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12/09/2018

Éradication définitive du paludisme ?

La première pierre vers l'éradication définitive du paludisme

a peut-être été posée en septembre 2018

 

Par Audrey Duperron

"Le Monde"

editor express 6 septembre 2018

 

Le Burkina Faso sera très prochainement le théâtre d’une grande première en Afrique. Mercredi, des chercheurs ont annoncé qu’ils avaient obtenu le feu vert de l’Agence nationale de biosécurité (ANB) burkinabée pour organiser un lâcher de moustiques mâles du genre Anopheles génétiquement modifiés dans la nature. Cette initiative fait partie d’un plan à long terme visant à éradiquer une espèce transmettant le paludisme.

 

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Plasmodium sp., agent du paludisme

 

Le paludisme est une maladie infectieuse potentiellement mortelle due à plusieurs espèces du genre Plasmodium, maladie qui est transmise à l’homme par la piqûre de moustiques infectés. Ces moustiques, "vecteurs" du paludisme, appartiennent tous au genre Anopheles. Selon l’OMS, cette maladie cause aux alentours d’un million de victimes par an dans le monde. Environ 40% de la population mondiale est exposée à la maladie et 500 millions de cas cliniques sont observés chaque année. La situation est d’autant plus préoccupante que depuis plusieurs années les parasites développent des résistances aux molécules antipaludiques et les moustiques craignent de moins en moins les insecticides. Aujourd’hui, aucun vaccin n’est disponible.

 

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Cycle du paludisme

Document Science & Vie

 

Ce lâcher d'Anophèles génétiquement modifiés sera la première libération d'un animal génétiquement modifié dans la nature en Afrique. Sur les neuf dernières années, des moustiques génétiquement modifiés ont déjà été libérés dans la nature aux Îles Caïman, en Malaisie, au Brésil, au Panama et en Floride.

 

Target Malaria

 

Le paludisme (aussi appelé malaria) se propage lorsque les parasites infectent les anophèles femelles, qui, en les piquant, transmettent la maladie à l'Homme. Ainsi, en 2016, 445 000 personnes sont mortes du paludisme, dont 90 % vivaient en Afrique. La plupart d'entre elles étaient des enfants. En l'absence de vaccin et de moyens de lutte conventionnels efficaces comme les moustiquaires imprégnées, les antipaludiques et les insecticides qui montrent leurs limites.

 

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Cycle du Plasmodium chez l'homme et chez le moustique

 

Le consortium de chercheurs africains et européens du projet “Target Malaria”, financé par la Fondation Bill & Melinda Gates, prévoit de lâcher des moustiques mâles génétiquement modifiés dans le village burkinabé de Bana ce mois-ci. Ces Anopheles gambiae, l’un des vecteurs de transmission du paludisme en Afrique, seront exclusivement des mâles qui ne piquent pas. Ils ont été génétiquement modifiés pour ne produire que des mâles : ainsi, les œufs produits par les femelles piqueuses avec lesquelles ils s’accoupleront ne donneront que des mâles qui ne sont pas piqueurs.

 

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Tête d'anophèle vue en microscopie électronique

à balayage et coloration

(Photo DR)

 

Une étape préliminaire avant le "forçage génétique"

 

Mais la vocation première de cette expérience, ce n’est pas d’éradiquer le paludisme ; c’est de familiariser les populations avec ce type de technique, et de gagner leur confiance pour franchir une nouvelle étape, bien plus polémique, dans la lutte contre le paludisme.

 

Celle-ci implique la mise en œuvre de la technique du “forçage génétique”, qui consiste à modifier le code génétique des insectes en introduisant des mutations génétiques transmissibles à leur descendance. Comme nous l'avons dit plus haut, ce forçage génétique ne produit que des anophèles mâles qui ne produiront que des descendants mâles, ce qui, à terme affaiblira les populations de moustiques, et permettrait de réduire graduellement les risques de transmissions  (seules les femelles peuvent transmettre la maladie). Selon le docteur Abdoulaye Diabaté, qui dirige ces travaux, il faudra « environ 20 descendances d’insectes, soit moins de deux ans », pour constater un impact massif et « sauver des millions de vies ».

 

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Anophèle femelle. Seules les femelles sont hématophages et transmettent le paludisme. Un repas sanguin est obligatoire pour permettre la maturation de leurs œufs (photo DR)

 

Mais cette technique soulève aussi de nombreuses questions. Personne n’a jamais procédé au lâcher d’un animal modifié génétiquement, car c’est une opération à haut risque, l’ouverture d’une boîte de Pandore dont on ne maîtrise pas forcément toutes les conséquences. Et si la libération de ces moustiques stériles génétiquement modifiés entraîne des conséquences imprévues, il ne sera pas possible d’annuler simplement l’expérience. L’ampleur des dégâts irréversibles serait également impossible à prévoir.

 

Mais compte tenu du nombre de décès annuels dus au paludisme, l’enjeu en vaut bien la chandelle, estiment les chercheurs de ce consortium.

 

Lost in translation

 

Reste à convaincre les habitants du bien-fondé de ces expériences. Au mois de juin, plus d’un millier de personnes ont manifesté dans la capitale Ouagadougou pour contester les plans de “Target Malaria”, dans le cadre d’une marche organisée par le Collectif citoyen pour l’agroécologie, un mouvement écologique. “Qu’est-ce qui prouve qu’en modifiant le gène de l’insecte, on ne va pas créer des mutants qui transmettront d’autres maladies ? Ensuite il y a la question écologique : en réduisant cette espèce, on risque de créer un vide écologique et déséquilibrer la chaîne alimentaire. Il y a beaucoup de doutes, nous ne pouvons pas accepter d’être utilisés comme des cobayes”, se demandait Ali Tapsoba, le porte-parole de ce collectif. Ses collègues déplorent le manque d’information de la population.

 

Car même si les chercheurs ont organisé des opérations de communication dans les villages pour recueillir un “consentement éclairé” des villageois, dûment formalisé par écrit, il n’est pas toujours facile de faire comprendre la finalité de leurs travaux. À l’analphabétisme de certains habitants, s’ajoutent les problèmes de traduction. “Comment voulez-vous traduire OGM en dioula ?”, résume Omar Karambiri, enseignant à l’école primaire du village burkinabé de Sourkoudiguin.

 

MONTAGNE D’OR EN GUYANE : LE DÉBAT PUBLIC SOULÈVE LES IMPOSSIBILITÉS DU PROJET

Logo_Principal_ROUGE_180.pngGNE_RVB_300-Transparent-01.pngCOMMUNIQUÉ DE PRESSE

VENDREDI 07/09/18 SEPTEMBRE 2018

 

 

 

MONTAGNE D’OR EN GUYANE : LE DÉBAT PUBLIC SOULÈVE LES IMPOSSIBILITÉS DU PROJET

 

Lire également le coup de gueule d'Isabelle Autissier du 16/10/2018 (Sciences & Avenir)

 

Aujourd’hui sont rendues publiques les conclusions du débat public sur le projet de mine « Montagne d’or » en Guyane. France Nature Environnement se félicite que ce débat, qui a eu lieu à sa demande, ait permis de mieux informer la population et de mettre en lumière les manques béants dans la construction du projet et la minimisation des risques par le porteur du projet. Il renforce notre détermination à demander l’abandon de ce projet.

 

Manque d’évaluation environnementale précise

 

575 ha de forêt amazonienne primaire disparaîtraient pour l'aménagement des infrastructures de la mine industrielle, de la piste et de la ligne électrique. Pas moins de 2000 espèces, dont 127 espèces protégées, vont voir leur habitat détruit ou perturbé.

 

Pourtant, peu d’éléments ont été fournis par les porteurs du projet à propos de son impact sur l’environnement et la santé des populations. C’est pourtant la préoccupation majeure de notre époque, comme le démontre les opinions exprimées lors du débat public. Les auditions de scientifiques qui ont eu lieu à l’occasion de ce débat n’ont fait que renforcer l’alerte donnée par France Nature Environnement et ses membres sur l’effet dévastateur qu’aurait cette mine aux dimensions monstrueuses. L’or est une ressource non renouvelable et non nécessaire, qui plus est paradoxalement source de misère et de violence. Au contraire, la biodiversité, l’eau, l’air, nous sont eux indispensables pour vivre et donner un avenir viable et pacifique à notre société.

 

Pour Ginette Vastel, responsable du réseau risques industriels : « Le débat montre une forte inquiétude sur les effets du projet sur la santé et des interrogations légitimes mais prises à la légère par les extractivistes sur leur recours au cyanure, dont nous demandons l’interdiction. Par le passé, des accidents très graves et des ruptures de digues sont pourtant survenus et ont dramatiquement contaminé cours d’eau et nappes phréatiques ».

 

Pas de consensus sur le principe de l’exploitation des mines d’or

 

Une des conclusions du débat renvoie vers une question essentielle : doit-on se lancer dans une politique d’exploitation aurifère industrielle en Guyane ? Est-ce le type de développement qui est souhaité pour ce territoire ? Le débat sur ce projet a clairement fait apparaitre que la population était très divisée sur le principe même de l’exploitation des mines d’or au regard des pollutions graves qu’elle engendre et des risques pour les riverains.

 

Pour Rémi Girault, président de Guyane Nature Environnement : « Les conséquences pour les habitants et la nature en Guyane sont bien trop graves pour qu’un tel projet soit autorisé, qui plus est sans que la population n’ait jamais été convenablement consultée au préalable sur le type de développement souhaité. Pourtant, les populations guyanaises ont clairement montré leur intérêt et leur souhait de contribuer plus activement à ce réel choix de société. Nous demandons donc un débat sur l’exploitation de l’or en Guyane, dont les conclusions du débat public soulignent l’utilité en préalable à toute décision sur ce projet de mine de la Montagne d’or ».

 

Pour Michel Dubromel, président de France Nature Environnent, « Nous demandons au Gouvernement de montrer qu’il a entendu le message de Nicolas Hulot lors de sa démission : il ne s’agit plus de trouver des compromis, de faire du « moins pire ». La situation est trop grave et trop urgente. Pour des projets aussi dévastateurs, il n’est plus possible de les autoriser sans analyse précise de ses impacts et surtout, sans consensus de la population sur le modèle de développement souhaité. Pour nous, les conclusions du débat public sont claires : le projet Montagne d’or ne peut pas être autorisé ».

Lire le dossier « La Montagne d'Or en Guyane : un gouffre environnemental et financier »

Voir toutes les publications de France Nature Environnement sur la Montagne d’or