Davantage de poissons en France métropolitaine
15/12/2011
en France métropolitaine
Vingt ans de campagnes d’inventaires en France métropolitaine effectuées par des agents de l’Onema ont permis d’en savoir plus sur l’évolution de 48 espèces ou groupes d’espèces de poissons. Les résultats de cette étude sans précédent en France sont en demi-teinte : le nombre d’espèces est à la hausse, en particulier pour les exotiques, mais certaines espèces régressent.
L’aire de répartition de nombreuses espèces présentes dans les cours d’eau de France métropolitaine s’est étendue et leurs populations se sont densifiées. Telles sont les observations qui ressortent de l’analyse portant sur l’évolution des poissons entre 1990 et 2009, menée par trois chargés de mission de l’Onema*, dont les résultats ont été publiés dans le Journal of Fish Biology.
Si de nombreuses espèces natives se portent bien (Spirlin, Barbeau, Chevesne), ce sont cependant les poissons exotiques (Silure, Pseudorasbora) qui ont connu le plus fort accroissement.
L’étude montre également la diminution significative de certaines espèces (Truite, Brème, Tanche). Elle confirme par ailleurs le déclin inquiétant de l’Anguille, qui a conduit à l’élaboration d’un plan de gestion pour sa restauration.
Certains repeuplements, orchestrés dans le cadre de plans de restauration ou à l’initiative des pêcheurs, ne font pas l’objet d’un suivi organisé. Cette pratique rend délicate l’interprétation des résultats car il est impossible de différencier les fluctuations naturelles d’une population de celles qui résultent d’une intervention humaine. Par exemple, la tendance à l’accroissement du Saumon, qui est sujet à un plan de restauration mis en place en 2008, reste à confirmer. "Cette étude donne une idée globale de l’évolution des poissons sur l’ensemble du territoire. Bien qu’elle montre une tendance à la hausse, il est important de rappeler que les effectifs de nombreuses espèces restent largement inférieurs à la situation précédant les révolutions industrielle et agricole qui ont eu un impact majeur sur la faune aquatique", précise Nicolas Poulet, chargé de mission "Écologie des organismes aquatiques" à l’Onema.
Des hypothèses à étudier
L’amélioration de la qualité de l’eau et le réchauffement climatique peuvent expliquer ces évolutions. Des efforts portant sur le traitement des eaux usées ont permis de diminuer les quantités de phosphates responsables de l’eutrophisation des cours d’eau. Certaines espèces semblent avoir réagi positivement. Quant au réchauffement climatique, il pourrait favoriser le développement des espèces d’eau « fraîche » au détriment des espèces vivant en milieu froid.
D'après une étude récente, les activités humaines seraient responsables d'une ressemblance accrue des communautés de poissons d'eau douce.
Le déclin mondial actuel de la biodiversité est largement imputable aux activités humaines. L'Homme a non seulement provoqué des extinctions d'espèces, mais il a également introduit de nombreuses espèces hors de leur aire d'origine. La combinaison de ces deux phénomènes est susceptible d'accroître la proportion d'espèces communes à différentes faunes, processus décrit sous le terme d'homogénéisation biotique.
Un consortium de chercheurs de l'Université de Toulouse III – Paul Sabatier (UPS), du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), de l'Institut de recherche pour le développement (IRD), du Muséum national d'Histoire naturelle (MNHN) et de l'université d'Anvers (Belgique) a mesuré pour la première fois l'homogénéisation biotique des poissons d'eau douce à l'échelle du globe. Cette étude révèle que même si l'augmentation de similarité entre faunes de poissons reste faible (0.5 %) à l'échelle du globe, elle atteint un niveau substantiel (jusqu'à 10 %) dans certains cours d'eau Eurasiens et Nord-Américains. Ces travaux sont publiés dans les Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America (PNAS).
Remarque :
Ainsi, à l'échelon de la planète, on constate que la faune des rivières devient de plus en plus uniforme. C'est le constat que dresse aussi l'équipe de Sébastien Villéger de l'université Paul-Sabatier de Toulouse. Le taux d'espèces pisciaires d'eau douce en commun a augmenté au cours des 200 dernières années, ce qui est dû aux introductions pratiquées par l'homme pour l'aquaculture et la pêche sportive. Comme ce sont souvent les mêmes poissons qui sont choisis (Carpe, Truite arc-en-ciel, Tilapia…), les faunes pisciaires sont de plus en plus homogènes (Science & Vie, janvier 2012, n° 1132, p. 22).
Une étude sans précédent
Une telle analyse temporelle à l’échelle du territoire métropolitain n’avait encore jamais été réalisée. Pourtant, la connaissance de l’évolution des espèces est fondamentale pour assurer leur conservation et vérifier l’efficacité des programmes de restauration. L’étude a été menée à partir des données provenant du suivi de 590 stations sur une période de huit à vingt années consécutives. Cette surveillance, initiée au début des années 1990 dans le cadre du réseau hydrobiologique et piscicole (RHP), se poursuit de nos jours, grâce à l’implication des agents des services territoriaux de l’Onema qui ont contribué à la mise en place du réseau et qui effectuent les campagnes d’inventaire.
Source :
Poulet N., Beaulaton L. & Dembski S. (2011). - Time trends in fish populations in metropolitan France : insights from national monitoring data, Journal of Fish Biology - Volume 79, Issue 6, pages 1436–1452, December 2011.
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