La Soufrière de Saint-Vincent
28/06/2010
La Soufrière de Saint-Vincent et l'éruption de 1979
Le volcanisme dans l'Arc antillais (5)
La Soufrière de Saint-Vincent
par André Guyard et Serge Warin
Saint-Vincent
(Cliché André Guyard, 1978)
Saint-Vincent est la plus grande île d'un état insulaire de la Caraïbe (Saint-Vincent-et-les Grenadines. C'est une île d'origine volcanique.
La côte ouest sous le vent de l'île est très rocheuse, tandis que la côte est au vent est constituée de nombreuses plages de sable fin. Le point le plus haut de l'île est un volcan, la Soufrière qui culmine à 1234 m.
On a pu dater une activité volcanique à la Soufrière de Saint-Vincent vers 2 300 ans avant J.-C. avec des éruptions explosives qui ont produit des dépôts pyroclastiques couvrant le nord de l'île.
La première éruption répertoriée par des Occidentaux remonte à 1718 et sept autres suivirent jusqu'à celle du 13 avril au 26 octobre 1979, la dernière éruption datant du début de l'année 2008.
Ainsi, depuis plus de trois siècles, les éruptions explosives, avec émission de nuées ardentes, alternent avec des éruptions effusives à St-Vincent (1718, 1812, 1902 et 1979). Ces dernières ne produisent pas des coulées mais des dômes de lave.
Deux grandes éruptions d'indice d'explosivité volcanique de 4 se sont produites sur la Soufrière de Saint-Vincent.
La première qui s'est déroulée du 27 avril au 9 juin 1812 dans le cratère principal a été à l'origine de la création du petit cratère situé au nord-est du principal. Un total de 550 millions de mètres cubes de téphras ont été émis sous la forme de panaches volcaniques et de nuées ardentes ayant engendré des lahars qui ont entraîné des dégâts matériels ainsi que des morts malgré l'évacuation de la population.
La seconde s'est déroulée du 30 mars au 7 mai 1902 dans le cratère principal avec des explosions phréatiques. L’explosion fut entendue à 700 km de là. Similaire dans ces effets et conséquences à l'éruption de 1812, l'éruption a éructé 380 millions de mètres cubes de téphras émis sous la forme de panaches volcaniques et de nuées ardentes recouvrant le nord de l'île. La production de cette masse de matériaux a engendré lahars et tsunamis qui ont entraîné là aussi des dégâts matériels et 1 565 victimes en dépit de l'évacuation de la population. Il est remarquable de noter que cette éruption s'est déroulée quelques jours seulement avant l'éruption dévastatrice de la montagne Pelée de la Martinique, située sur le même arc de subduction. Les éruptions successives ont ramoné l'ouverture du cratère formant une caldeira d'explosion aux parois verticales.
L'éruption du 4 octobre 1971 au 20 mars 1972 voit la formation d'un dôme de lave andésitique et basaltique d'un volume de 80 millions de mètres cubes de lave dans le cratère principal ainsi que la formation d'un panache volcanique s'élevant à vingt kilomètres d'altitude.
Caldeira de la Soufrière de Saint-Vincent en 1978
(Cliché André Guyard)
Ce dôme de lave devint une île lorsqu'un lac d'eau chaude (plus de 81 °C) se mit en place dans la caldeira. Le dôme s'accroît jusqu'à mesurer 68 m de hauteur.
Le fond impermable de la caldeira permet l'établissement du lac. Au milieu du lac, s'est formée une île, masse de lave andésitique, qui, n'ayant pu déborder et s'écouler à l'extérieur, s'est entassée en un dôme. Au sommet de ce dôme, fument quelques légères fumerolles.
L'éruption de 1979 se singularise par l’apparition d’un dôme de lave immédiatement après une phase explosive alors que d'ordinaire plusieurs décennies séparent ces deux événements. Elle débute brutalement le 13 avril à 4 h du matin, alors que les premiers séismes annonçant l'éruption ne se sont déclenchés que 12 heures auparavant.
Pendant près de 3 semaines, jusqu'au 29 avril se succèdent de nombreuses explosions produisant des colonnes de cendres qui s'élèvent à plusieurs kilomètres de hauteur (18,7 km lors de l'éruption paroxysmale du 17 avril), et des nuées ardentes qui empruntent les vallées de Larikai River à l'ouest, Wallibou River au sud-ouest, et Rabacca River au sud-est.
Lac et dôme de lave disparaissent au cours de l'éruption du 13 avril au 26 octobre 1979, suite à une série d'explosions phréato-magmatiques.
La photo ci-dessus a été prise d'un bateau amarré à la côte. On distingue une partie du cône volcanique de la Soufrière. Le nuage de l'explosion est très pâle, à cause des cendres dont il est en grande partie formée. On a estimé l'altitude atteinte par le nuage, sans doute plus de 10 000 mètres (il a été très bien vu à la Martinique, à 150 km environ).
Dès le début du mois de mai, se met en place un nouveau dôme d'un volume de 47 millions de mètres cubes de lave, qui mettra cinq mois pour atteindre sa taille actuelle, soit 130 mètres de hauteur pour un diamètre de plus de 840 mètres. Ce dôme de lave présente sur un de ses flancs une zone de fumerolles toujours active depuis l'éruption.
Cette éruption n'a pas fait de victimes grâce à la réaction avisée du premier ministre qui avait ordonné l’évacuation de 22 000 habitants du nord de l’île.
Pentes de la Soufrière de Saint-Vincent en 1979
(Cliché Serge Warin)
Les explosions de ce volcan sont de véritables nuées ardentes verticales. Lorsqu'elles retombent, elles détruisent la végétation et déposent une épaisse couche de cendres et de roches. Ici existait en 1878 une forêt humide d'altitude, avec des arbres serrés ne dépassant pas quatre mètres de haut, des fougères, des herbes, des mousses. Plus bas sur la pente, on distingue que les dégâts vont en diminuant, un peu de vert est visible, autour du lit de la Rivière Rabacca.
À signaler que les arbres ont été systématiquement écorcés du côté amont, on voit aussi que les branches tournées vers l'aval ont moins souffert.
Dôme en construction à la Soufrière de Saint-Vincent en 1979
(Cliché Serge Warin)
Si l'on compare la vue ci-dessus avec celles datant de 1978 donc avant l'éruption, on s'aperçoit que le lac a disparu, volatilisé par les premières explosions ; toute la pluie tombée depuis a été vaporisée par l'intense chaleur qui règne dans le fond de la caldeira formé de cendres.
Dans le nuage des vapeurs, derrière l'écran de l'air surchauffé et vibrant, on distingue une masse gris bleuté, sorte de galette aux bords bien arrondis, le dôme. Le dôme de 1978 a été pulvérisé par les fantastiques explosions du début de l'éruption. C'est au cours de la formation du deuxième dôme qu'ont eu lieu les dernières nuées ardentes verticales de 1979.
Source :
Warin S., Tanic A. & Voltaire M. (1980). - Le volcanisme antillais. CRDP Antilles-Guyane. Opuscule de 48 p. et de 24 diapositives.
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