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04/10/2010

Le glacier Perito Moreno gagne du terrain

glacier_perito moreno_logo.jpgLe paradoxe du Perito Moreno

 

par André Guyard

 

En dépit du réchauffement climatique, le glacier Perito Moreno gagne du terrain. Comment expliquer ce paradoxe ?

 

D’après un rapport publié par le Programme des Nations Unies pour l’Environnement et le Service de Surveillance Mondial des Glaciers, le taux de fonte moyen des glaciers montagneux du monde a doublé depuis l’année 2000.

 

Cette fonte des glaciers menace de tarir des sources d’eau douce dont dépendent l'approvisionnement humain pour l'agriculture, la boisson, ainsi que les ressources pour l’hydroélectricité. Finalement cet afflux d'eau risque d'accroître considérablement le niveau des mers.

 

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Situation géographique du glacier Perito Moreno

(Google Maps)


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Vue satellite du glacier (Google Maps)

Le glacier vient buter sur la péninsule

située de l'autre côté du lac

 

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Le front du Perito Moreno barre

l'un des bras du Lago Argentina

 

Alors que la plupart des glaciers du monde fondent peu à peu à cause de l’augmentation des températures moyennes mondiales, les scientifiques affirment que l’ice-field[1] du Perito Moreno, appelé aussi le Géant Blanc, gagne du terrain. Long de 30 kilomètres, il avance de deux à trois mètres par jour, malgré le réchauffement climatique général qui affecte la planète, y compris cette région froide de la Patagonie. De même, 13 % des glaciers continentaux de l'Antarctique sont stables ou gagnent un peu de terrain ainsi que la glace de mer (la banquise).

 

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Le glacier bute contre la rive opposée du bras lacustre

 

 

Le Perito Moreno est l’un des plus grands glaciers d’Amérique du Sud. Il doit sa célébrité grâce à son accessibilité par bateau aux touristes, malgré sa localisation à environ 3000 kilomètres de Buenos Aires. Il faut dire que le spectacle en vaut la chandelle. Le glacier déverse d’immenses blocs de glace de couleur bleue dans le Lago Argentino. De par sa configuration, le front du glacier barre le lac et vient buter sur la péninsule située de l'autre côté du lac (voir la carte ci-dessus). Le niveau de l'eau du bras amont est plus élevé que dans la partie aval. L'eau se fraie un chemin dans la glace et creuse un tunnel que l'on aperçoit sur le cliché ci-dessous. Cette arche va se développer progressivement jusqu'à son effondrement total toujours très spectaculaire. Voir clichés ci-dessous :

 

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On aperçoit l'arche à l'extrémité droite du glacier

 

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La voûte de l'arche s'écroule petit à petit

 

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Panneau explicatif de l'évolution de l'arche

jusqu'à son écroulement

 

 

Cette avancée du Perito Moreno contredit apparemment la thèse du réchauffement climatique. Ce phénomène constituait l'un des arguments phares des climato-sceptiques : pourquoi la banquise antarctique ainsi que les glaciers de Patagonie se développeraient-ils alors que l'atmosphère se réchauffe ?

 

Martin Stuefer, un expert patagonien de l’Université Fairbanks (Alaska) avait déjà subodoré une explication : les précipitations dans la région ont augmenté, parallèlement aux changements climatiques mondiaux, Combinées avec des vents forts et froids en Patagonie, les chutes de neige ont augmenté considérablement et ont ainsi contribué à renforcer le glacier.

 

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Récemment, Jiping Liu et Judith Curry, de la School of Earth and Atmospheric Sciences de l'université de Géorgie (États-Unis) complètent récemment l'explication : c'est bien parce que l'atmosphère se réchauffe que les précipitations neigeuses sont plus abondantes.

 

Sous les latitudes moyennes de l'hémisphère Sud, les températures croissantes provoquent une augmentation de l'évaporation et donc la formation de nuages plus nombreux qui vont porter cette humidité sur l'Antarctique et l'extrémité sud de l'Amérique du Sud où elle retombe sous forme de neige.

 

Une couche de neige plus épaisse a deux effets : elle réfléchit mieux le rayonnement solaire (phénomène de l'albédo) donc elle abaisse la température des glaciers patagons et la banquise des eaux plus chaudes de l'océan.

 

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Jiping Liu et Judith Curry prévoient que la couverture neigeuse devrait se résorber au cours du siècle. L'accroissement des températures pourrait en effet transformer la neige en pluie et supprimant ainsi sa protection à la glace.

 

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Une glace bleutée irréelle

 


[1] Rappelons qu'un ice-field est une zone de moins de 50 000 km² de glace, que l’on trouve souvent dans les climats les plus froids et les altitudes les plus hautes du monde, où il y a des précipitations suffisantes. C’est une zone extensive de glaciers reliés entre eux. Les ice-fields sont plus grands que les glaciers de montagne mais plus petits que les calottes glaciaires.

 

Photographies : Marcel Hoeuillard (janvier 2010)

 

Sources :

www.eas_gatech.edu/files/jiping_pnas.pdf

 

Chauveau L. (2010) Le mystère de l'Antarctique résolu. Sciences et Avenir, n° 761, oct. 2010

23/04/2010

Le Manchot de Magellan

Manchot de Magellan_0861-logo.jpgLe Manchot de Magellan

Spheniscus magellanicus Forster, 1781

Famille Spheniscidae

 

par André Guyard et Marcel Hoeuillard

 

Le Manchot de Magellan (Spheniscus magellanicus) est une espèce de manchot sud-américain qui se reproduit sur les côtes de l'Argentine, du Chili et sur les îles Malouines.

 

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Comme chez tous les manchots, le couple est indissociable
(Cliché Marcel Hoeuillard)

 

Il constitue l'espèce la plus nombreuse appartenant au genre Spheniscus. Ses cousins les plus proches sont le Manchot du Cap, le Manchot de Humboldt et le Manchot des Galapagos.

 

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Manchots de Patagonie et d'Antarctique

Sur la planche ci-dessus, sont répertoriés : 1 le Manchot de Magellan (Spheniscus magellanicus) ; 2 et 10 : le Manchot Adélie (Pygoscelis adeliae) ; 3 et 8 : le Gorfou sauteur (Eudyptes chrysocome) ; 4 et 11 : le Gorfou doré (Eudyptes chrysolophus) ; 5 et 9 : le Manchot à jugulaire (Pygoscelis antarcticus) ; 6 poussins de Gorfou papou ; 7 le Gorfou papou (Pygoscelis papua) ; 12 le Manchot royal (Aptenodytes patagonicus).

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Le Manchot à œil jaune ou Manchot antipode

(Megadiptes antipodes) vit en Nouvelle-Zélande

 

Quant au Manchot de Magellan, il est de taille moyenne (45 cm), et de couleur noir et blanc. Il a une tête noire entourée d'une bande blanche. Il a le dos gris-noirâtre et le ventre blanchâtre, avec deux bandes noires entre la tête et la poitrine, la bande inférieure en forme de fer à cheval inversé.

 

Il se nourrit de poisson, calmar, krill, et autres crustacés.

 

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Le poussin est nourri par régurgitation
(Clichés Marcel Hoeuillard)

 

Les clichés qui illustrent cet article ont été réalisés en janvier 2010 dans la réserve de Punta Tombo (Argentine). D'une superficie de 2,10 km2, cette réserve a été créée en 1972. Elle se situe sur la côte atlantique de la province de Chubut.

 

 

Punta Tombo est une étroite frange rocheuse de 3 km de long pour 600 m de large qui pénètre dans l'Océan Atlantique. Ce cap rocheux prononcé est dû à l'existence d'un affleurement de roche cristalline, d'origine préjurassique, qui a résisté à l'érosion marine. Sur ce substrat on trouve de vastes zones de sable fin mais compacté, ce qui constitue un terrain idéal pour que les manchots puissent creuser leur nid. De vastes zones du sol sont littéralement minées de cavités de faible profondeur, où les manchots déposent chaque année leurs œufs et élèvent leurs poussins.

 

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Le poussin à l'abri dans son terrier
(Cliché Marcel Hoeuillard)

La pente douce de ces plages, facilite beaucoup le déplacement terrestre des oiseaux, qui plusieurs fois par jour effectuent le trajet entre leur nid et la mer pour s'y alimenter.

 

Précédant les femelles, les manchots mâles reviennent sur la plage à la fin du mois d'août et reprennent possession du nid utilisé la famille année après année. Au début du mois d'octobre, les femelles pondent deux œufs, qu'elles couvent avec les mâles pendant quarante jours. Pendant cette période, le couple se relaie pour s'alimenter et surveiller le nid. Toute inattention est utilisée par des goélands (gaviotas) et autres oiseaux pour s'alimenter aux dépens des œufs. À la fin du mois d'avril, les poussins ont appris à nager et à s'alimenter par eux-mêmes, et entreprennent avec leurs parents leur périple annuel dans l'Atlantique sud.

 

L'année suivante fin janvier, les juvéniles passent deux semaines à terre sans se nourrir pour acquérir leur plumage adulte définitif.

 

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En janvier, c'est l'été austral : les adultes ont chaud
(Cliché Marcel Hoeuillard)

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Et les juvéniles aussi
(Cliché Marcel Hoeuillard)

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Juvéniles en cours de mue
(Clichés Marcel Hoeuillard)

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Le Manchot papou se distingue par
son bec rouge et ses pattes jaunes
(Clichés Marcel Hoeuillard, presqu'île de Valdès)

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  Gorfous sauteurs (Cliché Marcel Hoeuillard)


On a comptabilisé à Punta Tombo la présence de plus d'un million de Manchots de Magellan, ce qui fait de la réserve la plus grande colonie (en espagnol pingüinera) continentale de cette espèce.

 

D'autres espèces d'oiseaux nidifient aussi en ces lieux. Citons le Goéland cuisinier cocinera (Larus dominicanus) ou gaviota, le Goéland gris ou austral (Larus pacificus), les labbes (Stercorarius antarcticus et chilensis), le Cormoran royal (Phalacrocorax albiventer), le Cormoran de Magellan (Phalacrocorax magellanicus) et l'huîtrier de Garno ou ostrero (Haematopus leucopodus). La réserve est aussi visitée par les colombes antarctiques, les pétrels et les Sternes inca (Larosterna inca) ou gaviotínes.

 

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Cormoran royal (Phalacrocorax albiventer)
(Cliché Marcel Hoeuillard)
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Cormoran de Magellan (Phalacrocorax magellanicus)
(Cliché Marcel Hoeuillard)
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Les Sternes arctiques (Sterna paradisaea) hibernent dans l'hémisphère sud
(Cliché Marcel Hoeuillard)

Quant à la faune terrestre, on rencontre des guanacos (camélidés), des maras (lièvres de Patagonie), des renards, des tatous, et des oiseaux comme les tinamous (sorte de petites autruches) ou les ouettes à tête rousse (une espèce d'oie).
 
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Ouettes à tête rousse (Chloephaga rubidiceps) parmi les manchots
(Cliché Marcel Hoeuillard)

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Un guanaco parmi les manchots de Magellan
(Cliché Marcel Hoeuillard)

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Punta Tombo : quel beau paysage !


Arbre généalogique des manchots

 
Un article : Le plus étrange des oiseaux est consacré aux manchots dans la revue "Pour la Science" de mars 2013. Les auteurs présentent l'histoire évolutive de ces étranges oiseaux qui ne volent pas, mais sont parfaitement adaptés à la natation.
Histoire évolutive des manchots
(pour zoomer, cliquer sur l'image)
 
 
Fordyce E. et Ksepka D. (2013). - Le plus étrange des oiseaux, Pour la Science, n° 425, mars 2013, pp. 28-35.
 
 
Comme tous les Manchots, le Manchot de Magellan est menacé par le réchauffement climatique.
 

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Cerise sur le gâteau : un beau film sur le Manchot Empereur en Antarctique.