La Salamandre tachetée
10/10/2010
Espèce foncièrement terrestre, la Salamandre tachetée ne va à l'eau que pour y accoucher de larves qui mèneront une vie aquatique.
Salamandra salamandra (Amphibiens Urodèles Salamandridés)
par André Guyard
(dernière mise à jour de juillet 2016)
La Salamandre tachetée est facilement reconnaissable par son tégument noir luisant tacheté de jaune. Il s'agit d'un Amphibien terrestre que l'on rencontre dans les bois de feuillus au sol riche en humus.
Salamandre tachetée (sous-espèce S. s. salamandra)
(cliché Michel Cottet)
L'espèce comporte deux sous-espèces S. salamandra terrestris qui se rencontre dans toute la France et S. s. salamandra cantonnée plutôt dans le Sud-Est de la France avec l'exception du site des Mercureaux en Franche-Comté (voir plus bas).
La sous-espèce Salamandra salamandra terrestris se distingue par ses taches jaunes alignées en rangées longitudinales sur le dos et sur le ventre.
La sous-espèce Salamandra salamandra salamandra présente des taches jaunes très variables pas très nettes sur la face ventrale.
Quand les aires de répartition des deux sous-espèces sont en contact, des hybridations ont lieu et des formes intermédiaires peuvent apparaître, rendant la détermination difficile.
Les quatre pattes de la Salamandre sont pourvues de doigts (4 sur les antérieures et 5 sur les postérieures). Contrairement à la queue des tritons qui est aplatie latéralement, la queue de la Salamandre est de section circulaire. Cette particularité anatomique s'explique par le mode de vie de ces Urodèles. Les tritons sont essentiellement aquatiques et leur queue aplatie leur sert de godille pour la natation. Les salamandres étant des animaux terrestres, leur queue cylindrique leur interdit toute possibilité de natation.
De profil, la tête ressemble à celle d’une grenouille
Baptisée "Fifi" par les spéléologues,
une salamandre trouvée dans un gouffre du Jura
en novembre 2010 (Photo Anne Corriol-Gaulier)
Voici "Fifi" en avril 2011 (Photo Anne Corriol-Gaulier)
Pour déposer ses œufs, la femelle, inapte à la natation recherche un ruisseau à courant lent ou un petit ruisseau à cours rapide mais facilement accessible. Les lieux adéquats étant rares, les femelles entreprennent souvent de longues migrations avant de pouvoir déposer leur progéniture (migration prénatale). Il est indispensable que la couche d'eau soit mince et la rive en pente douce, sinon la femelle risque de se noyer. Souvent même, elle ne trempe dans l'eau que sa queue et son cloaque.
Larves de salamandres nageant dans un film d'eau
Les larves ressemblent à des petits tritons et présentent une respiration branchiale par trois touffes de branchies externes disposées de chaque côté de la tête. Dès la naissance, les larves mesurent 25 à 35 mm de long et elles sont pourvues de leurs deux paires de membres. Les membres postérieurs présentent sur la cuisse une petite tache jaune qui va grandir au fur et à mesure de la croissance. Au cours de la métamorphose, qui dure quatre à cinq mois, les fentes branchiales vont se refermer et les poumons vont se développer. La queue d'abord comprimée latéralement comme celle des tritons, va perdre sa nageoire et adopter la section circulaire de la queue de l'animal terrestre.
Les branchies externes sont bien visibles
Larve de Salamandre avant émergence de l'eau
(photo Jean-Louis Romand, 8 juillet 2012)
La date de la photo ci-dessous nous interpelle : une larve encore dans l'eau en juillet : c'est étonnant !
À cause de sa respiration transcutanée, la salamandre évite la dessication. Elle sort surtout la nuit et après la pluie. Elle passe la majeure partie de la journée cachée dans des refuges frais et humides, (vieille souche d’arbre, pierre, caverne, etc.). C’est dans ces refuges souterrains qu’elle hibernera d’octobre à mars.
Espèce protégée, la Salamandre tachetée est en voie de disparition. Le déboisement et la pollution des eaux en sont responsables, sans méconnaître l’écrasement par les véhicules lors de la traversée de routes.
Pour éviter la destruction des amphibiens lors de leur migration de reproduction vers les étangs et cours d’eau, l’O.N.F. et diverses associations aménagent sur les bas-côtés des routes, des barrages munis de seaux. Lorsque les amphibiens veulent traverser, ils longent la clôture, tombent dans un seau et se trouvent piégés. Le matin, il suffit de récupérer le seau avec tous ses occupants, et de traverser la route pour les déposer de l’autre côté. Les aménagements routiers récents prévoient l'existence de "crapauducs" pour permettre aux Amphibiens une traversée des chaussées sécurisée.
En ce qui concerne la Franche-Comté, il existe une colonie importante de Salamandra salamandra salamandra dans le vallon des Mercureaux (commune de Beure, Doubs). Signalée dès 1911 par Marie Phisalix, cette population a été suivie plus récemment par les herpétologues locaux, notamment Jean François et Hugues Pinston (avril 1987), Jean-Pierre Hérold (septembre 1987), Michel Cottet (mars 1990), Emmanuelle Craney et Hugues Pinston (octobre 1991).
Du point de vue phylogénétique, la Salamandre présente un grand intérêt.
En effet, les Urodèles sont les premiers Vertébrés à être sortis du milieu aquatique, une sortie de l’eau annoncée chez certaines formes tropicales de poissons : les Dipneustes où des poumons suppléent les branchies lors de la saison sèche.
A : avant la métamorphose ; B : chez l’adulte
A : Arcs aortiques I, II et III ; B : Aorte dorsale et racines de l’aorte
Au moment de la métamorphose, les deux premiers arcs aortiques vont disparaître, l’arc suivant deviendra l’arc carotidien qui irriguera la tête et l’encéphale, les deux suivants deviendront les arcs aortiques et le dernier donnera l’artère pulmonaire. Parallèlement, les fentes branchiales vont se refermer, les branchies externes vont progressivement disparaître et l’appareil circulatoire va se transformer pour que l’hématose se fasse au niveau des poumons.
A : disposition chez la larve de Salamandre ;
À noter que chez les Amphibiens anoures comme la Grenouille ou le Crapaud, il y a disparition d’un arc aortique et de la jonction entre artère pulmonaire et aorte dorsale (canal de Botal). De sorte que le mélange de sang est plus réduit chez les Anoures que chez les Urodèles.
- Angel F. (1942) – Faune de France, Reptiles et Amphibiens. Lechevalier (éd.), Paris, 204 p.
- Diesener G. et Reichholf J. (1994) - Batraciens et reptiles. France Loisirs (éd.), Paris, 287 p.
- Fretey J. (1975) – Guide des Reptiles et Batraciens de France. Hatier (éd.), Paris, 239 p.
- Guyard A. (1980). - Cours d’anatomie comparée Deug B, 2e année.
- Pinston H., Craney E., Pépin D., Montadert M. et Duquet M. (2000) – Amphibiens et Reptiles de Franche-Comté. Atlas commenté de répartition. Groupe Naturaliste de Franche-Comté et Conseil Régional de Franche-Comté (éds.), Besançon, 116 p.
18 commentaires
Nous habitons la vallée des Mercureaux (Beure) et nous rencontrons souvent des salamandres (qui se font écraser...)
Comment différencier les deux sous-espèces S. salamandra terrestris et S. s. salamandra ?
Comment différencier les larves de salamandres et les larves de tritons ? Il y a des larves, au printemps, sous les deux petits ponts enjambant le Mercureaux dans le lotissement des prés de Maillot (Beure). Nous avons toujours pensé que c'était des larves de tritons.
Merci.
Noé
Bonjour,
1. On distingue les deux sous-espèces par la conformation de la livrée. S. s. terrestris est appelée également salamandre à bandes, car ses taches jaunes sont disposées en bandes longitudinales, contrairement à S. s. salamandra qui présente une disposition des taches jaunes plus irrégulière.
Lorsque les deux sous-espèces coexistent, la distinction est plus délicate, car il peut se produire des phénomènes d'hybridation.
2. En ce qui concerne la distinction entre larves de salamandres et larves de tritons, les larves de salamandres présentent des marques jaunâtres et/ou brillantes à la base des pattes. Ce sont ces marques qui permettent de les différencier des larves de tritons.
Je confirme le point n°2 ;
en outre les larves de tritons fréquentent essentiellement les milieux aquatiques tels flaques et mares d'eau calme, non courante, voire parfois peu oxygénée, tiède, ensoleillée ;
les larves de salamandres sont plutôt rencontrées dans les ruisselets d'eau courante, souvent fraîche, bien oxygénée, sous le couvert forestier ;
aux Mercureaux, il y a beaucoup de salamandres et très peu de tritons. Sous les petits ponts que vous citez, il n' y a, à ma connaissance, que des larves de salamandres.
nous avions des salamandres au jardin, et chaque printemps, en mars, je trouvais des bébés rose pâle de 4 cm de long entre des pierres du mur de la maison, situé nord et très humide,dans des feuilles d'arbres. Je n'ai jamais trouvé d'explications à ce développement hors de l'eau. L'Ognon, ou plutôt son canal est à environ 150 m de la maison.
Ces bébés avaient la forme d'une salamandre adulte, mais une pâleur marquée.
Les salamandres ont disparu, dérangées par mon jardinage, ce que je regrette
Il est fort probable que, outre le canal et l'Ognon, vous ayez un ruisselet assez proche de chez vous. C'est sans doute de là que viennent les jeunes salamandres, qui ont quitté l'eau après avoir acquis leur respiration pulmonée et perdu leurs branchies. Même de très petite taille, elles se déplacent discrètement parfois loin de l'eau et cherchent des refuges dans des recoins humides, entre les pierres, sous les feuilles mortes. Si le ruisselet existe encore, s'il reste des adultes à proximité et que des femelles qui viennent déposer leurs larves, vous reverrez sans doute des jeunes salamandres chez vous, pour peu que vous leur laissiez quelques recoins préservés de votre jardin, avec un minimum d'entretien, afin de les accueillir...
merci Michel de m'avoir répondu: aucun ruisselet ici, mais les anciens du village racontaient que les salamandres passaient l'hiver dans le puits de notre maison: 10m pour atteindre la nappe phréatique, c'est un puits ancien; j'ai toujours été sceptique...
Il n'y a plus de salamandre dans le village à cause des produits agricoles, mais de gros orvets et des crapauds à qui je laisse des tas de branchages
encore merci !
De gros orvets et des crapauds ! bravo ! ce sont deux espèces bio-indicatrices intéressantes et de bons auxiliaires pour le jardinage.
Avez vous des jeunes orvets ? probablement... chaque année, mais ils sont très discrets ; c'est bien de les favoriser avec des tas de branchages, comme avec le compostage des déchets verts.
Bonne continuation.
point de vue interessant, merci
Bonjour,
je suis actuellement en vacances en France et lors d'une promenade dans le village de St CYR sur le Rhône (département du Rhône) nous sommes tombés sur une importante colonies de salamandres tachetées. Celles-ci se trouvaient dans un ru sous une forêt très ombragée. Il y en avait une bonne vingtaine par petit trou d'eau. Voila toute notre dcouverte trèes intéressante de la journée.
Sylvie Perret (CANADA)
bonjour,
j'ai trouvé un bébé salamandre blessée (patte en moins) et en attendant la visite chez le véterinaire pouvez-vous me donnez des conseils pour la nourrir (a part des fourmis je n'ai rien trouver )
elle ne doit avoir que quelque mois et est encore dans l'eau
merci de vos conseils
cordialement
Bonjour,
Votre bébé salamandre est certainement une larve au stade aquatique.
La salamandre est une espèce protégée dont la capture et le transport sont strictement interdits. Le mieux que vous ayez à faire, c'est de la remettre à l'eau à l'endroit où vous l'avez trouvée.
Bonne journée
Bonjour,
le mieux à faire serait de la remettre en liberté.
Cordialement.
Michel COTTET
merci de vos conseils j'ai annulé la visite chez le vétérinaire et je l'ai relaché près d'un ruisseau près de la ou je l'ai trouvé
merci
cordialement
Bonjour,
Je m'appelle Thomas et je suis élève de 6ème5 au collège Jean-Jacques Rousseau d'Avion. Notre classe participe au concours DEFI INTERNET 62 organisé par le Conseil général du Pas-de-Calais. J'ai choisi de travailler sur les Salamandres et je vous demande l'autorisation d'utiliser votre photo dont les références sont http://baladesnaturalistes.hautetfort.com/archive/2009/10/06/la-salamandre-tachetee.html
(on voit la salamandre manger un ver de terre)
Si vous me donnez l'autorisation, je vous remercie de m'envoyer votre accord à l'adresse de messagerie du CDI du collège : cdi.0622422w@ac-lille.fr
Thomas
Mon mail de réponse a été rejeté par l'adresse indiquée
Bonjour. Hier soir, nous avons trouvé une dizaine de bb salamandre avec leur mère dans la gamelle d'eau de notre chien. La mère semblait ne pas pouvoir sortir, donc nous avons placé une ardoise pour qu'elle puisse sortir, ce qu'elle a fait. En ce qui concerne les bébés, nous nous sommes demandés comment les aider, mais ils étaient tous morts ce matin. Si jamais cela se reproduit, que faut-il faire ? Nous avons un grand bassin à poissons rouges dans notre jardin, mais aussi des ruisseaux près de chez nous avec un petit marécage... Nous habitons le Finistère. Merci de votre réponse. Nadine
Quelle histoire! Avez vous pu faire des photos?
je serais curieuse de voir ces nouveaux nés.
Merci
Françoise
Les "bébés salamandres" ressemblent-ils aux larves décrites dans l'article ? Il est possible que la salamandre stressée ait libéré sa progéniture dans la gamelle. Apparemment les larves ont péri en raison d'un défaut d'oxygène ou d'une température trop basse. Il aurait fallu les remettre à l'eau dans un secteur calme et peu profond du ruisselet.
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