Les anciens méandres du Doubs dans la région de Besançon
20/05/2014
Les anciens méandres du Doubs dans la région de Besançon
par Patrick Rolin
Maître de conférences en géologie à l'Université de Franche-Comté
ARTICLE EN CONSTRUCTION
[Cet article constitue un extrait d'un futur guide consacré aux randonnées géologiques dans le Doubs.]
Aux environs de Besançon, le Doubs décrit un certain nombre de méandres dont le plus célèbre, la boucle du Doubs est un méandre actuel qui enserre la ville. Au cours de son histoire hydrographique, le Doubs s'est déplacé en fabriquant des méandres qu'il a ensuite abandonnés en les recoupant. On retrouve la trace de ces méandres anciens (paléo-méandres) en observant le paysage.
La déformation des anciens méandres
En aval de la ville, on peut distinguer différents paléo-méandres dont la topographie et la disposition peuvent surprendre le profane. Les études géologiques de ces méandres montrent qu'ils sont les témoins d’une tectonique récente qui a bouleversé leurs positions. Pour en avoir une idée d'ensemble, il faut commencer l'étude par le panorama offert depuis le fort de Planoise (point 1 sur la carte ci-dessous).
Fig. 1 - Carte géologique du secteur de Rosemont – Planoise et localisation de l’itinéraire conseillé et des points d’arrêts cités dans le texte.
Panorama du fort de Planoise
Le fort de Planoise (ou fort Moncey) est situé à 462 mètres d’altitude (point 1 de la carte). Il fait partie de l’enceinte fortifiée mise en place par Séré de Rivière. Construit entre 1877 et 1892, il comporte le fort principal et des ouvrages annexes dont 4 batteries destinés à le soutenir.
La colline de Planoise appartient au pli de la Citadelle. Celui-ci se poursuit dans la colline de Rosemont (fig. 2). Le pli érodé montre sa combe centrale et ses deux flancs ; à l’arrière, le pli se poursuit dans les collines de Chaudanne puis à la citadelle dont les fortifications reposant sur la courbure des couches calcaires apparaissent au pied de la colline de Bregille (fort allongé dans la verdure) dominée à l’arrière par le village et l’antenne de Montfaucon (second pli anticlinal).
Au pied de la colline de Rosemont, la petite colline de la Roche d’Or, en bordure du Doubs est un témoin du flanc sud de l’anticlinal de la citadelle. Elle occupe le pédoncule du méandre de la Roche d’Or. La boucle se raccorde sur la droite en pente douce à la terrasse alluviale actuelle du Doubs, et recoupe les calcaires du flanc de l’anticlinal par les deux cluses de la Roche d’Or.
Le méandre de la Malcombe, plus ancien, ceinture la colline de Montoille. Ce pédoncule est un témoin du flanc nord de l’anticlinal de la citadelle. Sur image Lidar [1] obtenue par prospection aérienne par radar le recoupement du paléo-méandre de la Malcombe par celui de la Roche d’Or apparaît très nettement (fig. 2). De même que l’encaissement dans le substratum plus marqué du méandre de La Malcombe par rapport à celui de la Roche d’Or. Nous verrons sur le terrain que la surface de ce premier est de 4 à 5m de plus basse par rapport à celle du second.
[1] Le Lidar est un système de relevé topographique à l’aide d’un radar aéroporté qui permet de mesurer avec précision l'altitude des différents points de la surface topographique et de générer des images de cette surface ressemblant à des photos aériennes.
Fig. 2 - Image Lidar des méandres entre les collines de Planoise et Rosemont. Les zones de même altitude sont repérées par une couleur, les bleues à violettes pour les plus basses et rouges pour les plus hautes. La surface du méandre de la Roche d’Or apparaît nettement en pente.
Des datations effectuées par luminescence stimulée optiquement sur des grains de quartz enfouis dans les alluvions des deux méandres (thèse Herfrich) ont donné des âges compris entre 33 000 et 27 000 ans pour les alluvions de la Malcombe et entre 8 100 et 7 800 ans pour celles de la Roche d’Or. Dans ce secteur, on peut ainsi mettre en évidence quatre époques de creusement de la vallée matérialisées par le cours ancien au nord des collines, la boucle de la Malcombe, la boucle de la Roche d’Or et le cours actuel du Doubs.
Ces méandres traduisent le déplacement du cours du Doubs pendant ces derniers milliers d’années. Par la simple force centrifuge, le courant creuse la rive concave du méandre, tandis qu’il dépose sa charge sur la rive convexe par diminution de sa vitesse. Il se déplace en aplanissant le pédoncule. C’est très net sur celui de Montoille. Le tracé est symbolisé sur la carte (fig. 3 [a]). Lors d’une forte crue ou à la suite d’apports de matériaux faisant barrage, le cours de la rivière est dévié et recoupe le pédoncule. Le parcours est alors raccourci donnant naissance au méandre de la Roche d’Or, plus court que le précédent, et la rivière abandonne le méandre de la Malcombe, qui devient un bras mort, rapidement asséché. L’eau attaque ensuite les bordures du méandre de la Roche d’Or et finit par recouper son pédoncule. Le Doubs abandonne ce méandre à son tour et coule alors dans son lit actuel. Toutefois, entre la courbure du méandre et le raccord de ses bras avec la terrasse alluviale du Doubs, existe un dénivelé d’une dizaine de mètres. Les bras sont inclinés vers le Doubs montrant une déformation du méandre qui normalement aurait dû rester horizontal. De même un ressaut que l’on devine, le long du chemin de Montoille et que l’on verra plus loin, montre l’enfoncement relatif du méandre de la Malcombe dont les bras eux aussi sont en pente douce vers le Nord-Ouest.
Avant de quitter le belvédère, observer sur la droite, vers l’Est (fig. 3), les collines en arrière du Doubs. Le village de Beure se loge dans une petite reculée creusée dans les calcaires du jurassique supérieur du flanc commun à l’anticlinal de la citadelle et au synclinal de la chapelle des Buis. À l’arrière, le pli anticlinal érodé de Montfaucon comporte une combe centrale entourée de deux crêts boisés redressés et allongés. Le premier discontinu repose tectoniquement sur les couches faiblement inclinées de Jurassique supérieur du flanc du synclinal. La combe centrale liasique se ferme à l’approche de Montfaucon.
Fig. 3 - Vue sur la colline double de Rosemont. C’est un mont dérivé dont la voûte anticlinale de calcaires du Jurassique moyen, fortement érodée, est préservée dans les deux cornes de la colline de Rosemont. La combe axiale liasique de Rosemont se poursuit vers nous entre les deux crêts des petites collines de la Roche d’Or, à droite, et de Montoille à gauche isolés dans les deux méandres de la Roche d’Or et de la Malcombe. Elle entaille aussi, à nos pieds, le cœur du pli anticlinal dans la colline de Planoise.
L’ancien méandre de la Malcombe
Quitter le belvédère du fort de Planoise et aller au point 2 de la carte 1 pour continuer l’itinéraire. Après la deuxième épingle à cheveux, la route entre dans le cirque abrupt qui ferme au SE la combe argileuse liasique de Rosemont. Ce cirque entaille la voûte calcaire du Jurassique moyen du pli assurant le sommet de la colline de Planoise. La pente raide du cirque est drapée de dépôts de groises lités bien visibles dans la cour du n° 10 du chemin du Fort.
- L’extrémité du méandre de la Malcombe au pied de la colline de Planoise (point 2)
S’arrêter après le pont qui passe sous la RN 273 au point (2). De ce point (fig. 4 [a]), on observe en face le pédoncule de Montoille et à l’avant le large bras plat du méandre de la Malcombe qui descend faiblement vers la gauche en entaillant les formations jurassiques. Vers la droite, au sud-est, cette surface bute contre un léger ressaut topographique (photo de la fig. 4 [b]) constitué d’argile du Lias (trait noir avec barbule de la carte fig. 4 [a]). Ces argiles isolent ce méandre de celui de la Roche d’Or, elles constituent un seuil (le seuil de la Malcombe) qui sépare ces deux méandres, distant de moins de 100m.
Fig. 4 - Vue sur la fin du méandre de la Malcombe au pied de la colline de Planoise. L’extrémité de ce méandre se termine brutalement contre un ressaut topographique formé par des argiles du Lias. Ces argiles séparent ce méandre de celui, plus jeune, de la Roche d’Or, dont la surface domine celle du méandre de la Malcombe de 4 à 5 m.
La surface du méandre de la Roche d’Or domine celle du méandre de la Malcombe de 4 à 5m (fig. 4, coupe [c]) : ce qui est anormal car ce dernier est plus ancien que le premier. Classiquement, un méandre ancien, abandonné par une rivière, est entaillé par l’encaissement de son lit récent, situé à une altitude inférieure à celle de l’ancien lit. De ce fait, la surface d’une ancienne terrasse ou d’un ancien méandre (lit abandonné) domine la surface d’une terrasse ou d’un méandre plus récent. Or c’est l’inverse qui se produit ici : la surface de l’ancien méandre de la Roche d’Or domine celle du méandre plus récent de la Malcombe. Cette anomalie traduit le soulèvement du substratum liasique du méandre de la Roche d’Or au cœur du pli par rapport au substratum jurassique moyen du méandre de la Malcombe.
Prendre la piste cyclable qui longe le méandre en direction de Planoise, s’arrêter au bout de 150m (point [b] sur la carte fig. 4) et regarder droit devant la colline Montoille, peu élevée. Cette colline (fig. 5) est irrégulière, sa partie à droite est conique et domine le méandre d’une quarantaine de mètres ; elle domine d’une trentaine de mètres les maisons du lieu-dit de Montoille, installées sur un replat topographique régulier qui se voit très bien sur la partie gauche de la colline (fig. 5). Ce replat est une ancienne surface d’érosion aménagée ici par la rivière qui coulait sur ce plat avant de se déplacer vers l’Ouest et de s’encaisser dans les calcaires pour donner naissance au méandre de la Malcombe.
Fig. 5 - Vue la colline de Montoille, le replat à gauche de la colline correspond à une ancienne surface d’érosion du Doubs.
- L’extrémité du méandre de la Malcombe au pied de la colline de Rosemont (point 3)
Se diriger vers Montoille. La route monte sur le replat du pédoncule du méandre, puis descend dans l’autre bras du méandre de la Malcombe. L’arrêt (point 3, fig. 1), au fond de la dépression permet d’observer la terminaison du bras du méandre contre le seuil de Gissey. La surface du méandre est plane, comme dans toute la zone de jeux de la Malcombe, mais ici elle monte en pente douce vers l’est (10m de dénivelé en 200m) et bute sur un ressaut topographique de quelque 20 mètres qui met en contact les alluvions contre les argiles liasiques du seuil de Gissey au cœur du pli anticlinal de Rosemont (fig. 6).
Cette disposition n’est pas due à un processus d’érosion (car la surface du méandre, parfaitement plane, n’a pas été érodée), mais semble plutôt correspondre à un basculement vers l’ouest de cette partie du méandre, peut être en relation avec le soulèvement du substratum liasique du méandre de la Roche d’Or au cœur de la combe de Rosemont.
Fig. 6 - La terminaison du méandre de la Malcombe au pied de la colline de Rosemont (point 4, fig. 1). Ce méandre butte contre les argiles du Lias, en relief dans le seuil de Gissey, qui dominent la surface du méandre de 20m.
- Le seuil de Gissey (carte 1, point 4)
Quitter le point 3 de la carte 1 et poursuivre en direction du rond-point de l’avenue Mitterrand, au premier carrefour (carte 1, point 3b), tourner à droite (chemin de Chamuse) et aller vers Gissey (carte 1, point 4). S’arrêter environ 400m plus loin au niveau des serres (carte 1, point 5). La route suivie domine la dépression du méandre de la Malcombe et le petit cirque marquant la rupture de pente qui la ferme contre les argiles du Lias. À Gissey on se trouve dans la combe de Rosemont occupée par les argiles liasiques au cœur de l’anticlinal de la colline de Rosemont. Ces argiles, recouvertes de prairies, affleurent sporadiquement dans les talus et caniveaux de bas-côté de la route.
Les argiles forment un seuil très marqué qui domine d’environ 20m les surfaces des deux méandres, et qui ne pouvait pas exister au moment où le cours du Doubs passait par la Malcombe. Deux hypothèses sont retenues pour l’expliquer : 1) un soulèvement du substratum entre les deux méandres ; 2) un glissement des argiles sur l’ancien cours du Doubs depuis la pente de la combe de la colline de Rosemont. Cette deuxième hypothèse, la plus simple, est très plausible, bien qu’il n’y ait aucune trace de glissement sur les images Lidar (fig. 2) ; la première rend compte des observations effectuées précédemment et explique le décalage vertical entre les deux méandres.
Panorama du fort de Rosemont
Aux serres de Gissey un sentier monte dans la combe argileuse liasique du cœur de l’anticlinal jusqu’au col de l’Œillet (carte 1, point 6). Le chemin longe des petites mares creusées dans les argiles. Au col, prendre tout d’abord, sur la droite et sur environ 200m, le sentier du Cras Rougeot . Le sentier suit le sommet du crêt sud de Rosemont dans les calcaires du Bajocien redressés. De belles échappées s’ouvrent à droite sur l’autre crêt de Rosemont qui nous domine, puis le paysage (carte 1, point 7) se dégage sur la double cluse de la Roche d’Or et son pédoncule souligné par un témoin du crêt sur lequel nous nous trouvons, la colline de Planoise et sa combe centrale qui se termine au pied du fort. Sur la gauche la vallée du Doubs est bordée par les reliefs de Planoise et d‘Arguel.
Revenir au col de l’Œillet et monter au fort de Rosemont établi sur le crêt nord de la colline. Les calcaires bajociens plongent vers le Nord-Ouest et se suivent en contrebas du fort dans une série de petites falaises dominant la vallée. Laissez le fort et continuez quelques dizaines de mètres (carte 1, point 8), un magnifique panorama (fig. 7) s’ouvre sur les reliefs d’Arguel, la vallée du Doubs, la colline de Planoise, le plateau bisontin et les Avant-Monts jalonnés par les clochers de Serre les sapins et de Franois.
Fig. 7 - Panorama vers le sud depuis le sommet de Rosemont.
À nos pieds se développent les deux méandres de la Malcombe et de la Roche d’Or et en particulier la zone de raccord entre eux (fig. 7). Le ressaut marquant la limite du méandre de la Malcombe au nord et au sud de Montoille est particulièrement net (fig. 8).
Au centre, le pédoncule de Montoille est entouré par le méandre de la Malcombe qui dessine une vallée en U, déprimée par rapport au niveau des terrains de Gissey occupés par les serres. Le ressaut qui limite la branche sud (au fond) suit sensiblement le chemin qui joint le pont sous la RN 273 au hameau de Montoille. La branche nord du méandre est bloquée par la route bordée d’arbustes qui part des serres en direction du rocher du premier plan. Les bras du méandre se poursuivent dans la partie surélevée à gauche de la photo.
Fig. 8 - a) Vue de détail sur le ressaut topographique des argiles du Lias des seuils de part et d’autre de la colline de Montoille : ressaut de la Malcombe et seuil de Gissey. b) Corrélation avec l’image Lidar du secteur.
La colline de Planoise
Devant nous, la colline de Planoise, qui appartient au pli de la Citadelle (fig. 9). L’anticlinal est régulier et symétrique, malgré le petit chevauchement qui affecte son flanc SE (voir carte fig. 9). Le fort de Planoise et ses ouvrages annexes reposent sur la voûte bombé du pli constituée par des calcaires du Jurassique moyen. Le flanc NW de la colline se raccorde au plateau bisontin du côté de Planoise par une rupture de pente très marquée, interprétée comme une cassure induite par une faille inverse profonde masquée (coupe fig. 9). La combe de Rosemont se termine par un cirque très escarpé induit par l’évidement des argiles du Lias au cœur du pli.
À l’arrière, le pli de la Citadelle se poursuit au Sud-Est par les collines de Rancenay - Montferrand hors de notre vue.
Fig. 9 - Vue sur la colline de Planoise. C’est un mont dérivé provenant de l’érosion de l’anticlinal de la Citadelle. La combe de Rosemont se termine par un cirque qui l’entaille fortement. Le flanc SE du pli est faillé, recoupé par un petit chevauchement (cf. carte). Notez la rupture de pente au raccord du flanc NW de la colline avec le plateau bisontin de Planoise.
L’ancien méandre de la Roche d’Or
Revenir aux serres et traverser le hameau de Gissey au carrefour en Y à la sortie des maisons prendre la route à droite et descendre le vallon vers le Cras Rougeot. Au fond du vallon, occupé par deux ou trois maisons, la route recoupe le méandre, puis fait un coude sur la droite au pied de la colline de la Roche d’Or. Suivre la route encore sur 300m jusqu’à un carrefour en T qui domine la nationale RN 273, stationner près du carrefour. Traverser le carrefour et aller au sommet du talus qui domine la RN 273 (Carte 1, point 9). La nationale suit la surface plane du méandre qui se voit bien (a, fig. 10). Cette surface est légèrement inclinée vers le Doubs. La pente se voit bien et apparaît régulièrement inclinée vers la rivière (15m de dénivelé en 500m, voir b et c, fig. 10).
Fig. 10 - Vue sur le bras sud du méandre de la Roche d’Or depuis le point 5 (photo a). La nationale suit la surface plane du méandre, qui est légèrement inclinée vers le Doubs (a et b). La pente de cette surface est régulièrement inclinée vers la rivière (15m de dénivelée en 500m : cf. carte b) et coupe c).
Des alluvions à galets siliceux et calcaires, attribuées au méandre de la Roche d’Or, étaient visibles en 2014 le long de la route (fig. 11), quelques mètres au nord-est du carrefour (Carte 1, point 9). La surface du méandre se raccorde en pente douce et régulière avec la basse terrasse actuelle du Doubs, sans aucun ressaut. Il en est de même pour l’autre bras du méandre au nord de la colline de la Roche d’Or (fig. 12).
Fig. 11 - Alluvions argilo-sableuses renfermant des galets siliceux (quartz blancs) et calcaires pluri-millimétriques à deux centimètres reposant sur des argiles grises du Lias. Ces alluvions sont attribuées au méandre de la Roche d’Or. (point 5)
Fig. 12 - Le bras nord du méandre de la Roche d’Or, vu dans la propriété de la mission catholique. La surface du méandre plonge vers le Doubs en pente douce et se raccorde sans escarpement à la surface de la basse terrasse du Doubs, visible derrière nous.
L’ancien méandre de Velotte
Pour compléter la vision sur les cours anciens du Doubs, on pourra se rendre à Velotte puis au petit Chaudanne. Pour observer le paléo-méandre de Velotte, traverser le Doubs au pont, en rive gauche se garer à quelques dizaines de mètres du pont le long de la route de Beure (point 10, fig. 1). Le raccord du méandre de Velotte avec la vallée du Doubs peut se voir en face de ce point.
Entre la colline de Rosemont, à gauche et celle de Chaudanne, à droite, apparaissent les deux bras du méandre perché de Velotte séparés par son pédoncule (fig. 13). La surélévation de ces deux bras par rapport au cours actuel du Doubs est très nette, le méandre de Velotte apparaît nettement recoupé par le cours actuel du Doubs, plus encaissé que cet ancien cours.
Fig. 13 - Le méandre perché de Velotte. La vue depuis la rive gauche du Doubs (point 10, fig. 1), en face de Velotte permet d’observer les relations entre l’ancien méandre de Velotte et le Doubs. L’ancien méandre et son pédoncule sont recoupés par la vallée actuelle du Doubs. Les calcaires du Jurassique moyen affleurent dans l’escarpement entre l’ancien méandre et la basse terrasse du Doubs.
Revenir à Velotte, monter la route en direction du Nord (vers la Grette) qui franchit l’escarpement et circule sur le bras nord de cet ancien méandre (fig. 1). L’urbanisation incontrôlée limite à l’extrême les possibilités de le découvrir (carte 1, point 11). Toutefois son pédoncule et son tracé peuvent se voir en montant dans le chemin du fort de Chaudanne (fig. 14), en haut de la première épingle à cheveux (points 12 et 13, fig. 1).
Fig. 14 - Le méandre de Velotte vu depuis la colline de Chaudanne (point 12, fig. 1). Au premier plan, la fermeture du méandre vers la ville au second plan, le Petit Chaudanne, le bras nord, le pédoncule de Velotte et le bras sud du méandre. Le méandre apparaît entaillé par la vallée du Doubs au fond. Il est ainsi suspendu au-dessus de la vallée du Doubs.
L’encaissement et la déformation des anciens méandres marqueurs du plissement récent de la région (pli de la Citadelle)
Plusieurs tracés anciens du cours du Rhin-Doubs ou du Doubs ont été reconnus, ils correspondent à des déplacements du lit de la rivière et à son encaissement dans son substratum. Cet encaissement se traduit par des terrasses alluviales étagées (fragments d’anciennes plaines d’inondation) et des méandres actifs ou abandonnés (fig. 15) qui marquent les différentes étapes de creusement et de remblaiement, des vallées.
Fig. 15 - carte des méandres et alluvions du Doubs et du Rhin-Doubs. Les alluvions actuelles du Doubs et ses anciens méandres abandonnés traduisent l’encaissement de la rivière dans le pli anticlinal de la Citadelle au cours du quaternaire. Ces alluvions sont constituées essentiellement de roches d’origine jurassienne. Les alluvions pliocènes attribuées au Rhin-Doubs sont constituées de galets issus de roches d’origine alpine et conservés en placages.
Les anciennes vallées du Rhin-Doubs ou du Doubs recoupent le mont anticlinal de la Citadelle, profondément érodé, en le découpant en collines (Bregille, Citadelle, Grand Chaudanne, Petit Chaudanne, Rosemont, Planoise) séparées les unes des autres par d’anciennes cluses.
Une des plus anciennes vallées du Rhin-Doubs (Pliocène, 5-2Ma) est en partie occupée par l’agglomération bisontine aujourd’hui. Elle suit l’extrémité méridionale du plateau de Besançon de Palente à Montferrand-le-Château, laissant des galets au pont Canot et du sable quartzeux à Montferrand de Château).
Des lambeaux d’anciennes terrasses alluviales du Rhin-Doubs se trouvent dans la cluse entre les deux Chaudanne, sur la colline du Bois de Peu et vers Busy (fig. 10). Ils correspondent à des plaines alluviales, plus récentes que la vallée fossile occupée par Besançon, mais à des altitudes plus élevées que cette vallée fossile).
Les plaines alluviales plus récentes (Quaternaire, 2-0 Ma), attribuées au Doubs ancien, passent par la boucle de Velotte, puis celle de la Malcombe et enfin celle de la Roche d’Or. Les terrasses correspondant à ces anciennes plaines alluviales, haut-perchées (Velotte), et déformées (la Malcombe et de la Roche d’Or) traduisent le soulèvement récent du mont érodé de la Citadelle.
Autrement dit, la migration vers le SE du cours du Rhin-Doubs sur l’anticlinal de la Citadelle au Plio-quaternaire, son encaissement dans le pli au Quaternaire, et la déformation des terrasses qu’il a laissées, sont intimement liés à la formation du pli. Les éléments de datation disponibles (âges approximatifs de 30 000 ans pour la boucle de la Malcombe et de 8000 ans pour celle de la Roche d’Or) traduisent que ce plissement était encore actif récemment. La course entre le soulèvement induit par le plissement et l’érosion s’est traduite par l’encaissement d’une centaine de mètres de la rivière dans le mont anticlinal de la Citadelle et explique la présence des alluvions du Rhin-Doubs à la fois au sommet de Chaudanne et dans la vallée fossile au pied des collines de l’anticlinal de la Citadelle.
À l’origine le Rhin-Doubs coulait sur une plaine en développant de vastes méandres divagants, mais durant la formation du pli de la Citadelle le substratum de la plaine s’est plissé et soulevé, le lit de la rivière s’est graduellement déplacé et encaissé (phénomène d’antécédence) abandonnant les alluvions d’anciennes plaines d’inondation et des méandres (les terrasses alluviales anciennes). Des traces de cet enfoncement se rencontrent dans les cluses anciennes abandonnées : col de Chaudanne (passage le plus haut), double cluse de Velotte, méandre de la Malcombe, double cluse de la Roche d’Or.
Le Doubs coule actuellement entièrement dans la chaîne du Jura. Les alluvions actuelles sont donc constituées essentiellement de roches d’origine jurassienne avec éventuellement quelques apports vosgiens. Toutefois l’extension latérale des alluvions de part et d’autre du Doubs, de même que la largeur de certains des tronçons de vallée incitent à penser que la rivière ait été autrefois plus importante. Or, dans les alluvions anciennes bordant la rivière entre le sud des Vosges et la forêt de Chaux, on trouve des galets d’origine alpine contenant par exemple des granites altérés, des radiolarites, des micaschistes ou des sables renferment des minéraux d’origine alpine, tels que le glaucophane, l’apatite, l’épidote ou des chloritoïdes. De telles alluvions ont été observées près du pont Canot, à Chaudanne, Busy et Montferrand-le-Château. Ces alluvions riches en galets quartzeux ont été apportées par le Rhin (le Rhin-Doubs ou l’Aar-Doubs) qui coulait sur la région, érodant la région au Pliocène moyen entre 3,2 et 2,6 Ma pendant la formation de la chaîne du Jura. Suite à une reprise de l’affaissement du fossé rhénan il y a environ 2 millions d’années le Rhin-Doubs, dévié vers la Mer du Nord, a abandonné sa vallée en Franche-Comté, qui est occupée depuis par le Doubs, l’un de ses anciens affluents.
Fig. 16 - Les méandres actuels du Doubs dans la région d'Avanne-Aveney
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