Saprolegnia parasitica : une unique souche parasite les poissons
02/06/2012
Une unique souche de Saprolegnia parasitica parasite les poissons du Jura
par André Guyard
(Dernière mise à jour : novembre 2012)
Une unique souche de Saprolegnia parasitica serait à l'origine de l'attaque des poissons des rivières jurassiennes : c'est la conclusion à laquelle est arrivé un laboratoire suisse.
Mandaté par l’Office fédéral de l’environnement (OFEV), le laboratoire neuchâtelois dirigé par le docteur Lassaâd Belbahri a mis en évidence une seule et même souche d’un agent pathogène, infestant les truites, ombres et loches du Doubs, de la Loue et de la Sorne. Un résultat qu’il faut probablement s’attendre à retrouver du côté de l’Ain et de la Bienne mais aussi de l’Areuse et de la Birse, en Suisse, où, les symptômes qui frappent le Doubs et la Loue depuis 2009 ont été relevés cette année.
Cet agent pathogène est un oomycète Saprolegnia parasitica, fréquent dans les piscicultures. Le voici maintenant envahissant nos rivières. Il s'agit d'un agent pathogène opportuniste qui s'attaque aux poissons soumis à des stress et/ou déjà affaiblis par des sources de pollution atteignant nos rivières. Autrefois classé parmi les champignons, les études phylogénétiques placent désormais cet organisme parmi les Straménopiles, un clade particulièrement compliqué rattaché aux Algues (voir l'article sur Saprolegnia dans ce même blog).
Une opinion partagée par le collectif SOS Loue et rivières comtoises : « La saprolégniose n’est qu’une cochonnerie de plus, une maladie qui achève des poissons déjà très faibles », avance Jean-Michel Blondeau, un membre fondateur. « Les éclusées (lâchers d’eau des barrages), l’ouverture hors crues des vannes de fond, les stations d’épuration inexistantes ou pas aux normes, les nitrates et phosphates présents dans des algues jamais analysées, voire certains alevinages. Un cocktail explosif. […] Reconnaissons notre responsabilité collective et agissons avant que ne survienne un problème de santé publique. »
Le laboratoire neuchâtelois établit que la souche de Saprolegnia a été introduite récemment et se caractérise par sa virulence des souches pathogènes déjà présentes dans les milieux observés. Mais son origine reste inconnue, probablement anthropique : lâchers de poissons d'élevage contaminés, contamination par les bottes d’un pêcheur, la coque d’une embarcation, l'utilisation de vifs contaminés comme appâts, introduction d’espèces exotiques, exploitations aquacoles… D'autres vecteurs de la contamination peuvent être soupçonnés comme les écrevisses américaines.
En effet, aux États-Unis, une écrevisse loge un tueur de grenouilles. Il s'agit également d'un champignon qui provoque la chytridiomycose décimant les amphibienset qui est aussi hébergé par les écrevisses ! C'est ce que révèle Tegan McMahon, de l'université de Floride du Sud. Dans le Colorado et en Louisiane, près de 30 % de ces crustacés sont contaminés par Batrachochytrium dendrobatidis. Des expériences en laboratoire montrent que des spores du pathogène, déposées dans l'eau, se logent dans la paroi intestinale des écrevisses, d'où elles peuvent ensuite contaminer les grenouilles. Ces réservoirs biologiques expliqueraient la virulence et la persistance de l'infection, en partie responsable du déclin des amphibiens.
En définitive, on ne peut que recommander pour éviter la propagation de Saprolegnia à d’autres cours d’eau de procéder à la désinfection du matériel ayant été en contact avec les eaux contaminées avec une solution javellisée ou alcoolique.
Rappelons que, dès mai 2011, la préfecture du Doubs avait demandé au laboratoire vétérinaire de Poligny (Jura français) d'étudier le problème de la saprolégniose, une maladie qui se manifeste par l’apparition d’un champignon sur le corps du poisson et qui n’occasionne en général qu’une faible mortalité. Les conclusions du labo : « Les poissons présentent des lésions dues à des surinfections externes cutanées par des saprolegnia banales. Aucun autre agent pathogène n’a été trouvé en quantité suffisante ».
Selon le blog animé par Isabelle Brunnarius sur le site de France 3 Franche-Comté, la Bienne est également sévèrement touchée.
23 mars 2012
L’AAPPMA La Biennoise souhaite interdire la pêche sur 24 kilomètres, pour une durée indéterminée, à la suite de la forte mortalité de poissons découverte à la mi-mars dans cette rivière jurassienne. Sur son blog, le pêcheur jurassien précise que « les limites du secteur fermé à la pêche sont pour l’amont, la confluence du Tacon avec la Bienne à St Claude et pour l’aval, la confluence du Merdançon et la Bienne à Dortan« . Cette décision intervient alors que les analyses réalisées par l’ONEMA sur les poissons morts ne sont toujours pas connues. Aujourd’hui encore, Charles Varenne, le président de l’AAPPMA, récupère des poissons morts au bord de cette rivière. Et pourtant, selon l’association de pêche, des pêcheurs continuaient de pêcher et de manger leurs prises. La Biennoise veut également sauvegarder les truites encore bien portantes.
La Bienne est également touchée
par cette mortalité pisciaire
15 novembre 2012
Daniel Berthet, le président de la société de pêche de Morez, prépare méticuleusement les truites mortes prélevées la semaine dernière dans la Bienne. Ces prélèvements vont partir ce jeudi dans un laboratoire d’analyse de Valence dans la Drôme. Ces analyses révéleront peut-être le nom du produit toxique à l’origine de la mort d’au moins 300 truites la semaine dernière à Morez. Mais il se peut que plus de poissons soient morts car les fortes pluies de ces jours-là ont augmenté le débit de la Bienne ; des poissons ont pu être entraînés loin rapidement. Avantage de cette météo, la pollution a été diluée.
Le président de cette AAPPMA souhaite déposer plainte à la gendarmerie, mais, pour l’instant, les gendarmes n’ont pas voulu prendre sa plainte en expliquant qu’ils attendaient le procès-verbal de la police de l’eau, l’Onema. Mais Daniel Berthet ne s’avoue pas vaincu, il retournera à la gendarmerie pour tenter de déposer plainte. Les enquêtes sur les pollutions aquatiques aboutissent difficilement car il est compliqué de prouver l’origine du déversement.
Voir également dans ce même blog sur le même sujet :
- État sanitaire de la faune halieutique du Dessoubre, de la Loue et du Lison
- La santé du Doubs mise à prix
- Mortalité des poissons dans le Doubs
- l'alerte lancée par Pascal P.
- Menaces sur le Doubs franco-suisse
- Proliférations algales dans la Haute vallée du Doubs
- Prolifération de Cyanobactéries dans la Loue
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