La couleuvre à collier
15/07/2013
Natrix natrix L., 1758
Son nom scientifique Natrix vient du latin qui signifie ‘nageur’.
par André Guyard et Michel Cottet
(Dernière mise à jour : 15 juillet 2016)
Caractéristiques :
La Couleuvre à collier est une grande couleuvre massive à tête ovale et nettement distincte du cou. Grands yeux à pupilles rondes, écailles dorsales nettement carénées, et longue queue. La coloration est grise (plusieurs tons), plus rarement brunâtre. Les couleuvres à collier peuvent être unies, avoir des taches dorsales et latérales noires, ou porter un ensemble de taches noires et de bandes longitudinales claires. La tête a généralement un motif caractéristique plus ou moins net : deux taches blanchâtres, jaunâtres ou orange entourées d'un liséré noir et situées sur les côtés de la nuque. La face ventrale blanchâtre ou jaunâtre s'orne d'un damier noir. Longueur totale du mâle 70-75 cm, de la femelle 85-90 cm (parfois même jusqu'à 180 cm). Les femelles sont plus grosses que les mâles, surtout en fin de printemps quand elle portent les œufs.
Langue bifide © H. Reinhard
La Couleuvre à collier montre une seule écaille préoculaire et trois écailles post-oculaires, alors que la Couleuvre vipérine possède deux écailles préoculaires et deux écailles post-oculaires et la Couleuvre lisse une seule écaille préoculaire et deux écailles post-oculaires.
Natrix natrix helvetica © Michel Cottet
Distribution :
La Couleuvre à collier vit dans presque toute l'Europe, dans l'ouest de l'Asie et en Afrique du Nord. Absente d'Irlande, du nord de l'Angleterre, d'Écosse et de différentes îles méditerranéennes (Baléares, Crète). Dans cette vaste aire de répartition, on distingue 9 sous-espèces caractérisées essentiellement par leur coloration.
Jeune Natrix natrix helvetica © Michel Cottet
Sous-espèces
- · astreptophora - Se rencontre au Portugal, en Espagne et une répartition limitée en France (départements des Pyrénées-Orientales et le Sud de l'Aude. limite Nord à proximité de Narbonne).
Natrix natrix astreptophora © F. Forman
Natrix natrix astreptophora © D. Philips
- · cetti - Se rencontre en Sardaigne.
- · corsa - Se rencontre en Corse, récemment séparée de la sous-espèce cetti.
Natrix natrix corsa © F. Forman
- · fusca - Se rencontre seulement sur l'île grecque de Kea.
- · gotlandica - Se rencontre sur l'île Suédoise de Gotland.
- · helvetica - Se rencontre sur la quasi totalité de la France (sauf où se trouve sp. astreptophora), la plupart de la Suisse (sauf l'extrême Est, où elle est remplacée par ssp. natrix), à l'Ouest du Rhin en Allemagne, Belgique, Luxembourg, les Pays-bas, l'Angleterre et le Pays de Galles.
Natrix natrix helvetica © F. Forman
- · lanzai - Se rencontre en Italie (sauf le Nord où elle est remplacer par ssp. natrix à l'Ouest et ssp. helvetica à l'Est).
- · natrix - Se rencontre à partir du Rhin vers l'est jusqu'en Russie, les limites Sud sont la Suisse, l'Italie du Nord, la Slovénie, Hongrie, et le Nord de la Roumanie. Au Nord cette sous-espèce se rencontre au Danemark, en Finlande, en Norvège et la Suède.
- · persa - Se rencontre dans la péninsule des Balkans, limite au Nord Est là où est la limite du Sud de ssp. natrix (voir natrix).
Couleuvre à collier rayée : Natrix natrix persa © D. Fuchs
- · schweizeri - Se rencontre sur plusieurs îles Grecs: Milos, Kimolos et Polyagos.
Natrix natrix schweitzeri © F. Forman
- · sicula - Se rencontre en Sicile.
Natrix natrix sicula © F. Forman
Habitat :
Serpent aquatique, la Couleuvre à collier vit souvent près des lacs, des étangs et des petites mares bordés de roseaux et de sous-arbrisseaux. Mais on la trouve aussi dans les zones marécageuses, et même dans les gravières et carrières sèches. C'est dans ce genre de biotope qu'elle se nourrit de crapauds ou de souris. Elle préfère la plaine, mais monte parfois en montagne jusqu'à 2400 m.
Mœurs :
La Couleuvre à collier est un serpent exclusivement diurne. Le soir, elle se retire dans une cachette où elle se repose en position repliée. Elle sort lentement de la fraîcheur du petit matin pour s'exposer longuement au soleil. Elle redevient surtout active en fin de matinée et l'après-midi. Pendant les grandes chaleurs, elle se replie dans une cachette. Les chaudes soirées d'été, la Couleuvre à collier peut se promener jusqu'au coucher du soleil. Elle se déplace à terre avec beaucoup d'agilité, mais fréquente aussi l'eau où elle nage et plonge fort bien. Elle commence l'hibernation fin septembre ou début octobre, s'abritant dans un terrier, une cavité naturelle, sous une souche ou dans une fente rocheuse. Les abris les mieux appropriés réunissent souvent plusieurs couleuvres en hibernation, parfois même un très grand nombre. Ces « dortoirs » se vident généralement fin mars, et le rut commence début mai. Plusieurs mâles se réunissent fréquemment autour d'une même femelle.
Menacée, elle siffle et émet un liquide malodorant quand on la manipule. Elle peut faire le mort : elle tire la langue avec la bouche ouverte et peut ainsi décontenancer un prédateur. Certains spécimens miment la vipère en étant plus agressifs en aplatissant tête et cou, en émettant des sifflements et se lançant sur le prédateur comme s'ils voulaient mordre.
Couleuvre à collier simulant la mort
©Monique Cottet (20 avril 2016)
Natrix natrix helvetica faisant le mort © Daniel Phillips
La reproduction a lieu au printemps au sortir de l'hibernation. Les mâles atteignent leur maturité sexuelle lors de la troisième année et les femelles lors de la cinquième année. Les individus mesurent alors environ 60 cm de long.
Dans les biotopes où cette espèce est fréquente, on a observé jusqu'à 20 mâles en rut autour d'une femelle. Lors de tels regroupements, les mâles peuvent se gêner au point qu'aucun ne parvienne à s'accoupler avec la femelle. Il n'est pas rare que celle-ci fuie la foule de ses prétendants. Quand ils s'en aperçoivent, les mâles commencent à arpenter les environs. S'ils retrouvent la femelle, ils recommencent à s'agglutiner autour d'elle, chacun essayant de se placer à son côté ou sur son dos. Quand un mâle parvient enfin à prendre la position requise et à réaliser l'accouplement, la femelle cherche à s'isoler, entraînant son partenaire sur son dos. La copulation se prolonge généralement un certain temps. En cas de danger, les partenaires ne peuvent pas se séparer instantanément et ont de grandes difficultés à s'enfuir. Ils essaient de se sauver dans des directions opposées. Finalement, c'est la femelle, généralement plus grande, qui parvient à entraîner le mâle avec elle.
Ponte © B.-Münker
La ponte se déroule en juillet ou en août. Chaque femelle pond environ 50 œufs et choisit pour cela un tas de feuilles, de roseaux ou de sciure en décomposition. Là encore, les lieux les mieux adaptés peuvent attirer plusieurs pondeuses, parfois un très grand nombre. On cite toujours des tas où on a retrouvé un nombre inimaginable d'œufs dans un petit espace : 3 500 à 4 000 œufs dans une scierie, par exemple. En général, une femelle pond une trentaine d'œufs, mais une ponte peut comprendre jusqu'à une centaine d'œufs Dans des conditions naturelles, les jeunes éclosent au bout de 60 à 75 jours Ils mesurent alors 15-22 cm et ont la même coloration que les adultes.
Éclosion © T. Angermayer
Alimentation :
La Couleuvre à collier se nourrit essentiellement de grenouilles rousses ou vertes, mais elle dévore aussi rainettes, crapauds et tritons et même des poissons de petite taille (carpes, carassins, goujons, etc.). Parmi les amphibiens, la couleuvre semble ne dédaigner que le crapaud sonneur et la salamandre. Dans des biotopes plus secs elle chasse des micro-mammifères. Les jeunes se nourrissent surtout de têtards, d'insectes et de poissons de petite taille.
Couleuvre à collier avalant une grenouille rousse © B. Münker
Couleuvre à collier attaquant un crapaud commun © Georges Lignier
Écologie :
La Couleuvre à collier a de nombreux prédateurs : les rats et les fourmis peuvent détruire sa ponte, et les toutes jeunes couleuvres peuvent être la proie de carabes, de la grenouille rieuse, ou de poissons. De nombreuses espèces d'oiseaux les apprécient également : hérons, grèbes et plongeons, cigognes, buses et busards, serpentaires, corvidés, pies-grièches et merles. On a même vu des moineaux domestiques s'attaquer à des couleuvres à collier fraîchement écloses. Cette foule de prédateurs n'exerce pas une pression suffisante sur l'espèce pour la menacer. Mais, bien que localement très fréquente, la Couleuvre à collier commence à se raréfier. Trop de plans d'eau sont ouverts aux baigneurs et aux sports aquatiques, les roselières qui bordent les lacs sont souvent détruites, et de nombreuses zones marécageuses sont assainies.
Le bruit que fait la Couleuvre à collier en se déplaçant fait souvent fuir sa proie favorite, la grenouille. La couleuvre réagit surtout au mouvement et ne reconnaît une grenouille posée près d'elle que lorsqu'elle prend la fuite ou si elle la touche par hasard de la langue. La proie est saisie n'importe comment et avalée vivante, soit les pattes, soit la tête en premier. Quand une Couleuvre à collier est poussée dans ses retranchements, elle s'enroule en « galette » et écarte ses côtes pour s'aplatir au sol. Elle peut aussi redresser l'avant du corps, siffler fortement en agitant la langue, et donner des coups de tête en direction de l'ennemi. Si elle est saisie en dépit de ces manœuvres d'intimidation, elle cherche à se dégager, frappant de son corps à droite et à gauche, et émettant de son cloaque un liquide blanc craie nauséabond qui imprègne longtemps les mains et les vêtements. Une couleuvre inquiétée peut également « faire le mort ». Elle devient brusquement molle, ouvre la bouche, laisse prendre la langue, et ses pupilles se tournent vers le bord inférieur de la paupière. Quand elle est dans cet état, on peut la tourner et la retourner au sol sans qu'elle ait de réaction. Lorsqu'on la laisse parfaitement tranquille, elle reste généralement assez longtemps immobile, mais se remet rapidement et prend la fuite. La Couleuvre à collier mue plusieurs fois par an. Une mue s'annonce par le ternissement des couleurs et l'obscurcissement des yeux. Pour se débarrasser de sa vieille peau, la couleuvre commence par se frotter la tête sur des objets, afin de détacher la peau des mâchoires supérieure et inférieure. Elle passe alors plusieurs fois entre des racines ou des broussailles pour achever de se déshabiller.
Couleuvre à collier en début de mue © M. Cottet
La couleuvre à collier est une espèce protégée. Voir à ce propos la fiche réalisée par l'Onéma.
Une belle vidéo sur la couleuvre à collier due à Julien Perrot, rédacteur de la Salamandre
Source principale :
Diesener G. & Reichholf J. (1986). - Batraciens et reptiles Ed. Solar.
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