bien documenté sur cette espèce.

http://fr.wikipedia.org/wiki/Macaque_berbère

 

Le Macaque de Barbarie dans la nature

 

(Source : Les Mammifères du Maroc, thèse, Fabrice Cuzin)

 

Unique Primate d’Afrique du Nord, endémique du Maghreb (Maroc et Algérie), le Magot est un des rares singes à vivre dans des milieux où sévit un véritable hiver. De telles adaptations sont rares chez les Primates et témoignent de la grande faculté d'adaptation des Macaques. On en connaît un autre exemple fameux avec le Macaque japonais (Macaca fuscata), apte à survivre dans une épaisse neige. L'habitat du Macaque de Berbérie est essentiellement le milieu forestier. Chez cette espèce très sociable, les mâles ont la particularité de s’occuper longuement des très jeunes. La taille des groupes varie de 2 à 55 animaux. La discussion se poursuit quant aux fameux individus résidant sur le Rocher de Gibraltar : introduits artificiellement durant la Seconde Guerre mondiale ou vestiges de populations qui s'étaient répandues dans tout le sud de l'Europe pendant le Pliocène ? L'espèce habitait alors les côtes méditerranéennes et se retrouvait, au nord, jusqu'en Allemagne et aux Îles britanniques. La population a diminué à l'âge glaciaire et s'est éteinte sur la péninsule Ibérique il y a 30.000 ans.

 

Le Magot ne s'éloigne guère des falaises, sauf dans la forêt de cèdre où les grands arbres lui permettent de se réfugier. Dans cette région, l'espèce n'a jamais été observée à plus de 1,5 km d'une futaie, qu'elle soit constituée de chêne vert ou de cèdre. Il est donc prisonnier de ce biotope qu'il ne peut quitter même pour aller boire en été quand l'eau lui fait défaut.

 

Le Magot se nourrit en grande partie au niveau de la strate herbacée. La ressource en glands est un facteur critique, en particulier pour la période allant de juillet à décembre, où la mortalité des jeunes de l'année est maximale, et d'autant plus que le gestionnaire forestier tend à éliminer le chêne vert du sous-bois de la cédraie originellement mixte. Au niveau de la strate herbacée, le surpâturage entraîne une diminution sévère de la biomasse et de la diversité, et le magot tend à exploiter les seuls milieux où cette strate se maintient (vires inaccessibles aux troupeaux en falaise, rares pâturages traditionnellement mis en défens avant leur ouverture aux troupeaux). Dans les secteurs où cette ressource est très réduite ou a déjà disparu (cédraies du Haut Atlas oriental lors de la dernière décennie), il est devenu vain de chercher à contacter ce singe qui a succombé à la destruction de son milieu.

 

Les principales menaces qui pèsent sur le Magot sont donc :

 

- Les coupes exercées par la population locale et les coupes légales réalisées sous le contrôle de l'administration forestière qui ont fait régresser le chêne vert, généralement transformé en taillis, inutilisable par le magot, tant en terme de ressource alimentaire (les glands, dont la production est réduite, sont alors accessibles aux troupeaux), qu'en terme d'abri ;

 

- Les dérangements fréquents par les bergers (qui considèrent que l'espèce est nuisible, à cause des déprédations exercées sur les cultures fruitières et qui éloignent les singes par des jets de pierre) et leurs chiens rendent les abris (arbres élevés et falaises) encore plus indispensables ;

 

- L'appropriation des rares points d'eau par le sylvopastoralisme.

 

Face à cette dégradation, les derniers singes qui peuvent survivre sont ceux, anthropisés, qui sont nourris parce qu'ils font office d'animaux de loisirs touristico-récréatifs. Ce phénomène est bien identifiable comme le syndrome du Magot.

 

L'avenir régional du singe Magot dépend donc :

 

- Au niveau local, du maintien et du développement de ses ressources alimentaires, des actions étant indispensables à court terme ;

 

- De la régénération de la strate herbacée ;

 

- De l'arrêt des coupes de certaines futaies de chêne vert, actuellement réalisées dans des secteurs de plus en plus reculés, où se maintient souvent le Magot ;

 

- Au niveau régional, le maintien de certains groupes clés est indispensable pour assurer une continuité génétique entre divers secteurs.

 

- La mise en œuvre effective des diverses aires protégées (Parcs nationaux et SIBE) permettrait de sauvegarder certaines populations.

 

- L'aménagement de corridors, avec une régénération de la végétation (en particulier de la futaie de chêne vert).

 

Étant donné la problématique contrastée de l'espèce au niveau national, un programme national d'évaluation de l'état des populations de Magot, permettant la mise en œuvre de mesures de conservation appropriées de l'espèce et de son milieu, est indispensable, avec en particulier une évaluation démographique et génétique des diverses populations, permettant d'évaluer rapidement la vigueur de ces populations. Si le Magot est à la fois assez bien étudié et parfaitement abandonné à son triste sort en milieu de cédraie, les études en chênaie, et particulièrement en milieu pauvre, font défaut et seraient souhaitables afin de proposer d'urgentes mesures... qui ne manqueront pas d'être esquivées !

 

Et n'oubliez pas que c'est pour bâfrer de la bidoche qu'on évince le Magot de sa forêt...