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(En fin d'article : dernière mise à jour du 07/06/2019)
Au milieu du XIXe siècle, le loup a disparu de la plus grande partie de l'Europe de l'Ouest. En France, par exemple, la politique nationale d'éradication de la rage et les primes à l'abattage qui l'accompagnaient ont eu des effets redoutables pour Canis lupus. Dans les campagnes françaises, on pensait se débarrasser simplement d'un « nuisible », de sorte qu'avec la généralisation des armes à feu et du poison, la chute des effectifs était inéluctable.
Ainsi, un facteur politique — l'existence d'un pouvoir centralisé efficace sur tout le territoire français — et des facteurs techniques — la démocratisation des armes à feu et du poison — ont joué un rôle majeur dans l'extermination du loup.
À ces facteurs directs se sont ajoutés des facteurs indirects : le déboisement des milieux refuges et la disparition des grands ongulés sauvages ont incité le grand prédateur à se rabattre sur les proies domestiques, ce qui a motivé davantage encore sa destruction. La mise en place d'infrastructures de communication et de transport modernes désenclavait de plus en plus de territoires, ce qui a exposé davantage la faune, dont le loup. La pénétration des milieux et des écosystèmes, leur détérioration se sont intensifiées. En cette première ère industrielle, un réseau de chemin de fer, de routes et de chemins a recouvert progressivement l'Europe occidentale, ce qui a fragmenté et réduit drastiquement les dernières populations lupines (figure 1).
Quelques dates caractérisent cette disparition progressive du principal grand prédateur européen. Le Loup a d'abord disparu des îles britanniques : en Angleterre au début du XVIe siècle, en Écosse en 1684 et en Irlande en 1710, ce qui a contribué à doter ces territoires d'un avantage compétitif dans l'élevage ovin. De fait, dès cette époque, ils sont réputés pour la qualité de leur laine. En Suisse, le dernier loup aurait été tiré en 1872. L'espèce lupine a disparu à la fin du XIXe siècle en Belgique et en Allemagne après s'être réfugiée dans les forêts des Ardennes et des régions rhénanes. En France, le Loup, confronté à une traque sans merci, a disparu entre 1923 et les années 1990.
Le grand prédateur s'est toutefois maintenu dans les contrées au développement industriel nul, faible ou tardif de l'Europe centrale et orientale. Dans ces régions où subsistaient les structures féodales, la vague d'extermination ne s'est propagée qu'à partir du début du XXe siècle, mais sans menacer les populations lupines.
En Europe du Nord non plus, l'élimination n'a jamais été complète. Même s'il est arrivé que les populations baissent beaucoup, les loups circulent dans tout l'espace scandinave, et leurs effectifs sont alimentés par l'important réservoir russe.
Dans le Sud de l'Europe, dans les péninsules ibérique et italienne surtout, les populations ont beaucoup régressé dans les années 1970, mais la destruction n'a jamais atteint l'intensité qu'elle a eue en France. Dans ce pays, le dernier loup aurait été abattu aux confins du Limousin et du Poitou en 1937. Mais entre cette date et le retour officiel du loup en France en 1992, des individus étaient régulièrement tués ou retrouvés morts. Il s'agissait probablement de restes de la population autochtone, des loups captifs libérés ou encore des pionniers de la recolonisation.
En effet, le loup a longtemps survécu dans toutes les marges et les périphéries de l'Europe. En France, il s'agit de l'Est ou de marges intérieures (zones reculées du Massif central et du centre-Ouest). Constatant la survie des loups au début du XIXe siècle dans les zones frontalières des départements français, l'historien Alain Molinier pointa en 1993 la corrélation entre la présence du Loup et un pouvoir politique faible ou un développement moindre dans les confins et les périphéries.
Pour la même raison, le loup a été refoulé aux marges de l'Europe de l'Ouest, et il n'est pas étonnant de constater qu'après les années 1950, les dernières populations viables se situaient à l'Est du Rideau de fer.
Avant l'avènement du communisme, de grands propriétaires dominaient les structures agraires dans ces contrées, où la paysannerie, durablement marquée par le féodalisme et le contrôle du droit de chasse, était maintenue dans un statut subalterne. Cela avait préservé une faune que la noblesse se réservait pour la chasse dans de grands domaines forestiers, tel Bielowieza, en Pologne.
La mise en place des démocraties populaires et de la collectivisation ont ensuite maintenu des équilibres dynamiques entre un monde agricole aux techniques plutôt traditionnelles et les grands prédateurs, tel le loup. Contrairement à ce qui s'est produit en Europe de l'Ouest, les grands prédateurs ont continué à disposer de zones refuges où la chasse, souvent réservée aux apparatchiks ou à des fonctionnaires spécialisés, ne nuisait pas aux effectifs.
En 1989, le Rideau de fer tombe, alors que les facteurs qui avaient produit la disparition du Loup en Europe de l'Ouest ont largement disparu… Dès lors, les marges orientales et méridionales de l'Europe se sont mises à fournir continûment des pionniers, qui ont amorcé la recolonisation de l'Europe de l'Ouest par le Loup à la fin du XXe siècle.
Plusieurs phénomènes complémentaires d'ordres écologiques, sociaux, politiques et territoriaux contribuent à ce retour du loup dans des pays tels que la France, la Suisse, l'Allemagne et dans des régions d'Espagne et surtout d'Italie où il avait été éradiqué. Tout d'abord, la vision du loup a changé : dans la plupart des pays d'Europe occidentale, il est passé, dans les années 1970, du statut d'un nuisible à éradiquer à celle d'une espèce à protéger. En Europe, deux textes majeurs garantissent la protection de cet animal : depuis 1979, la convention de Berne, puis, depuis 1992 dans l'Union européenne, la directive Habitats faune flore (directive 92/43/CEE).
En France, le retour du Loup est détecté pour la première fois en 1992 dans le Parc du Mercantour (Alpes Maritimes). Dans les Alpes, sa population est évaluée à 80 loups (comprenant à la fois les meutes réparties des Alpes Maritimes à la Savoie, et les individus en dispersion). Ainsi, la renaissance de la population française de loups résulte de l'expansion de la population lupine italienne dite des Abruzzes. À partir du refuge situé dans cette région d'Italie centrale, Canis lupus italicus a d'abord recolonisé les Apennins en direction du Nord, puis a atteint l'arc alpin, ce qui l'a conduit en France, dans le parc du Mercantour.
Fig. 2 - Les zones de présence du Loup en Europe de l'Ouest sont des régions peu habitées par l'homme. C'est particulièrement vrai en Italie, en Espagne, en France et dans toute l'Europe du Sud, où les loups occupent des massifs montagneux. Cela l'est aussi en Suède, en Finlande et en Allemagne, où le prédateur s'est surtout installé dans des régions forestières faiblement peuplées. Pour autant, cet infatigable explorateur a déjà été aperçu au Danemark, en Hollande, en Champagne.
En novembre 1992, lors d'un comptage de chamois, deux canidés ressemblant à des loups y ont été aperçus. Après vérifications et tergiversations, la présence de Canis lupus en France fut officiellement reconnue. Mis dans la confidence par les agents du parc, le magazine Terre Sauvage publia l'information. Les pouvoirs publics ont dû réagir, alors qu'ils misaient sur la discrétion, au regard de la réputation de l'animal et des mauvaises relations de l'administration du parc avec les élus locaux, les chasseurs et les agriculteurs. Pourtant, dès le début des années 1990, des spécialistes italiens avaient, sans retenir l'attention des autorités, annoncé l'arrivée imminente du loup en France.
Fig. 3 - Loups du Mercantour
Depuis 1992, du Mercantour (Alpes maritimes), le Loup a progressivement gagné les Alpes de Haute-Provence, les Hautes-Alpes, le Vercors et la Savoie. En 2004, on signale sa présence dans l'Ain, marquant ainsi sa progression vers le Massif jurassien et les Vosges. Désormais, en 2011-2013, il est signalé dans le Jura, le Doubs et les Vosges et même la Haute-Marne. (Voir l'article : le retour du Loup dans le massif jurassien).
Fig. 4 - Répartition du Loup dans les Alpes
Année 2001 (Carte Réseau loup)
Fig. 5 - En 2004, la progression du Loup vers le nord des Alpes
apparaît sur cette carte Réseau-loup
En 2004 selon le réseau-loup, les populations lupines sont en développement partout actuellement en Europe, mais leur distribution est fragmentaire sans connexion démographique entre l’Italie, la Péninsule Ibérique, les Balkans et l’Europe centrale ; effectifs très variables, compris selon les pays entre quelques individus et 2 500 loups.
Fig. 6 - L'expansion du Loup en France est soutenue, car le pays contient de nombreux habitats vacants convenant à cet animal. La première meute s'est créée en 1992 dans le parc du Mercantour Depuis, l'aire de répartition de l'espèce a augmenté de 20 à 25 pour cent par an, surtout dans des régions montagneuses où les meutes peuvent vivre en relative tranquillité.
Le dynamisme avec lequel la colonisation s'est ensuite poursuivie est surprenant (figures 4-6). Dès 1997, les loups fréquentent le plateau de Canjuers, dans le Var, le massif du Queyras et les Hautes-Alpes. En 1998, leur présence est attestée dans les Monges (Alpes-de-Haute-Provence). En 1999, ils sont identifiés dans les massifs du Vercors (Drôme, Isère) et de Belledonne (Isère, Savoie). De 2000 à 2003, le loup laisse des traces dans les Préalpes de Grasse, proches de Nice, en Maurienne (Savoie) et dans le Bugey (Ain). Et on le repère dans les Pyrénées-Orientales dès la fin des années 1990 ! À partir de 2006, on le rencontre dans plusieurs départements du Massif central – la Lozère, l'Aveyron, le Cantal, l'Ardèche – et à partir de 2011 dans le Jura et dans les Vosges. Aux dernières nouvelles, il est aussi arrivé en Haute-Marne et dans l'Aube. Dans l'ensemble, l'aire de répartition du loup s'est étendue 15 ans durant d'environ 25 pour cent par an en France, et cela malgré les décès accidentels ou les abattages.
Fig. 7 - Les populations de cerfs élaphes se développent en France en raison de l'expansion des forêts et des friches agricoles, et en raison de la gestion cynégétique. Ce phénomène favorise aussi le retour du loup, le principal prédateur du cerf. Si la présence de meutes de loups dans les forêts de plaine se confirme, elle constituera un régulateur naturel du Cerf et pourrait avoir des effets positifs sur la végétation forestière et agricole.
En Allemagne, la tendance est la même. Au tournant des années 2000, des loups arrivent outre-Rhin de Pologne. Leur présence est d'abord attestée dans le Lausitz, région forestière riche en cervidés, à cheval entre la Pologne et les länderde Saxe et de Brandenbourg. Si 13 des 19 meutes allemandes vivent encore dans cette région, l'espèce a essaimé dans tout le pays. En équipant de jeunes loups de colliers gps, (Des loups suivis par GPS (Pour la Science janvier 2012 n°411 p. 8.), les biologistes allemands ont mis en évidence que ni les routes ni les cours d'eau ne constituent des obstacles pour ces canidés, qui peuvent par ailleurs franchir des distances énormes. En deux mois, un jeune loup allemand a ainsi traversé la Vistule et l'Oder et parcouru 1 550 kilomètres avant de rencontrer une jeune femelle biélorusse. Dans l'Ouest de l'Allemagne, le loup a fréquenté la Rhénanie du Nord-Westphalie dès 2008 et l'analyse génétique d'un spécimen abattu en Rhénanie-Palatinat, un peu plus au Sud, a révélé qu'il s'agissait d'un loup italo-alpin !
Se profile ainsi une probable jonction entre les loups de souches orientale et nordique et les loups méditerranéens, jonction qui amorcera un précieux brassage génétique. De même, dans le Nord de l'Italie, en Autriche, voire en Suisse, les loups slovènes, eux aussi en expansion, pourraient rencontrer des loups italo-alpins.
La Suisse, pays de la Convention de Berne devrait être une terre de recolonisation favorable au loup, qui y est arrivé dès 1995. Or il n'en est rien. En 2012, pas plus de 17 individus ont pu être recensés, dont une minorité de femelles. Plus que la rudesse du milieu montagnard, ce sont des facteurs politiques qui expliquent encore une fois les difficultés du loup en Suisse.
Dans ce pays fédéral décentralisé, le pouvoir important des élus des cantons a pour effet de multiplier les abattages officiels instamment demandés par de puissants groupes de pression agricoles et cynégétiques. À cela s'ajoutent de nombreux tirs illégaux, souvent couverts par les autorités. Même l'Office fédéral de l'environnement (OFEV) demande régulièrement au comité permanent de la Convention de Berne d'assouplir le statut de protection de l'espèce. Le Fonds mondial pour la nature (WWF) obtient souvent des condamnations des tirs par les tribunaux suisses, mais la plupart du temps après que le mal est fait… Canis lupus progresse donc difficilement en Suisse : il n'est arrivé que dans les cantons des Grisons, du Tessin, de Vaud, du Valais et, plus récemment, dans la région située entre Berne et Fribourg.
Il existe aujourd'hui en 2013 21 meutes de loups en France et 12 en Allemagne. Depuis une dizaine d'années, le loup fait son retour dans l'Est de l'Allemagne.
Depuis 2009, l'Agence fédérale allemande pour la conservation de la nature suit par satellite six jeunes loups de la frontière germano-polonaise. Elle a fait d'intéressantes découvertes :
Ces travaux montrent qu'en Europe de l'Ouest, la dynamique de recolonisation par le loup est forte. La situation française l'illustre, puisque dans l'Hexagone, les accroissements des territoires et des effectifs restent actuellement de l'ordre de 20 pour cent par an en moyenne, et ce malgré l'existence d'un braconnage avéré et cryptique (caché), comme l'a étudié le biologiste Guillaume Chapron. Étant donné les espaces rendus disponibles par la déprise agricole, les loups français ne peuvent qu'avoir une grande capacité de dispersion.
C'est bien ce que montre le suivi français : des spécimens identifiés en Lozère ou dans les Pyrénées-Orientales l'avaient été plusieurs mois auparavant dans les Alpes. Des loups de souche italo-alpine franchissent même la frontière franco-espagnole pour coloniser la Sierra del Cadi, en Catalogne. La jonction avec les loups espagnols ne semble pas s'être faite, parce que leurs populations se trouvent à l'Ouest et au Sud de la péninsule Ibérique (voir figure 2) , et sans doute aussi parce qu'un braconnage efficace en Aragon et en Navarre isole encore les deux populations.
Il est ainsi apparu que le comportement des jeunes loups varie énormément : tandis qu'une jeune femelle n'a quitté sa famille qu'au bout de deux ans, un mâle de 12 mois a parcouru 1500 kilomètres pour aller à la rencontre d'une louve biélorusse... Les chercheurs ont été encore plus étonnés de voir les jeunes loups se risquer facilement sur des terrains découverts, telles les landes, et de constater qu'ils ne répugnent pas à séjourner longtemps près d'une route bruyante, une jeune louve allant jusqu'à creuser sa tanière à 500 mètres d'une grande artère.
« Les loups sont capables de se multiplier très vite dans les milieux structurés par l'homme », souligne Béate Jessel, directrice de l'Agence fédérale pour la conservation de la nature. En Allemagne aussi, il va falloir se préparer à gérer la cohabitation entre Canis lupus et Homo sapiens.
En Allemagne, le Loup ne s'attaque pas aux troupeaux de moutons, assurent les écologues, répondant aux craintes des éleveurs. La preuve est apportée avec l'étude des restes de 3000 repas de Canis lupus. Leur menu est composé principalement de chevreuils (55,3 %), de cerfs rouges (20,8 %), de sangliers (17,7 %) et de lièvres (3 %), révèlent les chercheurs. Seulement 1 % de leur repas provient des élevages (Science Daily).
Fig. 9 - (Carte Réseau Loup)
Fig. 10 - (Carte Réseau Loup)
Actuellement (juillet 2011), il y aurait 19 meutes avec plus de 170 loups aujourd'hui en France selon la Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal) Rhône-Alpes. La population des loups a été estimée entre 170 et 200 individus l'hiver dernier, contre 140 à 170 un an auparavant.
Selon le ministère, au 25 juillet 2011, 583 attaques ont été recensées depuis le début de l'année dans dix départements pour 2.115 ovins tués. À la même date en 2010, 470 attaques avaient été recensées pour 1 786 animaux tués. En 2011, l'État a dépensé 1,5 million d'euros pour indemniser les dégats dus au loup sur un budget loup total de 8 millions d'euros.
En 2013, on estime qu'il existe 21 meutes et 250 loups en France, chaque meute comptant 2 à 5 individus. Les signalements nouveaux concernent la plupart du temps des loups solitaires erratiques, jeunes mâles chassés des meutes constituées.
AJOUT DU 29/06/2014 : article de l'Est Républicain
Feu vert à l'abattage de loups
Des éleveurs et chasseurs ont manifesté hier dans les Pyrénées.
Alors que la profession agricole mobilisait dans l'Ariège contre « la gestion calamiteuse » des grands prédateurs, le gouvernement a annoncé hier qu'il allait faciliter les tirs contre les loups.
Gare au loup ! Le gouvernement a changé de fusil d'épaule alors que monte la colère des éleveurs. Ils étaient près de 3000, hier à Foix, pour protester contre « le fléau » des grands prédateurs (ours, loups, vautours), épaulés par les chasseurs, les forestiers et des représentants du monde rural. « Arrêtons le carnage, soutenons l'élevage », était venue clamer la profession agricole à l'appel des Jeunes agriculteurs et de la Fédération des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA).
S'agissant du loup, leur cri aura porté. La ministre de l'Écologie, Ségolène Royal, a annoncé hier le relèvement du plafond national de 24 loups maximum pouvant être abattus sous certaines conditions. Il est porté à 36 « si le seuil de 24 est atteint en cours d'année ».
Dans certains départements alpins et de l'est, les préfets vont pouvoir autoriser « des opérations de prélèvement de loups », autrement dit de tirs contre le canidé sauvage, animal protégé aux niveaux national, international et européen, mais qui ne cesse d'étendre son territoire en France. La population est désormais d'environ 300 individus, avec des effectifs en hausse de près de 20 % par an.
« Mieux protéger les éleveurs »
La ministre de l'Écologie ne va pas en rester là et promet une autre mesure, d'ici au 15 juillet, pour déléguer aux préfets « l'expérimentation de mesures plus souples » pour combattre le loup dans les régions où sont recensées le plus d'attaques. Des « battues au grand gibier » pourront être organisées.
L'annonce de ces mesures était attendue, au lendemain de la réunion convoquée par Ségolène Royal avec les préfets des départements concernés. Depuis 2009, les préfets ont compétence en matière de dérogation à la protection stricte du loup : ils peuvent prendre des mesures lorsqu'il y a « intérêt à agir », notamment pour prévenir des dommages importants aux élevages.
Les éleveurs sont « à bout de nerfs », a alerté le député UMP des Alpes-Maritimes, Charles-Ange Ginésy, mercredi à l'Assemblée nationale lors de la séance des questions au gouvernement. « Le loup gagne un département par an », a dénoncé l'élu, demandant « un signe fort et des actes ».
« La protection du loup est victime de son succès », a admis devant les députés Ségolène Royal, qui a dit hier vouloir « mieux protéger les éleveurs » contre la prédation de l'animal. La ministre de l'Écologie le reconnaît : « Les dommages aux troupeaux restent trop importants. Plus de 6 000 animaux d'élevage ont été victimes du loup en 2013. La détresse des éleveurs et de leurs familles doit être prise en considération. » Quant à l'ours, dont il reste une vingtaine d'individus après les réintroductions des années 1996-2005, l'idée est de procéder à des lâchers... en Espagne.
Farid Benhammou[1] Le retour du loup en Europe occidentale Pour la Sciencen° 435 janvier 2014 pp. 64-70.
[1] Farid BENHAMOU, est géographe et chercheur associé au Laboratoire de géographie physique (UMR CNRS 8591).
À propos d’un article paru le 13 octobre 2014 sur pastoralisme et biodiversité
Un article paru le 13 octobre 2014 dans le journal Libération Plaidoyer pour des écosystèmes non désertés par les bergers est très engagé contre la restauration d’une fraction de la faune autochtone. C’est un choix politique légitime. Ici, où l’on se doit de rester factuel et rationnel, ce n’est le lieu ni d’approuver ni de contester cette option.
Ce qui n’est pas légitime ce sont les multiples contre-vérité factuelles (voir détail plus bas) dont les auteurs prétendent étayer ce qui, de ce fait, objectivement, n’est pas une analyse mais de la propagande. Les mettre en évidence, ainsi que comme présenter les analyses ci-dessous, est tout à fait à sa place ici.
La solide analyse du géographe Farid Benhammou avait répondu à l’avance depuis plus de onze années, dans un article Benhammou Grands prédateurs biodiversité paru dans le Courrier de l’Environnement, revue de l’Institut National de la Recherche Agronomique et non pas presse d’opinion.
Contre-vérités factuelles in « Plaidoyer pour des écosystèmes non désertés par les bergers »
Lagopède Lagopus mutus et Bouquetins Capra sp. : prétendre que l’action de l’élevage pastoral leur soit profitable c’est ignorer totalement comment et où vivent ces animaux1 ;
Gypaète Gypaetus barbatus : Hirzel et al. (2004) ont montré que dans, les Alpes l’espèce la plus favorable à son installation est Capra ibex suivi par le Chamois R. rupicapra, les ovins ne viennent qu’au troisième rang ; réalité passée, mythe actuel : le rôle du pastoralisme pour la biodiversité tel qu’il est décrit est largement disparu. Depuis des décennies se juxtaposent beaucoup plus ici abandon2, là intensification3, voire surpâturage4 (cf. Benhammou Grds prédateurs biodiversité). Il ne s’agit nullement ici de critiquer cette évolution mais simplement d’appeler un chat un chat.
Faut-il s’en étonner ? Tous les nombreux signataires travaillent soit en sciences humaines, soit au sein d’organismes dont le champs d’activité est l’élevage, l’agronomie, etc. mais pas un seul sur la biodiversité, sa conservation ou/et sa restauration. Il est remarquable que la partialité de plusieurs d’entre eux ait déjà été analysé onze ans plus tôt dans l’article de Benhammou dans le Courrier de l’Environnement Benhammou Grds prédateurs biodiversité.
Au contraire, des éleveurs et/ou bergers par ailleurs naturalistes conviendront des critiques ci-dessus.
1 Alors que, au contraire, sont solidement documentés des cas d’effets négatifs de l’élevage sur des populations de bouquetin : disette hivernage par excès de pâturage, pathologies transmises.
2 Parcours difficile ou autre conditions rendant difficile ou impossible l’intensification.
3 La multiplication des impluviums dans des alpages qui s’en sont passé durant des siècles correspond à une intensification.
4 Certains sites célèbres par la diversité de leur flore ont été ainsi ruinés du fait de concentrations temporaires mais extrêmes.
Ajout du 30 août 2016 (d'après un article ce Science et Avenir n°835, p 56-57).
LE LOUP : UN DÉLICAT ÉQUILIBRE À RESPECTER
Population estimée : 300 individus
Répartition :Vosges, Massif central, Pyrénées
Statut :espèce strictement protégée
« Compter les loups, c'est comme chercher une aiguille dans une botte de foin tant ils évoluent sur de grands territoires, explique Christophe Duchamp, du service Études et recherche de l'ONCFS. Aussi, nous mutualisonsles énergies avec un réseau de 3100 observateurs formés qui s'étendau fur et à mesure de l'expansiondu prédateur.»
Absent du territoire national en 1992, le Loup est désormais revenu en provenance d'Italie. Les spécialistes récupèrent les crottes et les poils laissés par les carnivores pour établir leur carte d'identité génétique, étudient les moutons et animaux sauvages attaqués (8935 ovins tués en 2015) et expertisent les photos prises par des particuliers. Les pouvoirs publics se doivent de préserver la sérénité des éleveurs tout en assurant la sauvegarde d'une espèce protégée au niveau européen. « Nous évaluons les risques qu'ala population de loups de croître ou décroître selon le niveau de prélèvement [abattage] appliqué », résume Christophe Duchamp. Pour ce faire, les chercheurs utilisent un modèle démographique qui croise la dynamique de reproduction avec son expansion géographique. Ainsi, en 2015, 45 zones de présence permanente ont été identifiées pour 33 meutes. Le modèle permet aux pouvoirs publics de déterminer le plafond des abattages selon les régions. Entre juin 2015 et juin 2016,18 des 36 abattages se sont produits dans les Alpes-Maritimes. Sans que l'on connaisse bien, pour le moment, l'impact sur les meutes qui y vivent.
Le Loup signalé dans la Nièvre (La feuille de Neomys n° 13, décembre 2016)
Disparu de la Nièvre au siècle dernier, le Loup a fait sa réapparition dans le département le 30 décembre 2016. Il a été filmé à l'aide d'une caméra automatique sur la commune de Chougny (58). Un agriculteur avait placé ce dispositif après que son troupeau ait subi une première attaque. Au total, sept brebis ont été tuées lors de deux attaques consécutives.
"Les conclusions sont très claires", a indiqué, vendredi 13 janvier au matin, le préfet, Joël Mathurin. Le réseau Grands Prédateurs Loup Lynx de l'Office national de la Chasse et de la Faune sauvage (ONCFS) de Dijon (Côte-d'Or) l'a déterminé après analyse des images fournies par la caméra de surveillance posée dans son champ par l'un des éleveurs victimes. Les lisérés noirs sur les pattes avant de l'animal, ses oreilles courtes et arrondies, sa tache blanche sur une joue, la couleur de son pelage... ne supportent aucune ambiguïté. Il s'agirait d'un jeune loup d'environ dix-huit mois chassé d'une meute.
La préfecture a mis en place une cellule de veille qui s'est réunie le 13 janvier 2017.
Les loups sont de retour au Danemark, 200 ans après avoir disparu (ajout du 6 mai 2017)
Des loups, dont une femelle, ont fait leur retour au Danemark pour la première fois depuis deux siècles, a affirmé jeudi un zoologiste qui en a obtenu la preuve par l'ADN.
« Nous savions depuis 2012 que des loups étaient entrés au Danemark. Maintenant, nous avons la preuve qu'il y a une femelle », laissant la possibilité de naissances lors de ce printemps, a déclaré à l'AFP ce scientifique de l'université d'Aarhus, Peter Sunde. Ces animaux sont arrivés d'Allemagne pour s'installer dans l'Ouest du Danemark, région agricole, la moins densément peuplée du pays scandinave.
« Ils ont fait beaucoup de chemin, plus de 500 km. Nous pensons que ce sont des jeunes rejetés par leur famille qui recherchent de nouveaux terrains de chasse », a affirmé le chercheur.
Localisation maintenue secrète
La preuve a été établie, outre l'ADN, par le relevé d'empreintes et par la vidéosurveillance d'endroits où la présence des canidés était soupçonnée. Les scientifiques ont établi le profil génétique de cinq individus, quatre mâles et une femelle, mais il y en a peut-être plus.
La localisation est maintenue secrète, pour ne pas attirer d'éventuels chasseurs. « Nous suivons ça. Le loup est un animal qu'il n'est pas autorisé de chasser donc nous devons le protéger », a indiqué à l'AFP le directeur de l'Agence de l'environnement, Henrik Hagen Olesen. Le loup avait entièrement disparu du royaume au début du XIXe siècle, exterminé par les chasseurs.
Vives polémiques
Dans les autres pays nordiques où l'espèce est beaucoup mieux représentée, l'abattage des loups, espèce protégée par la Convention de Berne, est l'objet de vives polémiques entre habitants, éleveurs, chasseurs, gouvernement, Union européenne et défenseurs des animaux sauvages.
La présence du Loup signalée entre le Tarn et l'Hérault
Par Sciences et Avenir
L'attaque sur plusieurs brebis survenue dans le Tarn en juin 2018 pourrait bien avoir été commise par des loups : la présence de l'animal sauvage a été confirmée dans le Tarn et l'Hérault.
La présence du Loup, en expansion rapide en France (430 individus selon les dernières estimations de l'Office nationale de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS)), a été signalée à la limite entre le Tarn et l'Hérault, a indiqué le mardi 7 août 2018 la préfecture du Tarn, annonçant un renforcement du dispositif de surveillance pour protéger les troupeaux. Le Loup était en effet soupçonné dans l'attaque fin juin 2018 de plusieurs brebis d'un éleveur de Murat-sur-Vèbre (Tarn). L'Office National de Chasse et de la Faune Sauvage (ONCFS) a conclu, après expertises, que "le Loup figure parmi les prédateurs ayant pu commettre ces attaques", selon un communiqué de la préfecture.
Une photographie automatique a confirmé qu'il s'agissait d'un Loup
Un expert de l'ONCFS a confirmé qu'un grand canidé pris en photo par des appareils automatiques vers 2h du matin le 5 juillet 2018 sur la commune de Cambon-et-Salvergues (Hérault), en limite du département du Tarn, était "bien un Loup".
Avec environ 430 individus estimés, le Loup, tant redouté par certains éleveurs, continue son "expansion rapide" en France. Jadis présent partout dans le pays avant d'être éradiqué, le loup, revenu naturellement au début des années 1990 par l'Italie, poursuit sa recolonisation, par "taches" successives.
Un retour favorisé par la reforestation et l'exode rural
À l'origine de ce retour, la reforestation, l'exode rural, l'augmentation des proies, l'adaptabilité d'un animal capable de parcourir de grandes distances, et de strictes mesures de protection (Convention de Berne, directive de l'UE). Face à cette expansion, la FNSEA, les Chambres d'agriculture et les associations d'éleveurs ont demandé fin juillet 2018 à l'État un renforcement des mesures contre les attaques de loups.
En France, le seuil de 500 loups a été franchi, selon l'Office national de la chasse et de la faune sauvage qui assure le suivi de l'espèce.
Les spécialistes en étaient déjà plus ou moins sûrs : le seuil des 500 loups a été atteint en France, selon le bilan hivernal de l'Office de la chasse et de la faune sauvage rendu public le 7 juin 2019. De nouvelles mesures de gestion devraient donc être prises à l'encontre de cette espèce protégée.
Canis lupus colonise de nouveaux territoires
"La population a atteint le seuil de viabilité démographique fixé à 500 loups dans le cadre du Plan national d'action sur le loup et les activités d'élevage, reprenant une notion découlant de l'expertise scientifique collective ONCFS-MNHN 2017. Plus précisément, l'effectif en sortie d'hiver est estimé à environ 530", note l'agence. Elle précise que l'espèce Canis lupuscolonise aussi de nouveaux territoires depuis son retour en 1992 via les Alpes depuis l'Italie. "Des loups ont ainsi été détectés dans de nouvelles zones en 2018, notamment dans les Pyrénées-Atlantiques, dans la zone Aube-Yonne, et dans certaines nouvelles zones du massif central", souligne l'ONCFS.
Le nombre de Zone de Présence Permanente (ZPP) augmente également, passant de 74 à 92 en 1 an. 68 d'entre elles sont constituées en meute (au moins 3 loups ou une reproduction) contre 57 l'hiver précédent. "Toutefois, 5 zones de présence permanente perdent le statut de meute dans les départements 73 et 04. L’hypothèse d’un effet des tirs sur les meutes jusqu’alors présentes dans ces zones reste à confirmer", précise l'agence.
Une hausse des "prélèvements" prévue
"La question de l’effet des tirs sur la dynamique de constitution ou de scindement des groupes de loup – et donc la reproduction- doit être étudiée précisément", ajoute l'ONCFS. Les associations de protection des animaux ont déjà largement critiqué les tirs qu'elles jugent inefficaces. "Ces tirs sont inutiles (pas de baisse de la prédation des troupeaux domestiques), voire contre-productifs (l'éclatement des meutes de loups peut augmenter les attaques sur les troupeaux)", notait Férus en octobre 2018 dans un communiqué.
La présence de désormais 530 loups adultes va néanmoins entraîner une hausse du nombre d'animaux pouvant être abattus. Le préfet du Rhône, préfet coordonnateur du loup, a immédiatement annoncé que le plafond de prélèvement pour 2019 passerait à 53 loups (38 ont déjà été tués depuis le début de l'année). "Nous considérons que le loup n'est plus une espèce en voie de disparition, ce qui est une bonne chose pour la biodiversité", a déclaré le 5 juin 2019 le ministre de l'Agriculture Didier Guillaume. "Nous en sommes par contre, pour la prédation, à un niveau hors du commun (...) Nous avons besoin d'apporter un soutien fort et plein aux éleveurs. Leur bien-être est notre priorité", ajoutait-il.