Coraux des Antilles (1)
23/07/2010
Sous le vocable de corail, on désigne plusieurs formes animales coloniales qui appartiennent toutes au phylum des Cnidaires et dont le squelette est appelé polypier. Ce premier chapitre présente les principaux représentants des Cnidaires. Il définit et situe les coraux dans ce phylum.
Coraux et milieu récifal de la Province Caraïbe (1)
Chapitre I : C'est quoi le Corail ?
par André Guyard
(dernière mise à jour : 27 janvier 2018)
Les récifs coralliens appelés "Cayes" aux Antilles françaises ou "Keys" dans les Antilles anglaises sont l'œuvre de millions d'animalcules coloniaux : les polypes coralliens. Squelette calcaire de la colonie, le récif corallien est une structure dynamique qui s'accroît de quelques centimètres par an, mais qui peut atteindre des dimensions gigantesques telle la Grande Barrière de Corail d'Australie avec ses 2000 km de long. À l'échelle géologique, les roches calcaires du jurassique sont pour la plupart l'œuvre de coraux. La Grande Terre de Guadeloupe est une formation récifale de l'ère tertiaire surélevée d'une centaine de mètres par les mouvements de l'écorce terrestre.
Certains organismes : Mollusques avec leur coquille, Polychètes sédentaires avec leur tube, Algues calcaires encroûtantes et Foraminifères alimentent, cimentent et consolident la roche ainsi formée pendant que d'autres : Mollusques, Polychètes, Éponges, Oursins taraudent et minent l'édifice. Il en résulte un véritable labyrinthe de crevasses, de grottes et de tunnels qui sert de refuge à toute une faune fixée ou vagile.
Au voisinage du récif corallien, le paysage sous-marin est une véritable féerie de couleurs et de formes. Etrange jardin où resplendissent côte à côte, les bruns, orange, jaunes, rouges, roses, vert fluorescent des massifs et arbuscules des colonies coralliennes, où fusent les palmes rouges, orangées et noires des gorgones, où s'épanouissent les corolles des anémones de mer et les panaches multicolores des annélides, pendant que des comatules de jais s'accrochent aux outres des éponges géantes et que des ophiures dissimulent leurs bras délicats parmi le gazonnement bariolé des éponges et des algues encroûtantes. Une profusion de coquillages, de crustacés et de langoustes habitent ces lieux tandis que des myriades de poissons bigarrés patrouillent entre les frondaisons coralliennes ou hantent des grottes mystérieuses.
Pour qui n'est pas plongeur, la vision depuis un bateau à fond de verre du récif corallien est une fugitive approche, mais qui permet d'apprécier l'esthétisme de ce jardin fleuri.
Définition du corail
Sous le vocable de corail, on désigne plusieurs formes animales coloniales qui appartiennent toutes au phylum des Cnidaires et dont le squelette est appelé polypier. On connaît bien en Europe le corail rouge de Méditerranée Corallium rubrum dont le polypier est utilisé depuis longtemps en joaillerie. Dans le langage courant, on appelle également Coraux de pierre tous les Cnidaires au squelette calcaire constructeurs de récifs (coraux hermatypiques). Ce sont essentiellement des Scléractiniaires (ou Madréporaires) et des Hydrocoralliaires (Coraux de feu) qui constituent l'essentiel de la faune corallienne aux Antilles.
Remarque : on a rangé longtemps les coraux parmi les Coelentérés. Ce terme (du grec koïlos = creux et enteron = intestin), outre les Cnidaires, inclut également l'embranchement voisin des Cténophores, ce qui en fait un synonyme vieilli de Radiata. Aujourd'hui, ce terme est devenu obsolète.
Le tableau ci-dessous trace l'arbre phylogénétique des Cnidaires. En rouge sont indiqués les taxons qui se rapportent aux coraux hermatypiques des Antilles.
Tableau I : arbre phylogénétique des Cnidaires
Place des coraux parmi l'Embranchement des Cnidaires
En souligné sont indiqués les taxons de Cnidaires susceptibles d'être rencontrés dans la Province caraïbe.
A. Super-classe des Hydrozoa ou Hydrozoaires :
Cavité gastrique non cloisonnée dépourvue de pharynx.
I. Classe des Hydraires
Cavité gastrique non cloisonnée ; espèces à forme polype et à forme méduse*.
1) Ordre des Hydrides (Hydridae)
Animaux vivant en eau douce. Forme polype solitaire. Ex. : Hydre d'eau douce.
2) Ordre des Leptolides (Leptomedusae)
Alternance de colonies polypiformes fixées et de méduses sexuées.
a) Sous-ordre des Gymnoblastiques
Les polypes de la colonie sont nus et non rétractiles.
Un hydraire gymnoblastique du genre Clava
b) Sous-ordre des Calyptoblastiques : Les polypes de la colonie sont entourés par un calice protecteur dans lequel ils se rétractent.
II. Classe des Hydrocoralliaires
Espèces à forme polype coralliforme, vivant dans les récifs de coraux émettant des méduses mâles ou femelles.
1) Ordre des Milléporides = "coraux de feu"
2) Ordre des Stylastérides = aspect de corail
III. Classe des Siphonophores
Méduses ayant bourgeonné une colonie flottante.
IV. Classe des Hydroméduses
N'existent que sous la forme méduse.
B. Superclasse des Scyphozoaires : (ou Méduses Acalèphes)
Forme méduse. cavité gastrique marquée par des bourrelets saillants.
Multiplication assurée par un stade polype fugitif qui se fragmente en méduse libre.
C. Super-classe des Anthozoa (Anthozoaires)
Cnidaires à forme polype uniquement. Cavité gastrique cloisonnée et munie d'un pharynx.
I. Classe des Octocoralliaires (Octocorallia) ou Alcyonaires (Alcyonaria)
Colonies de polypes présentant 8 tentacules, 8 cloisons gastriques.
1) Ordre des Stolonifères (Stolonifera)
2) Ordre des Alcyonides (Alcyonacea) : "Coraux mous", colonies charnues.
3) Ordre des Corallides
Coraux mous fixés sur un axe calcaire, le polypier.
4) Ordre des Gorgonides (Gorgonacea)
Colonie ramifiée dans un plan et développée autour d'un polypier corné non épineux. Les Gorgones constituent un ordre très bien représenté dans la Province caraïbe.
5) Ordre des Pennatulides (Pennatulacea) : Colonies fichées dans le sédiment, charnues munies d'un axe corné.
II. Classe des Hexacoralliaires (Hexacorallia)
Colonies de polypes présentant en général 6 tentacules ou 6 cloisons (ou un multiple de 6).
1) Ordre des Cérianthes (Cerianthacea)
Polype solitaire sans squelette, enfermé dans un tube gélatineux.
Cérianthes
2) Ordre des Antipathaires (Antipatharia) :"Coraux noirs"
Polypes coloniaux fixés sur un polypier corné ramifié et épineux à allure de Gorgone.
3) Ordre des Zoanthaires (Zoanthidea) : "Coraux mous".
Polypes coloniaux sans squelette mais incrustés de sable souvent fixés sur d'autres animaux.
4) Ordre des Actiniaires (Actinaria) : Anémones de mer.
Pas de squelette. Nombreuses cloisons radiaires.
5) Ordre des Scléractiniaires (Scleractinia) ou Madréporaires
Polypier calcaire, "coraux de pierre".
Les Scléractiniaires (et dans une moindre mesure les Hydrocoralliaires) constituent aux Antilles les coraux hermatypiques, c'est-à-dire constructeurs de récifs. Ce sont eux qui feront l'objet principal de notre étude.
Remarque : Il existe quelques espèces de scléractiniaires qui vivent hors des zones tropicales. On les appelle les coraux froids. Ce type de corail s'épanouit en profondeur dans l'obscurité, de 39 m à plus de 1000 m, et dans des eaux de 2 à 14°C seulement. Contrairement aux coraux chauds, les coraux des mers froides ne vivent pas en symbiose avec des algues et construisent leur squelette calcaire beaucoup plus lentement, de l'ordre du millimètre par an. Encore méconnus et faisant l'objet de nombreuses recherches, ils ne regroupent que six espèces. C'est le cas de Goniocorella dumosa (famille des Caryophillidae) qui vit en Antarctique ou de Lophelia pertusa (famille des Caryophillidae) que l'on rencontre principalement en Atlantique Nord.
En particulier, du 9 septembre au 11 octobre 2011 une équipe de scientifiques européens a exploré les canyons sous-marins s'enfonçant jusqu'à -2000 mètres au large de la Bretagne sud et de l'Irlande. Les chercheurs ont cartographié des sites nouveaux où sont présents les coraux froids. Les colonies de plusieurs milliers d'années forment des récifs de plusieurs centaines de mètres de longueur et de dizaines de mètres de hauteur et abritent une grande biodiversité de poissons et crustacés. L'expédition a exploré entre autres les canyons du Croisic, du Guilvinec et de Lampaul. Outre une connaissance accrue, cette expédition va permettre de lancer la préservation de ces milieux menacés par le réchauffement climatique et labourés par le chalutage (Sciences et Avenir décembre 2011 n° 778, p. 31.)
Deux espèces de coraux froids
(Science et Vie n° 1124 mai 2011)
Suite au chapitre II : : les genres de scléractiniaires.
Sources :
Guyard A. (1979). - Coraux des Antilles. Le corail et son environnement. 113 p. 30 diapositives. CDDP Guadeloupe Ed.
L'auteur remercie chaleureusement les personnes qui ont participé à l'illustration de cet article par leurs clichés sous-marins, notamment Jean-Pierre Pointier et Edmond Civoniak.
Bibliographie :
— Illustration magnifique des coraux du Pacifique : conférence de Francis Rougerie : Vie et mort des récifs coralliens.
— 2018 : Année internationale des récifs coralliens par Sylvie Rouat (Sciences & Avenir)
La survie des coraux est menacée par le réchauffement climatique et l’urbanisation des littoraux. Serge Planes directeur du Criobe (Pyrénées-Orientales) à Perpignan nous explique en vidéo ce que signifie cette année internationale des récifs coralliens.
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